Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de prorogation du délai pour présenter la demande de permission d’en appeler est accueillie. La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, C. M. (prestataire), a demandé des prestations régulières d’assurance‑emploi et a commencé à en recevoir. Il a déclaré qu’il n’avait pas touché de rémunération pour la période couvrant les semaines du 26 février 2017 au 18 juin 2017. L’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (Commission), a toutefois appris que l’employeur du demandeur, X, lui avait versé un salaire pour ces semaines. La Commission a réparti cette rémunération et a établi que le prestataire avait reçu des versements excédentaires de prestations. Elle a conclu que le prestataire avait fait sciemment de fausses déclarations pour demander des prestations et, par conséquent, lui a infligé une pénalité et l’a déclaré responsable d’une violation. Après une révision, la Commission a réduit le montant de la pénalité. Le prestataire a fait appel de la décision de révision auprès de la division générale, qui a rejeté son appelNote de bas de page 1. Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale.

[3] Je dois d’abord déterminer si le prestataire a présenté à temps sa demande de permission d’en appeler et, dans la négative, si je dois exercer mon pouvoir discrétionnaire et proroger le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler. Enfin, si je proroge le délai pour présenter la demande, je dois décider si l’appel a une chance raisonnable de succès, c’est‑à‑dire si la cause est défendable.

[4] Le retard en question étant très court, je suis disposée à accorder un délai supplémentaire. Toutefois, je ne suis pas convaincue que la cause est défendable, et je refuse donc la permission d’en appeler.

Questions en litige

[5] Voici les questions en litige :

Question 1 : Le prestataire a-t-il présenté à temps sa demande de permission d’en appeler?

Question 2 : Dans la négative, devrais-je exercer mon pouvoir discrétionnaire et proroger le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler?

Question 3 : Si je proroge le délai pour présenter la demande, l’appel a‑t‑il une chance raisonnable de succès?

Analyse

Question 1 : Le prestataire a‑t‑il présenté à temps sa demande de permission d’en appeler?

[6] Non. Le prestataire n’a pas présenté sa demande dans le délai prévu. Les faits ainsi que mon analyse sont les mêmes que ceux dans la décision que j’ai rendue dans les appels du prestataire qui portent les numéros de dossiers du Tribunal AD-19-279 et AD-19-280.

[7] Aux termes de l’alinéa 57(1)(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), une demande de permission d’appeler d’une décision rendue par la section de l’assurance‑emploi doit être présentée à la division d’appel dans les trente jours suivant la date où le demandeur a reçu communication de la décision.

[8] Le prestataire ne précise pas à quelle date la décision de la division générale lui a été communiquée. Je remarque toutefois que la lettre de présentation de la décision que le Tribunal de la sécurité sociale a envoyée au prestataire est datée du 28 février 2019 et que le Tribunal a envoyé au prestataire un courriel daté du 1er mars 2019, auquel il a joint une copie de la décision de la division générale. Aux termes de l’article 19 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, une décision est présumée avoir été communiquée le dixième jour suivant celui de sa mise à la poste. Dans la présente affaire, puisque la décision pourrait avoir été envoyée aussi tard que le 1er mars 2019 – en même temps que le courriel –, elle est présumée avoir été communiquée au prestataire le 11 mars 2019. Par conséquent, selon les exigences du Règlement, le prestataire devait avoir déposé la demande de permission d’en appeler au plus tard le 10 avril 2019. D’après la date du courriel que le prestataire a envoyé au Tribunal, il a présenté la demande à la division d’appel le 15 avril 2019. Il a présenté sa demande de permission d’en appeler sept jours en retard.

Question 2 : Devrais-je exercer mon pouvoir discrétionnaire et proroger le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler?

[9] Ayant conclu que la demande du prestataire était en retard, devrais‑je proroger le délai pour présenter une demande?

[10] Selon le paragraphe 57(2) de la LMEDS, je peux proroger d’au plus un an le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler.

[11] Lorsqu’il s’agit de décider s’il convient d’accorder une prorogation de délai pour déposer une demande de permission d’en appeler, le critère le plus important est l’intérêt de la justiceNote de bas de page 2. Dans les affaires X (Re) et Canada (Procureur général) c Larkman, la Cour d’appel fédérale a établi les facteurs pertinents qu’il fallait examiner :

  • s’il y a des questions défendables dans l’appel ou si la demande a un certain fondement;
  • s’il existe des circonstances particulières ou une explication raisonnable pour justifier le retard;
  • si le retard est excessif;
  • si la prorogation du délai imparti causera un préjudice à l’intimé.

[12] Dans l’arrêt Larkman, la Cour d’appel fédérale s’est aussi demandé si la partie avait manifesté une intention constante de poursuivre sa demande.

[13] Le prestataire n’a pas fourni d’explication pour le retard, ni d’indication qu’il avait l’intention constante de poursuivre sa demande. Toutefois, il est peu probable que la Commission subisse un préjudice si j’accorde un délai supplémentaire, et la demande a été déposée avec peu de retard. Le fait que le retard ne soit que d’une semaine, tout juste, m’incite fortement à accorder la prorogation. En outre, le fait que le prestataire n’ait pas fourni d’explication raisonnable pour son retard ne constituerait généralement pas, en soi, un obstacle à la prorogation.

[14] En général, lorsqu’il faut déterminer si une prorogation du délai pour présenter une demande est dans l’intérêt de la justice, un plus grand poids est accordé au fait qu’il s’agisse ou non d’une cause défendable, en l’absence d’autres circonstances particulières. Toutefois, étant donné que le retard est relativement court en l’espèce, je suis disposée à accorder une prorogation du délai et à déterminer si la cause est défendable en me penchant sur la demande de permission d’en appeler.

Question 3 : L’appel a‑t‑il une chance raisonnable de succès?

[15] Le prestataire affirme qu’il s’agit d’une cause défendable pour les raisons suivantes :

  1. le membre de la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle parce qu’il ne lui a pas pleinement accordé une possibilité équitable de présenter sa cause;
  2. la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit parce qu’elle n’a pas cherché à déterminer si les raisons pour lesquelles le prestataire avait quitté son emploi constituaient une justification;
  3. la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, en ne considérant pas les raisons pour lesquelles il avait quitté son emploi.

[16] La Cour d’appel fédérale a établi qu’une chance raisonnable de succès était semblable à une cause défendable du point de vue du droit, et vice versaNote de bas de page 3. D’une façon ou d’une autre, pour qu’il y ait une chance raisonnable de succès, les moyens d’appel doivent être fondés sur le paragraphe 58(1) de la LMEDS. Ce paragraphe énumère les moyens d’appel sur lesquels il est possible de s’appuyer pour qu’il y ait une chance raisonnable de succès. Ils se limitent à ceux‑ci :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[17] Les prestataires ne sont pas tenus de prouver le bien‑fondé de leur cause; ils doivent seulement établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable.

[18] Le prestataire affirme que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée en ne tenant pas compte des éléments de preuve concernant les raisons de son départ, et qu’elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit en ne cherchant pas à déterminer si ces raisons constituaient une justification. Toutefois, ces arguments se rapportent à son emploi chez un autre employeur – X (faisant affaire sous le nom de X) – plutôt qu’aux X. Les arguments du prestataire concernant son emploi dans la société X ne sont pas pertinents parce que la décision de la division générale se rapportait seulement à son emploi aux X. Le Tribunal de la sécurité sociale a mentionné ce point au prestataire dans sa lettre datée du 25 avril 2019.

[19] Le Tribunal a aussi noté que la demande de permission présentée par le prestataire ne semblait pas faire référence aux questions relatives à la pénalité et à la violation que la division générale avait tranchées. Toutefois, le Tribunal a noté que le prestataire les avait invoquées comme moyens d’appel, et lui a donc demandé de fournir des détails et une réponse au plus tard le 6 mai 2019. Le prestataire n’a pas fourni de réponse.

[20] Comme il a été souligné dans la lettre du Tribunal, il ne suffit pas d’affirmer simplement que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, sans fournir d’élément de preuve. Le principe de justice naturelle se rapporte aux règles de procédure fondamentales qui s’appliquent dans un contexte judiciaire ou quasi judiciaire. L’existence de ce principe permet de veiller à ce que toutes les parties soient dûment avisées de toute instance, qu’elles aient pleinement la possibilité de présenter leur cause, et que la procédure soit équitable et impartiale ou ne suscite pas de crainte raisonnable de partialité. Ce principe est lié aux questions d’équité procédurale. Le prestataire n’a pas laissé entendre qu’il n’a pas été dûment avisé de l’audience, que le membre de la division générale l’a privé d’une audience juste, ou qu’il y avait des craintes de partialité. De plus, après mon examen de la preuve, y compris de l’enregistrement audio de l’audience de la division générale, je ne peux dégager aucun élément indiquant que la division générale aurait peut‑être privé le prestataire de la possibilité de présenter pleinement sa cause, ou que le prestataire aurait des craintes raisonnables de partialité. De même, rien n’indique que la division générale aurait peut‑être mal interprété ou négligé des éléments de preuve, ou commis une erreur de droit.

[21] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Je refuse donc la permission d’en appeler.

Conclusion

[22] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est accordée mais, puisque je ne suis pas convaincue que la cause est défendable, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

 

Demandeur :

C. G., Non représenté

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