Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli en partie.

[2] Le Tribunal conclut que la décision prise par l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission »), de réexaminer les demandes de prestations de l’appelant dans un délai de 72 mois, si elle estime qu’une déclaration fausse ou trompeuse a été faite, est justifiée en vertu de l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »). Dans le cas présent, le réexamen touche les demandes de prestations ayant débuté le 22 février 2009 (dossier GE-17-387), le 28 mars 2010 (dossier GE-17-386) et le 10 avril 2011 (dossier GE-17-384).

[3] Le Tribunal conclut que la décision prise par la Commission d’annuler les périodes de prestations de l’appelant parce qu’il ne remplit pas les conditions requises pour être admissible au bénéfice des prestations de l’assurance-emploi, est justifiée aux termes des articles 7, 48 et 49 de la Loi et du paragraphe 14(1) du Règlement sur l’assurance-emploi (le « Règlement ») (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[4] Le Tribunal conclut que l’imposition d’une pénalité à l’appelant, pour avoir perpétré un acte délictueux en faisant sciemment des déclarations fausses ou trompeuses, n’est pas justifiée en vertu de l’article 38 de la Loi (dossier GE-17-385). Le Tribunal considère que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire à cet égard, en vertu de l’article 38 de la Loi. La pénalité imposée à l’appelant relativement à sa demande de prestations ayant débuté le 13 janvier 2013 doit être annulée (dossier GE-17-385).

[5] Le Tribunal conclut que l’émission d’un avis de violation à l’endroit de l’appelant, à la suite d’une pénalité qui lui a été infligée pour avoir perpétré un acte délictueux, n’est pas justifiée aux termes de l’article 7.1 de la Loi (dossier GE-17-385). L’avis de violation émis à l’endroit de l’appelant relativement à sa demande de prestations ayant débuté le 13 janvier 2013 doit être annulé (dossier GE-17-385).

Aperçu

[6] Cette décision s’applique à quatre (4) dossiers d’appel (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387). L’appelant a déclaré avoir effectué plusieurs périodes d’emploi dans le domaine de la construction de 2008 à 2013 inclusivement, grâce auxquelles quatre (4) périodes de prestations ont été établies et à la suite desquelles des prestations d’assurance-emploi lui ont été versées.

[7] L’appelant a déclaré avoir travaillé pour les employeurs X, du 17 novembre 2008 au 21 février 2009 inclusivement, X, du 20 décembre 2009 au 27 mars 2010 inclusivement, ainsi que du 3 janvier 2011 au 9 avril 2011 inclusivement, et X, du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013 inclusivement. Dans chacun des cas, l’appelant a indiqué avoir cessé de travailler en raison d’un manque de travail.

[8] À la suite d’une enquête qu’elle a menée et à partir de la preuve qu’elle a recueillie, la Commission a effectué un réexamen des demandes de prestations de l’appelant ayant débuté aux dates suivantes : 22 février 2009 (dossier GE-17-387), 28 mars 2010 (dossier GE-17-386) et 10 avril 2011 (dossier GE-17-384).

[9] La Commission a rendu des décisions selon lesquelles les quatre demandes de prestations de l’appelant avaient été annulées, soit celles ayant commencé le 22 février 2009, le 28 mars 2010, le 10 avril 2011 et le 13 janvier 2013, puisque l’Agence du revenu du Canada (ARC) avait déterminé qu’il n’avait pas occupé un emploi assurable relativement à chacune de ces demandes de prestations (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[10] En fonction des renseignements qu’elle a obtenus au terme de son enquête, la Commission a conclu que l’appelant avait fait des déclarations fausses ou trompeuses en lui présentant un relevé d’emploi contenant de l’information fausse ou trompeuse provenant de l’entreprise X (monsieur M. B.), avec sa demande de prestations, et pour lesquelles une pénalité de 1 002,00 $ lui a été imposée. La Commission a indiqué avoir également imposé à l’appelant un avis de violation qualifié de « violation très grave » (dossier GE-17-385).

[11] L’appelant a expliqué avoir travaillé pour les employeurs concernés et a été rémunéré pour le travail qu’il avait effectué. Il a précisé que d’autres employés avec lesquels il avait travaillé étaient en mesure de confirmer sa présence au travail. L’appelant a affirmé qu’il ne savait pas qu’il faisait des déclarations fausses ou trompeuses lorsqu’il a présenté sa demande de prestations après avoir travaillé pour l’employeur X. Le 23 janvier 2017, l’appelant a contesté les décisions rendues à son endroit après qu’elles aient fait l’objet d’une révision de la part de la Commission. Ces décisions font l’objet du présent appel devant le Tribunal.

Questions préliminaires

[12] Le Tribunal précise que les appels portant les numéros de dossier GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387 ont été joints en vertu de l’article 13 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale puisqu’ils soulèvent des questions de droit ou de fait qui leur sont communes, dont celles portant sur le réexamen de plusieurs des demandes de prestations de l’appelant et l’annulation de ses demandes, puisque la Commission a déterminé qu’il ne remplissait pas les conditions requises pour être admissible au bénéfice des prestations. Ces appels soulèvent également des questions de droit ou de fait qui leur sont communes puisqu’ils concernent le même appelant.

[13] L’audience du 22 juin 2018 a été ajournée. Lors de cette audience, le représentant de l’appelant a indiqué au Tribunal que l’appelant avait contesté auprès de Cour canadienne de l’impôt (CCI), la décision rendue à son endroit par l’Agence du revenu du Canada (ARC), en date du 22 mars 2016, relativement à l’emploi qu’il a occupé lorsqu’il a été au service de monsieur M. B. (X) durant la période du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013. Dans la décision qu’elle a rendue, en date du 22 mars 2016, l’ARC a déterminé que l’emploi occupé par l’appelant n’était pas un emploi assurable en vertu du paragraphe 93(3) et de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi. Dans sa décision, l’ARC a alors précisé qu’étant donné que les exigences du contrat de louage de services n’avaient pas été respectées, il n’existait pas de relation employeur-employé (pièces GD3-51 et GD3-52 du dossier GE-17-385 et pièces GD14-1 à GD14-15 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[14] Le 25 juin 2018, le dossier a été mis en suspens par le Tribunal, en attendant que le processus d’appel devant la CCI soit complété et de recevoir une copie de la décision devant être rendue par cette instance (pièces GD20-1 et GD20-2 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[15] Le 28 novembre 2018, le représentant de l’appelant a transmis au Tribunal une copie de la décision rendue par la CCI (numéro de dossier : CCI : 2017-958(EI) APP), en date du 7 novembre 2018). Dans cette décision, la CCI a rejeté la demande de prolongation de délai formulée par l’appelant, en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, pour déposer un avis d’appel relativement à une décision de la ministre du Revenu national envoyée le 22 mars 2016 et confirmant que l’appelant, lorsqu’il travaillait pour M. B. (X), n’occupait pas un emploi assurable (pièces GD24-1 à GD24-7 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[16] Le 3 janvier 2019, l’appel a été retiré du suspens et l’audience a été reprise le 10 mai 2019, après plusieurs ajournements successifs.

Questions en litige

[17] Le Tribunal doit déterminer si l’appel des décisions de la Commission est fondé à l’égard des quatre litiges suivants :

  1. Le Tribunal doit déterminer si la décision prise par la Commission de réexaminer les demandes de prestations de l’appelant, dans un délai de 72 mois, si elle estime qu’une déclaration fausse ou trompeuse a été faite, est justifiée en vertu de l’article 52 de la Loi (dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GD-17-387) ;
  2. Le Tribunal doit déterminer si la décision prise par la Commission d’annuler les périodes de prestations de l’appelant parce qu’il ne remplit pas les conditions requises pour être admissible au bénéfice des prestations de l’assurance-emploi, est justifiée aux termes des articles 7, 48 et 49 de la Loi et du paragraphe 14(1) du Règlement (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387) ;
  3. Le Tribunal doit déterminer si l’imposition d’une pénalité à l’appelant, pour avoir perpétré un acte délictueux en faisant sciemment des déclarations fausses ou trompeuses, est justifiée en vertu de l’article 38 de la Loi (dossier GE-17-385) ;
  4. Le Tribunal doit déterminer si l’émission d’un avis de violation à l’endroit de l’appelant, à la suite d’une pénalité qui lui a été infligée pour avoir perpétré un acte délictueux, est justifiée aux termes de l’article 7.1 de la Loi (dossier GE-17-385).

Analyse

Réexamen des demandes de prestations

Est-ce que la Commission était justifiée de réexaminer les demandes de prestations de l’appelant dans un délai de 72 mois, si elle estime qu’une déclaration fausse ou trompeuse a été faite?

[18] Oui. Le Tribunal considère que la Commission était justifiée de réexaminer les demandes de prestations de l’appelant ayant débuté le 22 février 2009 (dossier GE-17-387), le 28 mars 2010 (dossier GE-17-386) et le 10 avril 2011 (dossier GE-17-384).

[19] En vertu de l’article 52 de la Loi, la Commission dispose d’un délai de 36 mois suivant le moment où des prestations ont été payées ou sont devenues payables à un prestataire, pour examiner de nouveau toute demande au sujet de ces prestations. Toutefois, en vertu de cet article, si la Commission estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demande de prestations, celle-ci bénéficie alors d’un délai de 72 mois pour réexaminer la demande, suivant la date à laquelle les prestations ont été payées ou sont devenues payables.

[20] Dans les affaires Dussault (2003 CAF 372), Lemay (2002 CAF 337) et Langelier (2002 CAF 157), la Cour d’appel fédérale (la « Cour ») a établi qu’une déclaration ou une représentation fausse ou trompeuse n’a pas à avoir été faite « sciemment » pour donner le droit à la Commission de procéder à un réexamen d’une demande de prestations, mais que celle-ci doit plutôt simplement démontrer qu’elle pouvait raisonnablement estimer qu’une déclaration fausse ou trompeuse avait été faite relativement à une demande de prestations.

[21] Cette conclusion a été rappelée dans l’affaire P. D. et Commission de l’assurance-emploi du Canada (2 mai 2016, Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, dossier AD-15-1153), où la Division d’appel du Tribunal a souligné qu’au stade du réexamen d’une demande de prestations, la Commission n’a pas à démontrer qu’il y a effectivement eu une déclaration fausse ou trompeuse de la part d’un prestataire, mais qu’elle devait simplement estimer qu’une déclaration fausse ou trompeuse avait été faite.

[22] Dans l’affaire Brière (A-637-86), la Cour a établi que lorsque la Commission exerce le pouvoir que lui confère le paragraphe 52 de la Loi, elle dispose également du droit de recouvrer des sommes ayant été versées en trop en prestations ou, selon le cas, lui crée l’obligation de verser des prestations qu’elle avait précédemment refusé de payer.

[23] Dans les dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387, le Tribunal considère que la Commission a démontré qu’elle pouvait réexaminer les demandes de prestations de l’appelant et qu’elle avait respecté le délai de 72 mois qui lui était alloué pour le faire.

[24] Dans une lettre en date du 13 mars 2015, la Commission a avisé l’appelant qu’elle avait réexaminé ses demandes de prestations ayant commencé le 22 février 2009 (dossier GE-17-387), le 28 mars 2010 (dossier GE-17-386) et le 10 avril 2011 (dossier GE-17-384) (pièces GD3-28 et GD3-29 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-15-387).

[25] Dans cette lettre, la Commission a informé l’appelant qu’elle estimait que des déclarations inexactes ou des affirmations fausses ou trompeuses avaient été faites, plus particulièrement, concernant le fait que ses périodes de prestations avaient été établies en fonction de relevés d’emploi comportant des informations fausses ou trompeuses. Elle lui a indiqué que le 20 février 2015, l’ARC avait rendu des décisions indiquant qu’il n’avait pas occupé des emplois assurables pour les entreprises suivantes : X et Les X (pièces GD3-28 et GD3-29 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-15-387).

[26] L’appelant a expliqué avoir travaillé pour les employeurs X et X au cours des années 2008 à 2011 et qu’il avait déclaré les sommes d’argent qu’il avait reçues de la part de ces employeurs dans ses déclarations de revenus (années 2008 à 2012), (pièces GD33-2 à GD33-18 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-15-387).

[27] Le représentant a soutenu que le délai de réexamen de la Commission devrait être de 36 mois et non de 72 mois, en vertu de l’article 52 de la Loi, étant donné qu’il n’y avait pas de déclarations fausses ou trompeuses au moment où l’appelant a fait ses demandes de prestations et que celui-ci pensait, de bonne foi, avoir occupé des emplois assurables auprès des employeurs concernés (X et X). Le représentant a demandé que le trop-payé ayant découlé des périodes de prestations en cause soit annulé parce que la Commission était hors délai pour annuler ces périodes. Selon le représentant, la Commission n’a pas assumé le fardeau de preuve qui lui incombe pour justifier le réexamen des demandes de prestations de l’appelant, étant donné qu’elle n’a pas prouvé l’existence de déclarations fausses ou trompeuses (Langelier, 2002 CAF 157, G. L. et Commission de l'assurance-emploi du Canada,2015 TSSDGAE 68, C. C. et Commission de l’assurance-emploi du Canada, 29 mars 2018, Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, dossiers GE-17-389 et GE-18-995, décisions en révision rendues à l’endroit d’une collègue de travail de l’appelant), (pièces GD17-4 à GD17-38, GD18-8 à GD18-13, GD36-3 et GD36-4 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387).

[28] Le représentant a fait valoir que la preuve présentée par l’appelant permet de conclure que celui-ci a bien travaillé au cours des périodes en cause (ex. : relevés d’emploi présentés, durée des périodes d’emploi, salaires payés, noms de ses supérieurs, déclarations antérieures de l’appelant, déclarations de revenus de l’appelant) et qu’il avait bien déclaré les emplois qu’il a occupés chez les employeurs concernés (X et X). Il a souligné que l’appelant avait rendu un témoignage crédible indiquant qu’il avait travaillé pour les employeurs en question et précisant la nature de ses différentes prestations de travail (ex. : tâches effectuées, endroits où il a travaillé). Le représentant a expliqué que les déclarations faites par l’un des employeurs de l’appelant au cours des périodes en cause, soit X (pièce GD18-1 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387), de même que la déclaration d’un collègue de travail de l’appelant (X), (pièce GD18-3 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387) viennent attester le travail que celui-ci a effectué. Il a fait valoir que dans son argumentation, la Commission a aussi confirmé que l’appelant avait travaillé pour les employeurs concernés lorsque celle-ci a donné l’indication suivante : « Parmi ces entreprises, figurait "X". Le prestataire y ayant travaillé [...] » (pièce GD4-2 du dossier GE-17-387).

[29] Le représentant a expliqué qu’au moment où l’appelant a fait ses demandes de prestations, aucune décision n’avait été rendue par l’ARC pour indiquer que les emplois qu’il avait occupés n’étaient pas assurables au sens de la Loi. Il a souligné que ce n’est qu’a posteriori que l’ARC a statué sur la non-assurabilité des emplois que l’appelant avait occupés. Le représentant a soutenu que le simple fait que l’ARC ait décidé que les emplois occupés par l’appelant n’étaient pas assurables était insuffisant pour démontrer que celui-ci avait fait des déclarations fausses ou trompeuses. Il a fait valoir que tant dans la lettre de décision transmise à l’appelant que dans son argumentation, la Commission a seulement fait allusion à la décision rendue par l’ARC pour justifier le fait qu’il y avait eu des déclarations fausses ou trompeuses (pièces GD3-28, GD3-29, GD4-4, GD36-3 et GD36-4 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-15-387).

[30] Le Tribunal ne peut retenir les arguments présentés par le représentant dans le but de démontrer que la Commission ne pouvait utiliser son pouvoir de réexamen, au-delà de la période de 36 mois, en vertu de l’article 52 de la Loi, parce qu’il n’y avait pas de déclarations fausses ou trompeuses au moment où l’appelant a fait ses demandes de prestations (Langelier, 2002 CAF 157, G. L. c Commission de l'assurance-emploi du Canada,2015 TSSDGAE 68, C. C. et Commission de l’assurance-emploi du Canada, 29 mars 2018, Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, dossiers GE-17-389 et GE-18-995).

[31] Pour se prévaloir de la prolongation du délai de réexamen d’une demande de prestations jusqu’à 72 mois, la Commission n’a pas à établir qu’un prestataire a sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses, mais doit seulement démontrer qu’elle pouvait raisonnablement estimer qu’une déclaration fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demande de prestations (Dussault, 2003 CAF 372, Lemay, 2002 CAF 337, Langelier,2002 CAF 157, P. D. et Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2 mai 2016, Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, dossier AD-15-1153).

[32] Le Tribunal considère que cette situation fait en sorte que la Commission peut se prévaloir de la période de 72 mois prévue à l’article 52 de la Loi pour réexaminer la demande de prestations de l’appelant, et ce, même si elle n’en est pas arrivée à la conclusion que celui-ci avait fait de fausses déclarations (Dussault, 2003 CAF 372, Lemay, 2002 CAF 337, Langelier,2002 CAF 157, P. D. et Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2 mai 2016, Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, dossier AD-15-1153).

[33] Le fait que la Commission ait estimé que des déclarations ou affirmations fausses ou trompeuses avaient été faites parce que les périodes de prestations de l’appelant avaient été établies en fonction de relevés d’emploi comportant des informations fausses ou trompeuses, à la suite des décisions rendues par l’ARC indiquant qu’il n’avait pas occupé des emplois assurables pour les entreprises X et X, justifie la décision prise par la Commission de réexaminer ses demandes de prestations dans un délai de 72 mois (Dussault, 2003 CAF 372, Lemay, 2002 CAF 337, Langelier,2002 CAF 157, P. D. et Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2 mai 2016, Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, dossier AD-15-1153).

[34] Le Tribunal considère qu’en prenant connaissance des décisions rendues par l’ARC indiquant que l’appelant n’avait pas occupé des emplois assurables pour les entreprises X et X, la Commission pouvait raisonnablement estimer que des déclarations fausses ou trompeuses avaient été faites.

[35] Le Tribunal est d’avis que la Commission a expliqué à l’appelant pourquoi les déclarations qu’il avait faites lui paraissaient fausses (Langelier, 2002 CAF 157).

[36] La Commission a donné des explications à l’appelant à cet effet lorsqu’elle l’a avisé qu’elle avait réexaminé ses demandes de prestations parce qu’elle estimait que des déclarations inexactes ou des affirmations fausses ou trompeuses avaient été faites, étant donné que les périodes de prestations de l’appelant avaient été établies en fonction de relevés d’emploi comportant des informations fausses ou trompeuses, puisque l’ARC avait rendu des décisions indiquant qu’il n’avait pas occupé des emplois assurables auprès des entreprises X et X (pièces GD3-28 et GD3-29 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387).

[37] Le Tribunal considère que pour chacune des trois demandes de prestations en cause (dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387), la Commission a fait le réexamen dans le délai de 72 mois soit, du 22 février 2009 au 13 mars 2015 pour le dossier GE-17-387, du 28 mars 2010 au 13 mars 2015 pour le dossier GE-17-386 et du 10 avril 2011 au 13 mars 2015 pour le dossier GE-17-384.

[38] L’appel n’est pas fondé sur cette question.

Annulation des périodes de prestations

Est-ce que la Commission était justifiée d’annuler les périodes de prestations de l’appelant parce qu’il ne remplit pas les conditions requises pour être admissible au bénéfice des prestations de l’assurance-emploi?

[39] Oui. Le Tribunal considère que la décision prise par la Commission d’annuler les périodes de prestations de l’appelant est justifiée puisqu’il ne remplit pas les conditions requises pour être admissible au bénéfice des prestations (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[40] Le paragraphe 48(2) de la Loi précise qu’aucune période de prestations ne peut être établie à moins que le prestataire n'ait fourni, sous la forme et de la manière fixée par la Commission, des précisions sur son emploi et sur la raison de tout arrêt de rémunération, ainsi que tout autre renseignement que peut exiger la Commission.

[41] Le paragraphe 49(1) de la Loi prévoit que nul n’est admissible au bénéfice des prestations pour une semaine de chômage avant d’avoir présenté une demande de prestations pour cette semaine, conformément à l’article 50 de la Loi et au Règlement, et prouvé que d’une part, il remplit les conditions requises pour recevoir des prestations; d’autre part, il n’existe aucune circonstance ou condition ayant pour effet de l’exclure du bénéfice des prestations ou de le rendre inadmissible à celui-ci.

[42] L’alinéa 90(1)d) de la Loi prévoit que la Commission peut demander à l’Agence du revenu du Canada (ARC) de rendre une décision sur une question portant sur la détermination du nombre d’heures exercées dans le cadre d’un emploi assurable.

[43] L’alinéa 5(1)a) de la Loi indique qu’un emploi assurable est un emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d’un contrat de louage de services ou d’apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l’employé reçoive sa rémunération de l’employeur ou d’une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière.

[44] Le paragraphe 14(1) du Règlement précise qu’un prestataire subit un arrêt de rémunération s’il est licencié ou cesse d’être au service de son employeur et se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d’au moins sept jours consécutifs sans rémunération.

[45] Dans l’affaire Kassam (2004 CAF 331), la Cour a réaffirmé le principe selon lequel le prestataire a le fardeau de prouver son admissibilité aux prestations au sens de la Loi. Dans cette affaire, la Cour a confirmé la conclusion à laquelle en est arrivé le juge-arbitre dans la décision CUB 56329 où celui-ci a refusé de renverser la décision de la Commission d’annuler la période de prestations puisqu’il avait été reconnu que le prestataire n’exerçait pas un emploi assurable au cours de sa période de référence basée sur de faux relevés d’emploi et la décision prise par Revenu Canada (Agence du revenu du Canada).

[46] Dans l’affaire Commission de l’assurance-emploi du Canada c S. G. (2016, TSSDAAE 519), la Division d’appel du Tribunal a rappelé que la jurisprudence a établi que l’ARC a la compétence exclusive pour déterminer combien d’heures d’emploi assurable un prestataire possède en application de la Loi (Romano, 2008 CAF 117, Didiodato, 2002 CAF 345, Haberman, A-717-98).

[47] La Cour a confirmé le principe que les exigences prévues au paragraphe 7(2) de la Loi ne permettent aucun écart et ne donnent aucune discrétion (Lévesque, 2001 CAF 304).

[48] Dans le cas présent, la preuve au dossier démontre que l’appelant n’a accumulé aucune heure d’emploi assurable au cours de chacune de ses périodes de référence à la suite des décisions rendues par l’ARC ou par la Cour canadienne de l’impôt (CCI).

[49] Dans des lettres similaires, en date du 20 février 2015, l’ARC a informé l’appelant que les emplois qu’il a occupés pour les employeurs X, durant les périodes du 13 août 2007 au 21 décembre 2007 et du 17 novembre 2008 au 21 février 2009 (dossier GE-17-387), X, durant les périodes du 20 décembre 2009 au 27 mars 2010 et du 3 janvier 2011 au 9 avril 2011 et X, durant la période du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013, n’étaient pas des emplois assurables parce qu’il n’avait pas de contrat de travail avec ces employeurs (pièces GD3-24 et GD3-25 du dossier GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387 et pièces GD3-25 et GD3-26 du dossier GE-17-385).

[50] Le 16 avril 2015, l’ARC a informé la Commission (Centre Service Canada) que des appels avaient été interjetés auprès du ministre du Revenu national concernant l’appelant et les employeurs X (périodes d’emploi du 13 août 2007 au 21 décembre 2007 et du 17 novembre 2008 au 21 février 2009), X (périodes d’emploi du 20 décembre 2009 au 27 mars 2010 et du 3 janvier 2011 au 9 avril 2011), X (« 807815873xxxxxx » – monsieur M. B., payeur), (périodes d’emploi du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013), relativement aux décisions qu’elle a rendues dans chacun des cas, le 20 février 2015 (pièce GD3-46 du dossier GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387 et pièce GD3-50 du dossier GE-17-385).

[51] Dans des lettres similaires, en date du 22 mars 2016, l’ARC a informé la Commission que les emplois que l’appelant a occupés pour les employeurs X, durant les périodes du 13 août 2007 au 21 décembre 2007 et du 17 novembre 2008 au 21 février 2009 (dossier GE-17-387), X, durant les périodes du 20 décembre 2009 au 27 mars 2010 et du 3 janvier 2011 au 9 avril 2011 et monsieur M. B. (X), durant la période du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013, n’étaient pas des emplois assurables en vertu du paragraphe 93(3) et de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’ARC a précisé qu’étant donné que les exigences du contrat de louage de services n’avaient pas été respectées, il n’existait pas de relation employeur-employé (pièces GD3-47 et GD3-48 du dossier GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387 et pièces GD3-51 et GD3-52 du dossier GE-17-385)

[52] Dans une décision rendue en date du 7 novembre 2018, la Cour canadienne de l’impôt (CCI) a rejeté la demande de prolongation de délai formulée par l’appelant pour déposer, en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, un avis d’appel relativement à une décision de la ministre du Revenu national envoyée le 22 mars 2016 et confirmant que l’appelant, lorsqu’il travaillait pour M. B. (X), n’occupait pas un emploi assurable (pièces GD24-3 à GD24-7 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[53] Pour ce qui est des autres périodes de travail en cause, dans un message courriel transmis au Tribunal, en date du 1er août 2018, le représentant a indiqué qu’après vérification auprès de la CCI et après avoir obtenu une confirmation de cette instance à cet effet, il n’y avait qu’un seul dossier d’appel ouvert, soit celui concernant l’assurabilité de l’emploi de l’appelant chez l’employeur X relativement à la période du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013 (pièces GD21-1 à GD21-3 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[54] L’appelant a expliqué qu’il avait travaillé pour les employeurs concernés au cours des périodes en cause.

[55] Le représentant a soutenu que la Commission ne pouvait annuler les périodes de prestations de l’appelant pour lesquelles elle ne pouvait pas reconsidérer, dans un délai de plus de 36 mois, les décisions qu’elle avait rendues à l’endroit de ce dernier puisqu’elle n’avait pas démontré qu’il avait fait des déclarations fausses (dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387), (pièce GD36-4 des dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387).

[56] Le représentant a fait valoir que la réclamation effectuée auprès de l’appelant par la Commission en date du 5 mai 2011 (décision rendue à l’endroit de l’appelant par la Commission, en date du 5 mai 2011, relativement à une fausse déclaration – pièces GD34-2 et GD34-3 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387) est un élément de preuve supplémentaire qui corrobore la position de ce dernier indiquant qu’il a réellement exercé des emplois pour les entreprises X, X ainsi que X Le représentant a souligné que la Commission a elle-même conclu que l’appelant avait obtenu une rémunération de X pour la semaine du 20 décembre 2009, soit durant sa première semaine de travail pour cette entreprise, comme l’indique le relevé d’emploi émis par cet employeur (pièce GD3-15 du dossier GE-17-386), (pièces GD34-2, GD34-3, GD36-3 et GD36-4 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[57] De son côté, la Commission a expliqué qu’elle était liée par les décisions rendues par l’ARC indiquant que l’appelant n’avait pas occupé des emplois assurables et que pour cette raison, les périodes de prestations de ce dernier avaient été annulées puisqu’il n’avait pas démontré qu’il avait accumulé le nombre requis d’heures d’emploi assurable au cours de ses périodes de référence en vertu de l’article 7 de la Loi (pièce GD4-7 du dossier GE-17-384, pièce GD4-5 du dossier GE-17-385, pièces GD4-5 et GD4-6 du dossier GE-17-386 et GD4-6 du dossier GE-17-387).

[58] Le Tribunal considère que même si l’appelant a déclaré avoir travaillé au cours des périodes en cause et qu’il a fourni des preuves à cet effet (ex. : relevés d’emploi émis par les employeurs concernés, déclarations de revenus de l’appelant, déclarations d’employeurs et de collègues de travail de l’appelant indiquant que ce dernier avait bien travaillé pour les employeurs en question), il n’a pas démontré que les emplois qu’il a occupés chez les employeurs X, X et X (monsieur M. B.) étaient des emplois assurables au sens de la Loi. Le fait que la Commission ait rendu une décision à l’endroit de l’appelant en date du 5 mai 2011 parce qu’il n’avait pas déclaré qu’il avait travaillé pour l’un des employeurs en cause ne fait pas en sorte de démontrer que ce dernier avait occupé un emploi assurable au sens de la Loi.

[59] En résumé, selon les éléments de preuve au dossier, le Tribunal considère que l’appelant n’a accumulé aucune heure d’emploi assurable au cours de chacune de ses périodes de référence pour que des demandes de prestations soient établies à son profit, étant donné que l’ARC a déterminé qu’il n’avait pas occupé des emplois assurables au sens de la Loi.

[60] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas fait la démonstration qu’il remplit les conditions requises pour recevoir des prestations.

[61] En conséquence, le Tribunal considère que la Commission est justifiée d’avoir annuler les périodes de prestations de l’appelant ayant respectivement commencé le 22 février 2009 (dossier GE-17-387), le 28 mars 2010 (dossier GE-17-386), le 10 avril 2011 (dossier GE-17-384) et le 13 janvier 2013 (dossier GE-17-385), en vertu des articles 7, 48 et 49 de la Loi, de même qu’en vertu du paragraphe 14(1) du Règlement.

[62] L’appel est rejeté sur cet aspect.

Déclarations fausses ou trompeuses

[63] La Cour a confirmé le principe qu’il n’y a déclaration fausse ou trompeuse que lorsque les prestataires savent de façon subjective que les informations qu’ils ont données ou les déclarations qu’ils ont faites ou celles qui les concernaient étaient fausses (Mootoo, 2003 CAF 206, Gates, A-600-94, Purcell, A-694-94).

[64] Dans la cause Gagnon (A-52-04), la Cour a spécifié de quelle manière la Commission peut être justifiée de se donner des lignes directrices en matière d’imposition de pénalités de façon à assurer une certaine cohérence à l’échelle nationale et éviter l’arbitraire en ces matières.

L’appelant a-t-il fait des déclarations fausses ou trompeuses?

[65] Oui. Dans le cas présent, le Tribunal considère que plusieurs éléments de preuve démontrent que l’appelant a fait deux fausses déclarations en présentant sa demande de prestations (demande de prestations ayant commencé le 13 janvier 2013 – dossier GE-17-385) et en fournissant à la Commission un relevé d’emploi contenant des renseignements faux ou trompeurs (Mootoo, 2003 CAF 206, Gates, A-600-94, Purcell, A-694-94).

[66] Le relevé d’emploi émis par l’employeur X, en date du 14 janvier 2013, indique que l’appelant a travaillé du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013 inclusivement, et qu’il a effectué 630 heures assurables au cours de cette période (pièces GD3-16 et GD3-17 du dossier GE-15-385).

[67] Les décisions rendues par l’ARC en date du 22 mars 2016, et par CCI, en date du 7 novembre 2018, démontrent que l’emploi occupé par l’appelant chez l’employeur X (M. B.), du 23 septembre 2012 au 11 janvier 2013, n’était pas un emploi assurable au sens de la Loi et qu’il n’existait pas de relation employeur-employé puisque les exigences du contrat de louage de services n’avaient pas été respectées (pièces GD3-51 et GD3-52 du dossier GE-17-385).

[68] Dans son argumentation, la Commission a précisé que dans les cas d’annulation de demande de prestations, la présentation d’un faux relevé d’emploi ou d’un relevé d’emploi contenant des renseignements faux ou trompeurs constitue un cas de fausse déclaration faite sciemment et que la présentation d’une demande de prestations représente une deuxième fausse déclaration faite sciemment (pièce GD4-7 du dossier GE-17-385).

[69] Même si l’appelant a fait valoir qu’il avait travaillé au cours de la période en cause et qu’il avait des témoins pouvant le démontrer, le Tribunal considère que la preuve recueillie par la Commission démontre qu’il ne rencontre pas les conditions requises permettant d’établir une demande de prestations d’assurance-emploi et qu’il a fait des déclarations fausses ou trompeuses, étant donné que le relevé d’emploi qu’il a fourni à la Commission contenait des renseignements faux ou trompeurs.

L’appelant savait-il que ses déclarations étaient fausses ou trompeuses?

[70] Non. Le Tribunal considère que l’appelant ne savait pas que ses déclarations étaient fausses ou trompeuses lorsqu’il a présenté sa demande de prestations en fournissant un relevé d’emploi contenant des renseignements faux ou trompeurs (Mootoo, 2003 CAF 206, Gates, A-600-94, Purcell, A-694-94).

[71] L’appelant a expliqué que lorsqu’il a présenté sa demande de prestations, après avoir cessé de travailler pour l’employeur X (monsieur M. B.), il ne pensait pas qu’il faisait des déclarations fausses ou trompeuses puisqu’il avait travaillé pour cet employeur. Il a souligné qu’il était présent au travail. L’appelant a fait valoir qu’il n’avait pas voulu profiter du système de l’assurance-emploi lorsqu’il a présenté sa demande de prestations.

[72] Le représentant a fait valoir que pour l’année 2013 (demande de prestations ayant commencé en janvier 2013 – dossier GE-17-385), la pénalité imposée à l’appelant, de même que l’avis de violation émis à l’endroit de ce dernier devaient être annulés parce qu’il n’y a pas de déclarations fausses ou trompeuses ayant été faites sciemment. Il a expliqué que l’appelant croyait de bonne foi qu’il était en droit d’obtenir des prestations d’assurance-emploi, car il venait de travailler suffisamment d’heures assurables (travail à temps plein chez l’employeur X) pour établir une période de prestations et que ce ne fut que par la suite que l’ARC a statué sur l’assurabilité de son emploi. Le représentant a souligné que l’appelant ne pouvait pas se douter que l’ARC allait décider environ deux ans plus tard que les déclarations qu’il avait faites étaient fausses ou trompeuses. Il a soutenu que la Commission n’a pas fait la preuve que l’appelant avait fait des déclarations fausses ou trompeuses puisqu’elle s’était fondée uniquement sur les décisions rendues par l’ARC relativement à l’assurabilité de l’emploi de ce dernier pour en arriver à cette conclusion (pièce GD36-4 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[73] Le représentant a fait valoir que pour conclure que l’appelant a fait des déclarations fausses ou trompeuses, celui-ci devait personnellement savoir qu’il en faisait, alors que ce n’était pas le cas puisqu’il avait toujours agi de façon honnête et qu’il n’avait pas été en mesure de prévoir si l’ARC allait considérer que son emploi allait être assurable ou non au moment où il a fait sa demande de prestations (Gates, A-600-94, Mootoo, 2003 CAF 206, Moretto, A-667-96, Demers, A-171-98, McDonald, A-897-90, M. L. et Commission de l’assurance-emploi du Canada (31 octobre 2018, Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, dossier GE-17-2530, décision CUB 68452A, décision CUB 66975B, décision en révision rendue par la Commission à l’endroit d’une collègue de travail de l’appelant lorsque celui-ci a travaillé chez l’employeur X), (pièces GD17-43 à GD17-68, GD18-4 à GD18-7 et GD33-19 à GD33-33 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[74] Le représentant a également fait valoir que l’argument de la Commission selon lequel l’appelant aurait raisonnablement dû savoir qu’il n’avait pas occupé un emploi assurable, étant donné qu’il avait été payé comptant dans le cadre de cet emploi n’est pas valide puisqu’il n’est pas conforme à la jurisprudence de la CCI en matière d’assurabilité d’un emploi (Bolduc c M. R. N. [Le ministre du Revenu national] (1999 CanLII 110 (CCI). Sur ce point, le représentant a souligné que même si l’appelant avait été payé en argent, cette situation ne signifiait pas nécessairement qu’il n’avait pas occupé un emploi assurable et qu’il avait eu l’intention de faire de fausses déclarations en présentant sa demande de prestations et en fournissant un faux relevé d’emploi (Bolduc c M. R. N. [Le ministre du Revenu national] (1999 CanLII 110 (CCI), (pièces GD17-39 à GD17-42 des dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[75] Le Tribunal considère que lorsque l’appelant a présenté sa demande de prestations pour la période en cause, il ne pouvait savoir que le relevé d’emploi qu’il a fourni était erroné, étant donné le fait que plus de deux ans après avoir occupé cet emploi, l’ARC a conclu qu’il ne s’agissait pas d’un emploi assurable au sens de la Loi.

[76] Le Tribunal ne retient pas l’argument de la Commission selon lequel l’appelant savait que le relevé d’emploi qu’il avait fourni en présentant sa demande de prestations était un faux relevé d’emploi et que l’information dans ce document était erronée puisqu’en étant payé comptant, il n’occupait pas un emploi de salarié et que les heures travaillées ne pouvaient pas être assurables (pièce GD4-7 du dossier GE-17-385).

[77] Le Tribunal considère que le fait que l’appelant ait été payé en argent ne change rien au fait qu’il ne pouvait savoir au moment de présenter sa demande de prestations et de fournir un relevé d’emploi correspondant à sa période de travail, qu’il faisait des déclarations fausses ou trompeuses.

[78] Le Tribunal est d’avis que l’appelant n’a pas volontairement induit la Commission en erreur en présentant une demande de prestations et en lui fournissant un faux relevé d’emploi. Il ne pouvait savoir qu’au moment de présenter sa demande de prestations, il ne rapportait pas adéquatement les faits (Purcell, A-694-94, Gates, A-600-94).

[79] Le Tribunal considère que l’appelant ne pouvait donc pas savoir qu’il faisait de fausses déclarations, en toute connaissance de cause, lorsqu’il a présenté sa demande de prestations. Il ne savait pas, subjectivement, que ses déclarations étaient fausses (Mootoo, 2003 CAF 206, Gates, A-600-94, Purcell, A-694-94).

[80] En somme, le Tribunal considère que l’appelant n’a pas sciemment fait de fausses déclarations (Mootoo, 2003 CAF 206, Gates, A-600-94, Purcell, A-694-94).

La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a imposé une pénalité à l’appelant?

[81] Non. La Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a imposé une pénalité à l’appelant.

[82] La Cour a confirmé le principe selon lequel la Commission détient le pouvoir discrétionnaire d’imposer la pénalité prévue au paragraphe 38(1) de la Loi. De plus, la Cour a déclaré qu’aucune Cour, aucun juge-arbitre ou Tribunal n’était autorisé à faire obstacle à une décision de la Commission concernant une pénalité, tant et aussi longtemps que la Commission pouvait prouver qu’elle exerçait son pouvoir discrétionnaire « de façon judiciaire ». En d’autres termes, la Commission doit démontrer qu’elle a agi de bonne foi, tenu compte de tous les facteurs pertinents et laissé de côté ceux qui ne l’étaient pas (Uppal, 2008 CAF 388, Tong, 2003 CAF 281).

[83] Au sujet de la question touchant l’imposition d’une pénalité, le Tribunal considère que la décision de la Commission sur cette question n’est pas justifiée dans les circonstances (Gagnon, A-52-04).

[84] Le Tribunal est d’avis que la Commission a donné la possibilité à l’appelant d’apporter des explications sur les fausses déclarations qui lui ont été reprochées après que celui-ci ait présenté sa demande de révision.

[85] Toutefois, malgré le fait qu’elle ne soit pas responsable de cette situation, la Commission n’a pas été en mesure d’évaluer le témoignage crédible rendu par l’appelant lors de l’audience selon lequel il ne savait pas qu’au moment de présenter sa demande de prestations, en janvier 2013, il avait fait des déclarations fausses ou trompeuses en présentant sa demande de prestations et en fournissant le relevé d’emploi que son employeur avait émis à son endroit.

[86] Le Tribunal considère que la Commission n’a pas été en mesure non plus d’évaluer les explications fournies par le représentant de l’appelant sur ce point et démontrant que l’appelant n’a pas sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses.

[87] Dans ce contexte, le Tribunal estime que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, en rendant sa décision d’imposer une pénalité à l’appelant, car elle n’a pas été en mesure de prendre en compte l’ensemble des faits pertinents au dossier (Uppal, 2008 CAF 388, Tong, 2003 CAF 281).

[88] Ces faits réfèrent essentiellement aux déclarations faites par l’appelant selon lesquelles il ne croyait pas qu’en présentant sa demande de prestations il avait fait sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses puisqu’il avait travaillé pour l’employeur X, même si l’ARC avait conclu plus de deux ans après que cette demande de prestations ait été présentée, qu’il ne s’agissait pas d’un emploi assurable au sens de la Loi.

[89] L’appel est fondé sur cette question.

Avis de violation

La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a émis un avis de violation à l’endroit de l’appelant?

[90] Dans le cas présent, puisque le Tribunal a déterminé que l’appelant ne savait pas si les déclarations qu’il a faites étaient fausses ou trompeuses au moment où il a présenté sa demande de prestations, il n’y a donc pas lieu d’évaluer si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a émis un avis de violation à l’endroit de l’appelant.

[91] Le Tribunal juge que l’avis de violation émis à l’endroit de l’appelant ne doit pas être maintenu.

[92] L’appel est fondé sur cet aspect.

Conclusion

[93] Relativement aux quatre questions en litige portées à son attention, le Tribunal conclut ce qui suit :

[94] Au sujet de la décision prise par la Commission de réexaminer les demandes de prestations de l’appelant dans un délai de 72 mois, en vertu de l’article 52 de la Loi, si elle estime qu’une déclaration fausse ou trompeuse a été faite, l’appel est rejeté (dossiers GE-17-384, GE-17-386 et GE-17-387).

[95] Concernant la décision de la Commission d’annuler les demandes de prestations de l’appelant, aux termes des articles 7, 48 et 49 de la Loi et du paragraphe 14(1) du Règlement, l’appel est rejeté (dossiers GE-17-384, GE-17-385, GE-17-386 et GE-17-387).

[96] En regard de la question se rapportant à l’imposition à l’appelant d’une pénalité aux termes de l’article 38 de la Loi, pour avoir perpétré un acte délictueux en faisant des déclarations fausses ou trompeuses, en toute connaissance de cause, l’appel est accueilli. La pénalité doit être annulée (dossier GE-17-385).

[97] En ce qui concerne la question relative à l’émission d’un avis de violation à l’appelant à la suite d’une pénalité qui lui a été infligée pour avoir perpétré un acte délictueux aux termes de l’article 7.1 de la Loi, l’appel est accueilli. L’avis de violation doit être annulé (dossier GE-17-385).

[98] L’appel est partiellement fondé sur les questions en litige.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 10 mai 2019

Vidéoconférence

A. L., appelant

Me Richard-Alexandre Laniel (cabinet Ouellet, Nadon et associées), représentant de l’appelant

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