Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant, L. P. (prestataire), a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi. Dans un relevé d’emploiNote de bas de page 1, son employeur a confirmé qu’il avait travaillé de décembre 2016 à août 2017 et qu’il avait quitté son emploi pour retourner aux études.

[3] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté la demande de prestations d’assurance-emploi du prestataire après avoir conclu qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification. La Commission a jugé que son départ volontaire n’avait pas été la seule solution raisonnable dans son cas. Le prestataire a demandé une révision, mais la Commission a décidé de maintenir sa décision. Le prestataire a interjeté appel de la décision de révision de la Commission auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, qui a à son tour conclu que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi et qu’il était exclu du bénéfice des prestations.

[4] Le prestataire fait appel de la décision rendue par la division générale. Je lui ai accordé la permission d’en appel au motif que la division générale pourrait avoir omis de déterminer s’il [traduction] « avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans l’avenirNote de bas de page 2 », ce qui aurait représenté une justification à son départ en vertu de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). J’ai cependant spécifié dans ma décision accordant au prestataire la permission d’en appeler qu’il lui faudrait démontrer que la division générale avait disposé d’une preuve de [traduction] « l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans l’avenir ».

[5] Je rejette cet appel parce que le prestataire n’est pas parvenu à démontrer qu’il y avait, dans le cadre de l’instance devant la division générale, la preuve d’une assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat, et que rien ne justifiait que la division générale se penche sur cette question.

Question en litige

[6] La division générale a-t-elle négligé de considérer si le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat?

Analyse

[7] Conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Dans son avis d’appel,Note de bas de page 3 le prestataire soutient que la division générale n’a pas considéré s’il avait quitté son emploi pour [traduction] « améliorer sa situation » ni si l’employeur l’avait pleinement appuyé dans la poursuite de ses études. J’ai traité de ces deux observations dans ma décision relative à sa demande de permission d’en appeler. J’ai constaté que la division générale avait, en réalité, examiné ces deux questions. Le prestataire n’a pas invoqué d’autres arguments relatifs à ces deux questions qui me convaincraient de les revisiter.

Question en litige : La division générale a-t-elle négligé de considérer si le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat?

[9] Le prestataire soutient que la division générale n’a pas considéré s’il avait [traduction] « l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans l’avenir ». Si le prestataire a eu l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat, il pourrait avoir été fondé à quitter son emploi en vertu de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE.

[10] Dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, j’ai précisé que le prestataire aurait à démontrer, afin d’avoir gain de cause en appel, qu’il avait produit dans le cadre de l’instance devant la division générale une preuve montrant qu’il avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat. Dans une lettre datée du 1er août 2018, au nom du Tribunal, j’ai également demandé au prestataire de spécifier où se trouvait cette preuve, soit en indiquant le numéro de la page à laquelle elle se trouvait dans le dossier d’appel ou le moment exact de l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale.Note de bas de page 4

[11] Après avoir d’abord écrit, le 26 juillet 2018, qu’il n’avait plus d’observations à présenter, le prestataire a informé le Tribunal par écrit, le 22 août 2018, qu’il [traduction] « avai[t] compris de son superviseur qu[’il] étai[t] un bon employé et que l’employeur [l]e réembaucherait n’importe quand. » Il a fourni une copie d’un courriel daté du 8 août 2015Note de bas de page 5, dans lequel l’employeur avait écrit ceci : [traduction] « Oui, je me souviens bien [du prestataire], et oui, je l’embaucherais de nouveau. »

[12] Le prestataire m’a également demandé de me reporter à 14 minutes 26 secondes de l’enregistrement audio. Il prétend que l’enregistrement audio prouve qu’il avait [traduction] « l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans l’avenirNote de bas de page 6 ». À ce moment de l’enregistrement, le père du prestataire affirme que l’employeur avait immédiatement invité le prestataire à présenter une demande d’emploi lorsqu’il avait appris qu’il était disponible. Le père du prestataire affirme que son fils avait commencé à travailler moins d’une semaine après avoir posé sa candidature. Le père du prestataire a aussi témoigné que le superviseur du prestataire avait déjà été son entraîneur de basketball et que le prestataire et l’entraîneur se connaissaient plutôt bien, et que leur lien était donc plus fort que la simple relation entre un employeur et son employé.

[13] La Cour d’appel fédérale a examiné la question de savoir ce qui constitue une « assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat ». Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c BordageNote de bas de page 7, la Cour d’appel fédérale a établi qu’il existe trois exigences essentielles pour l’application de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE : au moment où un prestataire choisit de lui-même de devenir chômeur, il doit savoir qu’il aura un emploi, il doit savoir de quel emploi auprès de quel employeur il s’agira, et il doit savoir à quel moment dans l’avenir il aura cet emploi.

[14] Dans Andrade c Canada (Procureur général)Note de bas de page 8, la Cour d’appel fédérale a qualifié de strict le critère à appliquer selon l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE. Elle s’est exprimée comme suit : « [i]l y a assurance raisonnable ou motif valable lorsqu’un prestataire a communiqué avec un employeur pour une offre d’emploi ou lorsqu’une offre d’emploi a été reçue par le prestataire ». La Cour d’appel fédérale a affirmé que « [l]e simple fait d’attendre un emploi […] ne satisfait pas à cette exigence. » Dans Canada (Procureur général) c SacreyNote de bas de page 9, la Cour d’appel fédérale a aussi statué que « [l]es mots “assurance raisonnable”, selon le contexte et leur sens naturel, laissent entendre un certain degré mesurable de garantie. »

[15] Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c LessardNote de bas de page 10, la Cour d’appel fédérale a statué qu’ « un emploi qui ne se concrétisera qu’à l’expiration d’un stage non encore commencé, d’une durée de treize semaines, n’est pas un emploi “dans un avenir immédiat” ».

[16] Eu égard à ces considérations, je juge que ni la preuve à 14 minutes 26 secondes de l’enregistrement audio ni le courriel récent de l’employeur ne satisfont aux exigences de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE. L’assurance d’un emploi doit être concrète et non abstraite, et exister avant que le prestataire quitte son emploi.

[17] J’ai examiné le dossier et écouté l’enregistrement audio. Je ne peux trouver aucune preuve qui montrerait que le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat.

[18] Enfin, dans des observations soumises le 12 juillet 2018, la Commission soutient que le prestataire ne lui avait pas révélé qu’il avait « l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans l’avenir » et qu’il n’avait jamais soulevé cette question auprès de la division générale. Je ne trouve aucune preuve montrant que le prestataire aurait soulevé cette question à un moment quelconque avant de présenter une demande de permission d’en appeler à la division d’appel. Comme je l’ai noté plus tôt, la division générale ne disposait pas d’une preuve d’une assurance raisonnable. Le fait que la membre de la division générale n’a pas examiné cette question ne pourrait être une erreur comme elle n’en a jamais été saisie; de plus, elle ne disposait d’aucune preuve ayant pu lui laisser croire à l’existence de cette question.

[19] Par conséquent, je ne suis pas convaincue que la division générale ait commis une erreur de droit en ne cherchant pas à savoir si l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE s’appliquait, ni qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle aurait tirée sans tenir compte du fait que le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat.

Conclusion

[20] L’appel est rejeté.

Mode d’instruction :

Comparutions :

Questions et réponses

L. P., appelant
Susan Prud’homme, représentante de l’intimée

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