Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. L’appelant (prestataire) a prouvé que la démission de son emploi dans une maison de soins infirmiers pour retourner à ses études autorisées constituait la seule solution raisonnable. Par conséquent, il était fondé à quitter son emploi et il n’est pas exclu du bénéfice des prestations.

Aperçu

[2] En mai 2018, après la deuxième année d’études de son diplôme en soins infirmiers, J. W., le prestataire dans cet appel, a accepté un emploi dans une maison de soins infirmiers au Nouveau-Brunswick. À la fin d’août 2018, il a quitté son emploi, comme prévu, et est retourné à l’université en Nouvelle-Écosse.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a déterminé que le prestataire n’était pas fondé à quitter volontairement son emploi, et elle l’a exclu du bénéfice des prestations en application de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

Questions en litige

[4] Le prestataire a-t-il quitté volontairement son emploi?

[5] Dans l’affirmative, compte tenu des circonstances, existait-il une solution raisonnable, autre que sa démission?

Analyse

[6] Les prestataires qui démissionnent volontairement sans justification ne peuvent toucher des prestationsNote de bas de page 1. Pour démontrer qu’ils avaient une justification, les prestataires doivent prouver que leur départ constituait la seule solution raisonnableNote de bas de page 2.

[7] Règle générale, une solution raisonnable pour les prestataires consiste habituellement à garder leur emploi jusqu’à ce qu’ils en aient trouvé un autreNote de bas de page 3.

[8] Les prestataires ne sont pas fondés à quitter leur emploi s’ils le font pour poursuivre des études non autorisées par la Commission ou son représentant désignéNote de bas de page 4.

Le prestataire a-t-il quitté volontairement son emploi?

[9] Oui, j’estime que le prestataire a quitté volontairement son emploi, car il a mentionné dans son avis d’appel qu’il avait démissionné. Puisqu’il avait le choix de rester, mais qu’il a choisi de partir, le départ était volontaireNote de bas de page 5.

Compte tenu des circonstances, existait-il une solution raisonnable dans son cas, autre que sa démission?

[10] Non, j’estime que le prestataire ne pouvait raisonnablement faire autrement que quitter son emploi, car il avait été autorisé à faire ses études par Skills PEI [Compétences Î.‑P.‑É.], un représentant désigné de la Commission, avant de partir, et il a été obligé de déménager dans une autre province pour continuer ses études autorisées.

[11] Pour toucher des prestations, le prestataire doit prouver selon la prépondérance des probabilités qu’il était fondé à quitter son emploi. Une justification ne signifie pas seulement qu’il avait une bonne raison de démissionnerNote de bas de page 6. Pour prouver qu’il avait une justification, le prestataire doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable, compte tenu de toutes les circonstances, que sa démission constituait la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 7.

[12] J’estime que le prestataire a quitté son emploi au Nouveau-Brunswick parce qu’il voulait retourner à l’université en Nouvelle-Écosse pour terminer son diplôme en soins infirmiers. Comme le prestataire travaillait au Nouveau-Brunswick et que son programme se donnait en Nouvelle-Écosse, il était impossible pour lui de travailler et de poursuivre son programme.

[13] La jurisprudence établit clairement que quitter son emploi pour poursuivre des études non autorisées par la Commission ou son représentant désigné ne constitue pas une justification au sens de la Loi sur l’AENote de bas de page 8.

[14] Je constate que Compétences Î.-P.-É. a autorisé les études du prestataire. La Commission ne conteste pas le fait que les études du prestataire avaient été autorisées.

[15] Je suis d’avis que ses études avaient été autorisées avant qu’il ne quitte son emploi, car dans sa demande de prestations et dans sa déclaration à la Commission, il a mentionné que son programme avait été autorisé avant sa démission. Le prestataire a aussi fourni une entente de client préparée par Compétences Î.-P.-É. et qu’il a signée le 17 juillet 2018. Le prestataire n’a pas quitté son emploi avant la fin d’août 2018.

[16] La Commission a soutenu que Compétences Î.-P.-É. n’avait pas autorisé le prestataire à démissionner. Toutefois, le critère juridique à satisfaire n’est pas de savoir si Compétences Î.‑P.‑É. avait autorisé le prestataire à démissionner, mais plutôt si le départ du prestataire constituait ou non la seule solution raisonnable.

[17] La Commission a cité l’arrêt Canada (Procureur général) c Beaulieu, A-465-07, à l’appui de son argument selon lequel [traduction] « le fait de quitter un emploi pour suivre un programme de formation qu’il n’était pas autorisé à quitter » contredit les principes de base du programme d’assurance-emploiNote de bas de page 9. La Commission a mal énoncé la position de la cour dans cette cause. Dans l’arrêt Beaulieu, la cour citait une autre cause, soit Canada (Procureur général) c Martel, qui dit ce qui suit :

L’employé qui quitte volontairement son emploi aux fins de suivre un cours de formation qui n’est pas autorisé par la Commission a certes, sur le plan personnel, un excellent motif pour agir. Mais il nous paraît contraire aux principes mêmes qui sont à la base du système d’assurance-chômage que cet employé puisse faire supporter par les contribuables à la caisse le poids économique de sa décision.

[18] Lorsque la cour fait référence à une autorisation, j’estime qu’elle parle de l’autorisation à suivre un programme et non de l’autorisation à quitter son emploi, comme le laisse entendre la Commission. Dans le cas du prestataire, comme je l’ai mentionné ci-dessus, ses études étaient autorisées et cette jurisprudence ne s’applique donc pas.

[19] La Commission soutient qu’une solution raisonnable aurait été que le prestataire continue de travailler jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi. Je suis d’avis que, dans l’ensemble de circonstances particulières du prestataire, y compris le fait que ses études autorisées se déroulaient à temps plein et dans une autre province, le prestataire a prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi.

[20] Plus précisément, j’estime que conserver un emploi au Nouveau-Brunswick ne constituait pas une solution raisonnable pour les raisons suivantes :

  1. Compétences Î.-P.-É. avait autorisé ses études en Nouvelle-Écosse du 2 septembre 2018 au 6 avril 2019;
  2. il a reçu l’autorisation de Compétences Î.-P.-É. avant de démissionner de son emploi au Nouveau-Brunswick;
  3. la distance entre son emploi au Nouveau-Brunswick et son lieu d’études en Nouvelle-Écosse était trop grande pour lui permettre de faire la navette.

[21] Le prestataire était fondé à quitter son emploi, car il a prouvé qu’il est plus probable qu’improbable que son départ constituait la seule solution raisonnable. Par conséquent, il n’est pas exclu du bénéfice des prestations au titre de l’article 30 de la Loi sur l’AE.

Conclusion

[22] L’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 4 février 2019

Téléconférence

James Kinnee, représentant de l’appelant

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