Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] La demanderesse, C. C. (prestataire) demande la permission d’interjeter appel de la décision de la division générale du 22 mai 2019. Cela signifie qu’elle doit obtenir la permission de la division d’appel avant de passer à l’étape suivante de son appel.

[3] La division générale a conclu que la prestataire touchait des revenus d’emploi qu’elle n’avait pas déclarés lorsqu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi. Une fois cette rémunération répartie sur les semaines pendant lesquelles elle les a touchées, il en est résulté un versement excédentaire de prestations pour la prestataire. Il y a eu un versement excédentaire pendant certaines semaines parce que la prestataire a touché des prestations que la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), n’aurait pas payées si elle avait su que la prestataire touchait des revenus et qu’elle allait être payée pour son travail.

[4] La prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit et qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée lorsqu’elle a calculé sa rémunération hebdomadaire. Elle soutient que, si la division générale avait bien calculé sa rémunération hebdomadaire, son versement excédentaire ne serait pas aussi élevé. Elle dit également que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle parce qu’elle n’a pas pleinement tenu compte de sa situation personnelle. Je dois décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

[5] Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès et je rejette donc la demande de permission d’en appeler de la prestataire.

Contexte factuel

[6] En juillet 2017, la prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi, affirmant qu’elle était disponible, mais incapable de trouver un emploi. Elle a par la suite trouvé du travail comme chargée de cours à temps partiel en études religieuses dans une université. Selon le relevé d’emploi, elle a commencé à occuper ce poste le 1er septembre 2017 et a cessé de travailler le 30 avril 2018, lorsque son contrat a pris fin.

[7] La prestataire a déclaré qu’elle n’avait pas touché de rémunération pour les trois premières semaines et les deux dernières semaines de son emploiNote de bas de page 1. Elle a touché des prestations d’assurance-emploi relativement à certaines de ces semaines. Toutefois, la Commission a reçu des renseignements sur la rémunération de l’employeur et a appris qu’elle avait touché une rémunération pour ces semaines. La Commission a écrit à la prestataire pour lui dire qu’elle avait rajusté la répartition de sa rémunération et qu’elle devrait donc rembourser les prestations qu’elle n’aurait pas dû toucher. Elle a également imposé une pénalitéNote de bas de page 2.

[8] La prestataire a demandé une révision, en disant que la rémunération aurait dû être calculée en divisant la rémunération totale aux termes de son contrat par le nombre de semaines qu’elle a travaillées aux termes ce contratNote de bas de page 3. (Il faudrait également diviser ce nombre par le nombre de jours ouvrables dans une semaine donnée.)

[9] La prestataire a également fait remarquer que son employeur ne l’a pas payée avant le 15 septembre 2017 et que son dernier paiement remonte au 30 avril 2018.

[10] La Commission a communiqué avec l’employeur pour savoir comment il a calculé la rémunération hebdomadaire de la prestataire. L’employeur a dit à la Commission qu’il avait fait une erreur et il a donc recalculé la rémunération en prenant le total de la rémunération aux termes du contrat et en la divisant par le nombre de jours pendant lesquels elle a travaillé aux termes de ce contratNote de bas de page 4.

[11] La Commission a rajusté la rémunération hebdomadaire de la prestataire pour les trois premières semaines et les deux dernières semaines de son emploi en fonction de ces nouveaux calculs. Compte tenu de la situation de la prestataire, elle a également réduit le montant de la pénalitéNote de bas de page 5. Toutefois, le rajustement de sa rémunération a eu pour effet d’augmenter le montant du versement excédentaire.

[12] La prestataire conteste la question de savoir s’il aurait dû y avoir un nouveau calcul parce que le calcul initial était plus favorable pour elle. Elle souligne qu’elle est chef de famille monoparentale et qu’elle a de la difficulté à s’occuper de deux enfants. Elle souligne également que, malgré ses études poussées, elle a eu beaucoup de difficultés à trouver du travail dans son domaine d’études.

Questions en litige

[13] Les questions en litige sont les suivantes :

Question en litige no 1 : Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de l’argument principal de la prestataire?

Question en litige no 2 : Peut-on soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle a tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance lorsqu’elle a décidé que la prestataire avait touché 179 $ pour la semaine commençant le 29 avril 2018?

Question en litige no 3 : Peut-on soutenir que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle?

Analyse

[14] Avant que la prestataire puisse passer à l’étape suivante de son appel, je dois être convaincue que ses motifs d’appel correspondent à au moins un des trois moyens d’appel énumérés à l’article 58(1)de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). L’appel doit également avoir une chance raisonnable de succès.

[15] Les trois seuls moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS sont les suivants :

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[16] Une chance raisonnable de succès équivaut à une cause défendable en droitNote de bas de page 6. La barre est relativement basse parce que les demandeurs n’ont pas à prouver leur cause; ils doivent simplement démontrer qu’il y a une cause défendable. Lors de l’appel, la barre est beaucoup plus élevée. Les tribunaux ont déclaré qu’il fallait suivre cette approche pour décider des demandes de permission d’en appelerNote de bas de page 7.

Question en litige no 1 : Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de son argument principal?

[17] La prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte de son argument principal. Elle prétend que cela a entraîné un versement excédentaire plus important. Comme elle l’a toujours soutenu, elle dit que le calcul de sa rémunération hebdomadaire aurait dû être fondé sur le nombre de semaines de travail plutôt que sur le nombre de jours de travail. Par exemple, aux termes d’un de ses contrats, l’employeur lui a versé 17 415 $ en huit versements semestriels. Elle dit qu’aux termes de ce contrat, sa rémunération hebdomadaire aurait dû être calculée comme suit :

17 415 $/8 périodes de paie, puis diviser ce nombre par le nombre de jours ouvrables dans une semaine donnée

plutôt que

17 415 $/84 jours x nombre de jours travaillés = 207,32 $.

207,32 $/jour x 5 jours = 1 037 $.

Autrement dit, elle prétend que la division générale a commis une erreur de droit en utilisant la mauvaise formule pour calculer sa rémunération hebdomadaire et en n’expliquant pas la formule utilisée pour calculer sa rémunération hebdomadaire.

[18] Comme la division générale l’a souligné, en vertu du Règlement sur l’assurance-emploi, il faut répartir la rémunération sur la période pendant laquelle la prestataire a fourni ces servicesNote de bas de page 8. À cet égard, je remarque que la Commission a appelé directement l’employeur pour savoir ce que la prestataire avait touché pendant une semaine donnéeNote de bas de page 9. L’employeur a déclaré qu’il avait mal calculé la rémunération auparavant. Il a recalculé la rémunération hebdomadaire en fonction du nombre de jours effectivement travaillés, tel qu’il est illustré ci-dessus. Malheureusement, cela a entraîné un versement excédentaire plus important pour la prestataire, mais cela ne signifie pas à lui seul que le calcul initial devrait être utilisé lorsque l’employeur dit que ce calcul était erroné au départ.

[19] Essentiellement, la prestataire me demande de modifier le montant de sa rémunération assurable pour ces semaines, mais je n’ai pas compétence pour régler les différends concernant le montant qu’elle a touché. D’ailleurs, la division générale non plus. Seule l’Agence du revenu du Canada peut déterminer la rémunération assurable. Même si j’avais la compétence de modifier la rémunération qu’elle a touchée, la prestataire n’a pas démontré que la division générale a commis une erreur de droit.

[20] Étant donné que ni la division générale ni moi n’avons le pouvoir de décider si la rémunération de la prestataire était inférieure à ce qu’elle prétend, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[21] En note, un employé peut demander à l’Agence du revenu du Canada de rendre une décision sur la détermination de la rémunération assurableNote de bas de page 10, mais il y a une limite de temps pour le faire.

Question en litige no 2 : Peut-on soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance lorsqu’elle a décidé que la prestataire avait touché 179 $ pour la semaine commençant le 29 avril 2018?

[22] Au paragraphe 9 de sa décision, la division générale a énuméré la rémunération de la prestataire, notamment pour la semaine commençant le 29 avril 2018. La division générale a écrit qu’elle a touché 179 $ pour la semaine. La division générale a dit avoir obtenu ces renseignements de l’employeur. La prestataire soutient que la division générale s’est trompée sur ce chiffre parce qu’elle avait déclaré que, selon son employeur, elle avait en réalité touché 143,33 $ pour cette périodeNote de bas de page 11.

[23] Il est vrai que la division générale n’a pas mentionné ces éléments de preuve, mais au bout du compte, ce que la prestataire me demande de faire, c’est de rajuster sa rémunération pour la semaine du 29 avril 2018, de 179 $ à 143,33 $.

[24] Comme je l’ai indiqué ci-dessus, je n’ai ni la compétence ni le pouvoir de rendre des décisions sur la détermination de la rémunération que la prestataire a touchée. La division générale non plus. En outre, je ne vois aucun document ou dossier à l’appui de ses affirmations selon lesquelles sa rémunération était inférieure à celle que l’employeur a déclarée à la Commission. En réalité, son employeur a dit que la rémunération brute de la prestataire pour cette semaine-là était de 178,62 $Note de bas de page 12.

[25] Comme ni la division générale ni moi n’avons le pouvoir de décider ce que la prestataire a touché, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige no 3 : Peut-on soutenir que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle?

[26] La prestataire dit qu’elle aurait été dans une meilleure situation si elle n’avait pas demandé une révision. Après sa demande de révision, l’employeur a recalculé sa rémunération, ce qui a entraîné un versement excédentaire plus important. La prestataire affirme que c’est injuste parce qu’elle n’a reçu aucun paiement pour son travail avant le 15 septembre 2017 et qu’elle n’a reçu aucun paiement après le 30 avril 2018. Pourtant, elle paie des impôts et des cotisations d’assurance-emploi depuis plus de 40 ans, et elle a des factures à payer. Elle fait valoir que le régime d’assurance-emploi devrait être conçu de manière à offrir un [traduction] « revenu d’appoint » aux personnes qui ne travaillent pas ou qui ne reçoivent aucun salaire lorsqu’elles sont en carence d’emploi. La prestataire soutient que le fait de ne pas fournir un [traduction] « revenu d’appoint » adéquat est injuste et constitue une atteinte aux principes de justice naturelle.

[27] Le principe de justice naturelle renvoie aux règles de procédure fondamentales qui s’appliquent dans un contexte judiciaire ou quasi judiciaire. Le principe vise à veiller à ce que toutes les parties reçoivent un avis suffisant de toute instance, à ce qu’elles aient pleinement la possibilité de présenter leur preuve et à ce que l’instance soit équitable et exempte de partialité ou de crainte raisonnable de partialité. Il porte sur des questions d’équité procédurale plutôt que sur l’incidence qu’une décision pourrait avoir sur une partie.

[28] En l’espèce, la prestataire n’a pas mentionné ni laissé entendre que la division générale ne lui avait pas donné un préavis suffisant, qu’elle pourrait l’avoir privé de la possibilité de présenter pleinement sa preuve ou qu’elle pourrait avoir fait preuve de partialité à son endroit. Pour cette raison, et malgré la situation personnelle de la prestataire, je ne suis pas convaincue que l’on puisse soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle.

Conclusion

[29] Pour les motifs qui précèdent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

Demanderesse :

C. C., non représentée

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