Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] L’appelant a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi (prestations d’AE) le 10 septembre 2017. Il a travaillé comme X pour X jusqu’au 3 mars 2017 et il a quitté son emploi. L’appelant a ensuite travaillé pour un autre employeur et il a accumulé 742 heures d’emploi assurable. L’intimée a déterminé que l’appelant était admissible à l’établissement d’une période de prestations d’assurance-emploi à son profit. Toutefois, l’intimée a expliqué que, pour calculer les prestations d’AE de l’appelant, elle n’avait pas tenu compte des heures d’emploi assurable qu’il avait accumulées en travaillant pour X, parce qu’il avait quitté volontairement cet emploi sans justification. L’appelant a soutenu qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi pour X, en raison de la violation des normes de santé et de sécurité sur le chantier. L’appelant a aussi fait valoir qu’il avait parlé à son superviseur (et à d’autres personnes) de ces infractions, mais en vain. J’estime que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi, puisqu’il s’agissait de la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstances.

Questions préliminaires

[3] L’appelant a participé à l’audience par vidéoconférence à l’heure prévue. La mise en cause (X) n’a pas participé à l’audience. L’avis d’audience de la mise en cause (daté du 4 octobre 2018) a été envoyé par poste prioritaire et on a accusé réception du document le 10 octobre 2018. Les documents de Poste Canada faisaient partie de la liste de documents ajoutés au dossier.

[4] Aux termes de l’article 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, si une partie omet de se présenter à l’audience, le Tribunal peut procéder en son absence, s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience. Je suis convaincu que la mise en cause a reçu son avis d’audience et je vais instruire l’affaire en son absence.

Questions en litige

[5] Le Tribunal doit trancher les questions suivantes :

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi? Si tel est le cas, l’appelant était-il fondé à quitter volontairement son emploi?

Analyse

[6] Les dispositions législatives pertinentes figurent en annexe de la présente décision.

[7] De nombreuses circonstances justifiant un départ volontaire sont énumérées à l’article 29c) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). La Cour d’appel fédérale a cependant expliqué qu’il incombe au prestataire de démontrer que son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas, compte tenu de toutes les circonstances (Patel c Procureur général du Canada, 2010 CAF 95; White c Procureur général du Canada, 2011 CAF 190).

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi?

[8] J’estime que l’appelant a quitté volontairement son emploi, parce qu’il a donné un préavis de deux semaines dans sa lettre de démission en raison d’un [traduction] « acte inéquitable » commis sur le chantier (GD3-38). Je suis conscient que l’appelant a soutenu qu’il avait fait l’objet d’un congédiement déguisé de la part de l’employeur. Néanmoins, je ne vois aucune preuve selon laquelle l’appelant aurait été obligé de démissionner, et je peux seulement conclure qu’il a quitté volontairement son emploi.

L’appelant était-il fondé à quitter volontairement son emploi?

[9] J’estime que l’appelant était fondé à quitter son emploi pour les raisons suivantes. Premièrement, l’appelant a affirmé que des violations graves aux normes de santé et sécurité sur le chantier représentaient un danger pour sa sécurité. Par exemple, l’appelant a expliqué que certains collègues conduisaient des camions et d’autres machines de façon imprudente et à trop grande vitesse. De plus, l’appelant a déclaré que certains collègues refusaient de porter l’équipement de protection requis et qu’ils l’avaient ignoré lorsqu’il avait signalé le fait à leur représentant de la sécurité. J’estime que le témoignage oral de l’appelant à ce sujet est crédible, car ses affirmations sont demeurées cohérentes, et elles étaient détaillées et plausibles.

[10] Deuxièmement, l’appelant a tenté de communiquer ses inquiétudes à propos des infractions aux normes de santé et de sécurité à son superviseur (T. B.), mais en vain. J’admets que l’employeur (M. P., des ressources humaines) a expliqué dans le dossier d’appel que T. B. avait reçu la lettre de démission de l’appelant, mais qu’il n’était pas au courant des problèmes de sécurité. Néanmoins, je privilégie la déclaration de l’appelant selon laquelle T. B. était au courant des inquiétudes de l’appelant liées à la sécurité, parce que les déclarations de celui-ci étaient sincères, cohérentes et plausibles. De plus, M. P. a expliqué dans le dossier d’appel qu’entre le 24 février 2017 et le 7 mars 2017 l’appelant s’était rendu à maintes reprises au bureau de l’administration pour faire part des inquiétudes qu’il avait en lien avec la santé et la sécurité, la violence parallèle et les milieux de travail dangereux (GD3-23).

[11] Troisièmement, l’appelant a essayé de porter ces problèmes de santé et sécurité à l’attention du ministère du Travail fédéral, mais on lui a répondu qu’il s’agissait d’un problème interne qui devait être réglé par l’employeur. Je suis conscient que l’intimée a soutenu qu’une solution raisonnable pour l’appelant aurait été d’organiser une rencontre avec le ministère du Travail fédéral pour discuter de ses inquiétudes, parce qu’il était le représentant de la sécurité. Malgré tout, je privilégie le témoignage de l’appelant, qui affirme qu’il a tenté d’aborder le sujet avec le ministère du Travail et qu’on l’a informé que la question relevait de la Fort William First Nation.

[12] Je reconnais que l’intimée a également soutenu qu’une autre solution raisonnable aurait été que l’appelant se trouve un autre emploi avant de quitter celui qu’il occupait. Cependant, il était important de tenir compte des circonstances particulières dans cette cause. Par exemple, l’appelant a donné des détails sur les conditions de travail dangereuses sur le chantier où les ouvriers travaillaient dans une exploitation minière à ciel ouvert. Plus précisément, l’appelant a affirmé que certains collègues conduisaient des machines lourdes et des camions de façon imprudente et à trop grande vitesse. L’appelant a également affirmé qu’il existait des angles morts sur le chantier où des ouvriers pouvaient être gravement blessés si un camion de chargement ou d’autres machines se déplaçaient trop rapidement. Je dois tenir compte du témoignage de l’appelant sur ces sujets, parce qu’il s’agit de circonstances significatives. En bref, j’estime que la seule solution raisonnable qu’avait l’appelant était de quitter son emploi, car sa sécurité était compromise sur le chantier.

[13] J’aimerais mettre l’accent sur le fait que l’appelant a tenté d’aborder les problèmes liés à la santé et à la sécurité avec son superviseur (T. B.), M. P. (ressources humaines) et le directeur général (K. O.) à maintes reprises. Toutefois, aucune mesure n’a été prise par l’employeur sur ces problèmes de sécurité pendant que l’appelant travaillait pour lui.

[14] En résumé, je conclus que l’appelant a été fondé à quitter son emploi, car son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas compte tenu de toutes les circonstances.

Conclusion

[15] L’appel est accueilli.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 7 novembre 2018

Vidéoconférence

S. B., appelant

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  2. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  3. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  4. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  5. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  6. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  7. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations — qu’elle soit initiale ou non — n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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