Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] Le Tribunal estime que le demandeur (appelant) a fourni des faits nouveaux; toutefois, ces derniers ne satisfont pas au critère du caractère essentiel. L’appelant n’a pas non plus démontré que le Tribunal avait rendu sa décision avant que soit connu un fait ou en se fondant sur une erreur relative à un tel fait. Ainsi, le Tribunal ne modifiera pas et n’annulera pas sa décision du 12 mars 2018.

Aperçu

[2] L’appelant a fait une demande de prestations le 13 juin 2016. L’intimée a rejeté la demande de prestations de l’appelant parce qu’il n’a pas démontré qu’il était disponible, car il n’a pas fourni de preuve démontrant qu’il avait un nouveau permis de travail (autorisation de la Commission de l’immigration du Canada) pour la période du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017. Toutefois, l’appelant a présenté un élément de preuve le 19 décembre 2017 démontrant qu’il avait obtenu un nouveau permis de travail et l’intimée a présenté des observations selon lesquelles le Tribunal devrait rejeter l’appel avec modification.

[3] L’appelant a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Le 12 mars 2018, le Tribunal a rejeté l’appel avec modification puisqu’il était d’accord que le demandeur n’avait pas démontré qu’il était disponible durant la période du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017; mais qu’il l’avait fait en date du 20 décembre 2017. Le 25 juin 2018, le Tribunal a reçu du demandeur une demande de modification ou d’annulation de sa décision. 

Questions en litige

  1. Le demandeur répondait-il aux conditions pour que le Tribunal prenne en considération sa demande de modification ou d’annulation de sa décision?
  2. Dans l’affirmative, le demandeur a-t-il présenté des faits nouveaux, essentiels à la décision, sur lesquels le Tribunal peut se fonder pour modifier ou annuler sa décision, ou le Tribunal est-il convaincu que la décision a été rendue sans la connaissance d’un fait essentiel ou qu’elle était fondée sur une erreur concernant un fait essentiel?

Analyse

[4] Le Tribunal peut annuler ou modifier une décision si des faits nouveaux lui sont présentés, ou si le Tribunal est convaincu que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou qu’elle a été fondée sur une erreur relative à un fait essentiel aux termes de l’article 66(1)(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

Question en litige no 1 : Le demandeur répondait-il aux conditions pour que le Tribunal examine sa demande d’annulation ou de modification de sa décision? 

[5] Conformément à l’article 66(2) de la Loi sur le MEDS, une demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision. Chaque personne qui est visée par une décision peut seulement présenter une demande d’annulation ou de modification de cette décision aux termes de l’article 66(3) de la Loi sur le MEDS.

[6] Le Tribunal estime que le demandeur a satisfait aux conditions législatives requises pour que sa demande d’annulation ou de modification de la décision du Tribunal soit examinée. Le Tribunal a rendu sa décision le 12 mars 2018 et le demandeur a présenté sa demande le 24 juin 2018. Le demandeur a indiqué que la décision lui avait été communiquée le 22 mars 2018 et il a présenté sa demande environ trois mois plus tard. Le Tribunal conclut donc que la demande a été présentée durant l’année suivant la date à laquelle la décision lui a été communiquée, et le demandeur n’a présenté aucune autre demande d’annulation ou de modification.

Question en litige no 2 : Le demandeur a-t-il présenté des faits nouveaux, essentiels à la décision, à partir desquels le Tribunal peut annuler ou modifier sa décision, ou le Tribunal est-il convaincu que la décision a été rendue sans la connaissance d’un fait essentiel ou qu’elle était fondée sur une erreur concernant un fait essentiel?

[7] Pour que des faits soient considérés comme étant « nouveaux », ils doivent s’être produits après que la décision en cause a été rendue ou, s’ils se sont produits avant que la décision ne soit rendue, il faut démontrer que les prétendus faits nouveaux n’auraient pu être découverts par une partie prestataire faisant preuve de diligence. Enfin, les faits nouveaux doivent être déterminants pour la question à trancher (Canada (Procureur général) c Chan, A-185-94).

[8] Le demandeur a affirmé le 25 juin 2018 dans sa demande d’annulation ou de modification de la décision du Tribunal que pendant qu’il attendait que la décision relative à son appel soit rendue, il avait consulté son dossier Service Canada et avait découvert qu’il y avait des [traduction] « renseignements détaillés » de l’intimée indiquant que le 6 février 2018, sa demande avait été réévaluée et qu’il avait été décidé qu’on ne considérait plus qu’il n’avait pas été disponible à travailler durant la période du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017. Le demandeur a pris une capture d’écran de cette page de son dossier Service Canada (RAGD207). Le demandeur a aussi démontré que sur la capture d’écran de son dossier Service Canada, il y avait la même note datée du 22 mars 2018 disant que sa demande avait été réévaluée et qu’une décision avait été rendue (RAGD2-6).

[9] L’intimée fait valoir que lorsqu’elle a examiné l’information fournie par le demandeur, elle a déterminé qu’elle n’annulerait pas ou ne modifierait pas la décision initiale. Le Tribunal estime que l’intimée n’a pas concédé l’appel devant le Tribunal.

[10] Le Tribunal souligne que le critère comporte deux volets. La Cour d’appel fédérale a établi un critère en deux volets pour qu’une preuve soit admissible en tant que révélatrice de « faits nouveaux » dans l’arrêt Canada (Procureur général) c MacRae, 2008 CAF 82, au paragraphe 16 :

  1. 1. elle doit établir un fait [...] qui existait au moment de la première audience, mais ne pouvait être découvert avant celle-ci moyennant une diligence raisonnable (c’est le « critère de la possibilité de découverte »);
  2. 2. il doit être raisonnablement probable que cette preuve aurait influé sur la décision rendue à l’issue de la première audience (c’est le « critère du caractère substantiel »).

[11] Il doit y avoir des faits nouveaux et ceux-ci doivent être déterminants pour la question à trancher. Le Tribunal juge que le demandeur a présenté des faits nouveaux et que ceux-ci n’auraient pas pu être découverts par une partie demanderesse faisant preuve de diligence puisque le Tribunal estime que l’on n’aurait pas pu s’attendre à ce que le demandeur consulte son dossier Service Canada chaque jour pendant qu’il avait un appel devant le Tribunal. Toutefois, le Tribunal estime que le demandeur n’a pas satisfait au critère selon lequel il devait prouver que les faits nouveaux étaient déterminants dans l’affaire présentée au tribunal, qui était la question de sa disponibilité. Le Tribunal juge que le demandeur n’a pas fourni de faits nouveaux avec une preuve substantielle pour prouver sa disponibilité.

[12] Le demandeur n’a pas fourni d’éléments de preuve au Tribunal pour démontrer qu’il avait reçu un permis de travail de la Commission de l’immigration du Canada (CIC) pour la période du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017 ou que la CIC lui a envoyé un permis de travail avec une lettre précisant que son permis de travail était rétroactif au 12 juin 2017. Il est clair pour le Tribunal que le Tribunal ne peut pas annuler ou modifier sa décision étant donné que le demandeur n’a pas démontré que les faits nouveaux qu’il a fournis satisfont au critère selon lequel les faits nouveaux doivent être déterminants dans l’affaire présentée au tribunal. 

[13] En faisant référence à la décision de la Cour fédérale dans Kent, la Cour a affirmé que le critère du caractère substantiel n’est rempli que « si l’on peut raisonnablement croire que les faits présentés comme nouveaux auraient conduit à une décision autre ». Mazzotta c Canada (Procureur général), 2007 CAF 297, para 45. Le Tribunal estime que puisque ni l’intimée ni le demandeur n’a pu fournir d’autres éléments de preuve pour démontrer que le demandeur était disponible, on ne peut raisonnablement s’attendre à ce que les faits nouveaux présentés par le demandeur aient une incidence sur la décision en ce qui a trait à prouver la disponibilité du demandeur, ou à ce qu’ils permettent au Tribunal d’annuler ou de modifier sa décision. Le Tribunal juge que les faits nouveaux présentés n’ont pas satisfait au critère relatif aux faits nouveaux avec des preuves substantielles pour prouver sa disponibilité.

[14] Puisque le demandeur n’a fourni aucun fait nouveau ou essentiel, le Tribunal estime qu’il n’y a aucun fait nouveau à partir duquel le Tribunal pourrait annuler ou modifier sa décision. Pour la même raison, le Tribunal n’estime pas que la décision a été rendue en
l’absence d’un fait essentiel ou qu’elle a été fondée sur une erreur relative
à un tel fait.

[15] Le Tribunal aimerait souligner que même si un appel est interjeté devant le Tribunal, l’intimée n’est pas habilitée à examiner une décision qui est devant le Tribunal. Une fois qu’une décision de la Commission a été portée en appel, il est trop tard pour que la Commission modifie sa décision (Canada (Procureur général) c Wakelin, A-748-98).

[16] La Commission n’a pas expliqué pourquoi elle avait réexaminé sa décision et pourquoi dans son examen il était indiqué que le demandeur était disponible du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017. Elle n’a pas offert d’excuse si sa décision a été réexaminée par erreur, et elle n’a pas offert d’excuse si elle a commis une erreur en affirmant que le demandeur était disponible alors qu’il ne l’était pas dans son dossier Service Canada. 

[17] Le Tribunal a beaucoup de sympathie et d’empathie pour la situation personnelle du demandeur et sa frustration par rapport aux circonstances de ce processus. Toutefois, le Tribunal ne peut pas contourner, réécrire ou ignorer la Loi sur l’assurance-emploi ou le Règlement sur l’assurance-emploi même par compassion (Knee c Procureur général du Canada, 2011 CAF 301). Le Tribunal est tenu d’appliquer la Loi. 

[18] Le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve supplémentaires présentés par le demandeur comme des faits nouveaux ne peuvent pas être considérés comme des faits nouveaux étant donné qu’ils n’ont pas satisfait au critère en deux volets, et que la décision précédente ne peut être annulée ou modifiée étant donné que le demandeur n’a pas démontré qu’il était disponible du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017.

[19] Dans l’analyse finale, le demandeur n’a pas démontré qu’il possède des faits nouveaux qui sont déterminants dans la question de la disponibilité, et on doit s’attendre raisonnablement à ce que les faits nouveaux aient une incidence sur le résultat de l’audience précédente (« critère du caractère substantiel »). Le Tribunal ne peut pas annuler ou modifier sa décision du 12 mars 2018 étant donné que le demandeur n’a pas su satisfaire au critère du caractère substantiel.

Conclusion

[20] La demande d’annulation ou de modification est rejetée et le demandeur n’a pas droit au bénéfice des prestations pour la période du 12 juin 2017 au 19 décembre 2017.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 29 octobre 2018

Téléconférence

A. S., demandeur

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