Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel sur toutes les questions en litige est rejeté. J’estime que le prestataire s’est vu imposer une pénalité pour avoir sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission. De plus, la Commission a bien exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle a imposé un avis de violation grave.

Aperçu

[2] L’appelant, R. E., que j’appellerai le prestataire, a présenté une demande renouvelée de prestations d’assurance-emploi (AE) le 11 décembre 2016. À l’époque où il a déposé sa demande de renouvellement, il a déclaré qu’il n’avait pas travaillé depuis sa dernière demande déposée le 5 janvier 2016.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada, que je désignerai sous le nom de Commission, a mené une enquête. Il a été révélé que le prestataire avait travaillé chez X et avait perdu son emploi parce qu’il ne pouvait plus conduire après une situation de conduite avec facultés affaiblies. La Commission a donné au prestataire l’occasion d’expliquer pourquoi il avait omis de divulguer cet emploi dans sa demande de renouvellement de prestations.

[4] Le prestataire a expliqué qu’il a fait l’objet d’une accusation de conduite avec facultés affaiblies le 5 décembre 2016 et qu’il a été congédié de son emploi parce qu’il a perdu son permis de conduire et que l’employeur n’avait pas d’autres emplois à lui offrir.

[5] La Commission a jugé que le prestataire avait fourni une déclaration fausse ou trompeuse lorsqu’il a renouvelé sa demande en omettant sciemment de déclarer qu’il avait travaillé depuis sa dernière demande et qu’il avait perdu son emploi parce qu’il avait été accusé de conduite avec facultés affaiblies. La Commission a imposé une pénalité et un avis très sérieux de sa violation.

[6] Le prestataire a interjeté appel de la décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») en faisant valoir qu’il avait fourni à la Commission un relevé d’emploi indiquant que son motif de cessation d’emploi était « K Autre » et que la décision est en cours de révision deux ans plus tard. De plus, il soutient qu’il n’a jamais déposé une demande de renouvellement, mais plutôt une demande initiale.

Questions préliminaires

[7] Une audience a été fixée au 16 janvier 2019, mais le prestataire ne s’y est pas présenté parce qu’il n’avait jamais reçu son avis d’audience. Un ajournement a été accordé et une audience a été fixée au 13 février 2019. Le prestataire a assisté à l’audience, mais n’avait pas son dossier. Il a accepté de procéder à l’audience. Toutefois, l’audience a été interrompue en raison d’une difficulté technique. Le prestataire avait été avisé au début de l’audience que s’il y avait déconnexion au cours de l’audience, il devait rappeler ou appeler le Tribunal au numéro de téléphone indiqué dans son avis d’audience. Le prestataire n’a pas rappelé et le Tribunal a tenté à plusieurs reprises de le contacter. Le 15 février 2019, un deuxième ajournement a été accordé et une audience a été fixée au 6 mars 2019. Le 4 mars 2019, le Tribunal a communiqué avec le prestataire qui a confirmé avoir reçu l’avis d’audience et son dossier.

Questions en litige

[8] Devrait-on imposer une pénalité au prestataire?

[9] Le prestataire a-t-il fait une déclaration fausse ou trompeuse? Si oui, a-t-elle été faite sciemment?

[10] La Commission a-t-elle correctement exercé ses directives quant au montant de la pénalité?

[11] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon appropriée lorsqu’elle a imposé un avis de violation?

Analyse

Première question en litige : Devrait-on imposer une pénalité au prestataire?

[12] Des pénalités peuvent être imposées pour de fausses déclarations faites « sciemment »Note de bas de page 1. Cet élément est établi selon la prépondérance des probabilités sur la base des circonstances de chaque affaire ou de la preuve concernant chaque affaireNote de bas de page 2.

[13] J’estime qu’une pénalité est justifiée parce que, selon la prépondérance des probabilités, le prestataire a sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission en omettant de divulguer qu’il avait travaillé chez X et la raison pour laquelle il a perdu son emploi.

Deuxième question en litige : Le prestataire a-t-il fait une déclaration fausse ou trompeuse et l’a-t-il fait sciemment?

[14] Oui, je conclus que le prestataire a sciemment fourni des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission parce que, selon la prépondérance des probabilités, il savait qu’il avait travaillé depuis sa dernière demande de prestations. De plus, il connaissait la raison pour laquelle il ne travaillait plus, à savoir qu’il avait perdu son permis de conduire en raison d’une accusation de conduite avec facultés affaiblies.

[15] Il ne suffit pas que la déclaration soit fausse ou trompeuse pour qu’une pénalité soit imposée; le prestataire doit savoir qu’elle est fausse ou trompeuseNote de bas de page 3. Il n’est pas nécessaire de démontrer qu’il existait un élément mental, comme l’intention de tromper, lorsqu’on conclut qu’une fausse déclaration a été faite sciemmentNote de bas de page 4. La Commission a le fardeau de démontrer que le prestataire a fait sciemment une assertion ou une déclaration fausse ou trompeuse.

[16] La Commission soutient qu’en l’espèce, elle s’est acquittée du fardeau d’établir que le prestataire a présenté les faits de façon erronée lorsqu’il a soumis des déclarations bihebdomadaires pour demander des prestations, ayant sciemment omis de fournir l’information qu’il avait travaillé chez X dans sa demande et qu’il avait perdu cet emploi en raison d’une accusation de conduite avec facultés affaiblies. La Commission soutient que le prestataire savait qu’il avait travaillé chez cet employeur et n’a fourni aucune explication raisonnable de la non-divulgation de cette information factuelle.

[17] Je suis convaincue que la Commission s’est acquittée du fardeau de la preuve puisqu’elle a fourni une copie de la demande de renouvellement des prestations du prestataire dans laquelle le prestataire a répondu « Non » à la question « Avez-vous travaillé depuis que vous avez rempli votre dernière demande de prestations d’assurance-emploi? » Le prestataire a accepté qu’il ait convenu avoir accepté ses droits et responsabilités et l’attestation pour présenter sa demande de prestations d’AE.

[18] Il incombe désormais au prestataire de prouver que les déclarations n’ont pas été faites sciemment et de fournir une explication raisonnable des renseignements erronés.

[19] Le prestataire a déclaré à la Commission que lorsqu’il a déposé sa demande de prestations, le relevé d’emploi (RE) indiquait que le motif de sa cessation d’emploi était « K Autre » et qu’il aurait dû être établi à ce moment-là qu’il n’était pas admissible aux prestations. Il a déclaré qu’il n’avait pas présenté une demande de renouvellement, mais plutôt une nouvelle demande avec un nouveau RE.

[20] Lors d’une autre conversation avec le prestataire, la Commission lui a expliqué qu’il avait déposé une demande de renouvellement et il a répondu non à la question « Avez-vous travaillé depuis que vous avez soumis votre dernière demande de prestations d’assurance-emploi? » En raison de cette réponse, sa demande a été renouvelée et il a commencé à recevoir des prestations. De plus, la Commission a demandé au prestataire pourquoi il n’a pas communiqué avec la Commission s’il savait que le motif de cessation d’emploi était un congédiement en raison de la perte de son permis de conduire causée par une accusation pour conduite avec facultés affaiblies. Le prestataire a répondu qu’il n’avait aucunement l’intention de frauder le gouvernement.

[21] Le prestataire a témoigné qu’en ce qui concerne la fausse déclaration, il ne croit pas avoir fait quoi que ce soit de mal. Il a déclaré qu’il a fait l’objet d’une accusation pour conduite avec facultés affaiblies le 5 décembre et qu’il a reçu un RE le 11 décembre. Il a indiqué qu’il était allé demander des prestations d’assurance-emploi et qu’il avait demandé à l’agente la signification de K. Elle lui avait expliqué que cela voulait dire autre chose. Il a mentionné que dans la case de commentaires, il était indiqué qu’il avait reçu une contravention pour conduite avec facultés affaiblies. Le prestataire a déclaré qu’après avoir déposé sa demande, il a reçu ses prestations rapidement, jusqu’en avril 2017. Il a ajouté que, lorsque sa demande a pris fin, il est retourné au travail.

[22] Le prestataire a témoigné qu’il ne croit pas avoir ouvert une demande existante et qu’il veut connaître les dates de début et de fin de cette demande. Il a déclaré qu’il veut savoir pour qui il travaillait au début de cette demande parce qu’il ne s’en souvient pas. Il a déclaré que le Tribunal devrait avoir toute l’information sur ses demandes antérieures et sur ses anciens employeurs, qu’il ne remboursera pas cet argent et qu’il ne sait pas pourquoi le Tribunal ne peut le lui dire, puisqu’il doit avoir toutes les réponses.

[23] Le prestataire a témoigné qu’il ne sait pas pourquoi il a répondu « non ». De plus, il ne comprend pas comment une mauvaise réponse à cette question peut faire une différence. Il a déclaré qu’il a reçu des prestations d’assurance-emploi 100 fois et que cela n’a jamais posé problème. Il a déclaré que la prochaine fois qu’il ne comprendra pas une question, il demandera des éclaircissements.

[24] L’appelant a témoigné qu’il ne se rappelle pas avoir présenté une demande de prestations d’assurance-emploi le 24 juillet 2017 et qu’il a répondu « non » à la même question que celle alléguée par la Commission. Il a déclaré qu’on lui avait remis un RE électronique du X, mais qu’il n’avait pas accumulé suffisamment d’heures. De plus, il n’est pas certain s’il a présenté une demande d’assurance-emploi parce qu’il croit avoir commencé à travailler le 1er août 2017 chez X.

[25] J’ai pris en considération l’argument du prestataire selon lequel il croit que je devrais connaître ou être en mesure de lui fournir tous les renseignements relatifs à ses demandes d’assurance-emploi antérieures et à l’endroit où il a travaillé dans le passé. Toutefois, je suis chargé de rendre une décision sur la question dont je suis saisi et, en l’espèce, de décider si le prestataire devrait se voir imposer une pénalité pour avoir sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs à la Commission. De plus, il incombe au prestataire de prouver que les déclarations n’ont pas été faites sciemment et de fournir une explication raisonnable de l’information erronée. Le prestataire doit-il prouver s’il a travaillé et où il a travaillé?

[26] Je ne suis pas convaincue que le prestataire a fourni une explication raisonnable, en ce sens qu’il ignorait qu’il présentait une demande existante, parce qu’il a beaucoup d’expérience du programme d’AE. Comme il l’a indiqué, il a fait 100 demandes de prestations d’assurance-emploi au fil des ans et la question est très simple. « Avez-vous travaillé depuis que vous avez rempli votre dernière demande de prestations d’assurance-emploi? »

[27] D’après les déclarations du prestataire, je conclus que la Commission n’aurait pas dû le rémunérer s’il n’était pas admissible à des prestations parce qu’il a perdu son emploi en raison de sa conduite avec facultés affaiblies. Cela suggère, selon la prépondérance des probabilités, qu’il aurait dû savoir qu’il devait divulguer cette information à la Commission.

[28] Le prestataire a fait valoir qu’il ne croit pas avoir fait quoi que ce soit de mal et qu’il ne comprend pas comment le fait de donner une réponse incorrecte pourrait lui causer tant de problèmes. Il a déclaré que son RE indiquait « K » et que, dans la case de commentaires, il mentionnait qu’il avait été accusé de conduite avec facultés affaiblies, et il a demandé à l’agente ce que cela signifiait, de sorte que la Commission aurait dû savoir.

[29] Je ne crois pas que la preuve puisse étayer son argument parce qu’un prestataire a la responsabilité de fournir à la Commission des renseignements exacts ou de l’informer de sa propre situation. En l’espèce, le prestataire a reconnu dans sa demande de renouvellement que les renseignements étaient exacts et, ce faisant, la Commission a cru ses renseignements véridiques et a procédé à sa demande rapidement, comme l’a confirmé le prestataire. Toutefois, d’après les faits, le prestataire a travaillé depuis sa dernière demande, ce à quoi il a mal répondu. Il n’a jamais informé la Commission de la raison pour laquelle il était devenu sans emploi et, en particulier, qu’il avait été accusé de conduite avec facultés affaiblies. J’accepte l’observation de la Commission selon laquelle le relevé d’emploi a été émis par l’employeur sur Internet et ne constituait pas une divulgation par le prestataire.

Troisième question en litige : La Commission a-t-elle correctement exercé ses directives quant au montant de la pénalité?

[30] Oui, je conclus que la Commission a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire pour établir le montant de la pénalité parce qu’elle a tenu compte de tous les renseignements et explications et que le prestataire n’a pas fourni de circonstances atténuantes à la Commission ou à moi-même à l’audience.

[31] J’aurais pris en compte l’argument du prestataire selon lequel il ne savait pas qu’il avait une demande existante si je considérais une circonstance atténuante. Toutefois, je ne suis pas convaincue que le prestataire l’ignorait parce qu’il a témoigné qu’il est un utilisateur fréquent du programme d’AE. Il savait qu’il recevrait ses prestations rapidement et qu’il n’avait droit à des prestations que pendant 16 semaines. Je suis d’avis qu’une personne qui a utilisé le programme d’AE au moins 100 fois, comme l’a déclaré le prestataire, saurait qu’elle active une demande renouvelée ou une nouvelle demande. De plus, j’estime que le prestataire saurait répondre correctement aux questions.

[32] Il n’y a pas de pouvoir d’ingérence dans les décisions discrétionnaires de la Commission, sauf s’il peut être établi que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière non judiciaire ou qu’elle a agi de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 5.

[33] La Commission soutient qu’en l’espèce, elle s’est acquittée du fardeau d’établir que le prestataire a fait une présentation erronée des faits lorsqu’il a soumis des déclarations bihebdomadaires pour demander des prestations, ayant sciemment omis de fournir l’information qu’il avait travaillé chez X sur sa demande et qu’il avait perdu cet emploi en raison d’une accusation de conduite avec facultés affaiblies. La Commission allègue que le prestataire savait qu’il avait travaillé chez cet employeur et n’a fourni aucune explication raisonnable pour avoir omis de divulguer cette information.

[34] J’accepte l’observation de la Commission selon laquelle la pénalité a été imposée au taux de 50 % du trop-payé connexe de 8 384,00 $ pour une première infraction d’avoir fait une fausse déclaration dans une demande de prestations, puis d’avoir des prestations pour 8 demandes fondées sur cette fausse déclaration. Une pénalité de 4 192,00 $ a donc été imposée.

Quatrième question en litige : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire correctement lorsqu’elle a imposé un avis de violation?

[35] J’ai compétence pour décider si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire lorsqu’elle a remis l’avis de violationNote de bas de page 6. Pour que j’intervienne dans la décision de la Commission, je dois juger que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire lorsqu’elle a décidé de donner l’avis de violation.

[36] Je ne peux intervenir, car je conclus que la Commission a bien exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle a imposé un avis de violation grave. Je conclus que la Commission a agi de façon judiciaire parce qu’elle a pris en considération l’impact global d’émettre un avis de violation au prestataire, incluant les circonstances atténuantes, les infractions antérieures et l’impact de l’avis de violation sur la capacité du prestataire à se qualifier sur les prochaines demandes; il est donc établi qu’une violation s’applique en l’espèce.

[37] La Commission soutient que la découverte d’une déclaration trompeuse a donné lieu à un trop-payé de 8 384,00 $. Par conséquent, le prestataire est responsable d’une violation qualifiée de très graveNote de bas de page 7.

[38] Le prestataire a témoigné que s’il avait commis une erreur, c’était une erreur honnête et qu’il n’avait aucune raison d’essayer de commettre une fraude contre le gouvernement. Il a déclaré qu’il n’y avait aucune circonstance atténuante à prendre en considération. Il a indiqué qu’il n’envisage pas de toucher des prestations d’assurance-emploi pendant longtemps. Il a déclaré que s’il perdait cet emploi, il serait en mesure de trouver un autre emploi, car le contexte de l’emploi en Colombie-Britannique est bon en ce moment.

[39] Je suis convaincue de cela parce que le prestataire n’a pas fourni de circonstances atténuantes à prendre en compte au cours de l’audience et qu’il a témoigné qu’il ne croyait pas avoir besoin à nouveau de prestations d’assurance-emploi pendant une très longue période; j’estime donc que l’avis de violation n’aurait aucune incidence sur sa capacité d’être admissible à une demande future.

Conclusion

[40] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

6 mars 2019

Téléconférence

R. E., appelant

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