Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – La division générale a conclu que l’absence de la prestataire du Canada relevait de l’exception énoncée à l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’assurance-emploi parce que le traitement médical en question n’était pas immédiatement disponible pour elle dans la région où elle résidait – Elle a conclu qu’une période d’attente de trois mois ne correspondait pas au sens de l’expression « immédiatement disponible » – La division d’appel a déterminé qu’il est impossible de prévoir une règle absolue quant au sens des mots « immédiatement disponible » pour toutes les causes – Cependant, ces mots doivent être interprétés comme étant plus forts que l’expression « dans un délai raisonnable » et exigent une action rapide.

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel.

Aperçu

[2] L’intimée, C. P. (prestataire), a voyagé à l’étranger en octobre 2017 pour passer un examen médical qu’elle attendait depuis juillet 2017 et pour suivre un traitement lié à ses problèmes de santé. L’appelante, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, a conclu que la prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations pour la période pendant laquelle elle était à l’étranger. La prestataire était en désaccord avec cette décision, car elle devait traiter de graves problèmes de santé et elle ne pouvait pas attendre de passer l’examen médical au Canada. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision, mais celle-ci a maintenu sa décision originale. La prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission auprès de la division générale du Tribunal.

[3] La division générale a conclu que le traitement médical que la prestataire a suivi en Inde n’était pas immédiatement disponible dans la région où elle réside. Elle a conclu que l’absence de la prestataire du Canada était visée par l’exception prévue à l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE).

[4] La Commission a obtenu la permission d’en appeler à la division d’appel. Elle fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit en concluant que la prestataire était admissible au bénéfice des prestations lorsqu’elle était à l’étranger.

[5] Le Tribunal doit déterminer si la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE.

[6] Le Tribunal accueille l’appel.

Question en litige

[7] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a conclu que lorsque la division d’appel instruit des appels conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loiNote de bas de page 1.

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieureNote de bas de page 2.

[10] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait commis une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Question en litige : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE?

[11] Les faits en l’espèce ne sont pas contestés. La prestataire a des problèmes de santé depuis juillet 2017, dont de gros vertiges et des étourdissements. Elle a cherché un traitement médical au Canada, en plus de consulter sa médecin de famille à plusieurs reprises. Sa médecin a tout d’abord envoyé une demande pour une IRM en juillet 2017, mais la prestataire ne pouvait pas passer l’examen avant le 15 novembre 2017, et un rendez-vous chez un spécialiste des vertiges était prévu le 12 janvier 2018.

[12] La prestataire a tenté de passer un examen en urgence vers la fin septembre, et son nom figurait sur la liste d’annulation pour une IRM. Toutefois, elle n’a pas réussi à obtenir un rendez-vous plus tôt.

[13] Selon la prestataire, son état de santé était trop grave pour attendre, alors elle est allée en Inde pour passer les examens médicaux plus rapidement. Elle a quitté le Canada le 7 octobre 2017 et a passé l’examen d’IRM le 10 octobre 2017.

[14] La division générale a conclu que le traitement médical que la prestataire a suivi en Inde n’était pas immédiatement disponible dans la région où elle réside. Elle a conclu qu’une période d’attente de trois mois ne correspondait pas au sens des mots [traduction] « immédiatement disponible ». La division générale a conclu que l’absence de la prestataire du Canada était visée par l’exception prévue à l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE.

[15] La Commission fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit en concluant que la prestataire était admissible au bénéfice des prestations lorsqu’elle était à l’étranger. Elle soutient que pour respecter le cadre législatif ou l’intention de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE, la division générale devait évaluer les faits dans le contexte réel du système de santé du Canada.

[16] L’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE prévoit ce qui suit :

« 55(1) Sous réserve de l’article 18 de la Loi, le prestataire qui n’est pas un travailleur indépendant n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations du fait qu’il est à l’étranger pour l’un des motifs suivants :

a) subir, dans un hôpital, une clinique médicale ou un établissement du même genre situés à l’étranger, un traitement médical qui n’est pas immédiatement ou promptement disponible dans la région où il réside au Canada, si l’établissement est accrédité pour fournir ce traitement par l’autorité gouvernementale étrangère compétente [...]. »

[17] Nul ne conteste que le traitement que la prestataire a reçu était promptement disponible au Canada. Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur dans son interprétation de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE lorsqu’elle a conclu que le traitement de la prestataire n’était pas immédiatement disponible dans la région où celle-ci réside au Canada.

[18] Le Tribunal est d’avis qu’il est impossible d’établir une règle absolue quant à la signification des mots [traduction] « immédiatement disponible » dans tous les cas. Toutefois, on doit accorder une plus grande importance à l’interprétation de ces mots plutôt qu’à celle de l’expression [traduction] « dans un délai raisonnable » et prendre des mesures rapidesNote de bas de page 3.

[19] Au moment où la prestataire a décidé de quitter le Canada le 4 octobre 2017, elle avait déjà une IRM prévue le 15 novembre 2017. Le Tribunal estime que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a fait fi de cet élément de preuve et qu’elle a conclu que le traitement n’était pas immédiatement disponible dans la région où la prestataire réside au Canada. De plus, le rendez-vous de suivi chez un spécialiste des vertiges, prévu le 12 janvier 2018, est assurément une mesure rapide dans le système de santé du Canada.

[20] Le Tribunal estime également que la note médicale du 3 octobre 2017 n’appuie pas la position de la prestataire et la conclusion de la division générale selon lesquelles la prestataire devait quitter le pays pour suivre un traitement immédiat et selon lesquelles elle ne pouvait pas attendre cinq semaines pour passer l’examen d’IRM déjà prévu. Le Tribunal fait simplement état que les symptômes de la prestataire sont persistants, et que même si elle avait une IRM prévue à la mi-novembre 2017, la prestataire est allée immédiatement en Inde pour passer les examens et suivre le traitementNote de bas de page 4.

[21] Une note médicale antérieure, datée du 25 septembre 2017, précisait en outre que la prestataire était capable de retourner au travail le 27 septembre 2017Note de bas de page 5.

[22] La preuve démontre que la prestataire a pris une décision personnelle d’aller en Inde parce qu’elle voulait recevoir le traitement médical plus rapidement qu’au Canada. Cela ne signifie pas que le traitement n’était pas [traduction] « immédiatement disponible » dans la région où la prestataire réside au Canada.

[23] Pour les motifs exposés ci-dessus, l’appel de la Commission est accueilli.

Conclusion

[24] Le Tribunal accueille l’appel.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 28 mars 2019

Téléconférence

Carol Robillard, représentante de l’appelante
C. P., intimée
M. P., représentant de l’intimée

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