Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. L’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi chez X et, par conséquent, ne peut être exclu du bénéfice des prestations de l’assurance-emploi pour ce motif. L’appelant n’a pas non plus perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.

Aperçu

[2] L’appelant a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi qui a pris effet le 6 mars 2016. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission), a appris par la suite que l’appelant a travaillé 14 heures au restaurant X exploité par X (X) entre le 16 et le 20 mars 2016. Bien que l’appelant ait déclaré les heures et la rémunération accumulées dans le cadre de cet emploi dans sa déclaration bimensuelle, il n’a pas déclaré qu’il avait quitté cet emploi, comme indiqué dans le relevé d’emploi émis par l’employeur. La Commission a imposé à l’appelant une exclusion pour une durée indéterminée à compter du 20 mars 2016 pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification. L’appelant a fait valoir qu’il ne travaillait qu’à temps partiel et que l’employeur lui avait dit que ses heures n’augmenteraient pas, et qu’il n’était pas logique pour lui de faire la navette après s’être éloigné du restaurant; et qu’il ne pouvait pas travailler de nuit en raison d’un problème de santé. La Commission a maintenu l’exclusion et l’appelant a interjeté appel au Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal).

Questions en litige

[3] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi au motif qu’il a quitté volontairement son emploi chez X sans justification?

[4] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi en raison de son inconduite, en l’occurrence pour avoir abandonné son emploi?

Analyse

[5] Les dispositions législatives applicables sont reproduites à l’annexe de la présente décision.

[6] Un prestataire qui quitte volontairement son emploi est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à moins qu’il puisse établir qu’il était « fondé » à le faire : article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi). Une justification existe si, eu égard à toutes les circonstances, selon la prépondérance des probabilités, le prestataire n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi (voir White 2011 CAF 190, Macleod 2010 CAF 301, Imram 2008 CAF 17, Astronomo A-141-97 et Tanguay A-1458-84).

[7] Le fardeau initial de prouver que l’appelant a quitté son emploi volontairement repose sur la Commission; une fois que cette preuve est faite, il incombe à l’appelant de prouver qu’il était « fondé » à quitter son emploi (voir White (supra); Patel A-274-09).

[8] En fait, l’article 30 de la Loi prévoit une exclusion du bénéfice des prestations pour une période indéterminée pour deux motifs liés : lorsque le prestataire est congédié par son employeur en raison de sa propre inconduite ou lorsqu’il quitte volontairement son emploi sans justification. Dans l’arrêt Borden 2004 CAF 176, la Cour d’appel fédérale a ainsi expliqué l’importance de ce lien :

« Dans l’arrêt Procureur général du Canada c Easson, A-1598-92, 1er février 1994, la Cour a indiqué clairement que les notions de « perte d’emploi pour inconduite » et de « départ volontaire sans justification » ont un lien rationnel entre elles, parce qu’elles visent toutes deux des situations où la perte d’emploi est la conséquence d’un acte délibéré de l’employé. La Cour a ensuite ajouté que c’est également pour des raisons d’ordre pratique qu’un tel lien a été établi entre les deux notions : il y a plusieurs cas dans lesquels, en raison de la preuve contradictoire, il n’apparaît pas clairement, en particulier pour la Commission, si la perte d’emploi est attribuable à la propre inconduite de l’employé ou au fait que ce dernier a décidé de quitter son emploi. En fin de compte, comme la question de droit en litige concerne une exclusion au titre du paragraphe 30(1) de la Loi, la conclusion du conseil arbitral ou du juge-arbitre peut reposer sur l’un ou l’autre des deux motifs d’exclusion dans la mesure où elle s’appuie sur la preuve. Cela ne cause aucun préjudice au demandeur parce qu’il sait qu’on cherche à obtenir une exclusion du bénéfice des prestations et qu’il connaît très bien les faits à l’origine de la demande d’ordonnance d’exclusion. »

La question consiste ensuite à déterminer si une exclusion aux termes du paragraphe 30(1) de la Loi est justifiée – pour l’un ou l’autre des motifs d’exclusion – selon la preuve dont dispose le Tribunal.

Question 1 : L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi chez X?

[9] Pour déterminer s’il y a lieu d’exclure un prestataire du bénéfice des prestations parce qu’il n’était pas fondé à quitter son emploi, le Tribunal doit d’abord déterminer si le prestataire a, en fait, quitté volontairement son emploi.

[10] Le simple fait que le relevé d’emploi (RE) de l’appelant indique qu’il a quitté son emploi n’est pas déterminant pour cette question. Pour que l’abandon soit volontaire, il doit y avoir une preuve crédible que l’appelant a lui-même pris l’initiative de rompre le lien d’emploi. Le Tribunal estime qu’il n’y a aucun élément de preuve de cette nature en l’espèce.

[11] L’appelant a témoigné de ce qui suit :

  • Il n’a jamais quitté son emploi chez X. L’employeur a simplement refusé de l’inscrire à l’horaire de travail après le 20 mars 2016.
  • Lorsque l’organisation X ne veut plus de vous – quelle que soit la raison, elle ne vous congédie pas. Elle ne fait que réduire vos quarts de travail à deux ou trois heures par semaine, et ensuite à 0 heure et vous ne travaillez plus jamais pour elle. De nombreuses personnes quittent le travail lorsque cela se produit.
  • Il avait déjà travaillé pour ce franchisé X en particulier de mai 2015 à janvier 2016. Il a été embauché en mai 2015 à temps partiel et cet emploi lui permettait de compléter les heures effectuées dans le cadre d’un stage qu’il avait obtenu auprès d’une agence de placement appelée « Great Connections ». En janvier 2016, son stage lui offrait l’équivalent d’un horaire à temps plein, et il devait souvent travailler des quarts de plus de 12 heures, avec pour conséquence qu’il ne pouvait plus occuper son deuxième emploi chez X, et il a donc quitté son emploi chez X.
  • Son RE émis à la suite de son premier emploi chez cet employeur est présenté en pièce GD5-2. Il montre qu’il a travaillé régulièrement entre le 2 mai 2015 et le 24 janvier 2016.
  • Lorsque son stage a pris fin le 8 mars 2016, il est retourné chez X et a demandé qu’on lui offre à nouveau des heures de travail pour qu’il puisse gagner de [traduction] « l’argent pour vivre ».
  • Mais le gérant ne voulait pas que l’appelant revienne travailler pour lui.
  • Le gérant a dit à l’appelant qu’il n’aurait pas d’heures à temps plein parce qu’il craignait qu’il quitte encore son emploi. Le gérant a rappelé à l’appelant qu’il avait déjà quitté cet emploi par le passé, et lui a aussi rappelé qu’il ne s’était pas présenté à un quart de travail et qu’en conséquence, son RE indiquait qu’il avait reçu 0 $ (voir GD5-2).
  • L’appelant savait que le gérant ne l’aimait pas, mais il a dit qu’il accepterait toutes les heures qu’il pouvait.
  • En tant que travailleur à horaire variable, l’appelant ne serait appelé que si l’employeur avait besoin de remplacer un employé à temps plein qui était malade ou en vacances, ou si c’était une période de vacances particulièrement occupée.
  • Le gérant lui a donné deux quarts de travail entre le 16 et le 20 mars 2016.
  • Pour savoir s’il devait travailler prochainement, l’appelant devait se rendre au restaurant et consulter l’horaire affiché, ou appeler au restaurant et demander à quelqu’un si son nom était inscrit à l’horaire affiché.
  • Lorsqu’il a terminé son deuxième quart de travail le 20 mars 2016, l’horaire n’était pas encore affiché pour la semaine suivante. L’appelant a appelé le 21, le 22 et le 23 mars, et a laissé des messages demandant de le rappeler si on prévoyait qu’il travaillerait. Il a aussi appelé certains de ses amis qui travaillaient à temps plein au restaurant et leur a demandé de vérifier l’horaire pour voir s’il devait travailler. Ils ont vérifié et lui ont répondu NON.
  • Il a eu une conversation avec l’un des superviseurs du restaurant au sujet de la possibilité de travailler de nuit, mais l’appelant ne peut travailler de nuit en raison de problèmes de santé.
  • À ce moment, l’appelant était en train de déménager, mais environ une semaine plus tard, il a parlé au gérant qui lui a confirmé qu’il ne l’avait pas inscrit à l’horaire. Le gérant lui a aussi dit que l’employeur avait récemment embauché et formé de nouveaux travailleurs pour le printemps/l’été, et qu’ils auraient priorité pour l’horaire.
  • L’appelant ne voulait pas dépenser 7 $ en transport public seulement pour se rendre sur place consulter l’horaire, mais il a continué à appeler et à parler à des amis qui travaillaient au restaurant pendant les deux semaines suivantes pour voir si on lui avait confié des quarts de travail. Ce ne fut jamais le cas.
  • Cet employeur savait que l’appelant avait déjà été formé et qu’il faisait du bon travail, et il lui avait récemment donné plusieurs heures régulières (voir RE en pièce GD5-2). Bien qu’on lui ait d’abord confié deux quarts de travail, il était clair pour l’appelant que le gérant n’avait pas l’intention de lui en confier une deuxième fois.
  • Il n’a jamais quitté son emploi. Il n’a plus jamais travaillé pour cet employeur simplement parce qu’on ne lui a jamais plus confié de quarts de travail. C’est ainsi que cet emploi a pris fin.
  • Il a poursuivi ses efforts pour trouver un emploi et a trouvé un emploi à temps partiel à partir de juillet 2016, qu’il a déclaré dans ses déclarations d’assurance-emploi. Il a trouvé un emploi à temps plein avant la fin de sa période de prestations.

[12] Le Tribunal prend note de la déclaration de l’appelant dans sa demande de révision selon laquelle il a « quitté » son emploi chez X (GD3-45), mais indique que ce document a été préparé en réponse à la lettre de décision de la Commission du 12 avril 2018 l’informant qu’il a été rétroactivement exclu des prestations d’assurance-emploi [traduction] « parce [qu’il a] volontairement quitté [son] emploi chez [X] le 20 mars 2016 sans justification » (GD3-42). Le Tribunal prend également acte de la déclaration similaire de l’appelant qui a été documentée dans le dossier de révision (GD3-47), mais indique que l’appelant était précisément interrogé par l’agent de la Commission à propos du départ volontaire. Le Tribunal accepte le témoignage de l’appelant selon lequel il attendait que l’employeur lui donne d’autres heures, mais qu’il était finalement devenu évident que l’employeur n’allait tout simplement pas lui confier à nouveau des quarts de travail, et c’est pourquoi il a cherché et trouvé un autre emploi. Ce témoignage est conforme au fait que l’appelant a déclaré en même temps ses heures et ses gains provenant de cet emploi dans sa déclaration de prestataire pour la période concernée (voir transcription de la déclaration du prestataire en pièces GD3-14 à GD3-20). Le Tribunal note aussi qu’il n’y a pas d’élément de preuve démontrant que l’appelant s’était vu confier des heures de travail après le 20 mars 2016 et qu’il ne s’était pas présenté à un quart de travail, ou qu’il avait démissionné, ou qu’il avait autrement avisé l’employeur qu’il quittait son emploi. En effet, il est évident, à la lumière du RE en pièce GD5-2, que si l’appelant ne s’était pas présenté pour un quart de travail, l’employeur n’aurait pas hésité à inscrire 0.00 $ pour la période de paye. Il n’y a aucune inscription de ce genre dans le RE en pièce GD4-34, même s’il n’a été émis que le 2 mai 2016 – soit deux mois après le dernier quart de travail de l’appelant. Pour ces motifs, le Tribunal accorde plus de poids au témoignage de l’appelant à l’audience et estime que l’appelant n’a rien fait pour provoquer la rupture de son lien d’emploi avec X. Cet emploi a plutôt pris fin simplement parce que l’employeur ne lui avait jamais confié d’autres quarts de travail après le 20 mars 2016.

[13] Le Tribunal conclut donc que l’appelant n’a pas volontairement quitté son emploi chez X et qu’il ne peut donc pas être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour ce motif.

Question 2 : L’appelant a-t-il abandonné son emploi chez X?

[14] Un employé qui s’absente du travail sans permission ou qui n’entre pas en communication avec l’employeur après avoir été absent du travail sans permission peut être considéré comme ayant abandonné son emploi. Une telle conduite peut être considérée comme un départ volontaire sans justification.

[15] Le Tribunal estime que l’appelant n’a pas abandonné son emploi chez X.

[16] La preuve de la Commission concernant l’abandon d’emploi consiste en une seule déclaration de l’employeur à l’étape de l’enquête selon laquelle l’appelant a abandonné son emploi lorsqu’il ne s’est pas présenté de nouveau au travail, sans explication (voir GD3-37); et une autre déclaration au cours du processus de révision selon laquelle l’appelant ne s’est tout simplement pas présenté (GD3-48). Toutefois, l’employeur n’a présenté aucun élément de preuve montrant que l’appelant s’était vu confier un quart de travail auquel il ne se serait pas présenté, ou que l’employeur aurait été forcé de trouver quelqu’un pour remplacer l’appelant lorsqu’il aurait omis de se présenter à un quart de travail. Tel que mentionné ci-dessus, il ressort clairement du RE en pièce GD5-2 que si l’appelant ne s’était pas présenté à un quart de travail, l’employeur n’aurait pas hésité à inscrire 0,00 $ pour la période de paye. Pourtant, il n’y a aucune inscription de ce genre au RE en pièce GD3-34, même s’il n’a été émis que le 2 mai 2016 – soit deux mois après le dernier quart de travail de l’appelant.

[17] Le Tribunal note que les renseignements fournis par l’appelant au cours du processus de révision (voir Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations en pièce GD3-50), à savoir qu’il a demandé des heures supplémentaires et qu’on lui a dit qu’on ne lui en accorderait pas, sont conformes à son témoignage détaillé à l’audience. Par contre, la déclaration de l’employeur selon laquelle si l’appelant était resté, il aurait obtenu plus d’heures est fallacieuse et n’est pas appuyée par les pratiques de l’employeur en matière d’établissement des horaires de travail reflétées sur le RE pour la période d’emploi antérieure de l’appelant (en pièce GD5-2).

[18] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas abandonné son emploi chez X. Par conséquent, l’appelant ne peut être exclu du bénéfice des prestations d’assurance emploi pour ce motif.

Question 3 : L’appelant a-t-il perdu son emploi chez X en raison de sa propre inconduite?

[19] L’article 30 de la Loi prévoit qu’un prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi s’il perd un emploi ou est suspendu en raison d’une inconduite.

[20] Il incombe à la Commission de prouver que l’appelant, selon la prépondérance des probabilités, a perdu son emploi chez X en raison de sa propre inconduite (Larivee A-473-06, Falardeau A-396-85).

[21] Le terme « inconduite » n’est pas défini dans la Loi. Sa signification aux fins de la Loi a plutôt été établie dans la jurisprudence des cours et des tribunaux administratifs qui ont examiné l’article 30 de la Loi et énoncé des principes directeurs qui doivent être pris en compte dans les circonstances de chaque cas.

[22] Pour prouver l’inconduite, il faut montrer que l’appelant s’est comporté autrement qu’il aurait dû et que ses actes étaient délibérés et volontaires ou qu’ils résultaient d’une insouciance telle qu’elle frôlait le caractère délibéré : Eden A-402-96. Pour qu’un acte soit considéré comme de l’inconduite, il faut démontrer que l’appelant savait ou aurait dû savoir que son comportement était tel qu’il pouvait compromettre l’exercice des fonctions dont il devait s’acquitter envers son employeur et que, par conséquent, le congédiement était une réelle possibilité : Lassonde A-213-09, Mishibinijima A-85-06, Hastings A-592-06, Lock 2003 CAF 262; et que la conduite nuit au rendement au travail de l’appelant, ou qu’elle est préjudiciable aux intérêts de l’employeur, ou encore qu’elle cause des torts irréparables à la relation employeur-employé : CUB 73528.

[23] Comme l’a établi la Cour d’appel fédérale dans Macdonald A-152-96, le Tribunal doit déterminer la véritable cause du congédiement du prestataire et déterminer si celle-ci constitue une inconduite au sens de l’article 30 de la Loi.

[24] Le Tribunal a déjà conclu que l’appelant n’a rien fait pour provoquer la rupture de son lien d’emploi et n’a pas abandonné son emploi. Son emploi a plutôt pris fin simplement parce que l’employeur ne lui avait jamais confié d’autres quarts de travail après le 20 mars 2016.

[25] Vu les conséquences sérieuses qui y sont associées, une conclusion d’inconduite doit être fondée sur des éléments de preuve clairs et non sur de simples conjectures et hypothèses. En outre, c’est à la Commission de prouver l’existence de tels éléments de preuve, et ce, indépendamment de l’opinion de l’employeur : Crichlow A-562-97. Le Tribunal doit disposer d’une preuve suffisamment circonstanciée pour lui permettre de savoir comment l’employé a agi et, ensuite, de juger si ce comportement était répréhensible : Joseph c C.E.I.C A-636-85.

[26] En l’espèce, l’employeur n’a pas qualifié d’inconduite la conduite de l’appelant; il a simplement déclaré que l’appelant ne s’était seulement plus présenté au travail. Tel qu’établi aux paragraphes 11 à 18 ci-dessus, le Tribunal ne juge pas cela crédible. L’appelant soutient que le gérant ne voulait tout simplement pas qu’il revienne lorsqu’il est retourné chez X en mars 2016, et qu’il était déterminé à ne pas lui donner plus d’heures de travail. Le Tribunal convient qu’il s’agit probablement de la véritable raison pour laquelle l’emploi de l’appelant a pris fin. Le Tribunal note également que l’appelant n’avait aucun contrôle sur cette situation, puisqu’il avait déjà été formé par cet employeur et qu’il cherchait à retourner au travail.

[27] Bien que l’employeur ait pu arriver à la conclusion qu’il n’était plus dans son intérêt de donner des heures de travail à l’appelant après son retour en mars 2016, ce n’est pas le rôle du Tribunal de déterminer si les mesures prises par l’employeur étaient justifiées ou appropriées (Caul 2006 FCA 251), mais il doit plutôt se demander si la conduite en question constituait une inconduite au sens de la Loi (Marion 2002 CAF 185).

[28] Pour les motifs exposés ci-dessus, il n’existe aucun élément de preuve crédible qui indique de la part de l’appelant un comportement délibéré ou négligent au point de frôler le caractère délibéré, ni que l’appelant savait ou aurait dû savoir que son comportement était tel qu’il aurait pu entraîner son congédiement. Par conséquent, la Commission ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait de prouver que l’appelant a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Le Tribunal conclut donc que l’appelant ne peut être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi au motif qu’il aurait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.

Conclusion

[29] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi chez X et, par conséquent, ne peut être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi en vertu de l’article 30 de la Loi pour ce motif.

[30] De plus, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas abandonné son emploi chez X pas plus qu’il ne s’est comporté autrement qu’il aurait dû, d’une manière qui pourrait être considérée comme une inconduite aux fins de l’article 30 de la Loi. Par conséquent, l’appelant ne peut être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi en vertu de l’article 30 de la Loi pour avoir perdu son emploi chez X en raison de sa propre inconduite.

[31] L’appel est accueilli.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 17 septembre 2018

Vidéoconférence

B. S., appelant

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement on emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations — qu’elle soit initiale ou non — n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.

Règlement sur l’assurance-emploi

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