Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] R. D. (prestataire) a présenté sa demande initiale de prestations d’assurance-emploi (AE) en octobre 2017. À la suite d’une enquête qu’elle a effectuée, la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a refusé de verser ses prestations au prestataire parce qu’il a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 1. Le prestataire a contesté la décision initiale rendue par la Commission, mais celle-ci a maintenu sa décision après révision. Le prestataire a ensuite porté la décision de la Commission en appel devant la division générale du Tribunal, mais celle-ci a rejeté l’appel.

[3] Le prestataire souhaite maintenant interjeter appel de la décision rendue par la division générale auprès de la division d’appel, mais il a besoin d’obtenir la permission d’en appeler pour que le dossier aille de l’avant. En résumé, le prestataire soutient que ses collègues ont comploté contre lui, qu’il a été victime d’une grave injustice et que le Tribunal est corrompu. Malheureusement pour le prestataire, toutefois, j’ai conclu que cet appel n’a aucune chance raisonnable de succès, ce qui signifie que je dois rejeter cette demande de permission d’en appeler.

Questions en litige

[4] J’ai mis l’accent sur les questions suivantes pour rendre la présente décision :

  1. Est-ce que l’un ou l’autre des arguments du prestataire s’inscrit dans un moyen d’appel reconnu et, dans l’affirmative, constitue un motif défendable grâce auquel l’appel pourrait être accueilli?
  2. Est-ce que la division générale a négligé ou mal interprété des éléments de preuve pertinents?

Analyse

Cadre juridique de la division d’appel

[5] Le Tribunal est formé de deux divisions dont les fonctions sont bien différentes. À la division d’appel, l’accent est mis sur la question de savoir si la division générale aurait commis une ou plusieurs des trois erreurs (ou moyens d’appel) énoncées à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). De manière générale, les erreurs pertinentes concernent la question de savoir si la division générale :

  1. a) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a commis une erreur en matière de compétence;
  2. b) a rendu une décision qui contient une erreur de droit;
  3. c) a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Les deux divisions se distinguent également du point de vue procédural. La plupart des causes devant la division d’appel suivent un processus en deux étapes : la permission d’en appeler et l’examen sur le fond. Cet appel est à l’étape de la permission d’en appeler, ce qui signifie qu’une permission doit être accordée afin que l’appel soit instruit. Il s’agit d’un obstacle préliminaire qui vise à éliminer les causes qui n’ont aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2. Le critère juridique auquel les parties demanderesses doivent satisfaire à cette étape est peu rigoureux : est-il possible de soutenir que l’appel a une chance de succèsNote de bas de page 3?

Question en litige no 1 : Est-ce que l’un ou l’autre des arguments du prestataire s’inscrit dans un moyen d’appel reconnu et, dans l’affirmative, constitue un motif défendable grâce auquel l’appel pourrait être accueilli?

[7] Je résumerais les arguments du prestataire contenus dans sa demande de permission d’en appeler comme s’inscrivant dans les sujets suivants :

  1. Le prestataire a été victime d’un plan prémédité visant à le faire congédier parce qu’il venait des Maritimes et qu’il avait besoin de moins d’heures pour être admissible aux prestations d’AE. Même son délégué syndical lui a fourni de mauvais renseignements et ce faisant, l’a empêché de présenter un grief contre son congédiement.
  2. Le contremaître du prestataire n’avait pas suivi les procédures appropriées et, ce faisant, a permis au prestataire d’être critiqué par des personnes qui n’avaient aucun droit de le faire, et ce, malgré le fait qu’il n’y avait eu aucune autre plainte concernant la qualité de son travail. Le prestataire avait donc des raisons d’agir de la façon dont il l’a fait et il n’aurait pas dû être congédié pour son comportement.
  3. Le Tribunal est une organisation corrompue et conçue pour rejeter 75 % des appels concernant l’AE.

[8] La division générale a rédigé une longue décision dans laquelle elle aborde des éléments de preuve liés aux deux premiers points du prestataire décrits ci-dessus. Le prestataire conteste maintenant la conclusion de la division générale, mais il n’a pas précisé quelle erreur la division générale pourrait avoir commise lorsqu’elle est arrivée à cette conclusion.

[9] La division d’appel n’est pas une instance où le prestataire peut plaider de nouveau sa cause dans l’espoir que la preuve soit appréciée en sa faveurNote de bas de page 4. Le prestataire aurait dû, à tout le moins, fournir certains détails concernant les prétendues erreurs commises par la division générale et la façon dont ces erreurs s’inscrivent dans l’un des trois moyens d’appel décrits plus hautNote de bas de page 5. Le Tribunal a expliqué cela au prestataire dans ses lettres datées du 25 octobre, du 2 novembre et du 19 novembre 2018, ainsi que dans le formulaire de lAvis d’appelNote de bas de page 6. Cependant, le prestataire n’a soulevé aucune erreur pertinente dans la décision de la division générale, et aucune erreur ne me paraît évidente d’emblée.

[10] Le troisième argument soulève des préoccupations relatives à la justice naturelle, mais il s’agit d’une accusation très grave qui met en doute l’intégrité du Tribunal dans son ensemble ainsi que celle de ses membres. Plus spécifiquement, le prestataire prétend que le Tribunal a été créé avec un système de quotas conçu pour refuser 75 % des causes dont il est saisi.

[11] La jurisprudence exige que les allégations sérieuses comme celles-ci soient soulevées à la première occasion et qu’elles soient étayées par une preuve, mais le prestataire n’a rien fait de celaNote de bas de page 7. En effet, le prestataire s’est plaint à la division générale avant et après l’audience au sujet du rythme auquel le Tribunal annule les décisions de la Commission. Toutefois, il n’a fourni aucune preuve pour étayer ses arguments et lorsqu’il a répondu à une question de la membre de la division générale, le prestataire a précisé qu’il ne soulevait pas une allégation de partialité contre le TribunalNote de bas de page 8. À mon avis, la jurisprudence empêche donc le prestataire de soulever ces arguments à cette étape-ci.

[12] Par conséquent, les arguments du demandeur n’ont aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige no 2 : Est-il défendable que la division générale a ignoré ou mal interprété une preuve pertinente?

[13] Peu importe la conclusion ci-dessus, je suis conscient des décisions de la Cour fédérale dans lesquelles la division d’appel a reçu comme directive de ne pas se limiter aux éléments écrits et d’apprécier la question de savoir si la division générale pourrait avoir mal interprété ou avoir omis de tenir compte adéquatement de l’un des éléments de preuveNote de bas de page 9. Si tel est le cas, la permission d’en appeler devrait normalement être accordée, et ce, peu importe les problèmes techniques qui pourraient avoir été constatés dans la demande de permission d’en appeler.

[14] Après avoir examiné le dossier documentaire, écouté l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale, et examiné la décision faisant l’objet de l’appel, je suis convaincu que la division générale a ni ignoré ni mal interprété un élément de preuve pertinent.

[15] Au contraire, la division générale a écouté la cause entière du prestataire et elle a apprécié attentivement ses éléments de preuve et ses arguments. En effet, lorsque j’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale, j’ai notamment relevé la patience et le professionnalisme dont a fait preuve la membre de la division générale tout au long de l’audience. En effet, durant l’audience de la division générale, le prestataire a décrit le membre du Tribunal comme étant une personne d’une grande intégrité et avec qui il est facile de parler.

Conclusion

[16] Je compatis énormément avec la situation très difficile dans laquelle se trouve le prestataire et je comprends la déception qu’il a dû ressentir après avoir lu la décision de la division générale. Toutefois, après avoir conclu que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès, je n’ai d’autre choix que de rejeter sa demande de permission d’en appeler.

Représentant :

R. D., non représenté

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