Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] En avril 2017, le demandeur, T. M. (prestataire), a fait une demande de prestations spéciales d’assurance-emploi pour prendre soin d’un [traduction] « membre de la famille qui est gravement malade et dont le risque de décès est important au cours des 26 semaines qui suiventNote de bas de page 1 ». La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a accueilli cette demande. En avril 2018, le demandeur a fait une demande de prestations spéciales pour [traduction] « fournir des soins ou du soutien à un membre de la famille qui est gravement maladeNote de bas de page 2 ». La Commission a déterminé que le prestataire avait commencé à recevoir des prestations à compter du 14 mai 2017 et que la période de prestations, étant d’une durée de 52 semaines, prenait fin le 12 mai 2018Note de bas de page 3. Autrement dit, le prestataire ne recevrait aucune prestation après le 12 mai 2018. La Commission a maintenu sa décision selon laquelle les circonstances du prestataire ne permettaient pas de prolonger la période de prestations au-delà de 52 semainesNote de bas de page 4.

[3] Le prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision de la Commission devant la division généraleNote de bas de page 5. Il a soutenu que l’état de santé de sa mère s’est prolongé au-delà de la période de cotisation de 52 semaines. Il a mentionné que son propre état de santé était en déclin et qu’il avait de la difficulté à trouver du travail. La division générale a jugé que les circonstances du prestataire ne correspondaient à aucun des scénarios figurant à l’article 10(10) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) qui auraient permis de prolonger sa période de prestations. La division générale a jugé que la période de prestations ne pouvait pas être prolongée pour des motifs ’de compassion. Ainsi, elle a rejeté l’appel du prestataire.

[4] Le prestataire souhaite maintenant obtenir la permission d’appeler la décision rendue par la division générale. Je dois décider si la cause du demandeur est défendable en appel. Je rejette la demande de permission d’en appeler puisque je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[5] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. Question en litige no 1 : Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle?
  2. Question en litige no 2 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte de la nature des demandes du prestataire?

Analyse

[6] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit des moyens d’appel limités. L’article n’accorde pas à la division d’appel le pouvoir de procéder à une nouvelle appréciation. L’article prévoit que seuls les moyens d’appel suivants peuvent être présentés :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] Avant d’accorder la permission d’en appeler, je dois avoir la certitude que les motifs de l’appel se rattachent aux moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. Il s’agit d’un critère relativement peu exigeant. Un prestataire n’a pas à prouver sa thèse; il doit simplement démontrer qu’une erreur susceptible de révision confère à l’appel une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 6. La Cour fédérale a confirmé cette approche dans Joseph c Canada (Procureur général)Note de bas de page 7.

[8] Le prestataire affirme que la division générale a commis les erreurs prévues aux articles 58(1)(b) et (c) de la Loi sur le MEDS.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle ou autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence?

[9] La justice naturelle vise à assurer qu’un prestataire bénéficie d’une occasion juste et raisonnable de présenter sa cause, et que la décision rendue soit impartiale ou exempte d’une apparence ou d’une crainte raisonnable de partialité. Elle touche les questions d’équité procédurale devant la division générale plutôt que l’incidence d’une décision de cette dernière sur le prestataire. Le prestataire n’a soulevé aucune question d’équité procédurale ou de justice naturelle qui concerne la division générale. Le prestataire n’a rien soulevé ni précisé de particulier qui laisse croire que la division générale pourrait l’avoir privé d’une occasion de présenter pleinement et équitablement sa cause ou qu’elle aurait fait preuve de partialité envers lui.

[10] Le prestataire laisse entendre que la division générale avait compétence pour prolonger sa période de prestations, mais comme la division générale a noté, l’article 10(10) de la Loi sur l’AE, qui énumère les seules conditions à partir desquelles une période de prestations peut être prolongée, ne comprend la considération d’aucun motifs d’ordre humanitaire.

[11] Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès si ce moyen est invoqué.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle a tirée sans tenir compte de la nature des demandes du prestataire?

[12] Le prestataire affirme que lorsqu’il a perdu son emploi et qu’il a fait sa demande de prestations d’assurance-emploi en avril 2018, il ne cherchait pas à faire prolonger ou renouveler les prestations spéciales qu’il avait obtenues en 2017. Il souhaitait [traduction] « simplement faire une demande pour une nouvelle période de prestations [d’assurance-emploi] parce qu’il avait été victime d’une agression physique en milieu de travailNote de bas de page 8 ». Autrement dit, il affirme que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée selon laquelle il cherchait à faire prolonger ses prestations ou la période de prestations, plutôt que de déterminer s’il était admissible à une nouvelle série de prestations d’assurance-emploi avec une nouvelle période de prestations.

[13] Après tout, le prestataire a fait deux demandes distinctes. La première, en avril 2017, était pour des prestations de compassion. Lorsque le prestataire a fait une demande de prestations en avril 2018, c’était pour des prestations de proche aidant pour un adulte gravement malade.

[14] La division générale a écrit que le prestataire avait présenté une [traduction] « demande renouvelée de prestations pour proches aidants » et que [traduction] « [l]a demande avait été renouvelée à compter du 1er avril 2018Note de bas de page 9 ». Cela pourrait avoir été trompeur parce que, si la Commission avait en fait versé des prestations pour proches aidants en 2017, le prestataire aurait été admissible à seulement 15 semaines de prestations, le nombre maximal de semaines pour les prestations pour proches aidants. Toutefois, le prestataire confirme dans sa demande de permission d’en appeler qu’il a reçu 26 semaines de prestations du 14 mai 2017 au 11 novembre 2017, le nombre maximal de semaines pour les prestations de compassion. Il est clair que la division générale a omis de faire la distinction entre les deux types de prestations spéciales : les prestations pour proches aidants et les prestations de compassion.

[15] Toutefois, la Commission a accueilli la demande de prestations pour proches aidants du prestataireNote de bas de page 10, en plus des prestations de compassion qu’il avait déjà obtenues en 2017. Elle a indiqué dans sa lettre du 8 juin 2018 que le prestataire pourrait recevoir jusqu’à 15 semaines de prestations sur une période de 52 semaines. Dans ce cas, elle a déterminé qu’il était admissible aux prestations pour proches aidants, que les paiements commenceraient le 8 avril 2018, et qu’ils continueraient pendant cinq semaines. Alors, en fait, la Commission ne refusait pas l’admissibilité du prestataire aux prestations pour proches aidants.

[16] Ce que la Commission a omis d’expliquer dans sa lettre du 8 juin 2018 est la raison pour laquelle le prestataire était limité à cinq semaines de prestations pour proches aidants, et la raison pour laquelle il ne recevrait pas les 15 semaines complètes de prestations de cette catégorie.

[17] Le prestataire était admissible au bénéfice des prestations seulement durant sa période de prestations. Comme la division générale l’a noté, une période de prestations initiale avait été établie à compter du 14 mai 2017, conformément à l’article 10(1) de la Loi sur l’AE. Cet article définit la période de prestations d’une partie prestataire comme débutant soit le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération ou le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine est postérieure à celle de l’arrêt de rémunération.

[18] Aux termes de l’article 10(1) de la Loi sur l’AE, le prestataire pourrait avoir été en mesure d’établir une nouvelle période de prestations de 52 semaines débutant le dimanche de la semaine au cours de laquelle il a formulé une demande de prestations pour proches aidants. Toutefois, l’article 10(3) de la Loi sur l’AE nous informe qu’une période de prestations ne doit pas être établie si une période de prestations antérieure n’est pas terminée. Puisqu’il y avait déjà une période de prestations existante qui avait été établie le 14 mai 2017 et qui n’était pas terminée lorsque le prestataire a fait sa demande de prestations pour proches aidants, le prestataire n’a pas pu établir une nouvelle période de prestations.

[19] Bien que la division générale puisse avoir omis de tenir compte des prestations de compassion et des prestations pour proches aidants ou de faire une distinction entre les deux, à la fin cela n’a pas eu d’importance parce que le prestataire ne pouvait pas établir une nouvelle période de prestations aux termes de l’article 10(3) de la Loi sur l’AE de toute façon. Il avait déjà une période de prestations existante lorsqu’il a fait sa demande de prestations pour proches aidants. Les seules options s’offrant à lui pour toute semaine de prestations supplémentaire consistaient à chercher à faire prolonger sa période de prestations existante ou à établir qu’il avait un motif valable pour le retard; selon ce que je peux déterminer à partir des faits au dossier d’audience, l’option d’établir qu’il avait un motif valable pour le retard ne s’applique pas.

[20] Bien que le prestataire ait fait une demande pour deux types de prestations spéciales différentes, cela importait peu pour la division générale, car elle devait décider si le prestataire pouvait prolonger sa période de prestations. Autrement dit, même si la division générale avait reconnu que la première demande avait été pour des prestations de compassion et que la deuxième avait été pour des prestations pour proches aidants, cela n’aurait eu aucune incidence sur le résultat. La division générale aurait quand même été tenue de déterminer le début et la durée de la période de prestations, peu importe la nature des demandes. En fin de compte, la division générale est arrivée à désigner la question à trancher et elle a déterminé que le prestataire était admissible à une prolongation de sa période de prestations.

[21] Le prestataire ne prétend pas, et je ne constate pas, que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation et son application de l’article 10(10) de la Loi sur l’AE lorsqu’elle a décidé que la période de prestations du prestataire pouvait être prolongée.

Conclusion

[22] Je ne suis pas convaincue que l’un ou l’autre des moyens d’appel soulevés par le prestataire auraient une chance raisonnable de succès. Par conséquent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

 

Observations :

T. M., demandeur

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