Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant travaille pour X à titre de X. Le 15 janvier 2018, il est congédié.

[3] L’appelant présente une demande pour recevoir des prestations d’assurance emploi. La Commission refuse de lui verser des prestations, parce que l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite.

[4] Selon l’employeur, l’appelant a transmis une série des courriels à caractère sexuel et harcelant à l’endroit de deux femmes dans son milieu de travail.

[5] L’appelant a également fait parvenir des photos de lui-même nu, de son pénis et de ses excréments à X.

[6] L’employeur a suspendu l’appelant avec solde, afin de mener une enquête. L’appelant a été convoqué à plusieurs reprises. Or, l’appelant ne s’est pas présenté pour donner sa version des faits dans le cadre de l’enquête. L’employeur a donc procédé à l’enquête sans la présence de l’appelant.

[7] L’employeur a conclu que les courriels transmis par l’appelant aux femmes étaient dégradants, vexatoires et intimidants.

[8] De plus, les gestes de l’appelant vont à l’encontre de la politique de l’employeur en matière de discrimination et de harcèlement au travail.

[9] Selon l’appelant, une personne a piraté son téléphone et elle a eu accès à ses photos et à son courriel. Il n’est pas responsable de la situation. L’employeur n’a pas un système informatique adéquat.

Question préliminaire

[10] Selon le dossier du Tribunal, l’appelant a été dûment convoqué à l’audience du 3 octobre 2018 par courrier. Ainsi, l’appelant a reçu l’avis d’audience le 29 août 2018.

[11] Avant de commencer l’audience, le Tribunal a attendu 30 minutes. L’appelant ne s’est pas présenté.

[12] Conformément au paragraphe 12 (1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement), le Tribunal peut procéder si une partie omet de se présenter à l’audience et s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience.

[13] Dans ce contexte, le Tribunal est convaincu que l’appelant a été avisé de la tenue de l’audience, il a procédé à l’audience.

Questions en litige

  1. Quels sont les gestes reprochés à l’appelant ?
  2. Est-ce que l’appelant a commis les gestes reprochés ?
  3. Est-ce que les gestes reprochés constituent de l’inconduite ?

Analyse

[16] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[17] Le Tribunal doit décider si l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite et qu’il doit donc être exclu du bénéfice des prestations aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

[18] Le rôle du Tribunal n’est pas de déterminer si le congédiement était justifié ou s’il représentait la mesure appropriée (Canada [procureur général] c Caul, 2006 CAF 251).

[19] En fait, le Tribunal doit déterminer quels sont les gestes reprochés à l’appelant. Est-ce que l’appelant a commis ces gestes ? Et est-ce qu’il s’agit d’une inconduite au sens de la Loi ?

[20] Il incombe à la Commission de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il y a eu inconduite (Bartone A-369-88).

1) Quels sont les gestes reprochés à l’appelant ?

[21] Le Tribunal retient de la preuve au dossier que l’employeur reproche à l’appelant d’avoir fait parvenir des courriels à caractère sexuel et harcelant à deux employées. Il a également transmis à X des photos de son pénis et de ses excréments.

[22] Le Tribunal est d’avis que ce sont les gestes reprochés par l’employeur à l’appelant ?

2) Est-ce que l’appelant a commis les gestes reprochés ?

[23] Le Tribunal comprend que l’appelant nie avoir commis les gestes reprochés. Il prétend que son ordinateur a été piraté. Il reproche à l’employeur de ne pas avoir un système informatique performant.

[24] Le Tribunal a pris connaissance de la volumineuse documentation que l’appelant a produite à la Commission. Il s’agit, entre autres, de sa lettre d’embauche, de ses conditions de travail, des photos de son lieu de travail et des talons de paye.

[25] Le Tribunal est d’avis que cette information n’est pas pertinente pour déterminer si l’appelant a commis les gestes reprochés ou non.

[26] Le Tribunal retient de la preuve au dossier qu’en 2011, l’appelant a consulté un psychiatre au mois de mars 2011 en raison de problème professionnel. La psychiatre a diagnostiqué des traits de personnalité schizotypique et un manque d’habiletés relationnelles. Elle concluait qu’il n’y avait pas de dangerosité pour lui-même ou autrui. Il devait prendre contact avec le programme d’aide aux employés pour un soutien additionnel.

[27] Le Tribunal retient de la preuve au dossier que l’appelant a refusé de répondre aux questions d’un agent de la Commission. Il devait se préparer concernant son procès, parce que les employées ont déposé une plainte.

[28] L’appelant prétend être victime d’une campagne de salissage de la part de son employeur.

[29] Le Tribunal estime que l’appelant a commis les gestes reprochés. Pour en arriver à cette conclusion, le Tribunal s’est basé sur l’enquête réalisée par l’employeur. Ainsi, neuf (9) courriels ont été envoyés de l’adresse électronique de l’appelant à sa supérieure hiérarchique contenant des propos vulgaires, sexuels, harcelants et des photos de son pénis. Une vidéo de son torse nu et tenant de propos inadéquats.

[30] L’appelant a également transmis sept (7) courriels à une technicienne en utilisant un langage vulgaire et menaçant. L’appelant a également envoyé six (6) photos de lui nu et six (6) photos de son pénis. L’appelant a également transmis ses coordonnées téléphoniques.

[31] X a reçu plusieurs courriels inappropriés et des photos de l’appelant nu, de son pénis et de ses excréments.

[32] Le Tribunal retient que l’appelant a eu l’occasion de rencontrer l’employeur et d’expliquer sa version des faits. Or, il ne s’est pas présenté aux rencontres fixées par l’employeur.

[33] Dans ce contexte, le Tribunal estime que la preuve au dossier démontre que l’appelant a commis les gestes reprochés. L’appelant ne peut pas seulement alléguer que le système informatique de l’employeur n’est pas adéquat ou qu’il fait l’objet d’une campagne de salissage. Les documents fournis par l’appelant ne permettent pas de le démonter.

3) Est-ce que les gestes commis par l’appelant constituent de l’inconduite au sens de la Loi ?

[34] La notion d’inconduite n’est pas définie par la Loi et s’analyse en fonction des principes tirés de la jurisprudence. La Loi « exige, pour qu’il y ait exclusion [du bénéfice des prestations], la présence d’un élément psychologique, soit un caractère délibéré soit une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéré » (Canada (Procureur général) c Tucker A-381-85).

[35] La Cour d’appel fédérale a défini la notion juridique d’inconduite, pour l’application du paragraphe 30 (1) de la Loi « comme étant une inconduite délibérée, où le prestataire savait ou aurait dû savoir que son inconduite était telle qu’elle entrainerait son congédiement. » (Mishibinijima [Procureur général] c Canada, 2007 CAF 36).

[36] Le Tribunal retient que l’employeur a une politique contre le harcèlement et il s’est engagé à fournir aux employés un environnement garantissant leur intégrité physique et psychologique.

[37] Le Tribunal retient que les courriels transmis par l’appelant vont à l’encontre de la politique de son employeur. L’appelant a perdu le lien de confiance avec son employeur en commettant ces gestes.

[38] Le Tribunal estime qu’en transmettant délibérément des courriels comportant des propos irrespectueux, dégradants et harcelants l’appelant savait ou devait savoir qu’il serait congédié en transmettant ces courriels.

[39] Dans ce contexte, le Tribunal conclut que la Commission a démontré, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite. que l’appelant.

Conclusion

[40] Le Tribunal conclut que l’appelant doit être exclu du bénéfice des prestations, car il a perdu son emploi en raison de son inconduite au sens des articles 29 et 30 de la Loi.

[41] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Le 3 octobre 2018

Téléconférence

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations ;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant ;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert ;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. (a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage ;
    2. (b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12 (2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (7) Sous réserve de l’alinéa (1) a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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