Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – L’arrêt Canada c Chan, (1994) ACF no 1916 (CA) a été appliqué afin de déterminer si les renseignements fournis par le demandeur à l’appui de sa demande d’annulation ou de modification correspondaient à des faits nouveaux pour l’application de l’article 66(1)(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social – Il est manifeste que le but de l’article 66 n’est pas de permettre à un demandeur de plaider à nouveau sa demande de permission d’en appeler alors que la division d’appel a déjà statué sur celle-ci.

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande d’annulation ou de modification de la décision relative à la demande de permission d’en appeler, rendue par la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada le 29 mai 2018, est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, M. E., a travaillé au sein de X jusqu’au 11 mars 2016. Le lendemain, il a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi. Le 4 avril 2016, la défenderesse, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, a rejeté la demande de prestations du prestataire après avoir conclu que celui-ci avait quitté volontairement son emploi sans justification. Le 31 janvier 2017, soit plus de 30 jours après avoir reçu communication de la décision de la Commission, le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. La Commission a conclu que le prestataire avait présenté sa demande de révision en retard et a donc refusé d’effectuer une révision. Le prestataire a interjeté appel devant la division générale.

[3] La division générale a tenu une audience par téléconférence. Le prestataire a participé à l’audience. La division générale a examiné la question de savoir si la Commission avait été fondée à refuser de proroger le délai dans lequel le prestataire pouvait présenter une demande de révision. La division générale a conclu que la Commission n’avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. La division générale a ensuite examiné la question de savoir si le prestataire avait fourni une explication raisonnable pour demander un délai supplémentaire ainsi que la question de savoir s’il avait manifesté l’intention constante de demander une révision. La division générale a conclu par la négative. Elle a refusé de proroger le délai afin que le prestataire puisse présenter une demande de révision et a ainsi rejeté l’appel.

[4] Le prestataire a présenté, en temps opportun, une demande de permission d’en appeler à la division d’appel. Le 29 mai 2018, la division d’appel lui a refusé la permission d’en appeler. Elle a conclu que l’appel du prestataire n’avait aucune chance raisonnable de succès. Elle a jugé que le prestataire n’avait présenté aucune preuve montrant que la division générale l’aurait privé d’une audience complète et équitable, que la division générale avait commis une erreur de droit, ou qu’un renseignement erroné qu’il aurait pu recevoir était pertinent aux questions que la division générale avait dû trancher.

[5] Le 6 juin 2018, dans le délai légal d’un an, le prestataire a présenté une demande d’annulation ou de modification de la décision relative à la demande de permission d’en appeler rendue par la division d’appel en vertu de l’article 66 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[6] Le 26 juin 2018, le prestataire a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire de la décision relative à la demande de permission d’en appeler rendue par la division d’appel. La division d’appel a donc suspendu la demande d’annulation ou de modification du prestataire.

[7] Le 18 février 2019, la Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire du prestataire pour cause de retard.

[8] Le 24 mars 2019, le prestataire a demandé à la division d’appel de rendre une décision concernant sa demande d’annulation ou de modification de la décision relative à la demande de permission d’en appeler rendue par la division d’appel le 29 mai 2018.

Questions en litige

[9] Le Tribunal doit déterminer si les renseignements soumis par le prestataire à l’appui de sa demande d’annulation ou de modification constituent des faits nouveaux, ou si la décision de la division d’appel a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait.

Analyse

[10] Le Tribunal a examiné les arguments présentés par le prestataire à l’appui de sa demande d’annulation ou de modification de la décision relative à la demande de permission d’en appeler rendue par la division d’appel.

[11] L’article 66 de la Loi sur le MEDS prévoit ce qui suit :

Modification de la décision

66(1) Le Tribunal peut annuler ou modifier toute décision qu’il a rendue relativement à une demande particulière :

a) dans le cas d’une décision visant la Loi sur l’assurance-emploi, si des faits nouveaux lui sont présentés ou s’il est convaincu que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait [...].

[12] Cette disposition de laLoi sur le MEDS reprend essentiellement les termes de l’article 120 de la Loi sur l’assurance-emploi, qui a été abrogé depuis et qui était en vigueur avant le 1er avril 2013. L’article se lit comme suit :

Modification de la décision

120 La Commission, un conseil arbitral ou le juge-arbitre peut annuler ou modifier toute décision relative à une demande particulière de prestations si on lui présente des faits nouveaux ou si, selon sa conviction, la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait.

[13] La Cour d’appel fédérale a déjà défini le critère servant à établir des « faits nouveaux » dans l’arrêt Canada c Chan, (1994) ACF no 1916 (CA), et ce critère a été récemment confirmé dans l’arrêt Canada c Hines, 2011 CAF 252, comme suit :

[14] Le critère pour déterminer si des « faits nouveaux » ont été présentés au sens de cette disposition est établi depuis longtemps. Il a été réaffirmé dans Canada (Procureur général) c Chan, [1994] A.C.F. no 1916, où le juge Décary – se référant à la disposition qui a précédé à l’article 120, dont le libellé est essentiellement le même – a déclaré ce qui suit (paragraphe 10) :

[…] Les « faits nouveaux », aux fins du réexamen de la décision du juge-arbitre recherché conformément à l’article 86 de la Loi, sont des faits qui se sont produits après que la décision a été rendue ou qui ont eu lieu avant la décision mais n’auraient pu être découverts par une prestataire diligente et, dans les deux cas, les faits allégués doivent avoir décidé de la question soumise au juge‑arbitre.

[14] À l’appui de sa demande, le prestataire soutient qu’il a reçu le 2 mai 2018 une lettre de la division d’appel datée du 25 avril 2018, lui demandant d’expliquer pourquoi il avait présenté sa demande de permission d’en appeler en retard. On lui accordait un délai de réponse de 40 jours. Le prestataire fait valoir que la décision relative à la demande de permission d’en appeler a été rendue avant qu’il n’ait eu la chance d’obtenir des conseils juridiques et de répondre à la lettre. Il avait été surpris que la division d’appel rende sa décision avant le délai de 40 jours. Il souhaite donc avoir la possibilité de répondre à la lettre de la division d’appel.

[15] Le prestataire avait bien reçu une lettre de la division d’appel lui demandant d’expliquer pourquoi il avait possiblement présenté sa demande de permission d’en appeler en retard. Comme la division d’appel a ensuite conclu que la demande avait été présentée à temps, le prestataire n’avait plus besoin de répondre à la lettre du 25 avril 2018 et la division d’appel a instruit sa demande de permission d’en appeler. Par conséquent, le prestataire n’a subi aucun préjudice en ne répondant pas à la lettre relative à sa demande tardive.

[16] Le prestataire a présenté à deux reprises ses moyens d’appel à l’appui de sa demande de permission d’en appeler avant que la division d’appel ne rende sa décision le 29 mai 2018Note de bas de page 1.

[17] La demande de permission d’en appeler du prestataire a été rejetée au motif que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès. La division d’appel a conclu que le prestataire n’avait présenté aucune preuve révélant que la division générale l’avait privé d’une audience complète et équitable, que la division générale avait commis une erreur de droit, ou qu’un renseignement erroné qu’il aurait pu recevoir était pertinent aux questions que la division générale avait dû trancher.

[18] Le Tribunal constate que le prestataire a participé à l’audience devant la division générale et qu’il a parfaitement eu l’occasion de présenter tous les faits relatifs à son dossier ainsi que de déposer tous les documents qu’il souhaitait soumettre pour soutenir sa cause.

[19] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas raisonnablement expliqué la présentation tardive de sa demande de révision. Elle a également conclu que le prestataire n’avait pas manifesté l’intention constante de demander une révision. La division générale a conclu que le prestataire ne devrait pas bénéficier d’un délai supplémentaire pour présenter sa demande de révision.

[20] La division d’appel conclut que la demande d’annulation ou de modification du prestataire ne soulève aucun fait qui se serait produit après que la décision eût été rendue ou qui aurait eu lieu avant la décision, mais qui n’aurait pu être découvert malgré la diligence du prestataire.

[21] De plus, le prestataire n’a pas démontré que la décision de la division d’appel aurait été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou qu’elle aurait été fondée sur une erreur relative à un tel fait.

[22] Par sa demande d’annulation ou de modification de la décision relative à la demande de permission d’en appeler rendue par la division d’appel, le prestataire semble tenter de plaider à nouveau sa demande de permission d’en appeler.

[23] L’objectif de l’article 66 de la Loi sur le MEDS n’est certainement pas de permettre à une partie prestataire de plaider à nouveau sa demande de permission d’en appeler alors que la division d’appel a déjà rendu une décision relativement à cette demande.

[24] Par conséquent, et pour les motifs qui précèdent, le Tribunal n’a d’autre choix que de rejeter la demande d’annulation ou de modification du prestataire.

Conclusion

[25] La demande d’annulation ou de modification de la décision rendue par la division d’appel le 29 mai 2018 est rejetée.

Mode d’instruction :

Comparutions :

Sur la foi du dossier

M. E., non représenté

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