Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, D. K. (prestataire), a travaillé comme paysagiste pour une entreprise de gestion immobilière de mars 2017 à juillet 2017. Il a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi. Dans son formulaire de demande, il a indiqué qu’il avait quitté cet emploi en raison de sa relation avec l’employeurNote de bas de page 1. La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté sa demande de prestations — initialement et après examen — après avoir déterminé qu’il avait quitté volontairement cet emploi sans justification et que son départ volontaire n’était pas sa seule solution raisonnableNote de bas de page 2. Le prestataire a interjeté appel de la décision de réexamen de la Commission à la division générale, alléguant que son employeur l’avait harcelé et menacé, le laissant avec un niveau élevé de stressNote de bas de page 3.

[3] La division générale a tenu une audience par téléconférence le 11 juillet 2018. Elle a conclu que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. La division générale a conclu que le prestataire était donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Elle a rejeté l’appel.

[4] Le prestataire demande maintenant la permission d’en appeler. Il fait valoir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle.

[5] Je dois maintenant décider si l’appel a une chance raisonnable de succès, c’est-à-dire si l’on peut soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle.

[6] Je refuse la permission d’en appeler parce que je conclus que l’appel n’a pas de chance raisonnable de succès. Le prestataire allègue que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, mais il n’existe aucune preuve à l’appui de cette allégation.

Question en litige

[7] Peut-on soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle?

Analyse

[8] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d'exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d'une erreur de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] Avant d’accorder la permission d’en appeler, je dois être convaincue que les motifs d’appel relèvent des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. Il s’agit d’un critère relativement peu exigeant. Les prestataires ne sont pas tenus d’établir le bien-fondé de leurs arguments; ils doivent simplement établir que l’appel a une chance raisonnable de succès sur la base d’une erreur susceptible de révision commise par la division générale. La Cour fédérale a approuvé cette approche dans la décision Joseph c. Canada (Procureur général)Note de bas de page 4.

[10] Le prestataire soutient que la division générale a fait preuve de partialité à son égard et que, par conséquent, elle n’a pas tenu une audience équitable. Plus particulièrement, il soutient que la division générale était motivée à économiser de l’argent au nom de Service Canada. Cela a apparemment été démontré lorsque le membre a essentiellement déclaré [traduction] « nous ne faisons pas que donner de l’argent » après ses observations préliminaires. Il prétend également que la membre était grossière et condescendante envers lui et qu’elle l'a manipulé en disant qu'il gagnerait probablement avant de rejeter sa demande. Enfin, il affirme que la membre a « précipité » l’audience par téléconférence.

[11] L’audience devait durer une heureNote de bas de page 5 et, selon l’enregistrement audio, a duré environ 49 minutes. Dans une allocution d’ouverture de plus de 10 minutes, la membre de la division générale a expliqué son rôle. Elle a souligné qu’elle était indépendante de la Commission et qu’elle n’avait pas encore été impliquée dans la demande du prestataire. Elle a également expliqué que, bien que la Commission ne se soit pas présentée à l’audience, elle avait déposé des arguments écrits pour s’opposer à son appel et elle avait le droit d’interjeter appel de sa décision, quelle qu’elle soit, tout comme le prestataire. Elle a expliqué qu’il était important pour le prestataire de reconnaître qu’il n’avait pas automatiquement gain de cause dans son appel simplement parce que la Commission ne s’était pas présentée à l’audience.

[12] La membre de la division générale a expliqué que sa compétence se limitait à la question de l’exclusion. Elle a également indiqué que le prestataire devrait se concentrer sur le critère juridique relatif à la justification pour quitter volontairement son emploi. Elle a indiqué qu’il incombait au prestataire de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Elle a noté que l’article 29 de la Loi sur l’assurance-emploi énumérait certaines des circonstances dans lesquelles une justification pouvait exister. Elle a noté qu’il ne s’agissait pas d’une liste exhaustive, mais que le prestataire devait démontrer que, compte tenu de toutes les circonstances, il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait.

[13] Le prestataire a ensuite présenté des observations préliminaires. Il a prétendu que son ancien employeur mentait constamment sur ce qui s’était passé. Il a souligné qu’il n’avait jamais été victime de harcèlement autant que dans le cadre de cet emploi. Il espérait que la division générale serait convaincue que son employeur l’avait harcelé et qu’elle lui accorderait des prestations d’assurance-emploi.

[14] À ce stade, la membre de la division générale a répondu que si le prestataire réussissait son appel, elle serait incapable de verser des prestations d’assurance-emploi et ne pourrait que lever l’exclusion. La membre a également expliqué que le prestataire devrait apporter une copie de la décision de la division générale à son bureau local de Service Canada pour demander des prestations. Bien que la division générale ait commis une erreur en expliquant le processus au prestataireNote de bas de page 6, cette inexactitude n’a pas influé sur l’issue de la procédure et n’étaye pas l’allégation du prestataire selon laquelle la division générale a déclaré [traduction] « nous ne faisons pas que donner de l’argent » ou quelque chose du genre.

[15] Après les observations préliminaires du prestataire, la membre a demandé : [traduction] « D’accord, c’était donc votre déclaration d’ouverture. Désiriez-vous passer au coeur de vos observations?Note de bas de page 7 » Le prestataire a répondu : [traduction] « Ouais, j’ai mis des preuves, euh, que j’ai […] euh, tout comme des points et des choses, puis j’ai comme la capture d’écran que j’ai jointe. J’aurais dû joindre d’autres documents, mais j’ai reçu un appel… » La membre de la division générale a suggéré qu’il commence par [traduction] « les éléments de preuve qu’[il] voulait soulever »Note de bas de page 8. Le prestataire a ensuite témoigné.

[16] Malgré les affirmations du prestataire, la division générale n’a jamais déclaré ce qui suit : [traduction] « Nous ne faisons pas que donner de l’argent » ou de tels mots, soit après les observations préliminaires du prestataire, soit, par ailleurs, à un moment quelconque de l’audience.

[17] De plus, je n’ai pu voir aucune preuve dans laquelle la division générale a démontré une préférence ou un parti pris en faveur de la Commission ou qu’elle était motivée à économiser de l’argent pour Service Canada, ni aucune preuve que le résultat était prédéterminé. En fait, dans ses observations finales, la membre de la division générale a indiqué qu’elle ne serait pas en mesure de rendre une décision [traduction] « dans cette affaire » parce que [traduction] « de toute évidence, [elle] devrait examiner [ses] notes et le dossier et prendre tout en considération »Note de bas de page 9.

[18] Le prestataire allègue que la division générale l’a « pressé » de témoigner et de présenter des observations, mais qu’après avoir écouté l’enregistrement audio, il est évident que le membre de la division générale a donné au prestataire plusieurs occasions de témoigner. Par exemple, après le témoignage du prestataire, le membre de la division générale a demandé au prestataire [traduction] « Y a-t-il autre chose?Note de bas de page 10 », ce à quoi le prestataire a répondu [traduction] « Non, mais je peux répondre à vos questions. »

[19] Un autre exemple qui donne à penser que la division générale n’a pas pressé le prestataire a trait à sa prétention selon laquelle il se sentait en danger au travail. Lors de l’audience, la membre de la division générale a noté que le prestataire avait déclaré dans ses documents qu’il se sentait en danger. La membre a demandé au prestataire : [traduction] « Vouliez-vous vraiment régler ça?Note de bas de page 11 » Le prestataire a refusé de répondre au problème parce qu’il croyait en avoir [traduction] « suffisamment dit au sujet de la sécurité et d’autres chosesNote de bas de page 12 ». La membre a informé le prestataire qu’en fait, il n’avait pas discuté de la question de la sécurité et lui a demandé de nouveau s’il voulait traiter de la question. Il a témoigné [traduction] « Je crois que ça va »Note de bas de page 13, si bien que la membre a tenté de confirmer qu’il ne voulait pas du tout traiter de la question. La membre a renvoyé le prestataire à la page de référence dans le dossier d’audience, afin de déterminer si elle devrait tenir compte de la sécurité au travail dans le cadre de l’argument du prestataire selon lequel il était fondé à quitter son emploi.

[20] Si la division générale s’était empressée de mettre fin à l’instance le plus tôt possible, il est très peu probable que la division générale aurait répondu à de nombreuses questions, voire à d’autres questions, pour le prestataire, et qu’elle ne lui ait pas donné plusieurs occasions de se pencher sur des questions particulières.

[21] Le prestataire soutient que la membre de la division générale était impolie et condescendante et l’a manipulé en lui disant qu’il gagnerait probablement. L’enregistrement audio ne comporte aucune preuve que cela s’est produit.

[22] Je ne suis pas convaincue que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle comme le prétend le prestataire.

[23] Enfin, j’ai examiné le dossier sous-jacent et je ne vois aucune indication que la division générale ait commis une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier, ou qu’elle ait négligé ou mal interprété un élément de preuve clé. La division générale a énoncé les dispositions applicables de la Loi sur l’assurance-emploi qui régissent le congé volontaire et la justification du congé, ainsi que la jurisprudence pertinente. La division générale a également abordé le témoignage du prestataire expliquant les circonstances qui l’ont contraint à quitter son emploi. En définitive, la division générale a déterminé que la situation du prestataire et sa relation avec son ancien employeur ne constituaient pas du harcèlement. La division générale a également déterminé que le niveau de stress du prestataire et la situation au travail n’avaient pas atteint un niveau qui signifiait que le prestataire n’avait d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi. Le simple fait de ne pas être d’accord avec l’application d’un droit établi aux faits de l’affaire ne permet pas d’intervenir dans la décision de la division générale en vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[24] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Comparution :

D. K., représenté par lui-même

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