Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. L’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé à prendre congé de son emploi.

Aperçu

[2] L’appelant travaillait pour X en tant qu’employé occasionnel lorsqu’il a été congédié le 10 août 2018. L’employé a aussi travaillé à temps partiel pour X (« X » ou « employeur »). Le 22 août 2018, l’appelant a pris congé de son poste auprès de X à X pour commencer ses études à l’Université du X à X.

[3] L’appelant a présenté une demande de prestations régulières d’assurance‑emploi à la Commission de l’assurance-emploi du Canada. La Commission a exclu le prestataire du bénéfice des prestations parce qu’elle a déterminé que l’appelant avait quitté volontairement son emploi chez X sans justification. À la suite d’une demande de révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. L’appelant a interjeté appel de cette décision auprès du Tribunal.

Questions préliminaires

[4] La Commission concède l’appel concernant l’exclusion de l’appelant qui aurait résulté du fait que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification, conformément à l’article 30 de la Loi sur l’assuranceemploi (Loi). Cependant, la Commission a soumis des arguments écrits pour appuyer la position selon laquelle l’appelant n’est pas admissible au bénéfice des prestations conformément à l’article 32 de la Loi pour avoir pris volontairement un congé de son emploi sans justification.

[5] Compte tenu du fait que la Commission a concédé la décision découlant de la révision, le Tribunal ne se prononcera pas sur la décision découlant de la révision. Le Tribunal, conformément au pouvoir que lui confère l’article 54(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, rendra la décision que la Commission aurait dû rendre.

Questions en litige

[6] Le Tribunal doit trancher les questions suivantes :

  1. L’appelant a-t-il pris volontairement un congé de son emploi chez X?
  2. Dans l’affirmative, l’appelant était-il fondé à prendre volontairement un congé parce qu’aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à lui compte tenu de l’ensemble des circonstances?

Analyse

[7] La Loi prévoit les situations dans lesquelles les prestataires seront exclus du bénéfice des prestations et d’autres situations dans lesquelles les prestataires seront inadmissibles au bénéfice des prestations.

[8] Si le prestataire quitte volontairement son emploi pendant la période de référence, sans justification, le prestataire sera exclu du bénéfice des prestations (articles 29 et 30 de la Loi). Dans ces situations, les prestataires ne peuvent pas recevoir des prestations étant donné que toutes les heures assurables préalables au départ volontaire ne sont pas considérées aux fins de l’assurance-emploi.

[9] Cependant, si un prestataire prend volontairement un congé sans justification de son emploi, le prestataire sera uniquement inadmissible au bénéfice des prestations de façon temporaire (article 32 de la Loi), par opposition à une exclusion du bénéfice des prestations plus permanente. L’article 32(2) de la Loi énonce que, selon le cas, l’inadmissibilité dure jusqu’à ce que le prestataire reprenne son emploi; perde ou quitte volontairement son emploi; ou jusqu’à ce qu’il cumule chez un autre employeur, depuis le début de la période de congé, le nombre d’heures d’emploi assurable exigé pour déposer une nouvelle demande. Un congé, aux termes de la Loi, existe lorsque la période de congé a été autorisée par l’employeur et qu’il y a entente quant à la date de reprise d’emploi.

[10] C’est pourquoi il est essentiel de déterminer les circonstances entourant le départ de l’appelant de son emploi comme point de départ à l’analyse de cette affaire.

Question en litige no 1 : L’appelant a-t-il pris volontairement un congé de son emploi chez X?

[11] Le Tribunal juge que l’appelant a pris volontairement un congé de son emploi chez X.

[12] L’appelant a affirmé dans son témoignage que lorsqu’il a été mis à pied de X, il a travaillé des heures excédentaires à son emploi à temps partiel chez X jusqu’à ce qu’il quitte pour commencer son baccalauréat à l’Université du X. L’appelant a affirmé dans son témoignage qu’il n’a pas quitté volontairement son emploi chez X, mais qu’il a plutôt pris congé. L’employeur a confirmé que l’appelant était en congé autorisé afin qu’il puisse fréquenter l’école à X.

[13] Le dossier montre que l’employeur et l’appelant s’attendaient initialement à ce que l’appelant retourne au travail après les vacances de Noël. L’appelant a informé le Tribunal qu’il n’est pas retourné chez X en décembre parce que X n’avait pas d’heures de travail à lui offrir. L’appelant a affirmé dans son témoignage que le gérant du X et lui avaient convenu qu’il retournerait travailler chez X après la fin de sa première année d’études, qui est prévue pour la fin d’avril 2019.

[14] Le Tribunal estime que l’appelant a pris volontairement un congé de son emploi chez X. Il existe une entente entre X et l’appelant, au terme de laquelle l’appelant est loin du lieu de travail, en congé autorisé. Cet arrangement n’est pas contesté. Même si la date précise à laquelle l’appelant reprendra son emploi n’a pas encore été établie, l’appelant et l’employeur ont convenu du moment où l’appelant reprendra son emploi, soit à la fin d’avril 2019. Compte tenu du contexte de l’entente entre l’employeur et l’appelant, le Tribunal ne juge pas que l’absence d’une date précise de retour au travail est fatale à l’application de l’article 32 de la Loi.

[15] Par conséquent, le Tribunal juge que la Commission a établi, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant a pris volontairement un congé de son emploi chez X.

Question en litige no 2 : L’appelant était-il fondé à prendre volontairement un congé parce qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable compte tenu de l’ensemble des circonstances?

[16] Le Tribunal juge que l’appelant n’était pas fondé à prendre volontairement un congé de son emploi.

[17] Pour établir une justification pour prendre volontairement un congé de son emploi, une partie prestataire doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’avait d’autre solution raisonnable que celle de prendre congé de son emploi, compte tenu de l’ensemble des circonstances.

[18] Une liste non exhaustive de circonstances que le Tribunal doit prendre en considération pour déterminer s’il existe une justification figure à l’article 29(c) de la Loi. Cependant, une partie prestataire qui désire s’appuyer sur l’article 29(c) de la Loi n’est pas tenue de montrer que sa situation correspond à l’une des circonstances expressément énumérées à cet article. Une partie prestataire peut présenter une preuve selon laquelle compte tenu de l’ensemble des circonstances, il n’avait d’autre solution raisonnable que celle de prendre congé de son emploi (Canada (Procureur général) c Lessard, 2002 CAF 469).

[19] La Commission a soutenu que l’appelant n’était pas fondé à prendre volontairement une période de congé parce qu’il a quitté son emploi pour fréquenter l’école à temps plein sans explorer d’autres solutions raisonnables qui s’offraient à lui.

[20] L’appelant a affirmé dans son témoignage qu’il s’était inscrit au printemps 2018 à l’Université du X parce qu’il était au courant que son emploi à temps plein auprès de X prendrait fin à l’automne 2018. L’appelant a affirmé dans son témoignage qu’il s’est inscrit à l’Université pour accroître ses possibilités d’emploi et pour possiblement retourner chez X en occupant un poste plus élevé au sein de l’entreprise.

[21] Il est bien établi dans la jurisprudence que le fait de laisser son emploi pour entreprendre un programme d’études ne constitue pas une justification, à moins que la personne n’ait été orientée vers une formation par une autorité désignée de la Commission conformément à l’article 25 de la Loi (Canada (Procureur général c Côté, 2006 CAF 219); (Canada (Procureur général c Shaw, 2002 CAF 325).

[22] L’appelant a reconnu que bien que son employeur lui ait accordé le congé, le congé n’était pas autorisé par la Commission ou par une autorité désignée.

[23] Bien que le Tribunal félicite l’appelant pour son retour aux études et les étapes concrètes qu’il a prises en matière de développement personnel, cela ne correspond pas à une justification au sens de la Loi. Le Tribunal juge donc que l’appelant n’était pas fondé à prendre congé de son emploi.

[24] Le Tribunal admet que l’appelant a véritablement pensé qu’il était fondé à prévoir un congé et avait de bonnes raisons de le faire. Cela dit, il existe une distinction entre les concepts de [traduction] « bonnes raisons » et de « justification » de prendre volontairement un congé. Aux termes de la Loi, le mot « justification » n’est pas synonyme de « raison » ou « motif » (Tanguay c Canada (Commission d’assurance-chômage), A‑1458‑84). Il n’est donc pas suffisant que l’appelant démontre qu’il avait un motif valable ou une bonne raison lorsqu’il a pris un congé du travail. Il doit démontrer qu’après avoir considéré toutes les circonstances, il n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi (McCarthy c Canada (Commission d’assurancechômage), A‑600‑93).

[25] L’appelant a soutenu qu’il n’avait d’autre solution que celle de prendre congé parce qu’il n’avait d’autre choix que de déménager de X à X pour fréquenter l’école. Cependant, l’appelant a admis qu’il n’a pas cherché un autre emploi à X avant de déménager parce qu’il ne croyait pas que son horaire lui permettrait de travailler et d’étudier en même temps. L’appelant ne s’est pas informé au sujet de la possibilité d’être transféré dans un magasin X à X.

[26] Le Tribunal est d’avis que compte tenu de l’ensemble des circonstances, l’appelant n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait une justification parce qu’il n’avait pas épuisé toutes les solutions raisonnables qui s’offraient à lui avant de prendre congé. Le Tribunal juge qu’il aurait été raisonnable pour l’appelant de conserver son emploi ou de demander un transfert dans un autre X à X, au lieu de se placer en situation de chômage.

[27] La décision de l’appelant de prendre congé représente un choix personnel. Il est contraire aux principes sous-jacents du régime d’assurance-emploi qu’un employé impose le poids économique de ce choix personnel aux cotisants au fond (Canada (Procureur général) c Beaulieu, 2008 CAF 133; Martel c Canada (Procureur général), A‑1691‑92). En l’espèce, le Tribunal reconnaît que l’appelant a décidé de retourner à l’école parce qu’il savait qu’il serait licencié de son poste auprès de X à l’automne 2018. Cependant, le départ de l’appelant en congé de son emploi à temps partiel chez X a déclenché les dispositions relatives à l’inadmissibilité de la Loi et l’empêche de recevoir des prestations pendant la période de son congé, car la Loi exige que l’appelant montre qu’il était fondé à prendre congé de son emploi (même si cet emploi est à temps partiel et que l’appelant a été licencié précédemment de son emploi à temps plein).

[28] Finalement, le Tribunal encourage l’appelant à communiquer avec son employeur pour convenir d’une date définitive de retour au travail. Une fois que cette date aura été déterminée, l’appelant est encouragé à informer la Commission, dès que possible, de cette date. Cela est important, car la période d’inadmissibilité dure jusqu’à ce que l’un des critères de l’article 32(2) de la Loi soit satisfait, la date de reprise de l’emploi par l’appelant étant l’un de ces critères.

Conclusion

[29] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 27 décembre 2018

Téléconférence

P. S., appelant

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