Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, J. A. (prestataire), a présenté une demande de prestation parentale au titre de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) en septembre 2017, alors qu’il s’occupait de son deuxième enfant. La demanderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a approuvé sa demande et des prestations ont été versées jusqu’en février 2018, lorsque son enfant a eu un an. Selon les renseignements qu’il avait reçus de la Commission, le prestataire ne s’attendait pas à ce que ses prestations cessent à ce moment-là et on lui a donc suggéré de présenter une demande de prestations régulières d’assurance-emploi (AE), ce qu’il a fait. Néanmoins, la Commission a rejeté sa demande de prestations d’AE parce que ses responsabilités quant aux soins de l’enfant faisaient en sorte que sa disponibilité pour travailler était limitée indûment.

[3] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant la division générale. En appel, le prestataire a soutenu qu’il aurait pu retourner au travail plus tôt et qu’il a subi des pertes financières en raison des renseignements inexacts fournis par la Commission et du délai de réception de la décision de la Commission concernant sa demande de prestations d’AE. La division générale a rejeté l’appel en concluant (en partie) que les renseignements inexacts et le délai de la Commission n’étaient pas pertinents dans le cadre de sa prise de décision.

[4] Le prestataire tente maintenant d’en appeler relativement à la décision de la division générale devant la division d’appel du Tribunal, mais il doit obtenir la permission avant de pouvoir aller de l’avant. Le prestataire semble admettre que la Loi sur l’AE a été appliquée correctement à sa demande de prestations. Par contre, il soutient que la division générale a commis une erreur en ne reconnaissant pas la façon dont le délai et les renseignements inexacts de la Commission ont contribué à ses pertes financières.

[5] Malheureusement pour le prestataire, j’ai conclu que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès, et la permission d’en appeler doit donc être refusée.

Questions en litige

[6] Je me suis penché sur les questions suivantes pour rendre la présente décision :

  1. Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence en ne reconnaissant pas la façon dont les renseignements inexacts et le délai de la Commission ont contribué aux pertes financières du prestataire?
  2. La division générale aurait-elle ignoré ou mal interprété un élément de preuve pertinent?

Analyse

Cadre juridique de la division d’appel

[7] Le Tribunal est formé de deux divisions dont les fonctions sont bien différentes. À la division d’appel, l’accent est mis sur la question de savoir si la division générale aurait commis une ou plusieurs des trois erreurs (ou moyens d’appel) énoncées à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social. Généralement, la division générale commet ces erreurs si elle :

  1. a) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a commis une erreur de compétence;
  2. b) a rendu une décision qui contient une erreur de droit;
  3. c) a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Les deux divisions se distinguent également du point de vue procédural. La plupart des causes devant la division d’appel suivent un processus en deux étapes : la permission d’en appeler et l’examen sur le fond. Cet appel est à l’étape de la permission d’en appeler, ce qui signifie qu’une permission doit être accordée afin que l’appel soit instruit. Il s’agit d’un obstacle préliminaire qui vise à éliminer les causes qui n’ont aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1. Le critère juridique auquel les parties demanderesses doivent satisfaire à cette étape est peu rigoureux : existe-t-il un motif défendable grâce auquel elles pourraient avoir gain de cause en appelNote de bas de page 2? Les parties demanderesses doivent démontrer que ce critère juridique a été satisfaitNote de bas de page 3.

Question en litige no 1 : Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence?

[9] Selon moi, il est évident que la division générale n’a pas commis d’erreur de compétence.

[10] La Commission semble admettre qu’elle a fourni des renseignements inexacts au prestataireNote de bas de page 4. Il fait également peu de doute que le prestataire s’est fié à ces renseignements à son détriment et que le problème s’est empiré en raison du temps que cela a pris à la Commission pour prendre une décision par rapport à sa demande de prestations régulières d’AE.

[11] Le prestataire fait maintenant valoir que la division générale aurait dû tenir compte de ces facteurs lorsqu’elle a pris sa décision, bien que je ne sois pas certain de qu’il veut dire par là. Veut-il dire que la Commission devrait compenser ses pertes, ou veut-il dire que les critères d’admissibilité énoncés dans la Loi sur l’AE devraient être appliqués avec souplesse à cause de sa situation? La division générale a évalué les deux scénarios et a conclu au paragraphe 6 de sa décision qu’elle ne pouvait accéder à la demande du prestataire :

[traduction]
Le fait de recevoir des renseignements inexacts de la part de la Commission ne donne pas le droit de déroger à l’application de la législation sur l’assurance-emploi (Canada (Procureur général) c Shaw, 2002 CAF 325). Lorsque je considère des questions liées à l’assurance-emploi, je suis tenu de respecter la loi et je ne peux pas refuser de l’appliquer, même si cela donnait un résultat plus équitable (Granger c Commission de l’emploi et de l’immigration, A-684-85). De plus, je n’ai pas la compétence d’évaluer si la Commission doit être blâmée d’avoir fourni des renseignements inexacts à l’appelant (Canada (Procureur général) c Romero, A-815-96).

[12] En retour, le prestataire s’appuie sur la lettre de mandat qui a été remise au président du Tribunal par le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement socialNote de bas de page 5. Cette lettre énonce que le président a la tâche d’établir des « normes de service et des mesures de rendement efficaces adaptées à la nature différente des programmes de prestations du Ministère et [d’]engager le Tribunal à améliorer constamment son efficience et son efficacité globales. »

[13] Je considère que l’argument du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. D’un côté, le paragraphe 6 de la décision de la division générale fournit une réponse complète aux arguments du prestataire et est bien ancré dans les autorités juridiques contraignantes. D’un autre côté, le prestataire s’appuie sur la lettre de mandat qui n’est pas une autorité contraignante et concerne le respect des délais par le Tribunal lorsqu’il rend des décisions, plutôt que par la Commission. Si le prestataire veut avoir une compensation en raison des renseignements inexacts qu’il a reçus et du mauvais service fourni par la Commission, il doit chercher ses mesures de réparation ailleursNote de bas de page 6.

[14] Comme je l’ai mentionné ci-dessus, le rôle de la division d’appel se limite à déterminer si la division générale a commis une des trois erreurs mentionnées à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS. En l’espèce, j’estime que l’argument du prestataire ne donne pas lieu à une cause défendable selon laquelle la division générale aurait commis une erreur de compétence. Par conséquent, je n’ai pas la compétence d’intervenir.

Question en litige no 2 : La division générale aurait-elle ignoré ou mal interprété un élément de preuve pertinent?

[15] Peu importe la conclusion ci-dessus, je suis conscient des décisions de la Cour fédérale dans lesquelles la division d’appel a reçu instruction de ne pas se limiter aux éléments écrits et de tenir compte de la question de savoir si la division générale pourrait avoir mal interprété ou avoir omis de tenir compte adéquatement de l’un des éléments de preuveNote de bas de page 7. Si tel est le cas, la permission d’en appeler devrait être normalement accordée, et ce, peu importe les problèmes techniques qui pourraient avoir été constatés dans la demande de permission d’en appeler.

[16] Après avoir examiné le dossier documentaire, écouté l’enregistrement sonore de l’audience devant la division générale, et examiné la décision faisant l’objet de l’appel, je suis convaincu que la division générale n’a ni ignoré ni mal interprété un élément de preuve pertinent. La question qui relevait de la compétence de la division générale était de savoir si le prestataire avait droit aux prestations au titre de la Loi sur l’AE. D’ailleurs, même le prestataire semble admettre que les dispositions de la Loi sur l’AE ont été appliquées correctement en l’espèceNote de bas de page 8.

[17] Le prestataire fait plutôt valoir que la division générale a ignoré les pertes qu’il a subies en raison des renseignements inexacts fournis par la Commission et du délai ultérieur avant que la Commission prenne une décision. Toutefois, pour les raisons exposées par la division générale, celle-ci ne pouvait pas tenir compte de ces facteurs lorsqu’elle a pris sa décision.

Conclusion

[18] Même si j’éprouve beaucoup de compassion à l’égard du prestataire en raison de sa situation, je conclus que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. En conséquence, je dois rejeter sa demande de permission d’en appeler.

Représentant :

J. A., non représenté

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