Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée.

Aperçu

[2] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a découvert que la demanderesse, H. R. (prestataire), a reçu des prestations de maladie pendant deux semaines durant lesquelles elle recevait aussi son salaire en entier. Étant donné que cette rémunération n’a pas été déduite des prestations plus tôt, la Commission a établi un trop-payé. La prestataire a demandé une révision, mais la Commission a maintenu sa décision originale. L’appel de la prestataire devant la division générale a également été rejeté. La prestataire cherche maintenant à obtenir la permission d’en appeler et une prorogation du délai pour présenter sa demande de permission.

[3] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée. La prestataire n’a pas démontré une intention persistante d’en appeler, n’a pas fourni de motif raisonnable pour justifier le retard ni présenté une cause défendable qui a une chance de succès en appel. Il n’est donc pas dans l’intérêt de la justice d’accueillir l’appel tardif.

Questions en litige

[4] La demande de permission d’en appeler a-t-elle été présentée en retard?

[5] Si l’appel a été présenté en retard, la division d’appel devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire et proroger le délai de présentation de la demande de permission d’en appeler?

Analyse

Question en litige no 1 : La demande de permission d’en appeler a-t-elle été présentée en retard?

[6] Conformément à l’article 57(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la demande de permission d’en appeler doit être présentée selon les modalités prévues par règlement et dans les 30 jours suivant la date où la partie reçoit communication de la décision de la division générale.

[7] Le dossier ne contient aucune information qui confirmerait avec exactitude la date où la décision a véritablement été communiquée à la prestataire. Dans un cas semblable, l’article 19(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit qu’une décision est présumée avoir été communiquée 10 jours après la date à laquelle elle a été envoyée par la poste. La décision est datée du 16 juillet 2018 et a été transmise par la poste ordinaire conjointement à une lettre datée du même jour. La décision est donc présumée avoir été communiquée à la prestataire le 26 juillet 2018.

[8] La prestataire a appelé le Tribunal le 26 septembre 2018 pour signifier qu’elle porterait en appel la décision de la division générale, mais la division d’appel n’a pas reçu la demande de permission d’en appeler de la prestataire avant le 5 octobre 2018. Cela représente un délai de 71 jours à partir de la date où la décision est présumée avoir été communiquée à la prestataire, ce qui tombe bien au-delà du délai de 30 jours.

[9] Par conséquent, la demande de permission d’en appeler a été présentée en retard.

Question en litige no 2 : La division d’appel devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire et proroger le délai de présentation de la demande de permission d’en appeler?

[10] L’article 57(2) de la Loi sur le MEDS confère à la division d’appel le pouvoir discrétionnaire d’accorder un délai supplémentaire à une partie pour présenter une demande de permission d’en appeler. Bien que la division d’appel dispose de ce pouvoir, la Cour d’appel fédérale a exigé qu’elle l’exerce en considérant certains facteursNote de bas de page 1. Ces facteurs, que l’on appelle les facteurs de Gattellaro, sont les suivants :

  • le demandeur a manifesté l’intention persistante de poursuivre l’appel;
  • le retard a été raisonnablement expliqué;
  • la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie;
  • la cause est défendable.

[11] L’importance accordée à chacun des facteurs mentionnés ci-dessus peut varier selon l’affaire et, dans certains cas, d’autres facteurs seront pertinents. Selon la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada (Procureur général) c LarkmanNote de bas de page 2, le facteur primordial est l’intérêt de la justice.

[12] Dans sa demande de permission d’en appeler, la prestataire a seulement déclaré qu’elle avait été occupée durant l’été, quelques membres de sa famille ayant été hospitalisés, et que cela lui avait pris du temps pour mettre de l’ordre dans ses affaires et communiquer avec le Tribunal.

[13] Le Tribunal a écrit à la prestataire le 16 octobre 2018 et il lui a demandé d’expliquer la raison du retard et de fournir un motif d’appel. Dans la lettre, on lui suggérait de traiter de chacun des facteurs de Gattellaro mentionnés ci-dessus de la façon la plus détaillée possible. Aucune réponse n’a été reçue.

[14] Bien que la prestataire ait appelé le Tribunal le 26 septembre 2018, elle accusait déjà un retard de 64 jours à ce moment-là, et elle a attendu encore 5 jours avant de présenter sa demande de permission d’en appeler. Je ne suis pas convaincu que la prestataire a manifesté l’intention persistante de poursuivre son appel. Je ne suis également pas convaincu par la quantité de détails fournie dans l’explication de la prestataire. Selon moi, le fait que la prestataire a été occupée durant l’été ou que des membres de sa famille ont été hospitalisés ne laisse pas entendre que les circonstances aient été si urgentes ou accablantes qu’elles l’aient empêchée de présenter sa demande de permission d’en appeler en temps opportun. Elle a attendu près de deux mois et demi après le délai de 30 jours prévu pour présenter un appel. Ces facteurs, à savoir l’intention persistante de poursuivre l’appel et l’explication raisonnable pour justifier le délai, sont défavorables à l’octroi d’une prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler.

[15] Bien qu’un délai de deux mois et demi soit long, la Commission n’a pas laissé entendre qu’elle subirait un préjudice qui l’empêcherait de répondre à l’appel. J’estime que ce facteur est neutre dans l’ensemble.

[16] Le dernier facteur de Gattellaro à considérer est celui de savoir si l’affaire soulève une cause défendable. Une chance raisonnable de succès a été assimilée à une cause défendableNote de bas de page 3. À moins que je puisse conclure qu’il existe une cause défendable fondée sur un des moyens d’appel, l’appel n’aurait pas de chance raisonnable de succès, même si j’accordais la prorogation de délai et que j’accueillais la demande de permission d’en appeler.

[17] La prestataire n’a pas fourni ou expliqué les motifs de son appel dans sa demande de permission. Malgré la demande du Tribunal qu’elle clarifie ses motifs d’appel, elle ne l’a pas fait.

[18] Néanmoins, j’ai suivi les directives de la Cour fédérale établies dans des causes telles que Karadeolian c Canada (Procureur général)Note de bas de page 4, et j’ai examiné le dossier pour juger s’il existait des éléments de preuve que la division générale aurait pu ignorer ou mal interpréter en rendant sa décision. Je ne peux conclure qu’il est défendable qu’une telle erreur ait été commise.

[19] Selon moi, la prestataire n’a pas présenté une cause défendable selon laquelle la division générale aurait commis une erreur correspondant à un des moyens d’appels énumérés à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS. On peut en déduire que l’appel n’aurait pas de chance raisonnable de succès, même si la permission d’en appeler était accordée. Ce facteur est défavorable à l’octroi d’une prorogation de délai.

[20] Compte tenu des quatre facteurs de Gattellaro, je conclus qu’il n’est pas dans l’intérêt de la justice de permettre l’instruction de l’appel. La prestataire n’a pas démontré une intention persistante de poursuivre l’appel, fourni d’explication raisonnable justifiant son retard ni démontré qu’il existait une cause défendable sur le bien-fondé de son appel.

Conclusion

[21] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée.

 

Représentante :

H. R., non représentée

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