Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté pour toutes les questions en litige. L’appelante a reçu des prestations spéciales de maladie de l’assurance-emploi alors qu’elle touchait également des indemnités supplémentaires de son employeur. Ces indemnités supplémentaires sont une rémunération qui doit être répartie.

Aperçu

[2] L’appelante, que j’appellerai la prestataire, a été blessée dans un accident de voiture et a fait une demande de prestations spéciales de maladie de l’assurance-emploi (AE). La Commission de l’assurance-emploi du Canada a établi la période de prestations et a versé 15 semaines de prestations à la prestataire. La Commission a établi plus tard que la prestataire recevait également des indemnités supplémentaires de son employeur au moment même où elle touchait des prestations de maladie d’AE et a omis de déclarer les indemnités supplémentaires dans sa déclaration bimensuelle. La Commission a réparti la rémunération de la prestataire pour inclure les versements d’indemnités supplémentaires et l’a avisée qu’elle lui devait de l’argent parce qu’elle avait reçu des prestations excédentaires. La prestataire a demandé une révision, affirmant qu’elle n’avait pas reçu d’argent de son employeur. La Commission a maintenu sa décision. La prestataire fait appel de la décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale, soutenant qu’elle n’a reçu aucun versement de son employeur.

Questions préliminaires

[3] Il s’agit de la deuxième audience de cette affaire à la division générale du Tribunal. L’affaire a été renvoyée par la division d’appel du Tribunal parce que la décision antérieure de la division générale ne montrait pas que le membre avait tenu compte des observations de la prestataire. 

[4] Lorsque la prestataire a déposé une demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel, elle a indiqué que sa [traduction] « Charte de droits » avaient été violés par la décision de la division générale parce que le fonctionnaire n’a pas [traduction] « bien examiné, cherché de preuve ». Bien que je n’aie pas très bien compris si la prestataire voulait dire que le membre du Tribunal a omis de tenir compte de l’ensemble de la preuve ou d’enquêter pour trouver d’autres éléments de preuve, il est évident qu’elle invoquait un argument constitutionnelNote de bas de page 1.

[5] J’ai tenu une conférence préparatoire à l’audience le 13 mars 2019 pour confirmer si la prestataire avait l’intention de présenter un argument constitutionnel à l’audience, puisque le processus est différent pour ce genre de questions. La prestataire et son représentant, de même que le représentant de la Commission, ont participé à la conférence. J’ai expliqué le processus des questions constitutionnelles à la prestataire et à son représentant. La prestataire a affirmé qu’elle n’avait pas l’intention de donner suite à un argument constitutionnel et qu’elle voulait aller de l’avant avec une audience régulière. J’ai décidé, d’après les observations de la prestataire, qu’il ne s’agissait pas d’une question constitutionnelle et j’ai prévu une audience régulière.

[6] À la conférence préparatoire à l’audience, la Commission a demandé deux mois pour faire une enquête approfondie sur le dossier parce qu’elle n’avait reçu aucune réponse de l’employeur concernant la raison du versement d’une somme d’argent à la prestataire pendant la période de prestations d’AE. J’ai accordé une période d’un mois. La Commission a fourni une observation le 12 avril 2019, bien que le Tribunal ne l’ait traitée que le 15 avril 2019, et que j’aie reçu une copie le 16 avril 2019 seulement, soit après l’audience. Le Tribunal a envoyé le document à la prestataire, avec une directive de ma part indiquant qu’elle avait jusqu’au 26 avril 2019 pour répondre. La prestataire n’a pas répondu.

[7] Le 15 avril 2019, après l’audience, j’ai demandé que la Commission enquête sur une question. Le représentant de la prestataire a soutenu à l’audience que rien ne prouvait qu’elle a reçu des prestations d’AE entre le 29 décembre 2013 et le 26 avril 2014. La Commission a fait valoir que la prestataire avait établi une période de prestations de maladie et qu’on l’a payée pendant 15 semaines. Le représentant a affirmé que la prestataire avait demandé une ventilation des versements de prestations, mais n’a reçu aucune réponse de la Commission et a donc soutenu qu’il n’y avait aucune preuve selon laquelle elle avait reçu des prestations d’AE. Ainsi, elle ne devrait pas avoir à rembourser quoi que ce soit. J’ai demandé à la Commission de fournir une ventilation des sommes versées à la prestataire entre le 29 décembre 2013 et le 26 avril 2014. J’ai donné la date limite du 26 avril 2019 pour répondre. La Commission a fait suivre une argumentation supplémentaire en réponse à ma requête du 18 avril 2019. 

[8] Ainsi, deux documents présentés après l’audience sont en litige. Le premier a été remis suite à la conférence préparatoire à l’audience et a été déposé au Tribunal avant l’audience, mais on ne l’a traité et l’on ne me l’a remis, ainsi qu’à l’autre partie, qu’après l’audience. Le second document fait suite à ma demande d’enquête. Je constate que les deux documents présentés après l’audience ont été fournis en respectant leurs dates limites respectives.

[9] Il n’existe aucun critère définitif sur l’acceptation d’observations après l’audience par un tribunal. En général, le dépôt de documents après l’audience est déconseillé, en partie parce que l’affaire est entendue de façon plus efficace, équitable et rapide lorsque les délais établis sont respectésNote de bas de page 2. Je suis consciente de ce que mon devoir de respect des règles d’équité procédurale ne se limite pas à l’audience et se poursuit jusqu’à ce que j’aie finalisé la décision. À ma connaissance, les tribunaux n’ont donné aucune réponse définitive à cette question dans le contexte de ce Tribunal, mais l’ont abordée dans d’autres circonstances. Dans un cas, la Cour fédérale a composé avec une situation d’observations postérieures à l’audience au procès et a accepté que trois facteurs doivent être pris en compte pour évaluer la pertinence de documents déposés après une audience, notamment qu’il doit être établi que même en faisant preuve de diligence raisonnable, il n’aurait pas été possible d’obtenir les éléments de preuve pour présentation au procès; les éléments de preuve doivent être susceptibles d’influer substantiellement sur l’issue de l’affaire et que les éléments de preuve doivent paraître crédiblesNote de bas de page 3.

[10] J’ai examiné l’affaire Murray et j’ai établi que je n’y suis pas liée pour rendre une décision dans la présente affaire. Les parties dans Murray ont convenu du critère à appliquer, ce qui signifie que la Cour fédérale ne s’est jamais penchée sur ce que serait le critère approprié et que les faits relatifs à cette affaire sont bien différents de l’affaire dont je suis saisie. Enfin, les régimes de justice administrative et judiciaire diffèrent et je ne suis pas liée par les règles de preuve qui lient un tribunal judiciaire. En l’absence d’autorité contraignante, je considère que le Tribunal peut adopter son propre critère concernant l’admission de documents après l’audience.

[11] La personne qui exerçait la présidence du Tribunal en 2016 a publié une directive de pratiqueNote de bas de page 4 concernant la procédure relative aux documents déposés après l’audience. La directive précise que la ou le membre doit évaluer s’il convient d’admettre les documents sans demander aux parties de déposer des observations ou s’il convient de demander aux parties d’expliquer pourquoi les documents déposés après la tenue de l’audience devraient être acceptés ou refusés. Si la ou le membre décide d’accepter les documents, il lui faut, selon le cas, procéder à la réouverture de l’audience; donner l’occasion à la partie adverse de répondre ou rendre une décision.

[12] J’ai donné à la prestataire l’occasion de répondre à la première observation de la Commission concernant l’objet des versements effectués par son employeur durant la période de prestations d’AE. Je n’ai pas invité la prestataire à répondre à l’observation déposée le 18 avril 2019 par la Commission, soit après l’audience, parce que la prestataire a expliqué sa position selon laquelle rien ne prouvait qu’elle ait reçu des versements d’AE à l’audience. Il s’agit d’une chose que la prestataire a eu l’occasion d’expliquer et à propos de laquelle je l’ai interrogée. C’est son observation qui a provoqué l’enquête relative à la question de savoir si des prestations avaient été versées. Rien ne donne lieu de croire que la valeur probante du fait d’accorder plus de temps pour des observations supplémentaires dépasserait l’incidence de retards supplémentaires dans le présent dossier alors que la prestataire a déjà abordé cet élément.

[13] J’ai également pris en compte la pertinence de la preuve déposée après l’audience par la Commission, sa valeur probante et si la preuve sert l’intérêt de la justice, si elle peut causer préjudice à l’autre partie, si son acceptation peut causer un retard injustifié, si le document aurait pu être fourni plus tôt et si les délais concernant les observations ont été respectés. Je considère que la preuve de la Commission est pertinente à l’affaire et précise des questions abordées à l’audience. L’acceptation de cette preuve sert les intérêts de la justice puisque cela me permet de rendre une décision solide sur le plan des faits et mon acceptation de ces documents ne cause aucun retard puisque le délai accordé à la prestataire pour répondre à la première observation de la Commission est le même que celui donné à la Commission pour la seconde observation. Il n’y a aucune autre perte de temps. J’estime que la preuve n’aurait pu être fournie plus tôt, la Commission ayant fait des démarches pour communiquer avec l’employeur et établir la provenance des versements pendant le processus d’arbitrage et n’ayant reçu aucune réponse. La Commission n’était pas responsable de cette absence de réaction et elle ne pouvait pas faire grand-chose d’autre que de demander à l’employeur, de façon répétée, d’expliquer les versements. En ce qui concerne la question de savoir si la prestataire a même reçu des versements d’AE, la Commission aurait pu fournir ces renseignements plus tôt, mais il était raisonnable pour elle de ne pas le faire puisque l’argument n’a été soulevé nulle part ailleurs au dossier et rien n’indiquait que la prestataire allait affirmer n’avoir reçu aucune prestation. Enfin, je considère que l’acceptation de ces documents ne cause préjudice à aucune des deux parties. La prestataire a eu l’occasion de répondre au premier document, qui portait sur la source et sur l’objet des versements de l’employeur. La seconde observation répond à l’argument de la prestataire selon lequel rien ne prouve qu’on lui ait versé des prestations d’AE.

[14] À ce titre, j’ai décidé d’admettre les documents présentés après l’audience et j’ai choisi de rendre une décision fondée sur les éléments portés à ma connaissance, y compris le dossier, les observations présentées après l’audience et le témoignage et les observations formulés pendant l’audience.

[15] Je note également que l’appel de la prestataire concernant la question de la pénalité a aussi été entendu à l’audience initiale devant la division générale. La division d’appel a rendu sa décision le 11 janvier 2019, confirmant que je ne peux pas réexaminer la question de la pénalité puisqu’elle n’a pas été portée en appel à la division d’appel.

Questions en litige

[16] Question en litige no 1 : La prestataire a-t-elle touché des prestations de maladie de l’AE du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014?

[17] Question en litige no 2 : La prestataire a-t-elle touché des indemnités supplémentaires de son employeur du 29 avril 2013 au 26 avril 2014?

[18] Question en litige no 3 : La prestataire a-t-elle touché des sommes de son employeur qui constituaient une rémunération devant être répartie?

Question en litige no 1 : La prestataire a-t-elle touché des prestations de maladie de l’AE du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014?

[19] J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que la prestataire a touché des prestations de maladie de l’AE du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014.

[20] À l’audience, son représentant a soutenu que rien ne prouvait que la prestataire avait effectivement reçu des prestations de maladie. La Commission a fait valoir que l’on a versé à la prestataire 15 semaines de prestations de maladie, soit du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014.

[21] J’ai demandé à la Commission de fournir une ventilation des versements de prestations à la prestataire au cours de cette période. La Commission a soutenu que l’on a payé la prestataire par dépôt direct, ce qui peut prendre jusqu’à trois jours à traiter. Il est donc possible que les dates des paiements reçus par la Commission et celles qui figurent sur son relevé bancaire ne correspondent pas parfaitement.

[22] La Commission a comparé ses versements de prestations aux relevés bancaires fournis par la prestataire. À l’audience, j’ai fait référence à des dépôts portant la mention « CANADA » sur les relevés de banque de la prestataire et je lui ai demandé à quoi ces entrées correspondaient. Elle a déclaré qu’elle l’ignorait. La Commission affirme qu’un versement de prestations d’AE de sa part figure sur des relevés bancaires avec la mention « CANADA ». J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que les entrées des relevés portant la mention « CANADA », qui correspondent aux observations de la Commission, sont en fait les prestations de maladie d’AE.

[23] La Commission a fait valoir que la prestataire a observé un délai de carence non payé de deux semaines, pendant lequel aucune prestation n’est payable, du 29 décembre 2013, et ce jusqu’au 11 janvier 2014. Le 21 mars 2014, la Commission a versé deux semaines de prestations de maladie allant du 12 janvier 2014 au 25 janvier 2014. La Commission soutient que la somme de 900 $ en prestations correspond au dépôt du 25 mars 2014 au compte de banque de la prestataire.

[24] Le 4 avril 2014, la Commission a payé deux semaines de prestations de maladie allant du 26 janvier 2014 au 8 février 2014. Selon elle, les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 8 avril 2014 au compte bancaire de la prestataire.

[25] Le 18 avril 2014, la Commission a versé deux semaines de prestations de maladie allant du 9 février 2014 au 22 février 2014. Elle affirme que les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 23 avril 2014 au compte de banque de la prestataire.

[26] Le 5 mai 2014, la Commission a payé deux semaines de prestations allant du 23 février 2014 au 8 mars 2014. Selon elle, les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 7 mai 2014 au compte bancaire de la prestataire.

[27] Le 16 mai 2014, la Commission a versé deux semaines de prestations de maladie allant du 9 mars 2014 au 22 mars 2014. Elle affirme que les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 21 mai 2014 au compte de banque de la prestataire.

[28] Le 30 mai 2014, la Commission a payé deux semaines de prestations allant du 23 mars 2014 au 5 avril 2014. Selon elle, les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 3 juin 2014 au compte bancaire de la prestataire.

[29] Le 13 juin 2014, la Commission a versé deux semaines de prestations de maladie allant du 6 avril 2014 au 19 avril 2014. Elle affirme que les 900 $ de prestations correspondent au dépôt du 17 juin 2014 au compte de banque de la prestataire.

[30] Le 27 juin 2014, la Commission a payé une semaine de prestations de maladie allant du 20 avril 2014 au 26 avril 2014. Elle soutient être incapable de vérifier le paiement puisque les renseignements bancaires de la prestataire sont fournis uniquement jusqu’au 30 juin 2014. Il est cependant logique de déduire qu’un versement de 450 $ portant la mention « CANADA » figure dans ses relevés bancaires au mois de juillet 2014. La Commission soutient que, puisqu’elle peut confirmer que 14 des 15 semaines de prestations ont été versées à la prestataire, il est raisonnable de conclure que la prestataire a touché la dernière semaine de prestations de maladie.

[31] J’ai examiné l’argumentation de la Commission, de même que les relevés bancaires de la prestataire, et j’ai pris en considération la position de la prestataire, selon laquelle rien ne prouve qu’on lui ait versé des prestations de maladie. J’estime que la prestataire a touché 15 semaines de prestations de maladie de l’AE, ce qui correspond à la ventilation fournie par la Commission. Les relevés bancaires montrent clairement des entrées équivalant aux sommes que la Commission a identifiées comme étant des versements du « CANADA », qui est le code de dépôt direct que je m’attendrais à voir sur un relevé de compte de banque concernant un paiement fédéral de prestations d’AE. Et si l’on ne dispose pas du relevé, il est effectivement logique de déduire que l’on a versé à la prestataire les prestations supplémentaires d’après les registres de la Commission selon lesquels elle lui a versé les 14 semaines précédentes.

[32] J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que la prestataire a touché des prestations de maladie de l’AE du 29 décembre 2013 jusqu’au 26 avril 2014.

Question en litige no 2 : La prestataire a-t-elle touché des indemnités supplémentaires de son employeur du 29 avril 2013 au 26 avril 2014?

[33] J’estime que la prestataire a touché des indemnités supplémentaires de son employeur et qu’au même moment, elle a reçu des prestations de maladie de l’AE.

[34] La prestataire a d’abord soutenu à la Commission qu’elle n’avait reçu aucune indemnité supplémentaire de son employeur du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014. Le relevé d’emploi, daté du 30 janvier 2014, montre que le dernier jour pour lequel la prestataire a été payée a été le 10 janvier 2014, ainsi qu’un versement hebdomadaire de 1 017,60 $ en assurance salaire à compter du 30 septembre 2013. La prestataire a déclaré avoir eu un congé de maladie payé et des prestations d’invalidité de courte durée de son employeur.

[35] La Commission a établi que la prestataire avait des [traduction] « semaines de travail complètes » pendant certaines des semaines de la période de prestations, ce qui a entraîné une rémunération non déclarée et un trop payé. Un relevé d’emploi montre que la prestataire a tenté de retourner au travail en janvier 2014. La prestataire n’a pas réussi ce retour, mais un relevé d’emploi distinct fait état d’une autre tentative de retour au travail de sa part en avril 2014. Les efforts de la prestataire ont de nouveau été infructueux et elle a quitté son emploi pour cause de maladie.

[36] À l’audience précédente de cette affaire, la division générale a conclu, compte tenu du formulaire « Demande de renseignements – Registres de paie » de l’employeur, que la prestataire a eu une rémunération brute pour les semaines commençant le 5 janvier 2014, le 12 janvier 2014, le 2 février 2014, le 13 avril 2014 et le 20 avril 2014. Le dossier démontre que la prestataire a nié avoir reçu des fonds de son employeur pendant cette période. Voici la rémunération désignée par l’employeur :

Semaine : Rémunération brute totale :
5 janvier 2014 1 017,60 $
12 janvier 2014 1 017,60 $
2 février 2014 407,04 $
13 avril 2014 207,60 $
20 avril 2014 207,60 $

[37] La division générale avait établi précédemment que le paiement pour la semaine commençant le 5 janvier 2014 était lié à un régime d’assurance salaire; il n’a donc pas été considéré comme une rémunération au cours du délai de carenceNote de bas de page 5. Même si l’on a considéré le versement de1 017,60 $ pour la semaine commençant le 12 janvier 2014 comme étant également lié à un régime d’assurance-salaire, il a été effectué après la fin du délai de carence. La division générale a établi que le paiement ne faisait pas, par conséquent, l’objet d’une exemption aux termes du Règlement sur l’assurance-emploi et était considéré à titre de rémunération.

[38] L’employeur a déclaré que le paiement de 407,04 $ pour la semaine commençant le 2 février 2014 représentait [traduction] « un crédit pour congés non utilisés de l’année précédente payé en février ». L’employeur n’a pas décrit la nature des versements pour les semaines commençant le 13 et le 20 avril 2014.

[39] La prestataire a affirmé à la Commission qu’elle ne peut plus accéder à ses talons de chèques de paie et qu’elle se fonde sur des relevés bancaires pour prouver qu’elle n’a pas reçu ces sommes ni même aucune somme de son employeur. Les relevés bancaires révèlent toutefois que les sommes suivantes ont été déposées directement dans son compte par l’employeur :

Date Payeur Montant net
Le 16 janvier 2014 Employeur 1 334,13 $
Le 30 janvier 2014 Employeur 1 362,63 $
Le 13 février 2014 Employeur 1 578,02 $
Le 27 février 2014 Employeur 1 365,68 $
Le 13 mars 2014 Employeur 1 285,42 $
Le 27 mars 2014 Employeur 1 362,70 $
Le 10 avril 2014 Employeur 381,98 $
Le 24 avril 2014 Employeur 582,35 $

[40] Ni les dates ni les sommes sur les relevés bancaires de la prestataire ne correspondent aux renseignements des registres de paie de l’employeur, même en tenant compte de retenues obligatoires ou autres possiblement enlevées de la rémunération brute. Les efforts déployés précédemment par la Commission pour joindre l’employeur et clarifier la nature des versements énumérés dans les relevés bancaires ont été infructueux, mais elle a pu obtenir plus de renseignements à la suite de la décision de la division d’appel, qu’elle a présentée au Tribunal le 12 avril 2019.

[41] La Commission a soutenu que l’employeur a précisé que la prestataire ne travaillait pas du 5 janvier 2014 au 26 avril 2014, puisqu’elle touchait des prestations d’invalidité de courte durée et des prestations supplémentaires de chômage ou un complément pour congé de maladie. La Commission fait valoir que le complément n’est pas considéré comme une rémunération aux fins de l’assurance-emploiNote de bas de page 6. La Commission a également soutenu que le complément ne serait pas réparti à l’égard du dossier de la prestataire puisqu’elle a approuvé le régime de prestations supplémentaires de chômage de l’employeur.

[42] De plus, la Commission a soutenu que l’employeur avait fourni des éléments de preuve suffisants pour montrer que les prestations d’invalidité de courte durée ne relevaient pas d’un régime collectif ou non collectif. Elle soutient que les paiements de prestations d’invalidité de courte durée de la prestataire constituent une rémunérationNote de bas de page 7 qui doit être répartie sur les semaines à l’égard desquelles les prestations sont payées ou payablesNote de bas de page 8.

[43] La Commission a expliqué que l’employeur avait indiqué que les renseignements contradictoires des registres de paie découlent d’une limitation de son système de paie. Pour la première semaine de prestations d’invalidité de courte durée, l’employeur a déclaré avoir versé à l’employée 100 % de son salaire et au cours de la période de paie suivante, l’employeur a déduit la somme. Ainsi, 70 % seulement des prestations d’invalidité de courte durée ont été payées à l’employée dans la période de paie précédente. Voilà pourquoi l’employeur a déclaré que le talon de paie de la prestataire variait d’une semaine à l’autre.

[44] L’employeur a également réfuté l’observation de la prestataire selon laquelle elle ne pouvait pas accéder à ses renseignements sur la paie. La Commission soutient que l’employeur a déclaré que la prestataire avait accès à son information sur la paie grâce au système libre-service de l’entreprise ou qu’elle pouvait demander ses talons de paie à l’employeur et que les renseignements lui auraient été envoyés.

[45] La prestataire a fait valoir qu’elle n’avait reçu aucun chèque et que rien ne prouvait qu’elle avait reçu des fonds de l’employeur alors qu’elle touchait des prestations d’AE. Je trouve que ce n’est pas convaincant, étant donné les relevés bancaires qui montrent le versement d’indemnités de la part de l’employeur alors que la prestataire recevait des prestations d’AE. La Commission affirme que l’employeur a déclaré que la prestataire était payée sur une base courante, ce qui signifie que l’argent était déposé dans son compte de banque le jeudi de la fin de chaque période de paie. La Commission a aussi précisé que les sommes données par la prestataire sur des relevés bancaires sont nettes, mais que les sommes fournies par l’employeur sont brutes, ce qui explique aussi le manque de cohérence.

[46] La Commission soutient que l’employeur a expliqué la confusion concernant les sommes d’argent et a fermement établi que les fonds accordés à la prestataire sont principalement une rémunération. L’employeur a officiellement déclaré avoir versé à la prestataire 711,94 $ en prestations d’invalidité de courte durée (70 % de sa rémunération hebdomadaire habituelle de 1 017,06 $), et ensuite 259,50 $ en complément à ses prestations d’AE payé par l’employeur, pour chaque semaine du 5 janvier 2014 au 26 avril 2014. L’employeur a aussi déclaré que la prestataire avait reçu 407 $ pour deux jours de congé personnel pour la semaine du 9 février 2014, ainsi que 120 $ en [traduction] « allocation de chaussures » pour la semaine du 20 avril 2014. La Commission a soutenu que puisque la prestataire n’est pas retournée au travail et que l’allocation de chaussures et les jours de congé personnel seront répartis sur une période de travail, il est raisonnable de conclure qu’ils doivent être répartis avant la date de début de la période de prestations de la prestataire le 29 décembre 2013. Je suis d’accord avec cette observation.

[47] La Commission fait également valoir que l’employeur a déclaré avoir versé à la prestataire 203,55 $ d’indemnité de jour férié pour le 1 er janvier 2014. Elle fait valoir que l’indemnité de jour férié est une rémunération nécessitant une répartition sur la semaine du jour fériéNote de bas de page 9. Je suis également en accord avec cette position.

[48] La Commission soutient que l’employeur a déclaré que les prestations d’invalidité de courte durée ont pris fin le 27 avril 2014 et qu’il avait déduit 450 $ par semaine du talon de paie de la prestataire entre le 30 mars 2014 et le 8 mai 2014. La Commission a soutenu qu’elle déduirait la même somme des prestations d’invalidité de courte durée à compter du 30 mars 2014 jusqu’au 26 avril 2014, ce qui correspond à la dernière semaine de prestations de maladie versées à la prestataire.

[49] Je reconnais que l’employeur a fourni des renseignements contradictoires, mais je considère, selon la prépondérance des probabilités, que son observation du 12 avril 2019 est le meilleur élément de preuve. Cet élément correspond le plus précisément à la situation relative au versement de prestations à la prestataire par l’employeur, parce que l’observation est exhaustive et explique les relevés bancaires, qui comprennent les montants nets versés à la prestataire par l’employeur durant sa période de prestations d’AE.

[50] La prestataire a été incapable de présenter des éléments de preuve pour réfuter l’observation de la Commission concernant la preuve de l’employeur, et a simplement déclaré ne pas avoir été payée par ce dernier alors qu’elle touchait des prestations d’AE, tout en soutenant également que rien ne prouvait qu’elle ait reçu des prestations d’AE. Je comprends le fait d’avoir une position de rechange, mais dans ce cas-ci, les observations de la prestataire manquent de crédibilité. La prestataire a fourni des relevés bancaires qui montrent qu’elle a été payée par son employeur et par le gouvernement fédéral, dont les entrées portent la mention « CANADA ». On lui a demandé d’expliquer la raison des paiements du « CANADA », et elle a déclaré qu’elle l’ignorait. Elle a aussi déclaré qu’elle ne se rend pas à la banque et que son époux est la personne qui sait ce qui entre et ce qui sort de son compte, et elle ignorait ce qui y avait été versé. Par ailleurs, elle a ajouté que s’il y avait eu paiement, elle ne devrait pas être tenue responsable de la possibilité de paiements en trop parce qu’elle n’en savait rien et à cause de difficultés financières. Je ne trouve pas les observations de la prestataire convaincantes ou suffisantes pour que la prépondérance des probabilités lui donne raison.

[51] La prestataire a également déclaré qu’elle reconnaît avoir touché des fonds de son employeur, puisque les entrées figurent sur ses relevés bancaires, mais elle ignore s’il s’agissait de prestations de maladie ou de paiements faits pour une autre raison. Elle a déclaré qu’elle ignorait que l’argent avait été déposé jusqu’à ce qu’elle reçoive les relevés.

[52] J’estime que la prestataire a touché des indemnités supplémentaires d’invalidité de courte durée de son employeur du 29 décembre 2013 au 26 avril 2014.

Question en litige no 3 : La prestataire a-t-elle touché des sommes de son employeur qui constituaient une rémunération devant être répartie?

[53] Le Règlement sur l’assurance-emploi définit la rémunération comme étant le« revenu intégral du prestataire provenant de tout emploiNote de bas de page 10 ». Il faut prendre en compte cette rémunération, entre autres choses pour déterminer la rémunération à déduire des prestations, qui est la fin applicable dans le présent cas. Les revenus doivent être liés à l’emploi, que ce soit à titre de sommes gagnées en travaillant ou accordées pour des travaux, ou il doit y avoir un lien suffisant entre l’emploi et l’argent reçuNote de bas de page 11. C’est à la prestataire qu’il revient de démontrer que l’argent a été versé pour autre chose qu’une rémunérationNote de bas de page 12.

[54] La Commission soutient que la prestataire a reçu une rémunération de 711,94 $ pour chaque semaine du 5 janvier 2014 au 26 avril 2014 de la part de l’employeur, et que cet argent lui a été versé à titre de prestations d’invalidité de courte durée. Comme l’employeur a déduit 450 $ du talon de paie de la prestataire du 30 mars 2014 au 8 mai 2014, la Commission fait valoir qu’elle déduira la même somme des prestations d’invalidité de courte durée du 30 mars 2014 au 26 avril 2014. La Commission soutient que cet argent constitue une rémunération parce que le versement a été effectué pour indemniser la prestataire grâce à une prestation d’emploi, qui provient de l’emploi de la prestataireNote de bas de page 13. Je considère que l’interprétation de la Commission de cet élément est juste, et elle a correctement réparti cette rémunération sur les semaines pour lesquelles les versements sont payés ou payablesNote de bas de page 14.

[55] La Commission aborde aussi l’indemnité de jour férié relative au 1er janvier 2014, et conclut qu’il s’agit d’une rémunération qui doit être répartie sur la semaine du jour fériéNote de bas de page 15. Je suis d’accord avec cette observation également.

[56] La Commission fait valoir que la répartition rétroactive de la rémunération de la prestataire modifie le trop payé, qui passe de 1 851 $ à 6 702 $.

[57] Les arguments de la prestataire ne m’ont pas convaincue du fait qu’elle n’a pas touché de fonds de son employeur alors qu’elle recevait des prestations d’AE. Malheureusement pour la prestataire, le processus d’examen détaillé et d’enquête a établi une chronologie des événements et de versements qui appuie un trop payé plus élevé que celui établi précédemment. Bien que la prestataire n’ait fourni aucune observation relativement à la position de la Commission concernant le trop payé plus élevé, bien que je l’aie invitée à répondre, je considère que son augmentation par la Commission est justifiée. Selon la Loi sur l’assurance-emploi, une partie prestataire a la responsabilité de rembourser à la Commission les prestations auxquelles elle n’est pas admissibleNote de bas de page 16. Bien qu’un certain nombre d’années se soient écoulées depuis le versement des prestations, la Loi sur l’assurance-emploi indique également que le recouvrement des créances visées au présent article se prescrit par 72 mois à compter de la date où elles ont pris naissanceNote de bas de page 17. Cette date n’est cependant pas celle du versement des prestations. La Cour d’appel fédérale a confirmé que la date à laquelle la Commission avise la partie prestataire de la somme à rembourser établit le point de départ du délai de prescription pour le recouvrement des créancesNote de bas de page 18. Puisque la Commission a informé pour la première fois la prestataire du trop payé initial le 31 décembre 2016, il s’agit de la date à laquelle a commencé le délai de prescription de 72 mois pour son recouvrement.

[58] Comme nous l’avons vu précédemment, le délai de recouvrement est autorisé par la loi et la Commission est dans son droit de demander que le trop payé soit remboursé.

[59] Bien que le représentant soutienne que la Commission n’a aucune preuve qui permette de déterminer que les fonds en question proviennent de prestations d’AE ou de l’employeur, j’estime que les éléments de preuve présentés sont suffisants pour conclure que, selon la prépondérance des probabilités, la prestataire a touché à la fois des prestations de maladie de l’AE et une indemnité d’invalidité de courte durée de son employeur. La prestataire a donc été payée en trop, parce qu’elle n’était pas admissible aux prestations de maladie alors qu’elle touchait une indemnité d’invalidité de courte durée.

[60] La prestataire a précédemment fait valoir à un autre membre que si elle avait reçu l’argent en question, elle demande que le Tribunal annule la somme contestée en raison de ses difficultés financières. Je prends note de la demande, mais je n’ai pas la compétence d’annuler le versement excédentaire.

[61] Ayant examiné les nombreux documents au dossier, et tenu compte du témoignage, je conclus que la prestataire a touché à la fois des prestations de maladie de l’AE, de même que des prestations d’invalidité de courte durée. Par conséquent, la prestataire a reçu à la fois une rémunération exigeant une répartition aux termes de la loi indiquée ci-dessus et a touché un versement excédentaire de prestations d’AE auquel elle n’était pas admissible. À cause de cela, la prestataire a accumulé un trop payé important. Bien qu’il soit regrettable que le fait de poursuivre son appel ait augmenté sa dette, la loi indique clairement qu’une partie prestataire doit rembourser les prestations auxquelles elle n’était pas admissible.

Conclusion

[62] L’appel est rejeté pour toutes les questions en litige.

 

Date de l’audience :

Le 15 avril 2019

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

R. S., appelante

N. S., représentant de l’appelante

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