Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant a travaillé pour l’employeur depuis le 12 novembre 1990. Le 11 janvier 2018, l’appelant a cessé de travailler en raison d’un conflit de travail.

[3] Le 21 mars 2018, l’appelant a commencé à travailler pour un autre employeur, et ce, jusqu’au 25 avril 2018.

[4] L’appelant a présenté une demande de prestations initiale le 7 septembre 2018. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (ci-après « la Commission ») a refusé de verser des prestations à l’appelant, puisqu’il a perdu son emploi en raison d’un conflit collectif.

Question en litige

[5] L’appelant ne conteste pas qu’il a cessé de travailler, le 11 janvier 2018, en raison d’un conflit de travail avec l’employeur. Cependant, l’appelant a soulevé qu’il n’était plus inadmissible à partir du 21 mars 2018, car il a commencé a exercé un emploi assurable de façon régulière.

[6] Est-ce que l’appelant a exercé un emploi assurable de façon régulière à partir du 21 mars 2018 permettant de mettre fin à l’inadmissibilité découlant du fait qu’il ait perdu son emploi précédant en raison d’un conflit collectif ?

Analyse

[7] Un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l’usine où il exerçait un emploi (paragraphe 36 (1) de la Loi sur l’assurance-emploi, ci-après « la Loi »).

[8] Cette inadmissibilité se termine à la fin de l’arrêt de travail ou le jour où le prestataire a commencé à travailler régulièrement à un emploi assurable (paragraphe 36 (1) b) de la Loi)

[9] Un conflit collectif se définit comme étant un conflit entre employeurs et employés, « qui se rattache à l’emploi ou aux modalités d’emploi de certaines personnes ou au fait qu’elles ne sont pas employées. » (article 2 de la Loi)

[10] La Commission a le fardeau de démontrer que l’appelant n’est pas admissible à des prestations (Procureur général du Canada c Benedetti 2009 CAF 283).

Est-ce que l’appelant a exercé un emploi assurable de façon régulière à partir du 21 mars 2018 permettant de mettre fin à l’inadmissibilité découlant du fait qu’il ait perdu son emploi précédant en raison d’un conflit collectif ?

[11] Le 21 mars 2018, l’appelant a commencé à travailler pour un autre employeur, et ce, jusqu’au 25 avril 2018 en raison d’un manque de travail.

[12] L’appelant a expliqué que cet employeur lui a mentionné, à l’embauche, qu’il allait travailler 40 heures par semaine. Ainsi, l’appelant était prêt à travailler 40 heures par semaine.

[13] L’appelant a expliqué qu’il rentrait chaque jour au travail et que son horaire variait chaque jour. L’appelant a expliqué qu’il n’avait pas d’horaire papier et que l’employeur lui avait dit de rentrer à tous les jours du lundi au vendredi. L’appelant a expliqué que l’employeur le laissait partir plus tôt en raison de la température ou d’un manque de travail.

[14] Le relevé d’emploi provenant de cet employeur démontre que l’appelant a travaillé 6 semaines avec un revenu variant entre 100 à 416 $ par semaines pour un total de 106 heures. Les relevés de paie démontrent que le nombre d’heures travaillé par semaine est les suivants :

  • Du 18 mars 2018 au 24 mars 2018 : l’appelant a travaillé 13,5 heures.
  • Du 25 au 31 mars 2018 : l’appelant a travaillé 26 heures.
  • Du 1er au 7 avril 2018 : l’appelant a travaillé 15 heures.
  • Du 8 au 14 avril 2018 : l’appelant a travaillé 23,5 heures.
  • Du 15 au 21 avril 2018 : l’appelant a travaillé 6,25 heures.
  • Du 22 au 28 avril 2018 : l’appelant a travaillé 21,25 heures.

[15] La preuve démontre que l’appelant n’a pas travaillé 40 heures par semaine.

[16] L’appelant a mentionné qu’une journée l’employeur lui a dit qu’il allait faire de la livraison, car il y avait moins de sablage au jet de sable à faire. L’employeur lui a dit que le lendemain, il verrait ce qu’il ferait. Ainsi, le lendemain, l’appelant a envoyé un message texte à l’employeur pour savoir s’il devait rentrer à 16h00. L’employeur lui a répondu : « pas besoin ce soir. Je te tiens au courant pour la suite. »

[17] L’appelant a mentionné qu’à la suite du message texte, il a cessé de se rendre sur les lieux du travail et l’employeur ne l’a jamais rappelé.

[18] L’appelant a expliqué que pour bénéficier d’une allocation du fond de grève, il devait faire du piquetage 10 heures tous les 6 jours. Selon l’appelant, il ne voulait pas abandonner son allocation en ne participant plus au piquetage, par solidarité. Le piquetage pouvait se faire de jour, de nuit, de soir et de fin de semaine.

[19] L’appelant a témoigné que l’horaire de piquetage était établi longtemps d’avance par le syndicat. L’appelant pouvait donc demander une modification dans l’horaire pour faire changer son temps de piquetage. L’appelant a affirmé tant à la Commission qu’au Tribunal qu’il aurait changé son horaire de piquetage en fonction de sa possibilité de travailler à temps plein. Par conséquent, l’appelant est d’avis que son obligation de faire du piquetage ne l’empêchait pas de travailler 40 heures par semaine.

[20] L’employeur a mentionné à la Commission que, normalement, les employés sont embauchés pour 40 heures par semaine et s’ils ne le font pas c’est souvent relié à des bris de machinerie.

[21] L’employeur a également mentionné que l’appelant n’était pas disponible pour travailler et qu’il s’absentait souvent, car il devait aller faire un ou 2 jours de piquetage. L’employeur a mentionné qu’il n’y avait aucune garantie d’heure et que l’appelant travaillait selon les besoins de l’entreprise.

[22] L’employeur a confirmé qu’il avait une entente avec l’appelant de le laisser faire son piquetage et qu’à l’occasion il pouvait manquer son travail, s’il ne pouvait pas se faire remplacer pour faire du piquetage.

[23] L’employeur a expliqué que lorsque l’appelant est parti, il a embauché un autre employé pour le remplacer. L’employeur ne sait pas pourquoi l’appelant a dit qu’il attendait d’être rappelé, car ce n’est pas le cas.

[24] Dans le cadre de la demande de révision, l’employeur a précisé à la Commission que l’appelant travaillait à temps partiel sur appel et qu’il n’avait pas de contrat écrit.

[25] L’appelant a rétorqué qu’il ne manquait pas de travail en raison du piquetage, car il s’était entendu avec son employeur. De plus, selon l’appelant, il ne devait faire qu’un jour de piquetage par 6 jours et il pourrait s’arranger avec ses collègues de travail pour changer son horaire de piquetage et lui permettre de travailler.

[26] L’appelant a témoigné qu’il a dit à l’employeur qu’il pouvait faire changer son horaire de piquetage. Les premières journées, il a travaillé des journées complètes. L’employeur lui a dit qu’il allait faire du sablage au jet de sable, sinon allait faire du tri de pièce. 

[27] L’appelant ne sait pas pourquoi ces quarts de travail ont baissé. Selon lui, il s’agissait d’une mauvaise gestion de l’employeur. 

[28] La Commission est d’avis que la preuve ne démontre pas que l’appelant a occupé un emploi de façon régulière. En effet, pour qu’un prestataire démontre qu’il exerçait un emploi d’une façon régulière il doit démontrer que : 1) l’emploi était ferme, sérieux, authentique, 2) qu’il y avait une continuité dans l’emploi, et 3) qu’il y avait une régularité de l’horaire de travail. Ainsi, selon la Commission, l’inadmissibilité n’aurait donc jamais pris fin dans le cas de l’appelant. 

[29] Le Tribunal est d’avis que l’appelant n’exerçait pas un emploi de façon régulière pour mettre fin à l’inadmissibilité en raison du conflit de travail (paragraphe 36 (1) de la Loi).

[30] La Cour suprême du Canada dans la décision Abrahams c Procureur général du Canada, [1983] 1 R.C.S. 2 a déterminé que pour qu’un prestataire exerce un emploi de façon régulière : « la caractéristique essentielle n’a pas trait à la durée de l’emploi, mais à la régularité de l’horaire de travail. »

[31] Ainsi, la durée de l’emploi n’est pas déterminante pour le qualifier de régulier, mais l’emploi doit être exercé pour une durée suffisante pour être en mesure de déterminer la régularité de l’horaire de travail (Abrahams, supra; Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada c Roy, [1986] 1 C.F. 193).

[32] Le Tribunal a constaté qu’il existe de la part de l’appelant et de l’employeur des versions contradictoires sur certains aspects de la preuve. Or, ces contradictions ne sont pas déterminantes, car les éléments importants ne sont pas contestés.

[33] En effet, la preuve de l’appelant et de l’employeur démontre que celui-ci ne travaillait pas de manière régulière pour l’employeur. L’appelant a lui-même témoigné qu’il rentrait au travail et que son quart de travail se terminait selon les besoins de l’employeur.

[34] Peu importe que l’appelant n’ait pas travaillé en raison de la température ou pour aller faire du piquetage, car le critère à appliquer se situe au niveau de la régularité de l’horaire de travail (Abrahams, supra).

[35] Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’appelant était inadmissible au bénéfice des prestations en raison d’un conflit de travail et que cette inadmissibilité n’a pas pris fin lors de l’embauche par un autre employeur, car l’appelant n’y a pas travaillé de façon régulière (paragraphe 36 (1) de la Loi; Abrahams, supra; Roy, supra).

Conclusion

[36] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 15 mars 2019

Téléconférence

M. B., appelant

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