Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté parce que l’appelante n’a pas démontré que le départ volontaire de son emploi était justifié. Les motifs de cette décision sont énoncés ci-dessous.

Aperçu

[2] L’appelante a perdu un premier emploi en octobre 2016 à la suite d’un manque de travail. Par la suite, l’appelante a occupé un autre emploi qu’elle a quitté volontairement en août 2017. Elle a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi en octobre 2017. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a rendu les décisions suivantes relativement à cette demande de prestations :

  1. La Commission a d’abord décidé que l’appelante ne pouvait recevoir de prestations parce qu’elle n’avait pas accumulé un nombre suffisant d’heures d’emploi assurable durant sa période de référence pour établir une période de prestations. À la suite d’une demande de révision, la Commission a revu sa décision et déterminé que l’appelante avait en effet accumulé un nombre suffisant d’heures assurables pour établir une période de prestations à partir de la date où elle a perdu son premier emploi en octobre 2016. Cependant, étant donné que l’appelante a reçu une indemnité de départ en octobre 2016, celle-ci a été répartie sur ses semaines de prestations jusqu’en novembre 2017 et sa période de prestations a été prolongée jusqu’au 27 octobre 2018 (GD3A-28). L’appelante a présenté un avis d’appel de cette décision auprès du Tribunal, mais elle s’en est désistée lors d’une conférence préparatoire à l’audience où elle a fait valoir que son intention était de contester une autre décision qui a été rendue concernant le départ volontaire de son emploi qu’elle a quitté en août 2017.
  2. Après la conférence préparatoire, l’appelante a demandé à la Commission de réviser la décision rendue concernant le départ volontaire de son emploi et la Commission a maintenu sa décision. En effet, la Commission a fait valoir que l’appelante avait quitté volontairement son emploi en août 2017 sans justification et devait par conséquent être exclue du bénéfice des prestations. Le Tribunal a donc demandé à la Commission de lui transmettre le dossier sur la question du départ volontaire sans justification afin de déterminer si ce départ volontaire était justifié.

[3] L’appelante reconnait qu’elle a quitté volontairement son emploi, mais elle maintient que cette décision était justifiée par un mauvais climat de travail, par le fait qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel et parce que cet emploi n’était pas convenable.

Questions en litige

[4] L’appelante était-elle justifiée de quitter volontairement son emploi ?

Analyse

[5] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[6] Les prestataires sont exclus du bénéfice des prestations s’ils quittent volontairement un emploi sans justification (article 30 de la Loi). Le critère relatif à la justification implique de déterminer si l’appelante n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

[7] Après avoir travaillé pendant plusieurs années à l’entreprise X, l’appelante a perdu son emploi en octobre 2016 à la suite d’un manque de travail. Quelques mois plus tard, l’appelante a accepté un autre emploi à temps partiel auprès de la Y. Elle a quitté volontairement cet emploi au mois d’août 2017. La Commission a déterminé que l’appelante devait être exclue du bénéfice des prestations parce qu’elle a quitté l’emploi qu’elle occupait à la Y sans justification. L’appelante plaide qu’elle ne cherche pas le paiement de prestations relativement à l’emploi qu’elle occupait à la Y, et qu’en conséquence l’article 30 de la Loi ne s’applique pas à son cas. Le Tribunal n’est pas de cet avis.

[8] En effet, la Loi définit « emploi » comme tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations (article 29 a) de la Loi). Dans le cas de l’appelante, elle a déposé sa demande de prestations initiale le 31 octobre 2017.  Sa période de prestations a été rétroactivement établie comme débutant le 30 octobre 2016 et demeure valide jusqu’au 27 octobre 2018.  L’appelante a quitté volontairement son emploi à la Y le 16 août 2017. Donc, le Tribunal détermine que l’appelante a quitté volontairement son emploi durant sa période de prestations. Par conséquent, le Tribunal détermine que l’article 30 de la Loi est applicable au cas de l’appelante puisqu’elle a quitté volontairement son emploi durant sa période de prestations.

L’appelante était-elle justifiée de quitter volontairement son emploi ?

[9] L’appelante a fait valoir que son départ volontaire était justifié par les circonstances suivantes : l’emploi à la Y n’était pas convenable et le climat de travail était désagréable. Le Tribunal conclut que le départ volontaire de l’appelante n’était pas justifié parce que l’analyse des circonstances révèle que quitter son emploi n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas.

[10] L’appelante a témoigné que lorsqu’elle compare l’emploi qu’elle occupait à la Y avec celui qu’elle a occupé chez l’employeur X, ce dernier était plus rémunérateur, était à temps plein et elle occupait un poste de gestion, alors qu’à la Y, elle était caissière à temps partiel et ne gagnait que 15 $ le taux horaire. Selon l’appelante, son emploi à la Y n’était pas un emploi convenable au sens de la Loi et elle était justifiée de le quitter. Cet argument ne peut être retenu parce que l’appelante avait accepté cet emploi à temps partiel et pouvait le conserver, mais elle a plutôt pris la décision de le quitter volontairement. Qui plus est, la jurisprudence a établi que le fait qu’un emploi ne soit pas, aux yeux du prestataire, suffisamment rémunérateur ne saurait justifier le fait de l’abandonner (Tanguay c Canada (Commission d’assurance-chômage), [1985] A.C.F)

[11] Pour les motifs susmentionnés, le Tribunal conclut que l’appelante avait d’autres solutions raisonnables que de quitter volontairement son emploi. En effet, l’appelante pouvait très bien conserver son emploi tout en cherchant un nouvel emploi qui convenait mieux à ses attentes.

[12] L’appelante a également fait valoir que le climat de travail était désagréable. Elle a expliqué qu’elle n’avait aucune stimulation, que ses responsabilités étaient imprécises et qu’il n’y avait aucun partage d’information sur des enjeux affectant le travail, aucun soutien et aucun encouragement. Qui plus est, les gestionnaires qui travaillaient au moment de son embauche ont été remplacés quelques jours après son embauche. Elle ajoute avoir tenté à deux reprises de fixer une rencontre avec un superviseur pour discuter de son développement professionnel.

[13] La jurisprudence enseigne que les prestataires ont l’obligation de tenter de résoudre les conflits de travail avec l’employeur avant de prendre la décision unilatérale de quitter leur emploi (White 2011 FCA 190 ; Murugaiah 2008 FCA 10 ; Hernandez 2007 FCA 320 ; Campeau 2006 FCA 376). De plus, la Cour d’appel fédérale maintient que pour établir une justification, le prestataire doit démontrer qu’il n’avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi au moment où il l’a fait (Landry, A-1210-92). L’appelante a témoigné avoir quitté volontairement son emploi sans avoir entrepris certaines démarches pour régler sa situation. De plus, l’appelante à travailler à la Y pendant sept semaines, donc, le Tribunal détermine que l’appelante ne s’est pas laissé suffisamment de temps pour assimiler son nouveau travail et ses nouvelles tâches et n’a pas discuté de la situation avec son employeur. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas prouvé que son départ volontaire fût justifié, compte tenu des circonstances, puisqu’elle avait d’autres solutions raisonnables à sa disposition. 

[14] L’appelante fait valoir qu’elle a accumulée suffisamment d’heures pour être admissible au bénéfice des prestations en vertu de son emploi précédent occupé chez X. De ce fait, l’appelante indique avoir droit aux prestations. Le Tribunal reconnait que l’appelante avait accumulé environ 2093 heures d’emploi assurable au cours de son emploi auprès de l’employeur X. Cependant, le paragraphe 30 (5) de la Loi énonce clairement que lorsqu’une personne quitte volontairement son emploi sans justification, les heures d’emploi assurable accumulées dans tout emploi antérieur sont exclues du calcul du nombre d’heures requises pour obtenir des prestations.

[15] Le Tribunal estime qu’aucune disposition dans la Loi ne permet à l’appelante d’utiliser ses heures d’emploi assurable accumulées avant le départ volontaire de son emploi. Le Tribunal sympathise avec l’appelante ; toutefois, le Tribunal n’a pas la compétence ni le pouvoir discrétionnaire requis pour faire abstraction de la législation telle qu’elle est libellée actuellement ou pour la modifier.

Conclusion

[16] En regard des circonstances particulières portées à son attention dans ce dossier, le Tribunal considère que l’appelante n’a pas épuisé toutes les solutions raisonnables avant de quitter volontairement son emploi. Le Tribunal conclut que l’appelante a volontairement quitté son emploi sans justification et son exclusion du bénéfice des prestations est fondée en vertu de l’article 30 de la Loi.

[17] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 25 septembre 2018

Téléconférence

N. L., appelante

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 7.1 (1) Le nombre d’heures d’emploi assurable requis au titre de l’article 7 est majoré conformément au tableau qui suit, en fonction du taux régional de chômage applicable, à l’égard de l’assuré s’il est responsable d’une ou de plusieurs violations au cours des deux cent soixante semaines précédant sa demande initiale de prestations.
  2. Table / Tableau
    Regional Rate of Unemployment / Taux régional de chômage Violation
      minor / mineure serious / grave very serious / très grave subsequent / subséquente
    6% and under / 6 % et moins 875 1050 1225 1400
    more than 6% but not more than 7% / plus de 6 % mais au plus 7 % 831 998 1164 1330
    more than 7% but not more than 8% / plus de 7 % mais au plus 8 % 788 945 1103 1260
    more than 8% but not more than 9% / plus de 8 % mais au plus 9 % 744 893 1041 1190
    more than 9% but not more than 10% / plus de 9 % mais au plus 10 % 700 840 980 1120
    more than 10% but not more than 11% / plus de 10 % mais au plus 11 % 656 788 919 1050
    more than 11% but not more than 12% / plus de 11 % mais au plus 12 % 613 735 858 980
    more than 12% but not more than 13% / plus de 12 % mais au plus 13 % 569 683 796 910
    more than 13% / plus de 13 % 525 630 735 840
  3. (2) [Abrogé, 2016, ch. 7, art. 210]
  4. (2.1) Toute violation prévue à l’article 152.07 dont s’est rendu responsable un particulier est réputée être une violation prévue au présent article, et ce, à la date où il s’est vu donner l’avis de violation.
  5. (3) Une violation dont un particulier s’est rendu responsable ne peut être prise en compte au titre du paragraphe (1) à l’égard de plus de deux demandes initiales de prestations présentées par lui au titre de la présente loi s’il remplit les conditions requises pour recevoir des prestations dans le cadre de chacune de ces deux demandes, compte tenu du paragraphe (1), du sous-alinéa 152.07 (1) d) (ii) ou des règlements pris en vertu de la partie VIII, selon le cas.
  6. (4) Il y a violation lorsque le prestataire se voit donner un avis de violation parce que, selon le cas :
    1. (a) il a perpétré un ou plusieurs actes délictueux prévus à l’article 38, 39 ou 65.1 pour lesquels des pénalités lui ont été infligées au titre de l’un ou l’autre de ces articles, ou de l’article 41.1 ;
    2. (b) il a été trouvé coupable d’une ou plusieurs infractions prévues à l’article 135 ou 136 ;
    3. (c) il a été trouvé coupable d’une ou plusieurs infractions au Code criminel pour tout acte ou omission ayant trait à l’application de la présente loi.
  7. (5) À l’exception des violations pour lesquelles un avertissement est donné, chaque violation est qualifiée de mineure, de grave, de très grave ou de subséquente, en fonction de ce qui suit :
    1. (a) elle est mineure, si sa valeur est inférieure à 1 000 $, grave, si elle est inférieure à 5 000 $, et très grave, si elle est de 5 000 $ ou plus ;
    2. (b) elle est subséquente si elle fait l’objet d’un avis de violation donné dans les deux cent soixante semaines suivant une autre violation, même si l’acte délictueux sur lequel elle est fondée a été perpétré avant cette dernière.
  8. (6) La valeur d’une violation correspond à la somme des montants suivants :
    1. (a) le versement excédentaire de prestations lié à l’acte délictueux sur lequel elle est fondée ;
    2. (b) si le prestataire est exclu ou inadmissible au bénéfice des prestations, ou si l’acte délictueux en cause a trait aux conditions requises au titre de l’article 7, le montant obtenu, sous réserve du paragraphe (7), par multiplication de son taux de prestations hebdomadaires par le nombre moyen de semaines à l’égard desquelles des prestations régulières sont versées à un prestataire, déterminé conformément aux règlements.
  9. (7) Le montant obtenu au titre de l’alinéa (6) b) ne peut excéder le montant des prestations auxquelles le prestataire aurait eu droit s’il n’avait pas été exclu ou déclaré inadmissible ou s’il avait rempli les conditions requises au titre de l’article 7.
  10. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations ;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant ;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert ;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  11. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. (a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage ;
    2. (b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  12. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  13. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  14. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  15. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  16. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12 (2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  17. (7) Sous réserve de l’alinéa (1) a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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