Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pendant toute la période de retarder sa demande de prestations d’assurance-emploi (AE); par conséquent, la demande d’antidatation est rejetée.

Aperçu

[2] L’appelante a présenté une demande initiale de prestations régulières d’AE le 8 avril 2019. Elle a occupé un emploi de chercheuse dans une université jusqu’au 31 août 2018.

[3] L’appelante demande que sa demande de prestations soit antidatée au 1er septembre 2018, au lieu d’être datée du 8 avril 2019, afin qu’elle soit admissible aux prestations d’AE plus tôt.

[4] Elle prétend qu’elle a présenté sa demande initiale de prestations d’AE en retard parce qu’elle s’attendait à être rengagée peu de temps après sa cessation d’emploi, elle ne connaissait pas le système d’AE, elle attendait que son employeur lui envoie son relevé d’emploi et son employeur ne lui a pas dit de demander des prestations d’AE.

[5] L’intimée a refusé d’antidater la demande, car l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pendant toute la période du retard, pour demander une antidatation.

Questions en litige

[6] Question en litige no 1 : L’appelante est-elle admissible à l’antidatation de sa demande au 1er septembre 2018, au lieu du 8 avril 2019?

[7] Question en litige no 2 : L’appelante était-elle admissible à des prestations d’AE à une date antérieure?

Analyse

Question en litige no 1 : L’appelante est-elle admissible à l’antidatation de sa demande au 1er septembre 2018, au lieu du 8 avril 2019?

[8] L’antidatation ou le fait de considérer une demande d’AE comme ayant été présentée à une date antérieure est prévu à l’article 10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). La partie prestataire doit prouver :

  1. a) qu’il y avait un motif valable pour expliquer le retard durant toute la période écoulée;
  2. b) qu’elle était admissible à des prestations d’AE à une date antérieure.

[9] L’obligation de présenter avec célérité sa demande de prestations est considérée comme étant très exigeante et très stricte. C’est pourquoi l’exception relative au « motif valable justifiant le retard » est appliquée parcimonieusement (Canada (Procureur général) c Brace, 2008 CAF 118).

[10] La partie prestataire doit démontrer qu’elle avait un motif valable de retarder le dépôt des déclarations durant toute la période pour laquelle une antidatation est demandée (Canada (Procureur général) c Chalk, 2010 CAF 243). Le fardeau de la preuve incombe à la partie prestataire (Canada (Procureur général) c Kaler, 2011 CAF 266).

[11] Le Tribunal estime que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pour toute la période du retard de demander l’antidatation de sa demande initiale d’AE.

[12] L’appelante demande une antidatation au 1er septembre 2018, au lieu du 8 avril 2019, soit le lendemain du dernier jour où elle a travaillé, c’est-à-dire le 31 août 2018.

[13] L’appelante prétend qu’elle a présenté sa demande initiale de prestations d’AE en retard parce qu’elle s’attendait à être rengagée peu après sa cessation d’emploi, elle ne connaissait pas le système d’AE, elle attendait que son employeur lui envoie son relevé d’emploi et son employeur ne lui a pas dit de demander des prestations d’AE.

[14] L’appelante n’a pas essayé de communiquer avec l’intimée durant la période pour laquelle elle demande l’antidatation, car elle ne savait qu’il existait un système d’AE pour le versement de prestations même si elle travaillait sporadiquement pendant une période de prestations potentielle. Elle affirme qu’elle a demandé des prestations d’AE immédiatement après avoir appris qu’elle pouvait le faire lors d’une rencontre avec son comptable fiscaliste en avril 2019.

[15] Pour démontrer un motif valable d’avoir retardé la présentation de sa demande initiale, la partie prestataire doit démontrer qu’elle a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les mêmes circonstances pour s’acquitter de ses obligations et faire valoir ses droits au titre de la Loi sur l’AE (Kamgar c Canada (Procureur général), 2013 CAF 157).

[16] Le Tribunal estime que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les mêmes circonstances.

[17] L’appelante n’a demandé aucun renseignement à l’intimée sur une demande initiale de prestations régulières d’AE et sur ses droits et ses obligations durant toute la période pour laquelle elle demande d’être admissible à une antidatation. Le Tribunal estime qu’elle était tenue de le faire et que cela ne relevait pas de la responsabilité de son employeur.

[18] À moins de l’existence de circonstances exceptionnelles, il incombe à la partie prestataire de « [vérifier] assez rapidement » si elle a droit à des prestations d’AE et de s’enquérir de ses droits et de ses obligations au titre de la Loi sur l’AE (Canada (Procureur général) c Carry, 2005 CAF 367; Canada (Procureur général) c Somwaru, 2010 CAF 336).

[19] L’ignorance du processus de demande d’AE et l’ignorance de la loi, si elles sont de bonne foi, constitueraient un motif valable tant que la partie requérante peut établir qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente, ou qu’il existait des circonstances exceptionnelles (Canada (Procureur général) c Beaudin, 2005 CAF 123; Shebib c Canada (Procureur général), 2003 CAF 88).

[20] Le Tribunal est d’avis que l’appelante n’a pas établi qu’il existait des circonstances exceptionnelles pour retarder la présentation d’une demande initiale de prestations d’AE, et qu’un motif valable pour expliquer le retard n’est pas la même chose que le fait d’avoir une bonne raison ou une justification pour le retard.

[21] Le Tribunal n’admet pas qu’elle a agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans cette situation pour s’enquérir de ses droits et de ses obligations sous le régime de la Loi sur l’AE (Somwaru). Une personne raisonnable aurait communiqué avec l’intimée pour se renseigner sur ses droits et ses obligations concernant sa demande d’AE bien avant le moment où elle l’a fait durant la période du 1er septembre 2018 au 8 avril 2019. 

[22] L’antidatation de la demande de prestations pourrait porter atteinte à l’intégrité du système lorsque la Commission se trouve dans la position délicate de devoir se livrer à un travail ou à un processus de reconstruction des événements, avec les coûts et les aléas afférents à un tel processus. Il s’agit d’un principe établi depuis longtemps par la jurisprudence que l’ignorance de la Loi sur l’AE n’excuse pas le retard à produire une demande initiale de prestations (Beaudin).

[23] Les prestataires d’AE sont tenus de présenter une demande de prestations d’AE avec célérité et de remplir les conditions d’admissibilité nécessaires. Le Tribunal doit appliquer la législation relative à l’AE équitablement, peu importe la situation personnelle.

[24] Le Tribunal compatit avec la situation personnelle de l’appelante, y compris le fait qu’elle ne connaissait pas le système d’AE, mais elle a retardé pendant de nombreux mois sa demande initiale de prestations régulières d’AE et n’a pas démontré l’existence d’un motif valable pendant toute la période du retard, soit du 1er septembre 2018 au 8 avril 2019. Elle n’a pas démontré que, selon la prépondérance des probabilités, elle a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans sa situation pour se renseigner sur ses droits et obligations. 

Question en litige no 2 : L’appelante était-elle admissible à des prestations d’AE à une date antérieure?

[25] La loi exige que la prestataire réponde aux deux facteurs afin que sa demande puisse être antidatée. Puisque l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable au cours de toute la période du retard, le Tribunal estime que l’appel ne peut pas être accueilli. Par conséquent, le Tribunal n’examinera pas la question à savoir si elle était admissible à des prestations d’AE à une date antérieure.

Conclusion

[26] L’appel est rejeté. La demande de l’appelant d’antidater sa demande de prestations d’AE au titre de l’article 10(4) de la Loi sur l’AE est rejetée.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Parties présentes :

Le 3 juillet 2019

Téléconférence

Aucune comparution

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