Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli sur la question de la semaine de chômage. L’appel est rejeté avec modifications sur les questions de la disponibilité et hors Canada.

Aperçu

[2] L’appelant a perdu son emploi en décembre 2017 et a reçu des prestations d’assurance-emploi à partir du 23 avril 2018. Il soutient avoir communiqué avec la Commission afin de la questionner sur les impacts d’un travail de consultant sur ses prestations d’assurance-emploi. L’appelant soutient qu’il ne s’agissait que d’une situation hypothétique pour laquelle il souhaitait obtenir de l’information. Néanmoins, la Commission l’informe alors qu’il est considéré comme n’étant pas en chômage à partir du 23 avril 2018 puisqu’il travaille à son compte.

[3] De plus, l’appelant informe la Commission qu’il est à l’extérieur du Canada dans le cadre d’une démarche d’emploi pour la période du 6 avril 2018 au 30 avril 2018. La Commission impose une inadmissibilité à l’appelant pour cette période en raison du fait qu’il est à l’extérieur du Canada et considère aussi qu’il n’est pas disponible pour travailler pour cette même période.

Questions en litige

Semaine de chômage

[4] L’appelant était-il considéré comme étant en chômage à partir du 23 avril 2018 ?

Hors Canada

[5] L’appelant était-il admissible aux prestations d’assurance-emploi malgré le fait qu’il se trouvait à l’extérieur du Canada du 6 au 30 avril 2018 ?

Disponibilité

[6] L’appelant était-il disponible à travailler du 6 au 30 avril 2018 ?

Analyse

Question en litige : L’appelant était-il considéré comme étant en chômage à partir du 23 avril 2018 ?

[7] Le Tribunal doit déterminer si l’appelant était considéré en chômage. Pour ce faire, le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :

  • L’appelant était-il un travailleur indépendant ?
  • Si oui, il est présumé avoir travaillé une semaine entière de travail et ne peut être en chômage. L’appelant a-t-il repoussé cette présomption en démontrant que le travail qu’il effectuait était dans une mesure si limitée qu’il ne pouvait constituer son principal moyen de subsistance ?

L’appelant était-il un travailleur indépendant ?

[8] Le Tribunal est d’avis que l’appelant n’est pas considéré comme étant un travailleur indépendant puisqu’il n’exploite pas une entreprise.

[9] Lorsqu'un assuré qui remplit les conditions requises formule une demande initiale de prestations, une période de prestations est établie à son profit et des prestations lui sont payables pour chaque semaine de chômage comprise dans la période de prestations (Loi sur l’assurance-emploi (« LAE »), art. 9).

[10] Une semaine de chômage est une semaine pendant laquelle un prestataire n'effectue pas une semaine entière de travail (LAE, art. 11).

[11] Un prestataire est considéré comme ayant effectué une semaine entière de travail lorsque, durant la semaine, il exerce un emploi à titre de travailleur indépendant ou exploite une entreprise soit à son compte, soit à titre d’associé ou de coïntéressé, ou lorsque, durant cette même semaine, il exerce un autre emploi dans lequel il détermine lui-même ses heures de travail (Règlement sur l’assurance-emploi (« RAE »), paragr. 30 (1)).

[12] Plus précisément, un travailleur indépendant s’entend de tout particulier qui exploite ou exploitait une entreprise ou de tout employé qui n’exerce pas un emploi assurable c’est-à-dire, une personne à l’emploi d’une personne morale qui contrôle plus de 40% des actions avec droit de vote de celle-ci (RAE, paragr. 30 (5) et LAE, alinéa 5 (2) b)).

[13] L’appelant a présenté une demande d’assurance-emploi dans laquelle il indique ne pas être un travailleur indépendant (GD3-32). Il soutient être en recherche active d’emploi depuis le 4 décembre 2017 et indique qu’il ne fait aucun travail pouvant lui procurer une rémunération. Il soutient qu’il n’est pas un travailleur indépendant.

[14] Le Tribunal fait face à une contradiction pour laquelle il doit trancher. En effet, d’un côté, la Commission considère l’appelant à titre de travailleur indépendant alors que l’appelant lui-même indique ne jamais avoir travaillé à titre de travailleur indépendant.

[15] Le Tribunal constate d’abord qu’aucun enregistrement d’entreprise au nom de l’appelant n’apparaît au dossier.

[16] La Commission soutient que la preuve au dossier démontre que le prestataire ne peut être considéré en chômage à compter du 23 avril 2018. Même si le prestataire n’exploite pas d’entreprise enregistrée, il attend l’offre que l’employeur international lui fera. Le prestataire affirme qu’il a beaucoup investi et qu’il ne veut pas se désister, lorsqu’il aura une offre, il va négocier avec eux. Son but est de devenir consultant indépendant pour une entreprise internationale qui viendrait s’établir au Canada. Il s’est rendu au Maroc du 6 au 30 avril 2018 pour y rencontrer le président et le directeur général. Il a assisté à deux conférences à cet endroit. Il a défrayé les coûts de son voyage et du prix pour assister aux conférences.

[17] Pour sa part, l’appelant a témoigné à l’effet qu’il était en démarchage avec une entreprise internationale qui souhaitait ouvrir une filiale au Canada. Par conséquent, l’appelant a effectué un long processus d’embauche pour l’entreprise. Il précise qu’il s’agissait d’un emploi salarié pour l’entreprise, mais croyait qu’il pourrait y avoir une période de transition, pendant la mise en place de l’entreprise. Pendant cette transition, il aurait pu avoir l’option de travailler à titre de travailleur indépendant. Il soutient qu’il a donc communiqué avec la Commission afin de s’informer du programme de soutien pour le travail autonome. Il indique que les informations qu’il a données à la Commission étaient donc hypothétiques puisqu’aucun travail indépendant n’était intervenu. Il donne aussi l’exemple des coûts investis dans l’entreprise en indiquant que le 9 000$ auquel la Commission réfère correspond aux frais de voyage au Maroc pour sa famille et lui.

[18] Le Tribunal prend aussi en considération les recherches d’emploi effectuées par l’appelant (GD5). L’appelant a confirmé avoir trouvé un emploi qu’il a débuté le 26 novembre 2018 (GD6).

[19] Le Tribunal prend en considération le fait que l’appelant a confirmé avoir passé plusieurs heures pour répondre aux exigences de l’employeur international. Il indique qu’il croyait que l’offre se concrétiserait, mais que l’employeur a remis à plus tard l’ouverture d’une filiale au Canada.

[20] Le Tribunal prend en considération que l’appelant a livré un témoignage détaillé sur la situation. De plus, mis en perspective avec son témoignage, le Tribunal note que le rapport de conversation avec la Commission concorde avec le témoignage de l’appelant (GD3-56/57). De plus, il n’y a pas d’élément de preuve supportant le fait que l’appelant exploitait une entreprise ou travaillait à titre de travailleur indépendant pendant cette période. Ainsi, le Tribunal accorde plus de poids au témoignage de l’appelant.

[21] Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’appelant n’exerce pas un emploi à titre de travailleur indépendant ou n’exploite pas une entreprise soit à son compte, soit à titre d’associé ou de coïntéressé. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’appelant n’est pas un travailleur indépendant au sens de l’article 30 du Règlement sur l’assurance-emploi.

[22] Ainsi, comme l’appelant n’est pas considéré comme une personne qui exerce un emploi à titre de travailleur indépendant ou qui exploite une entreprise, selon le paragraphe 30 (5) du Règlement, la présomption selon laquelle l’appelant travaille une semaine entière de travail ne s’applique pas. L’appelant est donc admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[23] Le Tribunal prend en considération les éléments soulevés par la Commission selon lesquels le prestataire ne cherche pas dans d’autres domaines d’emploi et n’applique pas s’il n’a pas toutes les qualifications, ne postule pas s’il a trop de qualifications, car les employeurs ont peur qu’il quitte par la suite et n’applique pas sur des postes à temps partiel, car il n’y a pas d’assurances médicale et dentaire. De plus, la Commission considère que le prestataire n’applique pas non plus pour des postes à temps plein qui n’offrent pas ces assurances, n’a pas vu d’emploi pour lequel il aurait pu appliquer en 2018 et il attend une réponse pour son travail de consultant, il se donne du temps pour chercher un emploi.

[24] Or, le Tribunal est d’avis qu’il s’agit d’éléments concernant la disponibilité d’un prestataire et non en lien avec le fait qu’il exploite ou non une entreprise. Comme la Commission n’a pas rendu de décision en lien avec la disponibilité de l’appelant, à l’extérieur de la période pour laquelle il se trouvait à l’extérieur du Canada, le Tribunal est d’avis qu’il n’a donc pas à se pencher sur la question de la disponibilité de l’appelant à l’extérieur de la période en litige.

Question en litige no 2 : L’appelant était-il admissible aux prestations d’assurance-emploi malgré le fait qu’il se trouvait à l’extérieur du Canada du 6 au 30 avril 2018 ?

[25] Sauf dans les cas prévus par règlement, le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour toute période pendant laquelle il est à l’étranger (LAE, paragr. 37 b)).

[26] L’une des circonstances pour lesquelles un prestataire peut être admissible à des prestations d’assurance-emploi est celle d’assister à une véritable entrevue d’emploi pour une période ne dépassant pas 7 jours consécutifs (RAE, 55 (1) e))

[27] « La « période » à l'alinéa 37b) de la Loi est la période, exprimée en jours complets, durant laquelle le prestataire était à l'étranger. À cette fin, un jour complet ne correspond pas nécessairement à un jour civil. Il peut correspondre à une période continue de 24 heures qui chevauche deux jours civils. » (Canada (Procureur général) c Picard, 2014 CAF 46).

[28] L’appelant explique qu’il s’est rendu au Maroc afin de rencontrer le président d’une entreprise avec lequel il était en démarche d’emploi pour l’ouverture d’une filiale au Canada. Il ajoute en avoir aussi profité pour visiter sa famille.

[29] La Commission soutient que le prestataire ne pouvait recevoir de prestations pour la période du 6 au 30 avril 2018.

[30] Néanmoins, la Commission recommande au Tribunal de modifier la période d’inadmissibilité pour l’absence du pays. La Commission indique que l’inadmissibilité dans ce dossier devrait débuter le 9 avril et non le 6 avril 2018. La Commission tient à préciser que ce changement n’a pas d’incidence sur le paiement de prestations d’assurance-emploi pour cette journée, car la demande de renouvellement du prestataire est établie au 22 avril 2018.

[31] Le Tribunal prend en considération le fait que l’appelant a indiqué qu’il devait assister à une entrevue d’embauche. Il a donc été invité à assister à deux conférences où il a pu discuter avec le président de l’entreprise. Le Tribunal constate que l’appelant n’a pas fourni de document en lien avec une convocation formelle à une entrevue. Le Tribunal est d’avis qu’il s’agissait plutôt d’une rencontre informelle. Bien que le Tribunal comprenne que cette rencontre aurait pu déboucher sur une offre d’emploi, il est d’avis que cela ne rencontre pas les exceptions prévues au Règlement afin qu’une personne soit admissible au bénéfice des prestations alors qu’elle se trouve à l’étranger. En effet, le Règlement réfère à « une véritable entrevue d’emploi » et le Tribunal ne peut faire cette détermination dans le présent cas.

[32] Néanmoins, le Tribunal prend en considération que l’appelant a indiqué avoir quitté le pays vers 19h00 le 6 avril 2018 et y être revenu vers 12h00 le 30 avril 2018. Ainsi, le Tribunal est d’avis, tel que le recommande la Commission, que l’appelant était admissible aux prestations d’assurance-emploi le 6 et le 30 avril 2018 (Picard).

[33] Par conséquent, le Tribunal est satisfait que l’inadmissibilité pour le hors Canada doit être imposée du 7 au 29 avril 2018 puisque l’appelant se trouvait à l’extérieur du Canada pendant cette période.

[34] L’appel est rejeté avec modifications sur cette question.

Question en litige no 3 : L’appelant était-il disponible à travailler du 6 au 30 avril 2018 ?

[35] Un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable (Loi sur l’assurance-emploi (LAE, alinéa 18 (1) a)).

[36] Il incombe aux prestataires de prouver leur disponibilité et un prestataire d’assurance-emploi doit s’assurer d’être disponible en tout temps. Il sera déclaré inadmissible si son comportement et ses dires ne sont pas suffisamment convaincants pour démontrer une réelle disponibilité à l’emploi (Canada (PG) c Cornelissen-O’Neil, A-652-93).

[37] Pour ce faire, la disponibilité doit être regardée en fonction de trois facteurs : le désir du prestataire à retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui est offert, les efforts nécessaires fournis pour se trouver un emploi convenable et le fait de ne pas établir de conditions personnelles pouvant limiter les chances de retourner au travail (Faucher A-56-96, A-57-96).

[38] La Commission a statué que le prestataire n’était pas disponible pour travailler du 6 au 30 avril 2018. Il était à l’extérieur du pays pour rencontrer un employeur international afin de devenir consultant indépendant au Canada. De plus, il était en visite chez ses parents.

[39] Néanmoins, la Commission recommande au Tribunal de modifier la période d’inadmissibilité. Pour la journée de départ, le prestataire a quitté le 6 avril 2018 à 19 h. La Commission considère qu’il était disponible et prêt à travailler. L’inadmissibilité devrait débuter le 9 avril 2018 et non le 6 avril 2018, telle qu’imposée. La Commission tient à préciser que ce changement n’a pas d’incidence sur le paiement de prestations d’assurance-emploi pour cette journée, car la demande de renouvellement du prestataire est établie au 22 avril 2018. Pour la journée du retour, le prestataire est revenu le 30 avril 2018 à midi. La Commission considère que pour cette journée, il était non disponible. Le vol arrivait à 12 h, il devait passer les douanes, recevoir ses bagages, faire la route pour retourner à son domicile, il ne pouvait pas travailler cette journée-là.

[40] Pour sa part, l’appelant soutient qu’il se trouvait à l’extérieur du Canada afin de rencontrer le président d’une entreprise internationale qui souhaitait ouvrir une filiale au Canada. L’appelant précise qu’il s’agissait bien d’un emploi de salarié et non d’un emploi de travailleur autonome. De plus, l’appelant a indiqué qu’il aurait pu être rejoint et être de retour au pays dans un délai de 48 heures (page GD3-61).

[41] Ainsi, le Tribunal doit déterminer si l’appelant était disponible à travailler. Pour ce faire, le Tribunal doit répondre aux trois critères établis par l’arrêt Faucher. Néanmoins, dans le présent cas, la question déterminante est de savoir si l’appelant impose des conditions personnelles pouvant limiter ses chances de retourner au travail.

L’appelant établit-il des conditions personnelles pouvant limiter les chances de retourner au travail ?

[42] Le Tribunal est d’avis que l’appelant impose des conditions personnelles pouvant limiter ses chances de retourner au travail.

[43] La disponibilité d’un prestataire ne peut être subordonnée à des conditions personnelles particulières ou des restrictions trop contraignantes qui limiteraient ses chances de se trouver un emploi (Canada (Procureur général) c Gagnon, 2005 CAF 321).

[44] L’appelant confirme être à l’étranger pour une entrevue d’embauche et pour visiter sa famille. Tel que déterminé précédemment, l’appelant n’a pas démontré qu’il avait une « véritable entrevue d’emploi ». De plus, l’appelant a confirmé qu’il profitait de son séjour à l’étranger pour visiter sa famille.

[45] Bien que l’appelant soutienne qu’il aurait pu être de retour dans un délai de 48 heures, le Tribunal rappelle que la Loi précise qu’un appelant doit démontrer sa disponibilité pour tout jour ouvrable. Ainsi, le Tribunal est d’avis que l’appelant n’était pas disponible à travailler pendant son séjour à l’étranger.

[46] Le Tribunal est néanmoins d’avis que le jour du départ, l’appelant était disponible à travailler puisqu’il n’a quitté que vers 19h00. De plus, le Tribunal est en accord avec la position de la Commission selon laquelle l’appelant n’était pas disponible à travailler le jour de son retour au Canada puisqu’il est arrivé à 12h00 et qu’il faut prendre en considération les délais causés par les douanes et le retour à son domicile.

[47] Par conséquent, le Tribunal est d’avis, en prenant en considération la preuve et les observations présentées par les parties, que sur une balance des probabilités, l’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible à travailler au sens de l’alinéa 18 (1) a) de la Loi pour la période du 7 au 30 avril 2018 puisqu’il imposait des restrictions personnelles sur sa disponibilité en se trouvant à l’extérieur du Canada.

[48] L’appel est rejeté avec modifications sur cette question.

Conclusion

[49] L’appel est accueilli en partie.

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

17 décembre 2018

Vidéoconférence

H. B., appelant

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