Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. L’appelante, D. M., que j’appellerai la prestataire, n’est pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté volontairement son emploi auprès de X sans justification.

Aperçu

[2] La prestataire travaillait comme employée occasionnelle pour X, au terme d’un contrat sur une base mensuelle, lorsqu’elle a quitté volontairement son emploi le 14 décembre 2017. La prestataire a mentionné qu’elle a choisi de suivre une formation rémunérée auprès d’un autre employeur, à compter du 29 novembre 2017, dans l’espoir d’obtenir un emploi pour cet employeur.

[3] Environ deux mois plus tard, la prestataire a obtenu un contrat d’emploi temporaire de cinq mois pour le nouvel employeur à compter du 5 février 2018 et a perdu cet emploi en raison d’un manque de travail le 27 avril 2018. Le 21 mai 2018, la prestataire a présenté une demande initiale de prestations et a établi une période de référence débutant le 29 avril 2018.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a déterminé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi auprès de X sans justification et a imposé une exclusion du bénéfice des prestations d’une durée indéterminée. La Commission a aussi déterminé que la prestataire n’était pas admissible aux prestations régulières parce qu’elle n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable depuis qu’elle avait quitté son emploi chez X.

[5] La Commission a révisé sa décision et l’a maintenue. La prestataire interjette appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale et fait valoir qu’elle a quitté son emploi temporaire auprès de X pour suivre une formation dans l’espoir d’obtenir un emploi pour le nouvel employeur.

Questions en litige

[6] La prestataire a-t-elle quitté volontairement son emploi auprès de X?

[7] Dans l’affirmative, la prestataire a-t-elle démontré qu’elle n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi?

[8] La prestataire a-t-elle accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable depuis la date d’entrée en vigueur de l’exclusion?

Analyse

[9] Comme cela a été expliqué pendant l’audience, si la prestataire a quitté volontairement son emploi sans justification, elle est exclue du bénéfice des prestations régulières, sauf si, depuis qu’elle a quitté son emploi, elle a occupé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis pour être admissible aux prestationsNote de bas de page 1.

[10] La Commission a le fardeau de prouver que la prestataire a volontairement quitté son emploi. Ensuite, il incombera à la prestataire de démontrer qu’elle était fondée à quitter son emploiNote de bas de page 2.

1) Départ volontaire

[11] Pour déterminer si la prestataire a quitté volontairement son emploi, la question suivante doit être posée : la prestataire avait-elle le choix de rester ou de partirNote de bas de page 3?

[12] Personne ne conteste le fait que la prestataire a fait le choix de quitter volontairement son emploi temporaire chez X. J’estime donc que la Commission s’est acquittée de son fardeau.

2) Justification

[13] Pour déterminer si une prestataire était fondée à quitter volontairement son emploi, je dois examiner l’ensemble des circonstances. Je dois aussi examiner si le départ de la prestataire constituait la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 4.

[14] Une liste non exhaustive de circonstances qui doivent être prises en considération pour déterminer si une personne était fondée à quitter son emploi se trouve à l’article 29(c) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi). L’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat figure parmi ces circonstances.

[15] La simple présence de l’une des circonstances énumérées à l’article 29(c) de la Loi ne prouve pas automatiquement que la prestataire était fondée à quitter son emploi. La prestataire doit quand même prouver que sa seule solution raisonnable était de quitter son emploi.

a) Ensemble des circonstances

[16] Au moment de déterminer si la prestataire était fondée à quitter son emploi, les circonstances qu’il faut considérer au titre de l’article 29(c) de la Loi sont celles qui existaient à l’époque où la prestataire a démissionné de son emploiNote de bas de page 5.

i)  Assurance raisonnable d’un autre emploi

[17] La prestataire a mentionné qu’elle avait été embauchée et ajoutée au bassin de candidats temporaires du nouvel employeur quelques semaines avant d’être embauchée chez X; cependant, le nouvel employeur ne lui a pas offert d’heures de travail à ce moment. La prestataire a affirmé qu’elle travaillait sur une base mensuelle pour X lorsqu’on lui a dit qu’elle pourrait bientôt avoir une possibilité d’emploi auprès du nouvel employeur si elle effectuait la formation exigée. La prestataire a mentionné que c’est à ce moment qu’elle a décidé de quitter X sur le champ, quelques semaines avant que les cours de formation ne commencent. Elle a aussi déclaré qu’elle a laissé X parce qu’elle n’aimait pas cet emploi. Elle a mentionné que son emploi chez X exigeait qu’elle ramasse de l’argent et qu’elle travaille dans le domaine des soins palliatifs, ce qu’elle trouvait trop stressant.

[18] La prestataire ne conteste pas la preuve de la Commission selon laquelle le 15 juin 2018, elle a déclaré qu’elle aurait pu continuer à travailler chez X jusqu’à ce qu’elle reçoive une lettre du nouvel employeur. Pas plus qu’elle ne conteste qu’elle a fait le choix personnel de quitter son emploi auprès de X avant de recevoir une offre d’emploi ferme du nouvel employeur.

[19] Même si la prestataire a fourni une nouvelle preuve relativement au moment où elle a d’abord été embauchée à titre d’employée temporaire auprès du nouvel employeur, je dois tenir compte du fait que lorsqu’il n’y a qu’une offre d’emploi conditionnelle, ou pas d’offre d’emploi concrète, le critère de l’assurance raisonnable d’un autre emploi n’est pas satisfaitNote de bas de page 6.

[20] J’estime que la preuve, comme elle est énoncée ci-dessus, appuie une conclusion selon laquelle la prestataire n’a pas prouvé qu’elle avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi au moment où elle a quitté son emploi chez X le 14 décembre 2017. La prestataire a admis volontiers qu’elle n’avait pas d’offre de contrat ni d’heures de travail prévues de la part du nouvel employeur lorsqu’elle a quitté X. La prestataire a fait valoir qu’elle agissait sur le fondement qu’elle avait besoin de suivre la formation additionnelle, offerte par le nouvel employeur, avant de pouvoir obtenir un poste, et qu’elle ne pouvait pas assister à cette formation pendant qu’elle travaillait à X. Par conséquent, j’estime que la prestataire n’a pas démontré qu’elle avait quitté son emploi auprès de X parce qu’elle avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi.

ii) Départ pour suivre une formation

[21] Je reconnais que la prestataire a fait le choix personnel de quitter son emploi pour X parce qu’elle le trouvait stressant et qu’elle a choisi de suivre une formation avec le nouvel employeur dans l’espoir d’obtenir un meilleur emploi à un salaire plus élevé. Même si un choix personnel peut être un motif valable, cela n’est pas synonyme des exigences de prouver qu’elle était fondée à quitter son emploi et de faire supporter par d’autres le fardeau du chômage de la prestataireNote de bas de page 7.

[22] De plus, il est établi en droit que de quitter son emploi pour entreprendre des études ou une formation ne constitue pas une justification au sens de la LoiNote de bas de page 8.En réponse à l’argument de la prestataire selon lequel elle gagnerait plus d’argent dans son nouvel emploi, les tribunaux ont toujours soutenu que la bonne foi et l’insuffisance du revenu ne constituent pas une justification de quitter volontairement son emploi et d’en faire supporter le coût au système d’assurance‑emploiNote de bas de page 9.

[23] Je renvoie aussi à l’arrêt Canada (Procureur général) c Richard, 2009 CAF 122, dans lequel la Cour d’appel fédérale a résumé le droit comme suit. « Si noble et si légitime que soit le désir d’un travailleur d’améliorer son sort, ce désir ne constitue pas, aux fins des articles 29 et 30 de la Loi, une justification légale de quitter volontairement son emploi ».

b)  Solutions raisonnables

[24] En tenant compte de l’ensemble des circonstances présentées par la prestataire, j’estime qu’elle n’a pas démontré qu’elle n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi temporaire pour X. La question n’est pas de savoir s’il était raisonnable pour la prestataire de quitter son emploi, mais bien de savoir si la seule solution raisonnable était qu’elle quitte son emploiNote de bas de page 10.

[25] Les circonstances présentées par la prestataire ne démontrent pas qu’il était urgent pour elle de quitter son emploi auprès de X. Bien qu’elle privilégiait peut-être le départ parce qu’elle n’aimait pas cet emploi, il demeure qu’elle a choisi de rompre de façon permanente son lien d’emploi avec X afin d’essayer d’obtenir un contrat temporaire auprès d’un autre employeur. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que de quitter son emploi pour X. était la seule solution raisonnable qui s’offrait à la prestataire. Il aurait plutôt été raisonnable pour la prestataire de conserver son lien d’emploi avec X. Elle aurait pu demander un congé pendant qu’elle [sic] l’autre contrat avec le nouvel employeur; si elle était malade ou stressée, elle aurait pu demander l’aide de son médecin pour obtenir un congé de maladie ou essayer de retourner travailler pour X. après la fin prématurée de son contrat avec le nouvel employeur en raison d’un manque de travail.

[26] Bien qu’il soit compréhensible que la prestataire ait voulu suivre les cours offerts par le nouvel employeur dans l’espoir d’obtenir un emploi à long terme auprès de lui, elle était au courant du fait qu’au moment où elle a quitté son emploi auprès de X, elle pouvait seulement se voir offrir un contrat à court terme avec le nouvel employeur.

[27] Compte tenu de toutes les circonstances, comme il est énoncé ci-dessus, je conclus que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi auprès deX Par conséquent, la prestataire n’a pas démontré qu’elle était fondée à quitter son emploi auprès de X et est exclue du bénéfice des prestations pour une période indéfinieNote de bas de page 11.

3) La prestataire a-t-elle accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable depuis la date d’entrée en vigueur de l’exclusion?

[28] Non. Une fois qu’il a été déterminé que la prestataire a quitté volontairement son emploi sans justification, elle est exclue du bénéfice des prestations jusqu’à ce qu’elle ait accumulé le nombre requis d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestationsNote de bas de page 12.

[29] Il n’est pas contesté que la prestataire réside dans une région économique où le taux régional de chômage en date des 29 avril 2018 et 21 mai 2018 s’établissait à 6,8 %. Pas plus qu’il n’est contesté que la prestataire a besoin d’accumuler 700 heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations en date du 29 avril 2018Note de bas de page 13.

[30] Selon le relevé d’emploi produit par le nouvel employeur, en date du 29 avril 2018, la prestataire avait accumulé seulement 322 heures d’emploi assurable depuis la date de l’exclusion pour avoir quitté volontairement son emploi chez X sans justification. Par conséquent, la prestataire n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations régulières.

Conclusion

[31] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 17 avril 2019

Téléconférence

D. M. (aussi appelée X), appelante (prestataire)

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