Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. L’appelante n’a pas prouvé que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire lorsqu’elle a rejeté sa demande de prorogation du délai pour la révision de la décision du 16 octobre 2018.

Aperçu

[2] L’appelante a établi une demande de prestations régulières d’assurance‑emploi (prestations d’AE) prenant effet le 2 septembre 2018. Dans une lettre datée du 16 octobre 2018, l’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (la Commission) l’a informée qu’elle était exclue du bénéfice des prestations d’AE parce qu’elle avait quitté volontairement son emploi le 31 août 2018, sans justification, et qu’elle était inadmissible à des prestations d’AE entre le 3 septembre et le 5 octobre 2018 parce qu’elle avait omis de prouver sa disponibilité à travailler pendant cette période. La lettre de décision du 16 octobre 2018 comprenait une déclaration selon laquelle l’appelante devrait travailler le nombre minimal d’heures d’emploi assurable après avoir quitté volontairement son emploi pour recevoir des prestations d’AE. L’appelante n’a pris aucune mesure en réponse à la décision d’exclusion du 16 octobre 2018. Lorsqu’elle a présenté une demande renouvelée le 9 janvier 2019, elle a été informée qu’elle ne pouvait pas toucher de prestations d’AE parce qu’elle n’avait pas travaillé le nombre d’heures requis depuis qu’elle avait quitté volontairement son emploi le 31 août 2018, sans justification.

[3] Le 26 février 2019, l’appelante a présenté une demande de révision de la décision d’exclusion rendue le 16 octobre 2018. La Commission a conclu que l’appelante ne pouvait justifier le délai de 98 jours qui s’est écoulé avant la présentation de sa demande de révision et que, par conséquent, elle n’effectuerait aucune révision. L’appelante a interjeté appel du rejet par la Commission de sa demande de prorogation du délai de révision devant le Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

Questions préliminaires

[4] L’appelante n’a pas assisté à l’audition de son appel. Le Tribunal a attendu 30 minutes après l’heure fixée pour l’audience par téléconférence, mais l’appelante ne s’est jamais jointe à l’appel. Le membre a alors procédé à l’audition de l’appel en l’absence de l’appelante, en conformité avec l’article 12 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Le membre était convaincu que l’appelante avait reçu l’avis d’audience, qui lui a été envoyé par courriel le 27 mai 2019. L’appelante a autorisé le Tribunal à communiquer avec elle par courriel dans son avis d’appel (GD2‑1). L’avis d’audience a été envoyé à l’adresse de courriel qu’elle a fournie, et le Tribunal n’a reçu aucun avis d’échec de livraison relativement à cette adresse de courriel. Il était donc convaincu que l’avis d’audience avait été envoyé à l’appelante par courriel le 27 mai 2019.

Question en litige

[5] La demande que l’appelante a présentée en vue d’obtenir une prorogation du délai de 30 jours pour la révision de la décision du 16 octobre 2018 devrait‑elle être rejetée?

Analyse

[6] L’article 112 de la Loi sur l’assurance‑emploi (Loi sur l’AE) prévoit qu’un prestataire peut demander à la Commission de réviser sa décision initiale, mais qu’il doit le faire dans les 30 jours suivant la date où il en reçoit communication. L’article 1 du Règlement sur les demandes de révision précise les conditions auxquelles il doit être satisfait pour que soit accordé un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision en application de l’alinéa 112(1)b) de la Loi. Lorsqu’une demande de révision est présentée plus de 30 jours après la communication de la décision initiale, la Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision seulement si elle est convaincue :

  1. qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai;
  2. que l’intéressé a manifesté l’intention constante de demander la révision.

[7] La décision que la Commission prend en vertu du Règlement sur les demandes de révision est une décision discrétionnaire. Par conséquent, elle ne peut être modifiée que si la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire. Autrement dit, si la Commission n’a pas agi de bonne foi ou dans un but et un motif appropriés, ou qu’elle n’a pas pris en compte tous les facteurs pertinents, qu’elle n’a pas fait abstraction de facteurs non pertinents ou qu’elle a par ailleurs agi de manière discriminatoire (Dunham A-708-95, Purcell A-694-94).

Première question en litige : Quand la décision du 16 octobre 2018 a-t-elle été communiquée à l’appelante?

[8] Le Tribunal accepte la preuve de l’appelante selon laquelle la décision d’exclusion du 16 octobre 2018 lui a été communiquée le 16 octobre 2018 (GD3‑29 et GD3‑58 à GD3‑62).

Deuxième question en litige : L’appelante a-t-elle satisfait au critère permettant d’accorder un délai plus long pour présenter une demande de révision?

[9] Le Tribunal note que la décision de la Commission datée du 16 octobre 2018 – à savoir que l’appelante était exclue du bénéfice des prestations d’AE parce qu’elle avait quitté volontairement son emploi sans justification, et qu’elle était inadmissible pour défaut de prouver sa disponibilité à travailler – n’est pas la question dont est saisi le Tribunal dans le cadre du présent appel. Le Tribunal doit plutôt déterminer s’il y a lieu d’accéder à la demande de l’appelante d’obtenir une prolongation du délai de 30 jours pour demander la révision de cette décision.

[10] En l’espèce, comme l’appelante a présenté sa demande de révision moins de 365 jours après que la décision du 16 octobre 2018 lui a été communiquée, la Commission peut accorder un délai plus long pour demander une révision seulement si elle est convaincue :

  1. qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai;
  2. que l’appelante a manifesté l’intention constante de demander la révision.

[11] L’appelante a déclaré à la Commission qu’elle n’avait pas compris que la décision du 16 octobre 2018 signifiait qu’elle ne pourrait pas utiliser ses heures d’emploi assurable à partir d’avant l’exclusion pour établir une demande subséquente de prestations d’AE. Elle a confirmé qu’on lui a dit qu’elle disposait d’un délai de 30 jours pour demander la révision de la décision du 16 octobre 2018, mais qu’on ne lui a jamais dit en quoi cette décision influait sur ses heures d’emploi (GD3‑64). L’appelante a déclaré qu’elle n’avait pas ressenti le besoin de demander une révision ou de faire le suivi de quoi que ce soit, car on avait communiqué avec elle peu de temps après au sujet d’un nouvel emploi et elle avait commencé sa formation le 26 octobre 2018 (GD3‑60 et GD3‑64). Cet emploi était saisonnier et, une fois son contrat terminé, elle a de nouveau demandé des prestations d’AE. Lorsqu’on lui a dit qu’elle n’était pas admissible parce qu’il fallait faire abstraction des heures accumulées dans le cadre de son emploi précédent, elle a pris des mesures pour demander une révision de la décision du 16 octobre 2018 (GD3‑65).

[12] Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas satisfait aux deux (2) facteurs parce que :

  1. Elle soutient que son retard était attribuable au défaut des agents de la Commission de l’informer explicitement qu’elle ne pourrait utiliser les heures d’emploi assurable accumulées avant l’exclusion pour établir une demande subséquente de prestations d’AE. Bien que cette information soit contenue dans la lettre de décision du 16 octobre 2018, l’appelante n’a pris aucune mesure pour communiquer avec Service Canada afin d’obtenir des précisions au sujet de la lettre de décision – même si elle savait qu’elle avait 30 jours pour demander à la Commission de réviser sa décision si elle n’était pas d’accord avec celle‑ci. L’appelante a choisi de ne pas tenir compte de la déclaration faite dans la lettre de décision du 16 octobre 2018 au sujet de son obligation d’effectuer des heures assurables supplémentaires, et a plutôt procédé sur la base de sa propre hypothèse, à savoir qu’elle n’aurait à présenter une nouvelle demande que si elle souhaitait recevoir des prestations d’AE à une date ultérieure. Elle n’a pris aucune autre mesure relativement aux décisions d’exclusion et d’inadmissibilité relatives à sa demande. Le Tribunal convient avec la Commission que l’appelante n’a pas agi raisonnablement à cet égard. Même si elle a trouvé du travail peu de temps après, rien ne l’empêchait de communiquer avec la Commission pour obtenir des précisions ou de déposer une demande de révision en temps opportun. Le Tribunal conclut donc que l’appelante n’a pas fourni d’explication raisonnable pour justifier son retard dans la présentation de sa demande de révision.
  2. L’appelante n’a pas manifesté l’intention constante de demander la révision, car elle n’avait en fait aucune intention de le faire étant donné qu’elle avait trouvé un autre emploi rapidement après avoir été exclue du bénéfice des prestations d’AE le 16 octobre 2018. Si l’appelante était en désaccord avec l’exclusion pour départ volontaire sans justification ou avec l’inadmissibilité pour défaut de prouver sa disponibilité à travailler, il lui incombait au moins de faire un suivi auprès de la Commission et de demander une révision. Tel est le cas, peu importe que l’appelante ait compris ou non l’incidence de l’exclusion sur ses heures d’emploi assurable. L’appelante n’a pas pris de telles mesures et a plutôt décidé sciemment de ne pas pousser l’affaire plus loin. Le Tribunal conclut par conséquent qu’elle n’a pas manifesté l’intention constante de demander une révision.

[13] Pour que l’appelante se voit accorder une prolongation de délai pour demander la révision de la décision du 16 octobre 2018, il faut qu’il soit satisfait aux deux (2) facteurs énoncés à l’article 1 du Règlement sur les demandes de révision. Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas satisfait aux deux facteurs et qu’elle ne peut donc obtenir une prorogation de délai.

Troisième question en litige : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire lorsqu’elle a rejeté la demande de prorogation de délai de l’appelante pour demander une révision?

[14] Le Tribunal doit donc déterminer si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a rejeté la demande de l’appelante d’obtenir une prolongation du délai de 30 jours pour présenter une demande de révision de la décision du 16 octobre 2018. En d’autres termes, le Tribunal doit déterminer si la Commission a agi de bonne foi et dans un but ou pour des motifs appropriés, si elle a pris en compte tous les facteurs pertinents et fait abstraction des facteurs non pertinents, et si elle a agi de manière non discriminatoire (Dunham, précité, Purcell, précité).

[15] En l’espèce, le Tribunal ne voit aucune raison d’intervenir dans la décision de la Commission.

[16] La Commission a pris en considération les deux facteurs énoncés à l’article 1 du Règlement sur les demandes de révision et a conclu que l’appelante n’avait satisfait à aucun d’eux (voir le compte rendu de décision aux pièces GD3‑68 à GD3‑69). L’argument de l’appelante selon lequel elle aurait dû être explicitement informée par la Commission que l’exclusion signifiait qu’elle perdrait toutes les heures d’emploi assurable qu’elle avait accumulées dans le cadre de l’emploi qu’elle avait quitté volontairement sans justification, n’invalide pas les instructions énoncées en des termes clairs dans la lettre de décision du 16 octobre 2018 concernant le délai de 30 jours pour demander une révision.

[17] Le fait qu’environ quatre (4) mois après que la décision lui a été communiquée, l’appelante n’a pas été en mesure de renouveler sa demande antérieure de prestations d’ AE n’est pas pertinent pour l’analyse à entreprendre afin de déterminer s’il y a lieu de prolonger le délai de 30 jours pour révision. Cela n’explique pas raisonnablement le retard de l’appelante à demander une révision, ni ne manifeste une intention constante de demander une révision.  Si l’appelante n’était pas d’accord avec la décision du 16 octobre 2018 concernant sa demande de prestations, il lui était loisible de prendre des mesures pour la faire réviser. Elle ne l'a pas fait. 

Conclusion

[18] Le Tribunal conclut que la Commission a agi de bonne foi et qu’elle a pris en considération tous les critères pertinents et fait abstraction de ceux qui ne l’étaient pas lorsqu’elle a refusé la demande de prorogation de la période de 30 jours de la prestataire en vue de faire réviser sa décision du 16 octobre 2018 en vertu de l’article 112 de la Loi sur l’AE et de l’article 1 du Règlement sur les demandes de révision. Le Tribunal conclut que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, et il ne peut donc pas intervenir dans cette décision.

[19] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Le 10 juin 2019

Téléconférence

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.