Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] L’appelant a fait établir une période de prestations au 16 juillet 2017. Il a cessé de travailler et a touché une indemnité de départ, dont le montant a été réparti à partir de la date à laquelle sa période de prestations a été établie, et la durée de sa période de prestations a été prolongée jusqu’à 104 semaines. La date de fin de sa période de prestations a été changée, passant du 30 octobre 2018 au 12 juillet 2019. Le 29 septembre 2017, l’appelant a été informé que les sommes reçues à sa cessation d’emploi ont été réparties sur la période du 16 juillet 2017 au 15 septembre 2018, avec un solde de 2 194 $ appliqué à la semaine commençant le 22 septembre 2018. L’inadmissibilité aux prestations prend fin le 29 septembre 2018. La question de la répartition du montant de l’indemnité de départ n’est pas une question soulevée dans le présent appel devant le Tribunal.

[3] L’appelant était à l’étranger du 25 août au 21 octobre 2018. L’appelant ne touchait pas de prestations d’assurance‑emploi pendant qu’il était à l’étranger du fait de la répartition des sommes reçues à sa cessation d’emploi. Initialement, l’intimée a déterminé que l’appelant satisfaisait à l’exception énoncée à l’alinéa 55(1)b) du Règlement sur l’assurance-emploi (le « Règlement » pendant qu’il se trouvait à l’étranger pour assister aux funérailles de son père; toutefois, l’appelant ne satisfaisait à aucune autre des exceptions prévues dans le Règlement et a été inadmissible aux prestations pour le reste du temps passé à l’étranger. L’appelant a demandé un réexamen de cette décision et a fait valoir qu’il s’est occupé de son père malade et en phase terminale, que son père est décédé le 9 octobre 2018 et qu’on devrait lui accorder une exemption de 14 jours en application du 55(1.1) du Règlement. En réexamen, la période d’exemption de sept jours lui a été accordée en vertu de l’alinéa 55(1)b) du Règlement; toutefois, l’appelant n’était pas admissible au bénéfice des prestations pendant les sept premiers jours de sa période à l’étranger en raison d’une répartition de rémunération, et il était inadmissible aux prestations pour le reste de son temps passé à l’étranger.

[4] À la suite de la décision de réexamen, l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») a accordé à l’appelant 14 jours pour rendre visite à son père gravement malade et assister à ses funérailles, en application des alinéas 55(1)b) et d), à compter de la date de son départ du Canada, mais a imposé une inadmissibilité aux prestations pour le reste du temps que l’appelant a passé à l’étranger.

[5] L’appelant a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal »), cherchant à faire courir la période d’exemption de 14 jours à partir d’une date plus rapprochée du 9 octobre 2018, date à laquelle son père est décédé, et non à partir de la date de son départ du Canada. L’appelant convient que, pour le reste de son temps passé à l’étranger, il ne toucherait pas de prestations.

Questions en litige

  1. L’appelant était-il admissible aux prestations pendant qu’il se trouvait à l’étranger? Dans l’affirmative, est-il admissible aux prestations au-delà des 14 premiers jours consécutifs de son absence?

Analyse

[6] Aux termes de l’alinéa 37b) de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »), les prestataires ne sont pas admissibles au bénéfice des prestations pendant qu’ils sont à l’étranger. La seule exception à cette disposition est prévue à l’article 55 du Règlement (Canada (Procureur général) c Gibson, 2012 CAF 166). Il incombe aussi à l’appelant de démontrer qu’il était disponible pour travailler, en application de l’article 18 de la Loi (Procureur général du Canada c Elyoumni,2013 CAF 151).

[7] L’une de ces exceptions permet à un prestataire se trouvant à l’étranger de se voir accorder une période maximale de sept jours consécutifs durant laquelle il n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations pour rendre visite à un proche parent gravement malade ou blessé (alinéa 55(1)d) du Règlement) et une autre exception permet au prestataire de se voir accorder une période d’au plus sept jours consécutifs pour assister aux funérailles d’un proche parent (alinéa 55(1)b) du Règlement).

[8] En outre, aux termes du paragraphe 55(1.1) du Règlement, seules les périodes visées aux alinéas (1)b) et d) peuvent être cumulées au cours d’un même voyage à l’étranger et seulement dans le cas où le proche parent que visite le prestataire au titre de l’alinéa (1)d) est le même que celui aux funérailles duquel il assiste au titre de l’alinéa (1)b).

[9] Il incombe aux prestataires de démontrer qu’ils satisfont aux exigences prévues pour être admissibles à des prestations et qu’il n’existe aucune circonstance qui les rendra inadmissibles ou exclus du bénéfice des prestations pendant la période visée, y compris qu’ils satisfont aux exigences prescrites à l’article 18 de la Loi concernant la disponibilité pour travailler (Procureur général du Canada. c Picard).

Question 1 : L’appelant était-il admissible au bénéfice des prestations pendant qu’il se trouvait à l’étranger?

[10] L’appelant convient qu’il était à l’extérieur du Canada du 25 août au 21 octobre 2018. Il a produit, le 22 octobre 2018, un questionnaire de non-disponibilité indiquant qu’il se trouvait à l’étranger pour assister aux funérailles de son père. Il affirme aussi qu’au cours d’un même voyage à l’étranger il est allé rendre visite à son père gravement malade et, lorsque ce dernier est malheureusement décédé, il a assisté à son enterrement/ses funérailles.

[11] L’appelant est allé à l’étranger rendre visite à son père très âgé (94 ans) et dans un état fragile le 25 août 2018. Il avait réservé sa date de retour au Canada pour le 5 octobre 2018; cependant, le 3 septembre 2018, on a diagnostiqué son père deux tumeurs cancéreuses et on lui a dit qu’il ne restait que de deux à six mois à vivre à son père. Il a alors annulé sa date de retour du 5 octobre 2018 et a laissé son billet de retour ouvert. Son père est décédé le 9 octobre 2018 et l’enterrement a eu lieu le 12 octobre 2019. L’appelant est revenu au Canada le 21 octobre 2018.

[12] Il plaide que son admissibilité aux prestations pendant la période de 14 jours prévue au paragraphe 55(1.1) du Règlement soit plus proche de la date du décès de son père, le 9 octobre 2018, et déclare que la période de 14 jours pourrait commencer le 3 octobre 2018. Il accepte le fait, que pour le reste de son temps passé à l’étranger, il n’est pas admissible au bénéfice des prestations en application de l’alinéa 37b) de la Loi et qu’il ne satisfait à aucune des autres exceptions prévues à l’article 55 du Règlement, et il convient qu’il est inadmissible au bénéfice des prestations en dehors de la période d’exemption de 14 jours prévue au paragraphe 55(1.1) du Règlement.

[13] Le Tribunal reconnaît qu’il y a deux périodes en question, d’une part une période de 14 jours pour laquelle les deux parties conviennent que l’appelant satisfait à l’exception prévue au paragraphe 55(1.1) du Règlement et durant laquelle l’appelant est admissible au bénéfice des prestations et, d’autre part la période du reste du séjour de l’appelant à l’étranger, pour laquelle les deux parties conviennent que l’appelant ne satisfait à aucune autre des exceptions prévues à l’article 55 du Règlement et durant laquelle il est inadmissible au bénéfice des prestations du fait qu’il était à l’étranger, conformément à ce que stipule l’alinéa 37b) de la Loi.

[14] Les deux parties conviennent que l’appelant a droit à 14 jours en application du paragraphe 55(1.1) et des alinéas 55(1)b) et d) du Règlement, soit deux périodes de 7 jours cumulées au cours d’un même voyage à l’étranger, puisque l’appelant rendait visite à son père malade et que, lorsque ce dernier est décédé, il a assisté aux funérailles. C’est sur la date de début de la période d’exemption que les parties ne s’entendent pas. L’intimée (la Commission) a fait commencer la période de 14 jours à la date de départ du Canada de l’appelant, soit le 25 août 2018, tandis que l’appelant soutient qu’il est raisonnable de faire commencer cette période d’exemption à une date plus proche du moment où son père est tombé gravement malade, est décédé puis a été enterré.

[15] Le Tribunal conclut que l’appelant est admissible au bénéfice des prestations pour deux périodes de sept jours consécutifs aux termes des deux exceptions prévues aux alinéas 55(1)b) et 55(1)d) du Règlement et que ces deux périodes ne peuvent être cumulées en vertu du paragraphe 55(1.1) du Règlement (Canada (Procureur général) c Walsh, 2008 CAF 220). Le Tribunal a déterminé que l’appelant était disponible pour travailler durant les périodes visées par ces exceptions, vu qu’il avait pris des mesures pour qu’on puisse communiquer avec lui pendant son séjour à l’étranger pour d’éventuelles possibilités d’emploi (GD3-14). Les alinéas 55(1)b) et d) représentent deux des motifs de compassion qui ont été ajoutés pour élargir l’éventail des motifs pour lesquels un prestataire, pendant un séjour à l’étranger, peut quand même rester admissible au bénéfice des prestations.

[16] L’intimée plaide que le calcul de cette période est une question de politique et que la politique a été adéquatement appliquée. La période de 14 jours a été établie comme commençant le jour où l’appelant est allé à l’étranger, soit le 26 août 2018, de sorte que l’inadmissibilité de l’appelant au bénéfice des prestations devrait être imposée le 15e jour, soit à l’expiration de la période de 14 jours consécutifs et, puisque ce 15e jour tombe un samedi, l’inadmissibilité devrait être imposée pour la période du 3 septembre au 19 octobre 2018.

[17] L’appelant soutient que le début d’application de la période d’exemption de 14 jours devrait être à une date plus rapprochée de la date de décès de son père, le 9 octobre 2018 (GD 2‑12) et de son enterrement/ses funérailles, le 12 octobre 2018, et que, bien que l’intimée ait pour politique de fixer le début de la période à la date à laquelle il est parti à l’étranger, il ne s’agit là que de la politique de l’intimée et non de dispositions prévues par la Loi.

[18] Le Tribunal convient et accepte que l’appelant satisfait bel et bien à l’exception prévue au paragraphe 55(1.1) du Règlement. Le Tribunal doit soupeser les arguments présentés par l’appelant. Bien qu’il ne soit pas lié par ses décisions antérieures, le Tribunal se fonde sur une décision qu’a rendue la division d’appel et dans laquelle la Commission a reconnu que ni la Loi ni le Règlement ne précise la façon de calculer la date de début d’application d’une période d’exemption (R.R. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2018 TSS 77).

[19] Le Tribunal estime que rien dans la Loi ou le Règlement ne précise à quel moment il faut fixer le premier jour d’application de la période d’exemption de l’appelant pendant son séjour à l’étranger. Lorsque la période passée hors du Canada se prolonge au-delà de la période de grâce de 14 jours, l’exemption de l’inadmissibilité peut être appliquée à toute période durant l’absence de l’appelant du Canada. Par conséquent, le Tribunal retient l’argument de l’appelant selon lequel il serait raisonnable de faire commencer sa période d’exemption de l’inadmissibilité pendant 14 jours consécutifs à une date plus proche de la date de décès et d’enterrement de son père, plutôt qu’à la date à laquelle il est parti à l’étranger, car à cette date, son père n’était pas gravement malade et n’avait pas décédé. Puisque la mort de son père est survenue le 9 octobre 2018 et que l’enterrement a eu lieu le 12 octobre 2018, il est raisonnable de faire commencer les sept jours consécutifs d’exemption de l’inadmissibilité pour rendre visite à son père gravement malade durant les sept jours qui ont précédé le décès de son père, le 9 octobre 2018, et de faire commencer les sept jours d’exemption pour assister aux funérailles de son père après le décès de ce dernier. Le Tribunal estime que la période d’exemption de 14 jours pourrait commencer le 3 octobre 2018.

[20] La Loi sur l’assurance-emploi est conçue pour permettre aux personnes sans emploi d’avoir rapidement accès à des prestations lorsqu’elles y sont admissibles, si bien qu’on devrait en faire une interprétation libérale pour atteindre cette fin (Abrahams c. Canada (Procureur général), A-872-80).

Conclusion

[21] L’appelant a prouvé qu’il était admissible au bénéfice des prestations pendant une période de 14 jours, en application du paragraphe 55(1.1) du Règlement, parce que son père était gravement malade et que c’est aux funérailles de son père que l’appelant a assisté, et que l’admissibilité au bénéfice des prestations pourrait commencer le 3 octobre 2018.

[22] L’appel est accueilli.

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16 février 2019

Téléconférence

B. C., appelant

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