Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli parce que l’appelante a démontré que la somme reçue de son ancien employeur constitue une indemnité pour avoir renoncé à son droit d’être réintégré dans son ancien poste. Conséquemment, cette somme ne constitue pas de la rémunération, et ne doit pas faire l’objet d’une répartition.

Aperçu

[2] L’appelante a perdu son emploi et elle a présenté une demande de prestations d’assurance‑emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a établi une période de prestations et celles-ci furent versées. À la suite d’un règlement intervenu dans le cadre d’une action pour congédiement injustifié, l’employeur a versé la somme de 43 908 $ à l’appelante. La Commission a décidé que cette somme constitue de la rémunération et celle-ci a été répartie sur les semaines de prestations. Cette décision a généré un trop-payé de prestations d’assurance-emploi dont la Commission demande à l’appelante de rembourser.

[3] L’appelante maintient que la somme qui lui a été versée ne constitue pas de la rémunération, car celle-ci a été versée parce qu’elle a renoncé à son droit de réintégrer son emploi.

Questions en litige

[4] Le Tribunal doit statuer sur les questions suivantes :

  1. Est-ce que le montant reçu par l’appelante après la cessation d’emploi constitue une rémunération ?
  2. Si oui, ce montant a-t-il été réparti correctement par la Commission ?

Analyse

[5] Le Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) prévoit que la rémunération inclut « le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi » (article 35 du Règlement). La jurisprudence enseigne que les sommes qui constituent une rémunération aux termes de l’article 35 du Règlement doivent être réparties aux termes de l’article 36 du Règlement (Boone et al c. Canada (PG), 2002 CAF 257).

[6] Il incombe au prestataire d’établir que la totalité ou une partie du montant reçu à la suite de son congédiement constituait autre chose qu’une rémunération au sens de la Loi (Bourgeois c. Canada (PG), 2004 CAF 117). L’appelante soutient que selon un règlement intervenu entre elle et son employeur, la somme de 43 908 $ lui a été versée parce qu’elle a renoncé à son droit de réintégrer son emploi. Donc, selon l’appelante, cette somme ne constitue pas de la rémunération.  

Est-ce que le montant reçu par l’appelante après la cessation d’emploi constitue de la rémunération ?

[7] La Cour d’appel fédérale a établi les conditions selon lesquelles un montant versé à la suite d’une cessation d’emploi peut être considéré comme ayant été versé pour compenser la renonciation au droit de réintégrer un emploi. Au départ, le droit d’être réintégré doit exister en vertu d’une loi fédérale ou provinciale, d’un contrat ou d’une convention collective. En second lieu, le prestataire doit avoir demandé à être réintégré et l’entente de règlement doit démontrer que le montant a été versé à titre de compensation pour renoncer au droit d’être réintégré (Canada (PG) c. Nicole Meechan, 2003 CAF 368).

[8] Est-ce que le droit à la réintégration existait ? Oui, en effet, à la suite de son congédiement, l’appelante a contesté sa fin d’emploi par le dépôt des plaintes pour pratique interdite et pour congédiement sans cause juste et suffisante auprès de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) (GD3-54 à 61). Le Tribunal reconnait que lorsque le congédiement est fait sans cause juste et suffisante, le recours en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail, permet au salarié d’obtenir sa réintégration dans son emploi et/ou une indemnité, et la Cour d’appel fédérale a établi que le congédiement injustifié. Donc, le Tribunal détermine que le droit de l’appelante à la réintégration dans son emploi existait.

[9] Est-ce que l’appelante a demandé de réintégrer son emploi ? Oui, car l’appelante a témoigné qu’elle a demandé de réintégrer son emploi par une lettre datée le 15 juin 2017 ou son avocat a avisé l’employeur de son intention de prendre les recours nécessaires afin de contester son congédiement et d’être réintégrer sans son emploi (GD2-14). De surcroit, dans une tentative de régler le litige, le 6 juin 2018, l’appelante avise son employeur qu’elle accepterait la somme de 43 908 $ à titre de renonciation à son droit de réintégrer son emploi (GD2-19). Finalement, l’entente entre les parties indique clairement que l’appelante a demandé de réintégrer son emploi (GD2-29). Il est donc clair que l’appelante avait demandé de réintégrer son poste.

[10] Est-ce que la somme a été versée en guise de renonciation au droit à la réintégration ?

[11] La Commission souligne dans ses observations que la somme en question n’a pas été versée parce que l’appelante a renoncé à son droit de réintégrer son emploi. La Commission soutient que son argument est fondé sur le fait que la CNESST avait établi une réclamation pécuniaire au nom de l’appelante qui s’élevait à 6 374,32 $ comme indemnité de préavis et 909,82 $ comme paye de vacances (GD3-33, 34 et 35). Donc, selon la Commission ces sommes ont été versées pour compenser la perte d’emploi et non pas parce que l’appelante a renoncé à son droit de réintégrer son emploi. Cet argument ne saurait être retenu, car l’appelante s’est désistée de cette plainte pécuniaire, tel qu’il appert d’une correspondance entre les avocats des parties (GD3-75), donc, le Tribunal accepte le témoignage de l’appelante indiquant qu’aucune somme ne lui a été versée pour compenser une paye de vacances ou une indemnité de départ.

[12] De plus, selon la Commission, la somme de 43 908 $ fut versée à l’appelante à titre d’indemnité de départ. Cet argument ne saurait être retenu pour les motifs suivants.

[13] En effet, l’entente intervenue entre l’appelante et son ancien employeur stipule expressément dans son préambule qu’elle a été conclue en contrepartie de la renonciation de l’appelante à sa réintégration dans son emploi (GD3-46). De plus, l’article 2 de l’entente précise « en contrepartie de la renonciation de l’Employée à sa réintégration dans son emploi, l’Employeur convient de payer à l’Employée un montant forfaitaire de 43, 908,00 $ alloué de la façon suivante : la somme de 13, 868,00 $ dans le compte REER de l’appelante ; 24, 589,72 $ moins les retenues fiscales à l’ordre de l’appelante ; 5, 450,73 $ pour les honoraires d’avocat. Donc, le Tribunal détermine que l’appelante a démontré que la somme de 43 908 $ a été versée parce qu’elle a renoncé à son droit de réintégrer son emploi.

[14] Pour les motifs susmentionnés, le Tribunal conclut que l’appelante disposait d’un droit à la réintégration dans son emploi, qu’elle a cherché à s’en prévaloir et qu’elle y a renoncé en contrepartie d’une compensation pécuniaire (Meechan, supra). Donc, la somme de 43 908 $ ne constitue pas de la rémunération au sens de l’article 35 du Règlement parce que cette somme a été versée à l’appelante parce que cette dernière a renoncé à son droit d’être réintégrée dans son emploi. Par conséquent, cette somme ne peut être répartie aux termes de l’article 36 du Règlement.

Conclusion

[15] L’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 21 janvier 2019

Téléconférence

A. M., appelante

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