Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. L’appelante a démontré qu’elle avait, durant toute la période de son retard, un motif valable pour justifier sa demande de prestations tardive, et qu’elle avait un motif valable pour justifier le retard dans la présentation de ses déclarations bimensuelles.

Aperçu

[2] L’appelante [sic] ensuite une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 6 décembre 2017. Elle avait accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations et une demande a pris effet le 3 décembre 2017Note de bas page 1. L’appelante a présenté un relevé d’emploi à l’intimée le 27 février 2018, lequel avait été produit le 7 février 2018Note de bas page 2, et par la suite elle a essayé de remplir ses déclarations électroniques le 18 mars 2018Note de bas page 3. Après avoir essayé de remplir ses déclarations, elle a déposé une demande de renouvellement le 18 mars 2018Note de bas page 4. L’appelante a demandé que sa demande de prestations commence durant la semaine du 31 octobre 2017Note de bas page 5.

[3] L’intimée a conclu que l’appelante n’avait pas démontré qu’elle avait, durant toute la période de son retard, un motif valable pour justifier le retard dans la présentation de sa demande de prestations d’assurance-emploi et qu’elle n’avait pas présenté ses déclarations en temps opportun puisque conformément à l’article 26(1) du Règlement sur l’assurance-emploi, les déclarations auraient dû être retournées à l’intimée au plus tard le 3 janvier 2018. L’appelante a demandé une révision. Dans la décision découlant de la révision, l’intimée a maintenu sa décision initiale. L’appelante a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[4] Question en litige no 1 : L’appelante a-t-elle démontré qu’elle avait, durant toute la période écoulée, un motif valable pour justifier sa demande initiale de prestations tardive?

[5] Question en litige no 2 : Dans l’affirmative, aurait-elle rempli les conditions requises pour recevoir des prestations à une date antérieure?

[6] Question en litige no 3 : L’appelante a-t-elle démontré qu’elle avait un motif valable pour justifier la présentation tardive de ses déclarations?

Analyse

[7] Par antidatation, on entend attribuer une date antérieure à une demande initiale de prestations. Cela est permis au titre de l’article 10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi. La Loi énonce qu’une demande devrait être antidatée si un motif valable justifie la présentation tardive pendant toute la période du retard, et que la partie prestataire montre qu’elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations à une date antérieure.

[8] Un motif valable n’est pas la même chose qu’une bonne raison ou une justification pour expliquer le retard. Le critère à appliquer en ce qui concerne le motif valable est la question de savoir si une partie prestataire peut montrer que pendant toute la période du retard elle a agi comme l’aurait fait une personne raisonnable dans la même situation pour s’enquérir des droits et des obligations que lui impose la LoiNote de bas page 6.

[9] L’obligation de présenter avec célérité sa demande de prestations est considérée comme étant très exigeante et très stricte. C’est la raison pour laquelle l’exception relative au « motif valable justifiant le retard » est appliquée parcimonieusementNote de bas page 7.

[10] Sauf en de circonstances exceptionnelles, on attend d’une personne qui demande des prestations qu’elle vérifie assez rapidement les obligations que lui impose la LoiNote de bas page 8.

[11] Pour que sa demande initiale de prestations soit antidatée au 31 octobre 2017, il incombe à l’appelante d’établir :

  1. qu’elle était admissible aux prestations en date du 31 octobre 2017;
  2. qu’elle avait un motif valable, durant toute la période écoulée, pour justifier la présentation tardive de sa demande initiale de prestations.

Question en litige no 1 : L’appelante a-t-elle démontré qu’elle avait, durant toute la période écoulée, un motif valable pour justifier sa demande initiale de prestations tardive?

[12] Oui. L’appelante avait un motif valable durant toute la période de retard dans la présentation de sa demande initiale de prestations.

[13] L’intimée a fait valoir que l’appelante n’a pas agi comme une personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait agi pour se renseigner sur ses droits et obligations au titre de la Loi. Bien que l’appelante mentionne ses problèmes continus d’attention, de concentration et de respect des échéances en raison de son problème de santé sous-jacent, elle a précisément déclaré à l’intimée que la raison pour laquelle elle n’avait pas présenté de demande d’assurance‑emploi avant le 6 décembre 2017 était qu’elle n’avait pas son relevé d’emploiNote de bas page 9. Une personne raisonnable se trouvant dans la situation de l’appelante aurait communiqué avec l’intimée après avoir reçu son relevé d’emploi initial, lequel était inexact, pour s’informer de ce qu’elle pourrait faire pour protéger sa demande de prestations. L’appelante n’a pas tenté de communiquer avec l’intimée avant le 22 mars 2018; cependant, elle a mentionné une tentative précédente où elle avait raccroché en raison du temps d’attente et de l’affluence.

[14] L’intimée a aussi soutenu qu’une personne raisonnable se trouvant dans la situation de l’appelante et qui se préoccupe de la protection de sa demande de prestations aurait communiqué avec l’intimée pour se renseigner au sujet de sa situation et de la possibilité de déposer une demande de prestations sans son relevé d’emploi. De plus, l’appelante n’a pas mentionné avoir joint l’intimée avant de recevoir son relevé d’emploi en février 2018 et auparavant, elle n’avait pas cherché à obtenir des précisions sur la possibilité de présenter une demande sans son relevé d’emploi, puisqu’elle avait l’impression que le relevé était requis.

[15] À l’audience, l’appelante a affirmé qu’après avoir perdu son emploi elle était bouleversée. Comme elle avait des économies, il ne lui est jamais venu à l’idée d’appeler. Dans son [traduction] « esprit », elle faisait la bonne chose et elle n’avait pas de questions à poser à Service Canada. Elle croyait que ses suppositions étaient correctes. Lorsque l’intimée l’a appelée, elle était dehors en train de pleurer, mais voulait poursuivre l’interrogatoire. Ce fut une expérience très traumatisante.

[16] La représentante de l’appelante a soutenu que l’appelante avait des problèmes d’attention et de concentration en raison de ses problèmes de santé sous-jacents. Il s’agissait de circonstances exceptionnelles.

[17] Après avoir tenu compte de l’ensemble des éléments de preuve des deux parties, j’estime que l’appelante avait un motif valable pendant toute la période du retard.

[18] J’accepte la preuve claire, convaincante et directe de la version des événements de l’appelante qui explique pourquoi elle n’a pas déposé la demande en date du 31 octobre 2017.

[19] Bien que l’intimée ait reconnu qu’il y avait eu des difficultés en raison des problèmes continus d’attention, de concentration et de respect des échéances de l’appelante attribuables à ses problèmes de santé sous-jacents, elle n’a pas expliqué pourquoi elle n’a pas tenu compte de cette preuve.

[20] J’ai admis la preuve médicale figurant dans l’élément GD2‑4 et j’accorde un poids considérable à l’observation du médecin selon laquelle l’appelante a des problèmes continus d’attention, de concentration et de respect des échéances en raison de son problème de santé sous-jacent. J’estime que l’incapacité de l’appelante de communiquer clairement avec l’intimée en raison de ses difficultés d’attention, de concentration et de respect des échéances attribuables à ses problèmes de santé sous-jacents a joué un rôle important dans le fait qu’elle a tardé à présenter sa demande. J’estime qu’en raison de son état de santé, elle ne pouvait pas prendre les mesures qu’une personne raisonnable aurait prises dans les mêmes circonstances pour s’informer de ses obligations.

Question en litige no 2 : L’appelante remplissait-elle les conditions requises pour recevoir des prestations à une date antérieure?

[21] L’intimée n’a pas présenté d’observations sur la question de savoir si l’appelante est admissible aux prestations à une date antérieure. Compte tenu de l’absence de preuve selon laquelle l’appelante ne serait pas admissible à une date antérieure, j’estime que l’appelante est admissible aux prestations en date du 31 octobre 2017.

Question en litige no 3 : L’appelante a-t-elle démontré qu’elle avait un motif valable pour justifier la présentation tardive de ses déclarations?

[22] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi pendant une semaine de chômage, une partie prestataire doit présenter une demande de prestations (article 49(1) de la Loi). En pratique, les parties prestataires présentent ces demandes de prestations continues en remplissant des déclarations bimensuelles, habituellement par téléphone ou par Internet. Les parties prestataires doivent présenter ces rapports dans les trois semaines qui suivent la date de la déclaration, sans quoi la déclaration est considérée comme en retardNote de bas page 10.

[23] La Commission peut accepter des déclarations bimensuelles en retard, toutefois la partie prestataire doit démontrer qu’elle avait un motif valable justifiant le retard dans la présentation de ses déclarationsNote de bas page 11. Par motif valable, on entend que la partie prestataire a agi comme une personne raisonnable aurait agi dans la même situation pour connaître ses droits et obligations au titre de la Loi. Les parties prestataires doivent vérifier assez rapidement si elles ont droit à des prestations d’assurance-emploi, et la nécessité de présenter ses demandes en temps opportun est sévère et stricte. L’ignorance de la loi, même de bonne foi, n’est pas suffisante pour constituer un motif valableNote de bas page 12.

[24] L’intimée a soutenu qu’une personne raisonnable se trouvant dans cette situation aurait tenté de communiquer avec l’intimée et aurait persisté jusqu’à ce qu’elle réussisse à la joindre. Dans l’éventualité où l’appelante n’aurait pas été en mesure de joindre l’intimée par téléphone, il aurait été raisonnable qu’elle se présente dans un centre de Service Canada pour s’informer de ses droits et responsabilités concernant ses déclarations, surtout après avoir reçu la lettre contenant son code d’accès.

[25] J’estime que les problèmes d’attention, de concentration et de respect des échéances de l’appelante étaient attribuables à ses problèmes de santé sous-jacents qui ont joué un rôle important dans le fait qu’elle a présenté ses déclarations en retard. J’estime qu’en raison de ses problèmes de santé, elle ne pouvait pas prendre les mesures qu’une personne raisonnable aurait prises dans les mêmes circonstances pour s’informer de ses obligations.

[26] Par conséquent, je conclus que l’appelante a démontré qu’elle avait un motif valable pour justifier son retard dans la présentation de ses déclarations bimensuelles.

Conclusion

[27] L’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 1er octobre 2018

Téléconférence

S. B., appelante
Rachell Marie Abou-Hamad, représentante de l’appelante

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