Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. La membre conclut que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en refusant de proroger le délai imparti à la prestataire pour demander une révision.

Aperçu

[2] La prestataire a présenté une demande de prestations ordinaires d’assurance-emploi, mais seules 15 semaines de prestations lui ont été accordées sur le fondement de son dernier emploi. Lorsqu’elle s’est renseignée auprès de la Commission de l’assurance-emploi du Canada, celle-ci l’a informée que les heures accumulées dans le cadre de son emploi précédent chez X n’avaient pas été prises en compte dans le calcul. Il en était ainsi puisque la Commission a conclu, le 28 novembre 2017, que la prestataire avait quitté son emploi chez X sans justification. À l’époque, la prestataire n’avait pas demandé une révision de cette décision. Environ huit mois plus tard, le 25 juillet 2018, la prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision initiale du 28 novembre 2017. La Commission a rejeté la demande de la prestataire et n’a pas révisé sa décision. La Commission a fait valoir que la prestataire avait attendu 209 jours avant de présenter une demande de révision, ce qui excède le délai de 30 jours fixé par la loi. La Commission a affirmé qu’elle ne pouvait pas accorder un délai supplémentaire à la prestataire puisque celle-ci n’avait pas raisonnablement expliqué son retard ni manifesté l’intention constante de demander une révision. La prestataire, n’étant pas d’accord, a fait appel au Tribunal de la sécurité sociale du Canada.

Question en litige

[3] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en refusant d’accorder à la prestataire un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision?

Analyse

[4] Les dispositions législatives pertinentes figurent en annexe de la présente décision.

[5] Le 28 novembre 2017, la Commission a communiqué par lettre sa décision initiale de refuser à la prestataire des prestations puisqu’elle avait quitté son emploi chez X sans justification. Durant l’audience, la prestataire a confirmé qu’elle avait reçu cette lettre et qu’elle était au courant de cette décision.

[6] Un prestataire, un employeur ou quiconque fait l’objet d’une décision initiale de la Commission peut demander à la Commission de réviser sa décision, mais cette demande doit être présentée dans les 30 jours suivant la date où il reçoit communication de cette décision (article 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi).

[7] Le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision initiale le 25 juillet 2018, soit environ huit mois après qu’eut été rendue sa décision initiale. Sa demande de révision a été présentée après le délai de 30 jours et était donc tardive.

[8] Si la demande de révision n’est pas présentée dans le délai de 30 jours, la Commission peut accorder un délai supplémentaire (article 112(1) de la Loi). Sa décision d’accorder ou non un délai supplémentaire aux fins de la présentation d’une demande de révision est une décision discrétionnaire appartenant à la Commission (Daley, T-1500-15).

[9] Le 30 août 2018, la Commission a refusé d’accorder à la prestataire un délai supplémentaire pour demander une révision, et elle n’a donc pas révisé sa décision initiale.

[10] Selon la Cour d’appel fédérale, le Tribunal ne peut intervenir à l’égard de cette décision que si la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire quand elle a rejeté la demande de la prestataire visant à proroger le délai de 30 jours pour demander une révision de la décision initiale. Autrement dit, la membre doit décider si la Commission a agi de bonne foi, avec de bons motifs, et a tenu compte des facteurs pertinents tout en faisant fi des facteurs non pertinents et en agissant de façon non discriminatoire (Uppal, A-341-08; Tong, A-412-02; Dunham, A-708-95).

Question en litige : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en refusant d’accorder à la prestataire un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision?

[11] Oui. La Commission a tenu compte de l’ensemble des observations et des éléments de preuve pertinents fournis par la prestataire pour décider qu’elle n’accordait pas un délai supplémentaire pour la présentation d’une demande de révision. Elle s’est donc acquittée du fardeau de prouver qu’elle avait exercé sa discrétion de façon judiciaire (Gagnon A-52-04).

[12] Les conditions à remplir pour obtenir un délai supplémentaire sont énoncées à l’article premier du Règlement sur les demandes de révision.

[13] La Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que la partie intéressée a manifesté l’intention constante de demander une révision (article 1(1) du Règlement).

[14] Si la demande de révision est présentée plus de 365 jours après que la partie intéressée a reçu communication de la décision, deux conditions de plus doivent être remplies. Dans un tel cas, la Commission doit également être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès et que le délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partie (article 1(2) du Règlement).

[15] En l’espèce, il n’est pas contesté que la prestataire a attendu 209 jours avant de présenter sa demande de révision relative à la décision initiale de la Commission. La prestataire doit donc démontrer à la Commission qu’elle a rempli les deux conditions fixées à l’article 1(1) du Règlement. Ainsi, si la Commission n’est pas convaincue que l’une ou l’autre de ces conditions soit remplie, elle peut rejeter la demande de la prestataire.

[16] Durant l’audience, la prestataire a justifié son retard au moyen des mêmes raisons que celles qu’elle avait fournies à la Commission. Quand elle avait reçu la lettre du 28 novembre 2017 de la Commission, elle n’avait pas pensé à demander une révision parce que, d’une part, elle avait commencé à travailler pour un nouvel employeur et, d’autre part, elle ne savait pas que les heures travaillées chez X ne seraient pas comptabilisées aux fins de son admissibilité future. La prestataire a affirmé qu’elle n’avait sincèrement jamais eu l’intention de demander une révision. Cependant, après n’avoir reçu que 15 semaines de prestations, elle a appelé la Commission pour savoir pourquoi sa période de prestations avait pris fin. C’est alors qu’elle a, le 25 juillet 2018, demandé à la Commission de réviser sa décision initiale. La prestataire a aussi souligné qu’elle avait, entre-temps, fait une réclamation contre X auprès du ministère du Travail et qu’elle avait gagné son appel. Elle faisait aussi appel contre cet employeur auprès du Tribunal des droits de la personne.

[17] La Commission a soutenu que la prestataire n’avait pas fourni une explication raisonnable à l’appui de son retard ni manifesté l’intention constante de demander une révision. Elle a affirmé que rien ne démontrait que la prestataire n’aurait pu présenter sa demande plus tôt qu’elle ne l’a fait ou dans le délai de 30 jours fixé à cet effet. Le fait que la prestataire avait déposé une réclamation auprès du ministère du Travail le 24 octobre 2017, un mois avant la décision initiale de la Commission, n’est pas une circonstance atténuante qui aurait contribué à son retard. Sa réclamation ne l’aurait pas empêchée de présenter sa demande de révision. La Commission a jugé que la prestataire n’avait pas fourni une explication raisonnable à son retard en affirmant qu’elle travaillait et ignorait que les heures tirées de cet emploi ne seraient pas comptabilisées aux fins de sa prochaine demande de prestations. De plus, la prestataire s’était seulement renseignée sur la décision initiale au moment de présenter sa demande de révision. Elle n’a donc pas manifesté l’intention constante de demander une révision.

[18] La membre constate que la prestataire a justifié son retard en invoquant les mêmes raisons que celles ayant déjà été prises en considération par la Commission. La prestataire n’a présenté aucun nouvel élément de preuve au Tribunal. De plus, elle n’a présenté aucune [traduction] « raison spéciale » ou circonstance particulière afin d’expliquer pourquoi elle n’avait pas présenté une demande de révision dans le délai prescrit (Penny, A-340-07).

[19] La membre conclut que la Commission a tenu compte de l’ensemble des observations et des éléments de preuve portés à sa connaissance pour décider de ne pas proroger le délai. Elle a agi de bonne foi, avec de bons motifs. Elle a tenu compte des facteurs pertinents, a ignoré les facteurs non pertinents et a agi de manière non discriminatoire en refusant de proroger le délai de 30 jours pour demander la révision de sa décision du 28 novembre 2017. La membre conclut que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire et elle ne peut donc pas intervenir à l’égard de cette décision.

Conclusion

[20] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 29 octobre 2018

Téléconférence

T. C., appelante

Annexe

Loi sur l’assurance-emploi

112 (1) Quiconque fait l’objet d’une décision de la Commission, de même que tout employeur d’un prestataire faisant l’objet d’une telle décision, peut, dans les trente jours suivant la date où il en reçoit communication, ou dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder, et selon les modalités prévues par règlement, demander à la Commission de réviser sa décision.

(2) La Commission est tenue d’examiner de nouveau sa décision si une telle demande lui est présentée.

Règlement sur les demandes de révision

1 (1) Pour l’application du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi et sous réserve du paragraphe (2), la Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que l’intéressé a manifesté l’intention constante de demander la révision.

(2) Dans les cas ci-après, la Commission doit aussi être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès et que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partie :

  1. a) la demande de révision est présentée après l’expiration du délai de trois cent soixante-cinq jours suivant le jour où l’intéressé a reçu communication de la décision;
  2. b) elle est présentée par une personne qui a fait une autre demande de prestations après que la décision lui a été communiquée;
  3. c) elle est présentée par une personne qui a demandé à la Commission d’annuler ou de modifier la décision en vertu de l’article 111 de la Loi sur l’assurance-emploi.
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