Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler à la division d’appel.

Aperçu

[2] Le défendeur, P. C. (prestataire), était un salarié à l’essai et devait payer des cotisations syndicales afin de travailler sur le chantier, mais il n’était pas encore membre du syndicat puisque 45 jours civils après sa date d’embauche devaient s’écouler avant qu’il puisse en devenir membre. Avant ce délai, la convention collective ne s’appliquait pas au prestataire, et la compagnie pouvait décider durant ces 45 jours si elle voulait le garder comme employé. L’employeur participait à des négociations avec le syndicat et, le jour même où le syndicat a tenu son vote de grève, l’employeur a congédié le prestataire à la fin de son quart de travail, invoquant dans son relevé d’emploi un manque de travail comme raison de sa cessation d’emploi. Le syndicat a voté en faveur de la grève et a déclenché la grève le jour suivant la cessation d’emploi du prestataire.

[3] La demanderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), a statué que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi après avoir conclu qu’il avait [traduction] « perdu son emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectifNote de bas de page 1. » Le prestataire a demandé une révision de la décision, mais la Commission a confirmé sa décision originale. Le prestataire a interjeté appel de la décision de révision à la division générale.

[4] La division générale a conclu que la perte d’emploi du prestataire ne découlait pas d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif. Le prestataire avait été mis à pied avant l’arrêt de travail. Le Tribunal a donc conclu que le prestataire s’était retrouvé au chômage avant l’arrêt de travail causé par le conflit collectif et qu’il n’était pas inadmissible aux prestations conformément aux dispositions de l’article 36 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[5] La Commission veut maintenant obtenir la permission d’appeler de la décision de la division générale auprès de la division d’appel.

[6] Le Tribunal doit décider si la Commission a soulevé une erreur révisable commise par la division générale et grâce à laquelle elle pourrait avoir gain de cause en appel.

[7] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler puisque l’appel de la Commission n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La Commission soulève-t-elle une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont les suivantes : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond. C’est une première étape que le prestataire doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui dont il devra s’acquitter à l’audience relative à l’appel sur le fond. À l’étape de la demande permission d’en appeler, le prestataire n’a pas à prouver sa thèse, mais doit établir que son appel a une chance raisonnable de succès. En d’autres mots, il doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a eu erreur révisable pouvant lui donner gain de cause en appel.

[11] Ainsi, avant d’accorder la permission d’en appeler, le Tribunal doit être convaincu que les motifs de l’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel susmentionnés et qu’au moins l’un de ces motifs confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[12] Pour ce faire, le Tribunal doit déterminer, conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS, s’il existe une question de principe de justice naturelle, de compétence, de droit ou de fait dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision de la division générale qui est en cause.

Question en litige : La Commission soulève-t-elle une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

[13] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit pour l’application de l’article 58(1)(b) de la Loi sur le MEDS et qu’elle a mal appliqué la jurisprudence en concluant que le prestataire n’avait pas perdu son emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif.

[14] Selon la preuve non contestée, le prestataire n’était pas membre du syndicat et n’a pas participé au vote ayant déclenché la grève. Il était obligé de payer des cotisations syndicales pour travailler sur le chantier mais pouvait seulement devenir membre du syndicat 45 jours après son embauche. Le 26 mars 2018, il a été informé de sa mise à pied avant la fin de son quart de travail, et il a travaillé jusqu’à la fin de son quart, à 17 h, le 26 mars 2018. Il avait été embauché le 5 mars 2018, et le délai de 45 jours n’était donc toujours pas échu au moment de sa mise à pied. Il a témoigné qu’on lui avait dit, quand il avait quitté le chantier, qu’il ne pouvait pas revenir travailler. La grève a débuté à 0 h 30 le 27 mars 2018.

[15] La division générale a conclu que la perte d’emploi du prestataire n’était pas attribuable à un arrêt de travail dû à un conflit collectif puisque le prestataire avait été mis à pied avant l’arrêt de travail. Par conséquent, la division générale a jugé que le prestataire s’était retrouvé sans emploi avant l’arrêt de travail causé par un conflit collectif et qu’il n’était pas inadmissible aux prestations conformément à l’article 36 de la Loi sur l’AE.

[16] La preuve étaye sans contredit la conclusion de la division générale selon laquelle le prestataire a perdu son emploi parce qu’il avait été mis à pied en prévision d’un arrêt de travail, et non en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif. Il n’était pas membre du syndicat lorsque la grève a commencé et, comme il avait été mis à pied, il n’a pas participé à la grève.

[17] Selon les décisions de la Cour d’appel fédérale ayant été citées par la division générale, des employés qui sont mis à pied en prévision d’une grève ne peuvent se voir refuser des prestations conformément à la Loi sur l’AENote de bas de page 2.

[18] Après révision du dossier d’appel, de la décision de la division générale et des arguments avancés par la Commission à l’appui de sa demande de permission d’en appeler, le Tribunal conclut que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. La Commission n’a invoqué aucun motif qui se rattache aux moyens d’appel susmentionnés et qui pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

Conclusion

[19] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler à la division d’appel.

Représentante :

Louise LaViolette, représentante de la demanderesse

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