Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas justifié de quitter volontairement son emploi.

Aperçu

[2] L’appelant travaillait chez X. Il a d’abord déclaré avoir quitté son emploi le 14 avril 2018 pour des raisons médicales parce qu’il avait mal à l’épaule et qu’il avait de la difficulté dans l’exécution de certaines tâches. Au moment de la révision, l’appelant a indiqué qu’il vivait du harcèlement psychologique de la part de son superviseur. La Commission a rejeté la demande de l’appelant parce qu’elle a conclu que quitter volontairement son emploi ne constituait pas la seule solution raisonnable dans ce cas. Le Tribunal doit déterminer si l’appelant était justifié de quitter volontairement son emploi.

Question en litige

[3] L’appelant a-t-il été victime de harcèlement psychologique?

[4] Quitter son emploi constituait-il la seule solution raisonnable pour l’appelant?

Question préliminaire

[5] L’appelant était absent lors de l’audience ayant d’abord été fixée le 21 février 2019. L’appelant n’a fourni aucun numéro de téléphone ou adresse courriel permettant au Tribunal de le contacter autrement que par la poste. Le 21 février 2019, l’avis de l’audience a été délivré par la poste prioritaire et l’appelant a accusé réception de l’avis de l’audience. Le Tribunal ne connaît pas l’heure à laquelle l’appelant a reçu l’avis de l’audience, mais puisque l’appelant n’a pas contacté le Tribunal, ni le greffe ni pour se joindre à l’audience, le Tribunal a ajourné l’audience afin de permettre à l’appelant de se préparer et de se présenter à l’audience.

[6] Un nouvel avis de l’audience lui a été acheminé par la poste prioritaire et par la poste régulière. L’audience a donc eu lieu le 21 mars 2019. L’appelant était absent lors de l’audience. En aucun moment il n’a tenté de joindre le Tribunal. Puisque le Tribunal est convaincu qu’il a été avisé de la tenue de l’audience, le Tribunal a conclu que les deux parties ont été avisées de la tenue de l’audience et il a procédé en l’absence de celles-ci.

Analyse

Départ volontaire

[7] Le Tribunal doit déterminer si l’appelant a quitté volontairement son emploi et la Commission doit prouver que le départ était volontaire (Green 2012 FCA 313; White 2011 CAF 190; Patel 2010 FCA 95).

[8] L’appelant admet avoir quitté volontairement son emploi après avoir subi un accident du travail le 13 février 2018. Il a déclaré avoir quitté son emploi parce qu’il avait mal à l’épaule et qu’il avait de la difficulté à réaliser certaines tâches. Il a également indiqué ne pas accepter de se « faire crier après » par son superviseur.

[9] Le Tribunal conclut que l’appelant a quitté volontairement son emploi le 14 avril 2018 (Green 2012 FCA 313; White 2011 CAF 190; Patel 2010 FCA 95).

L’appelant a-t-il été victime de harcèlement psychologique?

[10] L’appelant a déclaré à la Commission avoir subi un accident du travail le 13 février 2018. Puisque l’appelant avait une contusion à l’épaule, l’employeur lui a offert des travaux légers au moment de son retour au travail. Après une semaine, l’appelant aurait demandé à l’employeur de réintégrer son poste, mais l’employeur aurait refusé en indiquant que l’appelant n’était plus capable de faire ce travail. L’employeur a demandé à l’appelant de travailler comme manœuvre à la ligne d’assemblage.

[11] L’appelant a accepté et il a alors commencé à travailler sur deux lignes d’assemblage. Puis, on lui a donné trois puis quatre lignes d’assemblage. L’appelant a déclaré qu’il ne pouvait faire face à quatre lignes d’assemblage.

[12] L’appelant a également déclaré avoir demandé à quelques reprises d’occuper un poste à l’extrusion et que l’employeur le lui avait promis, mais qu’au moment de quitter il n’avait pas encore obtenu ce poste. Pour cette raison, il aurait quitté son emploi.

[13] L’appelant a expliqué que suite à son accident, il n’avait pas subi de diminution de salaire. Deux semaines avant de quitter son emploi, le médecin a fourni un billet médical à l’appelant indiquant qu’il était en congé de maladie. L’employeur ne payait pas les journées en maladie, mais l’appelant a déclaré qu’il est tout de même allé travailler le samedi et le dimanche. Il a alors reçu une paie au montant de 320$ qu’il considérait insuffisante. Il a également déclaré avoir quitté pour cette raison.

[14] Au moment de présenter sa demande de révision, l’appelant a indiqué qu’il avait été harcelé psychologiquement par l’employeur, qu’il avait été mal traité et qu’il ne pouvait continuer à travailler pour cette entreprise. L’appelant a expliqué que son superviseur l’aurait poussé à faire plus de « lignes » sur la ligne d’assemblage et lui aurait « crié après ». L’appelant a pourtant déclaré qu’il n’avait pas consulté un médecin ou déposé une plainte pour cette raison.

[15] Dans son avis d’appel, l’appelant a déclaré que suite à un accident du travail, son superviseur est devenu méchant.

[16] L’employeur a déclaré à la Commission qu’au moment de quitter son emploi, l’appelant est allé voir les « ressources humaines » et il aurait annoncé qu’il quittait et qu’il n’avait pas besoin de travailler. L’employeur a expliqué que l’appelant avait été engagé comme aide à l’assemblage et qu’il n’y avait pas eu de changement à son poste. L’employeur a indiqué que si l’appelant voulait obtenir un autre poste, il pouvait postuler sur les postes affichés, mais l’employeur a précisé que l’appelant ne l’avait jamais fait.

[17] La Commission soutient que les déclarations de l’appelant sont contradictoires et qu’il a consulté un médecin qui considérait qu’il était apte à occuper son emploi. Elle affirme que l’appelant n’a pas démontré qu’il avait des problèmes de santé qui l’obligeait à quitter son emploi. Elle soutient que, bien que l’appelant ait indiqué qu’il avait subi du harcèlement, du racisme et que son chef d’équipe criait « après lui », il pouvait consulter des intervenants, tel que son syndicat ou déposer une plainte, afin de l’aider à régler ce problème, ce qu’il n’a pas fait.

[18] Le Tribunal est également de cet avis. Le Tribunal estime que l’appelant était en période d’adaptation suite à son accident du travail survenu le 13 février 2018. Comme il avait d’abord été embauché pour travailler sur la ligne d’assemblage, l’employeur lui a offert ce travail, mais sans modification à la rémunération de l’appelant. L’appelant a déclaré avoir trouvé difficile l’adaptation à trois lignes d’assemblage puis à quatre lignes. Il a déclaré que le chef d’équipe lui aurait « crié après ».

[19] Le Tribunal est d’avis que, bien que cette situation vécue par l’appelant ait été ressentie comme étant désagréable, ces explications ne sont pas suffisantes pour conclure qu’il y a eu présence de harcèlement psychologique de la part de son supérieur immédiat. L’appelant a déclaré avoir quitté parce qu’il n’aimait pas le travail qu’il effectuait, mais il n’a pas postulé sur d’autres postes. Il a également déclaré avoir quitté son emploi le 14 avril 2018 parce qu’il ne comprenait pas son chèque de paie et qu’il n’avait pas obtenu les renseignements nécessaires. Cependant, la preuve n’est pas suffisamment circonstanciée pour permettre au Tribunal de conclure que les situations relatées par l’appelant alors qu’il travaillait sur la ligne d’assemblage constituent du harcèlement. Cette situation semble être un épisode isolé avec son superviseur qui doit également assurer la sécurité de la ligne d’assemblage. L’appelant n’était pas habitué d’interagir avec quatre lignes d’assemblage et il ressentait une pression, cependant il n’a pas discuté de cette situation ni avec les ressources humaines chez l’employeur ni avec l’employeur lui-même ou son supérieur immédiat ni, non plus, avec le syndicat, le cas échéant.

[20] Le Tribunal est d’avis que, même si l’appelant considère que le fait que son superviseur lui ait crié après constitue du harcèlement, et bien que cet épisode ait pu être désagréable ou constituer un manque de respect, le Tribunal ne peut conclure de la preuve présentée que cette personne a prononcé des paroles humiliantes envers l’appelant. Aucune preuve n’a été présentée en ce sens.

[21] Le Tribunal est d’avis que l’appelant ne peut se prévaloir de l’exception prévue à l’alinéa 29c)i) de la Loi (harcèlement de nature sexuelle ou autre) pour justifier son départ volontaire. Le Tribunal est plutôt d’avis, comme l’appelant l’a déclaré à la Commission, qu’il a quitté son emploi parce qu’il n’aimait pas travailler sur la ligne d’assemblage et que, suite à un arrêt pour maladie, il ne comprenait pas les indications sur son chèque de paie.

Quitter son emploi constituait-il la seule solution raisonnable pour l’appelant?

[22] Puisque la Commission a démontré que le départ était volontaire, l’appelant doit démontrer qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi (Green 2012 FCA 313; White 2011 CAF 190; Patel 2010 FCA 95).

[23] La Commission soutient que les conditions salariales de l’appelant n’ont pas été modifiées et que même s’il n’avait pas obtenu une réponse concernant son chèque de paie, il aurait pu attendre d’obtenir cette réponse avant de quitter son emploi. La Commission affirme également qu’avant de quitter son emploi parce qu’il ne pouvait pas suffire à la ligne d’assemblage, l’appelant aurait pu consulter d’autres intervenants afin de régler son problème plutôt que de quitter son emploi pour cette raison.

[24] Aussi, la Commission affirme que les déclarations de l’appelant sont contradictoires concernant un éventuel poste qu’il aurait aimé occuper. En ce sens, l’employeur a expliqué que l’appelant pouvait postuler pour obtenir un poste lorsqu’il y avait un affichage, mais qu’il ne l’avait pas fait. La Commission affirme que l’appelant aurait pu continuer à travailler jusqu’à ce qu’il obtienne un poste qui lui convenait mieux.

[25] Le Tribunal est également de cet avis. L’appelant avait la possibilité de postuler pour obtenir un autre poste chez l’employeur, mais il aurait également pu amorcer une recherche d’emploi chez un autre employeur, ce qu’il n’a pas fait.

[26] Le Tribunal précise que le prestataire a, dans la plupart des cas, l’obligation de tenter de démontrer qu’il a fait des efforts pour trouver un autre emploi avant de prendre la décision unilatérale de quitter celui qu’il occupait (White 2011 CAF 190).

[27] Or, l’appelant n’a non seulement pas postulé pour obtenir un poste qui l’intéressait chez l’employeur, mais il ne l’a pas fait non plus chez d’autres éventuels employeurs. Une solution pour l’appelant aurait été d’attendre d’avoir l’assurance raisonnable d’un autre emploi avant de cesser d’occuper celui qu’il occupait.

[28] Le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas justifié de quitter volontairement son emploi le 14 avril 2018 parce que la décision de quitter son emploi n’était pas la seule solution raisonnable dans ce cas (Rena-Astronomo, A-141-97; Tanguay, A-1458-84; Peace 2004 CAF 56 (CanLII); Landry, A-1210-92).

Conclusion

[29] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’audience :

21 mars 2019

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