Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – L’article 55 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) exige qu’un prestataire prouve que le traitement n’était pas immédiatement ou promptement disponible, ce qui signifie que les critères immédiatement ou promptement disponible sont des critères indépendants et alternatifs – De plus, rien dans le Règlement ni aucune interprétation judiciaire ne laisse entendre que la décision selon laquelle le traitement n’est pas immédiatement disponible au Canada dépend de la question de savoir si le traitement est requis immédiatement par le prestataire – Le caractère urgent du problème de santé du prestataire n’est pas pertinent pour le critère de l’article 55(1)(a).

Contenu de la décision



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Décision et motifs

Décision

[1] La décision de la division générale est confirmée.

[2] Bien que la division générale ait commis une erreur en rendant sa décision, j’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre et j’estime toujours que la prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations.

Aperçu

[3] L’appelante, M. L. (prestataire), a quitté le Canada afin de se faire opérer pour un problème de santé. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a déterminé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi était à l’étranger parce qu’elle n’avait pas prouvé que son intervention médicale n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada. La Commission a maintenu cette décision après que la prestataire a demandé une révision.

[4] La prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais son appel a été rejeté. Elle interjette maintenant appel devant la division d’appel.

[5] J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre et je confirme que la prestataire n’a pas prouvé que son intervention médicale n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada.

Questions en litige

[6] La division générale a-t-elle manqué à un principe de justice naturelle en omettant de donner à la prestataire l’occasion de fournir ses éléments de preuve médicale?

[7] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en interprétant le droit comme exigeant que les problèmes de santé de la prestataire soient urgents afin de lui permettre de toucher des prestations à l’extérieur du Canada?

[8] La division générale a-t-elle tiré une conclusion erronée selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada :

  1. en raison d’un malentendu quant à l’amélioration de l’état de santé de la prestataire depuis la recommandation de l’intervention chirurgicale;
  2. en raison d’un malentendu quant au fait que la prestataire ne savait pas qu’elle avait besoin d’une intervention chirurgicale;
  3. sans tenir compte de l’expérience du temps d’attente de la prestataire pour une intervention chirurgicale en raison de son état de santé particulier?

Analyse

[9] La division d’appel ne peut intervenir à l’égard d’une décision de la division générale que si elle conclut que cette dernière a commis l’une des erreurs correspondant aux « moyens d’appel » prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[10] Les moyens d’appel prévus à l’article 58(1) sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle manqué à un principe de justice naturelle en omettant de donner à la prestataire l’occasion de fournir ses éléments de preuve médicale?

[11] La prestataire a fait valoir qu’on lui avait posée des questions sur ses documents médicaux et qu’elle ne comprenait pas qu’elle devait les présenter à la division générale. J’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale, et la prestataire a dit que [traduction] « l’AE » ne lui avait pas demandé ses antécédentsNote de bas de page 1, mais qu’elle aurait pu obtenir la confirmation de son spécialiste qu’elle était sur la liste d’attente pour une intervention chirurgicale. Elle a déclaré à la division générale qu’elle pouvait obtenir ces éléments de preuve si elle en avait besoin, mais elle n’a pas demandé à la division générale si elle souhaitait les voir ou si elle pouvait avoir la possibilité de lui faire parvenir.

[12] La prestataire a déclaré à la division d’appel qu’elle lui aurait fourni les éléments de preuve si elle avait su que la division générale aurait voulu les voir. Cela pourrait être interprété comme un argument selon lequel la division générale n’a pas observé le droit de justice naturelle qu’a la prestataire d’être entendue.

[13] La prestataire a également dit qu’elle avait fourni les documents à la division générale après que celle-ci a rendu sa décision. Rien dans le dossier ne montre que la division générale a reçu de nouveaux éléments de preuve de la prestataire avant ou après avoir rendu sa décision. Toutefois, la prestataire a bel et bien fourni de nouveaux éléments de preuve à la division d’appel, lesquels comprenaient un rapport médical. Étant donné que la prestataire a confondu la division d’appel et la Commission avec la division générale dans son plaidoyer, je présumerai qu’elle décrivait en fait le rapport médical qu’elle a joint à son observation à la division d’appel, datée du 7 mars 2019.

[14] Bien que la division d’appel ne peut généralement pas tenir compte de nouveaux éléments de preuve, j’ai examiné le rapport médical en l’espèce afin de déterminer si le droit qu’a la prestataire d’être entendue aurait pu être compromis. Le rapport semble être un rapport diagnostique d’une échographie préparé à la suite de l’intervention chirurgicale. Ce dernier confirme que la prestataire a subi une myomectomie et donne à penser qu’elle a développé un hématome.

[15] Même si on pouvait dire que la division générale aurait dû en faire plus pour s’assurer que la prestataire ait l’occasion de présenter d’autres éléments de preuve après l’audience, les éléments de preuve que la prestataire aurait présentés auraient eu peu d’importance sur la décision. La prestataire avait déjà fourni des éléments de preuve médicale à la Commission qui confirmaient la nature de son intervention chirurgicale dans son pays natal, ainsi que certains détails pertinents sur l’évolution de son état de santé et sur son rétablissement prévu. Ces renseignements figuraient dans le dossier dont disposait la division générale. De plus, la décision de la division générale ne conteste pas le fait lié à l’intervention chirurgicale de la prestataire ni à son hématome postopératoire.

[16] Je n’estime pas que la division générale n’a pas observé le droit de justice naturelle de la prestataire en ne laissant pas entendre qu’elle devrait présenter ces autres éléments de preuve médicale après l’audience.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en interprétant le droit de façon à exiger que les problèmes de santé de la prestataire soient urgents afin de lui permettre de toucher des prestations à l’extérieur du Canada?

[17] La division générale affirme à plusieurs reprises que la prestataire doit prouver que son traitement médical n’était pas immédiatement et promptement disponible au CanadaNote de bas de page 2. Il ne s’agit pas du critère. L’article 55 du Règlement sur l’assurance-emploi exige qu’une partie prestataire prouve que son traitement n’était pas immédiatement ou promptement disponible, ce qui signifie que les critères relatifs à la disponibilité immédiate et à la disponibilité prompte sont indépendants et interchangeables. Si la partie prestataire était capable de prouver que son traitement médical était immédiatement disponible mais difficile à obtenir, promptement disponible mais quelque peu retardé, ou difficile à obtenir et retardé, elle ne serait pas inadmissible.

[18] Le fait que la division générale ait demandé que la prestataire prouve que son traitement était difficile à obtenir et retardé constitue une erreur de droit.

[19] De plus, à la lecture de la décision de la division générale, je constate que celle-ci a conclu que le traitement n’était pas immédiatement disponible en se fondant sur sa conclusion selon laquelle le besoin de traitement de la prestataire n’était pas urgent. Il peut être attrayant de lier la définition de l’expression « immédiatement disponible » à l’immédiateté du besoin, mais rien dans le Règlement ni dans aucune interprétation judiciaire ne donne à penser que la conclusion selon laquelle le traitement n’est pas immédiatement disponible au Canada dépend du fait de savoir si la prestataire a immédiatement besoin du traitement. En fin de compte, le fait de déterminer le niveau d’urgence est un jugement de valeur : un problème de santé peut ne pas être mortel, mais peut offrir un soulagement de la douleur, une mobilité accrue ou d’autres effets bénéfiques, de sorte qu’une partie prestataire pourrait considérer qu’il serait important de suivre le traitement le plus rapidement possible. La division générale ne devrait pas porter de jugements de valeur quant à l’urgence de la plainte d’une partie prestataire pour déterminer si, dans les circonstances, le traitement est immédiatement disponible.

[20] J’estime que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 55(1)(a) du Règlement et, en particulier, dans son application des critères relatifs à [traduction] « disponibilité immédiate et [à la] disponibilité prompte ».

Question en litige no 3 a) : La division générale a-t-elle tiré une conclusion erronée selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada en raison d’un malentendu quant à l’amélioration de l’état de santé de la prestataire depuis la recommandation de l’intervention chirurgicale?

[21] Comme il a été mentionné précédemment, l’urgence du problème de santé de la prestataire n’est pas pertinente au critère de l’article 55(1)(a). Toutefois, la division générale a semblé le croire et a fondé sa décision, du moins en partie, sur cette conclusion.

[22] En décembre 2017, le problème de santé de la prestataire a connu une forte recrudescence, ce qui a entraîné des douleurs intenses et une paralysie. La division générale a estimé qu’il était important de noter que les symptômes de la prestataire s’étaient atténués au moment où elle a consulté son médecin et avant de quitter le pays pour se faire opérer. C’est sur cela que la division générale s’est fondée pour conclure que les problèmes de santé de la prestataire n’étaient pas urgents.

[23] La division générale semble avoir compris que l’amélioration de l’état de santé de la prestataire était une amélioration permanente ou un retour à son état de santé normal avant la recrudescence. En fait, la prestataire a continué d’avoir des symptômes comprenant de la constipation et des douleurs persistantesNote de bas de page 3. Avant la recrudescence, la prestataire n’avait presque plus de symptômes, ce pour quoi elle avait décidé d’annuler l’intervention chirurgicale prévue et d’ajouter son nom à une liste d’attente pour subir un traitement pour la fertilité. Bien que sa paralysie soit disparue et que sa douleur se soit estompée, la prestataire surveillait l’évolution de sa fibrose et a jugé qu’elle devrait se faire opérer, comme son état était maintenant symptomatique. Dans son témoignage, la prestataire a dit que les médecins [traduction] « ne pouvaient rien faire », mais le contexte donne à penser qu’elle parlait de la recrudescence de ses symptômes et du fait qu’elle aurait dû passer un examen pendant la recrudescence de symptômes pour en déterminer la causeNote de bas de page 4. Elle a affirmé qu’elle avait quitté le Canada pour obtenir un traitement, car elle ne pouvait pas attendreNote de bas de page 5 : les symptômes étaient de plus en plus fréquentsNote de bas de page 6. Lorsque son état était asymptomatique, son médecin avait hésité à la [traduction] « traiterNote de bas de page 7 », mais comme il était maintenant devenu symptomatique, la prestataire devait se faire opérerNote de bas de page 8.

[24] Les éléments de preuve présentés à la division générale donnent à penser que l’épisode de recrudescence des symptômes représentait un développement dans l’évolution du problème de santé sous-jacent. La division générale semble avoir compris que la diminution des symptômes signifiait que la prestataire avait moins besoin d’un traitement, ou que cela était moins [traduction] « urgent ». Toutefois, rien n’appuie cette conclusion lorsque l’ensemble de la preuve est pris en considération en contexte. À mon avis, la division générale a fondé sa décision sur une interprétation erronée des éléments de preuve de la prestataire, ce qui constitue une erreur aux termes de l’article 58(1)(c) de la Loi sur le MEDS.

Question en litige no 3 b) : La division générale a-t-elle tiré une conclusion erronée selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada en raison d’un malentendu quant au fait que la prestataire ne savait pas qu’elle avait besoin d’une intervention chirurgicale?

[25] Les paragraphes ci-dessus sont également pertinents quant au fait de savoir si la prestataire savait qu’elle avait besoin de l’intervention chirurgicale. C’est la membre de la division générale qui a laissé entendre à la prestataire que ses symptômes disparaissaient de plus en plus et [traduction] « qu’une intervention chirurgicale [n’était donc] pas une option », mais la prestataire n’était pas d’accord et a affirmé qu’elle avait parlé à son médecin et qu’elle savait qu’elle avait besoin de l’interventionNote de bas de page 9.

[26] La division générale s’est également appuyée sur le fait que la prestataire ne savait pas si elle allait se faire opérer lorsqu’elle a quitté le Canada, jusqu’à ce que le spécialiste dans son pays natal ait rendu sa décision. Cela est vrai. Toutefois, la raison pour laquelle la prestataire ne savait pas si elle se ferait opérer est qu’elle ne savait pas si ce médecin allait ou pouvait effectuer l’intervention. Ses éléments de preuve démontraient clairement qu’elle avait compris qu’elle avait besoin de l’intervention.

[27] La division générale semble avoir fondé sa décision selon laquelle l’intervention chirurgicale était immédiatement disponible au Canada en partie sur la conclusion erronée que la prestataire ne savait pas qu’elle avait besoin de l’intervention, qui est fondée sur une interprétation erronée des éléments de preuve de la prestataire à ce sujet. J’estime que la division générale a commis une erreur aux termes de l’article 58(1)(c) de la Loi sur le MEDS.

Question en litige no 3 c) : La division générale a-t-elle tiré une conclusion erronée selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada sans tenir compte de l’expérience du temps d’attente de la prestataire pour une intervention chirurgicale en raison de son état de santé particulier?

[28] La division générale a déterminé que la prestataire ne pouvait pas prouver que son traitement n’était pas promptement disponible, car elle n’avait pas parlé à son spécialiste avant de quitter le Canada pour se faire opérer. D’après le témoignage de la prestataire, il n’est pas clair qu’elle avait discuté de l’aggravation ou du changement de ses symptômes avec son médecin de famille, mais elle savait qu’elle aurait besoin de l’intervention chirurgicale si son état devenait symptomatique. La division générale a raison de croire que la prestataire n’a pas consulté son spécialiste avant de quitter le Canada.

[29] La division générale a aussi compris que la prestataire avait déjà été sur la liste d’attente pour la même intervention et que celle-ci avait finalement été prévue en 2016, soit après un an d’attenteNote de bas de page 10. La prestataire a précisé qu’elle pensait qu’elle devrait attendre une autre année, selon son expérience antérieure. Cet élément de preuve est important et pertinent pour déterminer la rapidité à laquelle la prestataire pouvait se faire opérer au Canada.

[30] La division générale ne semble pas avoir soupesé ni analysé l’expérience que la prestataire a vécue environ un an plus tôt par rapport au temps d’attente au Canada pour la même intervention afin de traiter le même problème. Sa conclusion repose uniquement sur le fait que la prestataire n’a pas consulté son spécialiste avant de quitter le Canada pour confirmer la rapidité à laquelle elle pouvait obtenir le même traitement au Canada.

[31] La division générale a soit ignoré l’expérience du temps d’attente de la prestataire pour tirer sa conclusion selon laquelle elle n’avait pas prouvé que le traitement n’était pas facilement accessible ou immédiatement ou promptement disponible, soit considéré que le fait selon lequel la prestataire n’avait pas été informée du temps d’attente pour l’intervention était si convaincant que l’expérience antérieure de la prestataire n’aurait rien changé. Si la division générale a ignoré l’expérience de la prestataire, j’estimerais donc qu’elle a commis une erreur aux termes de l’article 58(1)(c) de la Loi sur le MEDS. Si la division générale a simplement accordé plus d’importance au fait que la prestataire n’a pas demandé à son spécialiste de l’informer de la disponibilité de l’intervention chirurgicale à la fin de 2017, la façon dont la division générale a soupesé et analysé l’élément de preuve n’est pas apparente. Le caractère inadéquat des motifs constituerait toujours une erreur de droit aux termes de l’article 58(1)(b) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[32] La prestataire a invoqué des moyens d’appel au titre de l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS. Je vais maintenant me pencher sur la réparation appropriée.

Réparation

[33] L’article 59 de la Loi sur le MEDS me confère le pouvoir de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, de renvoyer l’affaire à la division générale avec ou sans directives, ou de confirmer, d’infirmer ou de modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

[34] J’estime que le dossier d’appel est complet et que je peux donc rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[35] L’article 37(a) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) prescrit que, sauf dans les cas prévus par règlement, une personne n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour toute période pendant laquelle elle est à l’étranger. Les exceptions prescrites sont prévues à l’article 55 du Règlement. L’article 55(1)(a) prévoit l’exception qui s’applique à la situation de la prestataire. Cet article permet à une partie prestataire d’être admissible lorsqu’elle est à l’étranger si elle est à l’extérieur du Canada pour suivre un traitement médical qui n’est pas immédiatement ou promptement disponible au Canada.

[36] La prestataire s’est fait opérer dans le pays de son ancienne résidence afin d’enlever des fibromes utérins. Elle n’a pas soutenu qu’elle ne pouvait pas subir cette intervention au Canada ni qu’il serait trop difficile de le faire au Canada. Toutefois, elle a bel et bien laissé entendre que l’intervention n’était pas immédiatement disponible parce que son nom avait déjà figuré sur une liste d’attente pour l’intervention et qu’elle avait attendu un an avant d’obtenir la date de l’intervention. Elle avait des raisons personnelles de refuser l’intervention à ce moment-là et elle a perdu sa place sur la liste d’attente. L’argument de la prestataire repose sur le principe qu’il faudrait beaucoup de temps pour se faire opérer au Canada, car il avait fallu attendre longtemps avant que l’intervention ne soit prévue en 2016. La prestataire s’appuie sur sa propre expérience récente au Canada où elle a dû être environ un an sur la liste d’attente pour la même intervention afin de traiter le même problème.

[37] J’accepte le fait qu’un traitement médical au Canada pour lequel un patient doit attendre un an n’est pas un traitement immédiatement disponible aux fins de l’article 55(1)(a) du Règlement. Toutefois, la question est de savoir si la prestataire a réellement prouvé qu’elle aurait dû attendre aussi longtemps au Canada pour se faire opérer, au moment où elle a quitté le pays pour subir l’intervention, pour ne pas pouvoir dire que l’intervention était immédiatement disponible au Canada. La prestataire a le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que le traitement médical n’était pas immédiatement disponible au CanadaNote de bas de page 11.

[38] La prestataire a déclaré un changement à son état de santé. Lorsque la prestataire était initialement sur la liste d’attente pour l’intervention chirurgicale, ses fibromes ne lui causaient presque aucun symptôme, de sorte que ses priorités professionnelles et son désir de subir un traitement pour la fertilité ont pris le dessus. Elle a même retiré son nom de la liste d’attente lorsque son intervention chirurgicale avait finalement été prévue annulée. Toutefois, la situation a changé lorsque la prestataire a été atteinte d’une vive douleur et d’une paralysie temporaire lors d’une crise aiguë. La prestataire a compris en effectuant ses propres recherches que l’apparition de symptômesNote de bas de page 12, ou la fréquence accrue de symptômesNote de bas de page 13, signifiait qu’elle ne pouvait plus repousser l’intervention. C’est à ce moment-là qu’elle a décidé qu’elle devrait quitter le pays pour suivre le traitement.

[39] La division générale s’est prétendument fondée sur le fait que la prestataire n’avait pas parlé à son spécialiste avant de quitter le Canada pour suivre le traitement, ce qui, selon la division générale, signifiait que la prestataire ne pouvait pas prouver que son traitement n’était pas immédiatement disponible. À mon avis, le fait que la prestataire avait des connaissances personnelles relatives au temps d’attente pour le type de traitement dont elle avait besoin est également pertinent. Toutefois, la prestataire a décidé de quitter le Canada en raison d’un changement relatif à ses symptômes qui, selon elle, était l’évolution de sa maladie. L’attente d’un an de la prestataire s’appliquait à ce qui était alors un problème asymptomatique pendant une période lors de laquelle la prestataire était capable de travailler sans difficulté. En fait, il s’agissait du temps d’attente pour une intervention [traduction] « non urgente ».

[40] J’ai déjà jugé qu’il serait erroné de conclure qu’une intervention doit être immédiatement disponible si le besoin de cette intervention n’est pas urgent. Toutefois, j’admets que l’urgence du problème de santé pour lequel un traitement est demandé aurait probablement une incidence sur la date prévue du traitement. Bien que je reconnaisse que la prestataire a supposé qu’elle devrait attendre jusqu’à un an pour se faire opérer au Canada, son expérience antérieure par rapport au temps d’attente ne peut pas être considérée comme reflétant sa capacité à obtenir un traitement en décembre 2017, lorsque ses fibromes avaient évolué au point de lui causer de la douleur, de nuire à son emploiNote de bas de page 14 et de produire vraisemblablement plus souvent de la paralysie et des douleurs aiguës.

[41] La prestataire n’a fourni aucun élément de preuve concernant la rapidité à laquelle son intervention chirurgicale aurait pu être prévue au Canada à la fin de 2017, lorsqu’elle présentait de graves symptômes. La prestataire a discuté avec son médecin de famille de son intention d’aller à l’étranger pour se faire opérerNote de bas de page 15, mais elle n’a pas décrit la réaction de son médecin ni si celui-ci lui avait fait des recommandations ou des mises en garde. La prestataire n’a pas consulté son spécialiste pour lui décrire l’évolution de son état de santé qui l’a menée à décider qu’elle ne pouvait pas attendre pour subir la chirurgie.

[42] Les éléments de preuve de la prestataire concernant le temps d’attente datent d’un an et portent sur un problème de santé pour lequel le traitement était alors peu urgent. Les rapports médicaux au dossier ne portent ni sur l’urgence liée au besoin de l’intervention de la prestataire ni sur la disponibilité de l’intervention au Canada.

[43] J’estime que la prestataire n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que le traitement médical qu’elle a suivi à l’étranger n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada.

[44] La décision de la division générale selon laquelle la prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations aux termes de l’article 37 de la Loi sur l’AE, lorsqu’elle était à l’étranger, est confirmée.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 7 mai 2019

Téléconférence

M. L., appelante

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