Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Motifs et décision

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande de prestations parentales d’assurance-emploi payables à compter du 2 décembre 2018. Dans sa demande, il devait choisir entre les prestations parentales standards, c’est‑à‑dire jusqu’à concurrence de 35 semaines de prestations à un taux de 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurable, et les prestations parentales prolongées, c’est‑à‑dire jusqu’à concurrence de 61 semaines de prestations à un taux de 33 % de sa rémunération hebdomadaire assurable. L’appelant a choisi les prestations standards et a reçu son premier versement de prestations parentales le 24 décembre 2018.

[2] Le 18 mars 2019, l’appelant a demandé de convertir ses prestations standards en prestations prolongées. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté sa demande. L’appelant a ensuite demandé à la Commission de réviser sa demande parce qu’il n’avait pas compris que les 35 semaines de prestations standards devaient tomber dans les 12 mois suivant la naissance de son enfant. Son fils est né le XX février 2018, et si l’appelant avait choisi les prestations prolongées, il aurait pu recevoir des prestations parentales jusqu’en août 2019 au lieu de février 2019. La Commission a maintenu sa décision initiale, car l’article 23(1.2) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) prévoit que le choix entre les prestations parentales standards ou prolongées est irrévocable dès lors que des prestations sont versées. L’appelant a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[3] L’appelant a été avisé par écrit de l’intention du Tribunal de rejeter de façon sommaire son appel, parce qu’il avait choisi les prestations parentales standards et qu’il n’existe aucun pouvoir discrétionnaire permettant de changer son choix dès lors que des prestations lui sont versées. L’appelant a eu la possibilité de déposer d’autres observations, ce qu’il a fait le 21 juin 2019 (GD6). La Commission a ensuite présenté des observations le 25 juin 2019 (GD7), puis l’appelant a déposé une réponse le 28 juin 2019 (GD8).

Question en litige

[4] Le Tribunal doit déterminer si l’appel doit être rejeté de façon sommaire.

Droit applicable

[5] L’article 53(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit que la division générale doit rejeter de façon sommaire un appel si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

[6] L’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale stipule que la division générale doit aviser la partie appelante par écrit et lui donner un délai raisonnable pour présenter des observations avant de rejeter un appel de façon sommaire.

[7] Selon les articles 12(3)(b) et 14(1) de la Loi sur l’AE, toute partie prestataire qui a donné naissance à un enfant ou qui a adopté un enfant après le 3 décembre 2017 doit choisir entre les prestations parentales standards (jusqu’à concurrence de 35 semaines de prestations à un taux de 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable) ou les prestations parentales prolongées (jusqu’à concurrence de 61 semaines de prestations à un taux réduit de 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable).

[8] L’article 23(1.2) de la Loi sur l’AE prévoit que le choix est irrévocable dès lors que des prestations parentales sont versées pour la demande relative à un enfant en particulier.

Preuve

[9] L’appelant a présenté une demande de prestations parentales le 6 décembre 2018. Dans sa demande, il a précisé que son enfant était né le XX février 2018, et qu’il avait choisi de recevoir les prestations standards, c’est-à-dire jusqu’à concurrence de 35 semaines de prestations à un taux de 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurable.

[10] L’appelant a reçu son premier versement de prestations parentales le 24 décembre 2018, et les versements se sont poursuivis jusqu’au tout dernier, soit le 24 février 2019 (GD3‑22).

[11] Le 18 mars 2019, l’appelant a communiqué avec la Commission pour lui demander de modifier son choix pour des prestations prolongées, mais sa demande a été rejetée parce que des prestations parentales lui avaient déjà été versées (GD3‑20).

[12] Il a demandé à la Commission de réviser sa demande parce qu’il n’avait pas compris que les 35 semaines de prestations standards devaient toutes tomber dans les 12 mois suivant la naissance de son fils. Dans son cas, son fils est né le XX février 2018, mais il n’a pas commencé son congé parental avant décembre 2018. S’il avait choisi les prestations prolongées, il aurait pu recevoir des prestations parentales jusqu’à la fin de son congé parental en août 2019, plutôt que jusqu’en février 2019.

[13] La Commission a rejeté sa demande de modifier son choix pour les prestations prolongées, car ce choix est irrévocable dès lors qu’une seule semaine de prestations parentales est versée (GD3‑24).

Observations

[14] Dans ses documents de réponse (GD6 et GD8), l’appelant a soutenu ce qui suit :

  1. Il ne demande pas nécessairement de changer ses prestations parentales standards en prestations parentales prolongées. Il souhaite plutôt continuer de recevoir des prestations parentales standards pendant 35 semaines à partir de la date à laquelle il a présenté sa demande en décembre 2018, ce qui lui permettrait de toucher des prestations jusqu’en août 2019, soit quelque 78 semaines après la naissance de son fils.
  2. Il n’a pas choisi la bonne option en fonction de sa situation, car le processus de demande ne contenait pas assez d’informations sur le sujet. Son fils est né en février 2018. Son épouse est travailleuse indépendante et ne peut pas toucher de prestations d’assurance-emploi. Ils ont décidé d’attendre jusqu’en décembre 2018 pour présenter une demande de prestations d’assurance-emploi. Ils souhaitaient recevoir les prestations pour les 35 semaines suivantes, soit jusqu’en août 2019.
  3. La Commission doit veiller à ce que toute partie prestataire reçoive suffisamment d’informations pour faire un choix éclairé. La Commission ne s’est pas acquittée de cette responsabilité. Il n’est expliqué nulle part dans le processus de demande que la fenêtre parentale concernant les prestations standards prend fin dans les 52 semaines suivant la date réelle de l’accouchement.
  4. Il n’a pas été en mesure de prendre une décision éclairée, car des renseignements importants avaient été [traduction] « omis » dans le processus de demande. Il est injuste pour lui d’être pénalisé en recevant moins de 35 semaines de prestations parentales parce que la Commission ne fournit pas tous les renseignements pertinents aux parties prestataires.

[15] La Commission a soutenu que le choix de l’appelant entre les prestations parentales standards ou prolongées est devenu irrévocable dès lors que ses prestations parentales lui ont été versées en décembre 2018. Il ne peut toucher le solde des 35 semaines de prestations parentales, car la fenêtre parentale prend fin dans les 52 semaines suivant la date réelle de l’accouchement. Le fils de l’appelant est né dans la semaine du 18 février 2018 (la date réelle de l’accouchement dans son cas). En ajoutant 52 semaines à la date réelle de l’accouchement, la fenêtre parentale s’étend jusqu’à la semaine du 17 février 2019. L’appelant a reçu des prestations jusqu’à la semaine du 17 février 2019, et aucune autre prestation parentale ne peut lui être versée.

Analyse

[16] L’article 53(1) de la Loi sur le MEDS prévoit que la division générale du Tribunal rejette de façon sommaire l’appel si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

[17] Selon l’article 23(1.1) de la Loi sur l’AE, toute partie prestataire demandant des prestations parentales doit choisir entre les deux périodes de prestations prévues à l’article 12(3)(b) de la Loi sur l’AE, soit entre 35 ou 61 semaines. L’article 14(1) de la Loi sur l’AE prévoit le calcul du taux de prestations hebdomadaires en fonction du choix de la partie prestataire, soit jusqu’à concurrence de 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurable ou jusqu’à concurrence de 33 % de sa rémunération hebdomadaire assurable.

[18] À moins que la partie prestataire choisisse la période de prestations prolongées de 61 semaines, l’article 23(2) de la Loi sur l’AE prévoit que les prestations parentales sont soumises à un délai de prescription de 52 semaines. Autrement dit, les prestations parentales ne peuvent être versées que pour la période commençant à partir de la semaine de la naissance de l’enfant et prenant fin 52 semaines plus tard.

[19] Selon l’article 23(1.2) de la Loi sur l’AE, le choix entre 35 et 61 semaines de prestations est irrévocable dès lors que des prestations parentales concernant l’enfant en particulier sont versées.

[20] Le Tribunal estime que le choix de l’appelant, soit une période de prestations de 35 semaines, ne peut être modifié, car l’appelant a déjà reçu des prestations parentales liées à cette demande.

[21] Le Tribunal estime également que la Commission a bien calculé la fenêtre des prestations parentales en l’espèce. Elle a déterminé que, selon la période de prestations de 35 semaines que l’appelant a choisie, celui-ci pouvait seulement toucher des prestations parentales entre la semaine de la naissance de son fils, soit le XX février 2018, et la fin de la période de prestations de 52 semaines, qui tombe dans la semaine du 17 février 2019. Le fait que l’appelant ait attendu jusqu’en décembre 2018 pour présenter une demande de prestations parentales ne modifie pas la période de prescription de 52 semaines qui s’applique à la période de prestations de 35 semaines.

[22] Le Tribunal estime donc que la Commission a correctement mis fin au versement des prestations parentales de l’appelant pendant la semaine du 17 février 2019.

[23] Le Tribunal comprend la déception de l’appelant de ne pas pouvoir recevoir les 35 semaines de prestations parentales qu’il a demandées. Toutefois, la Loi sur l’AE n’accorde aucun pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne l’irrévocabilité du choix des 35 semaines de prestations que l’appelant a fait ou le délai de prescription de 52 semaines de prestations qui s’applique à la période de prestations de 35 semaines.

[24] Le Tribunal reconnaît également l’opinion bien arrêtée de l’appelant selon laquelle la Commission pourrait mieux communiquer les règles concernant le choix de la période de prestations aux parties prestataires. Toutefois, le Tribunal n’a pas le pouvoir discrétionnaire de modifier le langage clair de la loi, peu importe les circonstances atténuantes.

[25] La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel le délai de prescription des prestations et toute autre condition d’admissibilité prévue par la Loi sur l’AE ne peuvent être modifiés à la discrétion d’un décideur. Dans l’arrêt Procureur général (Canada) c Lévesque, 2001 CAF 304, il ne manquait qu’une seule heure d’emploi assurable à la partie prestataire pour être admissible aux prestations, mais la Cour a déclaré que la Loi sur l’AE n’accorde pas de pouvoir discrétionnaire pour réparer une telle erreur dans sa demande. Le Tribunal fait preuve de compassion à l’égard de la situation de l’appelant, plus précisément en ce qui concerne son congé parental qu’il avait prévu jusqu’en août 2019 (GD3‑7). Sa frustration face à la situation dans laquelle il se trouve est palpable. Toutefois, le principe s’applique, peu importe les circonstances atténuantes (Pannu, 2004 CAF 90). Le Tribunal est également appuyé dans son analyse par la déclaration de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Granger c Canada (CEIC), [1989] 1 RCS 141 selon laquelle le juge est lié par la loi et ne peut, même pour des raisons d’équité, refuser de l’appliquer.

[26] L’appelant souhaitera peut-être continuer de soulever cette question auprès de son député local afin d’améliorer les informations que la Commission fournit aux parties prestataires dans le processus de demande. Malheureusement, le Tribunal ne peut lui accorder la réparation qu’il souhaite, c’est-à-dire recevoir le solde des 35 semaines de prestations qu’il demandait lorsqu’il a présenté sa demande de prestations parentales le 6 décembre 2018.

[27] Le Tribunal estime que l’appelant a choisi la période de prestations de 35 semaines et qu’étant donné que son fils est né le XX février 2018, il ne peut toucher des prestations parentales après la semaine du 17 février 2019. Le Tribunal n’a pas compétence pour modifier ce délai de prescription. Par conséquent, l’appelant ne peut toucher d’autres prestations parentales dans sa demande pour l’enfant né le XX février 2018.

[28] En l’espèce, le rejet de l’appel est inévitable malgré toute preuve ou tout argument qui pourrait être présenté à l’audience. L’appel doit être rejeté de façon sommaire conformément à l’article 53(1) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[29] Le Tribunal conclut que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, l’appel est rejeté de façon sommaire.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.