Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. Les notes médicales fournies ne sont pas valides, de sorte que S. T., que j’appellerai l’appelante, n’a pas droit aux prestations de maladie qu’elle a reçues du 21 avril au 17 août 2013. L’appel est rejeté sur cette question.

[2] Bien que l’appelante ait fourni des renseignements faux ou trompeurs en fournissant deux notes médicales non valides, elle n’a pas sciemment fourni de renseignements faux ou trompeurs. Par conséquent, aucune pénalité n’est justifiée et l’avertissement est retiré. L’appel est accueilli sur cette question.

Aperçu

[3] L’appelante a présenté une demande de prestations de maladie le 21 avril 2013. Pour prouver sa maladie, elle a fourni deux notes médicales qui semblaient avoir été signées par un médecin. L’appelante a touché des prestations de maladie du 21 avril au 17 août 2013. Elle a ensuite touché des prestations de maternité et parentales du 15 septembre 2013 au 21 juin 2014, date à laquelle elle a commencé à travailler à temps plein.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada, que j’appellerai l’intimée, a mené une enquête et déterminé que la personne qui utilisait le titre « Dr » devant son nom et qui signait les notes médicales de l’appelante en utilisant le titre « M.D. » n’était pas en réalité un médecin. Il était considéré un praticien de médecine chinoise. L’intimée a déterminé que les notes médicales fournies par l’appelante pour prouver sa maladie n’étaient pas valides parce qu’elles n’ont pas été remplies par un médecin ou un autre professionnel de la santé comme l’exige le Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE). L’intimée a conclu que l’appelante n’avait pas droit aux prestations de maladie qu’elle a touchées et lui a demandé de rembourser cet argent. L’intimée a également conclu que l’appelante avait sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs en fournissant les deux notes médicales non valides et a donné un avertissement en guise de pénalité.

Questions préliminaires

[5] L’appelante a obtenu les services d’un interprète pour son audience.

[6] Dans son témoignage, l’appelante a mentionné des communications par courriel avec une entreprise qui l’a aidée à demander des prestations de maladie de l’AE. Elle voulait présenter les courriels en preuve, mais ils étaient rédigés en chinois. Étant donné que les renseignements contenus dans les courriels étaient potentiellement pertinents relativement aux questions faisant l’objet de l’appel, j’ai accordé à l’appelante jusqu’au 11 juillet 2019 pour faire traduire ces documents et les soumettre au Tribunal. L’appelante a fourni ces documents le 11 juillet 2019 et ils ont été transmis à l’intimée.

Questions en litige

[7] Première question en litige : L’appelante a-t-elle fourni un certificat médical valide pour sa demande de prestations de maladie?

[8] Deuxième question en litige : Dans la négative, l’intimée a-t-elle le pouvoir d’imposer une pénalité?

[9] Troisième question en litige : Si une pénalité devait être imposée, l’intimée a-t-elle adéquatement exercé son pouvoir discrétionnaire en donnant un avertissement?

Première question en litige : L’appelante a-t-elle fourni un certificat médical valide pour sa demande de prestations de maladie?

[10] Non. L’appelante n’a pas fourni de certificat médical valide pour sa demande de prestations de maladie. Les notes médicales n’étaient pas valides puisqu’elles ont été signées par une personne qui utilisait les titres « Dr » et « M.D. », mais qui n’était pas un médecin inscrit auprès de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario.

[11] Un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations lorsqu’il ne peut prouver qu’il était incapable de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure et qu’il aurait été sans cela disponible pour travaillerNote de bas de page 1.

[12] Pour prouver son incapacité de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure, un prestataire doit fournir à l’intimée un certificat médical rempli par un médecin ou un autre professionnel de la santé qui atteste cette incapacité et qui indique la durée probable de la maladie ou de la blessureNote de bas de page 2.

[13] L’appelante a présenté une demande de prestations de maladie le 21 avril 2013, dans laquelle est a indiqué qu’elle avait cessé de travailler le 19 février 2013 en raison d’une maladie. Elle a confirmé qu’elle avait rempli la demande sans aideNote de bas de page 3.

[14] À l’appui de sa demande de prestations de maladie, l’appelante a fourni deux notes médicales rédigées sur des feuilles d’ordonnance. La première note est datée du 24 février 2013. Elle indique que l’appelante [traduction] « devrait être en congé jusqu’au 5 juillet 2013 pour des raisons médicales ». Au haut de la note se trouve un nom à côté du titre « Dr » ainsi qu’une adresse et un numéro de téléphone. Une signature est apposée en bas à côté du titre « M.D. »Note de bas de page 4. La deuxième note est datée du 6 juillet 2013. Elle indique que l’appelante [traduction] « devrait s’absenter du travail pendant deux mois pour des raisons médicales ». Au haut de la note se trouve le même nom que dans la note précédente à côté du titre « Dr », ainsi que la même adresse et le même numéro de téléphone. Une signature est apposée en bas à côté du titre « M.D. »Note de bas de page 5.

[15] Le 25 août 2013, l’appelante a rempli un questionnaire relatif aux prestations de maternité et parentales dans lequel elle a indiqué que la date prévue de son accouchement était le 19 novembre 2013Note de bas de page 6.

[16] L’intimée a versé à l’appelante le maximum de 15 semaines de prestations de maladie du 21 avril 2013 au 17 août 2013. L’appelante a ensuite touché des prestations de maternité et des prestations parentales du 15 septembre 2013 au 21 juin 2014.

[17] Je conclus que les deux notes médicales fournies par l’appelante à l’appui de sa demande de prestations de maladie de l’AE se rapportent à la période au cours de laquelle l’appelante a touché des prestations de maladie.

[18] L’intimée a présenté des observations indiquant que ses agents d’intégrité ont mené une enquête sur les pratiques de X. L’enquête a révélé que le propriétaire de cette entreprise demandait des prestations d’AE au nom des prestataires et les dirigeait vers l’un de ses « médecins » pour obtenir des notes médicales frauduleusesNote de bas de page 7.

[19] L’agent d’intégrité de l’intimée a déterminé que dans le cas de l’appelante, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario n’avait aucun dossier concernant le médecin qui avait signé ses notes médicales en utilisant le titre « M.D. ». D’après une photo tirée de Google Maps, l’adresse qui figurait sur les feuilles d’ordonnance était une résidence et non une clinique médicale ou un cabinet de médecin. L’agent d’intégrité s’est rendu sur les lieux et a constaté qu’il s’agissait d’une maison jumelée de deux étages. Il n’y avait pas de panneau indiquant qui vivait là ou que la maison abritait un cabinet de médecin. Le numéro de téléphone figurant sur la note médicale fournie par l’appelante était lié à une entreprise appelée X, située au X. L’agent d’intégrité de l’intimée a conclu que cette entreprise n’était pas un cabinet médical qui emploie des médecins et qu’il s’agissait plutôt d’une entreprise de médecine chinoise traditionnelleNote de bas de page 8.

[20] Le 19 octobre 2017, l’appelante a reçu une lettre lui demandant de communiquer avec l’intimée au plus tard le 7 novembre 2018 pour fixer une entrevue concernant les certificats médicaux qu’elle avait soumis avec sa demande, car l’intimée n’avait pu trouver aucun renseignement pour valider ou authentifier les notes médicalesNote de bas de page 9. L’appelante n’a pas communiqué avec l’intimée pour organiser une entrevue. L’intimée a ensuite conclu que l’appelante n’avait pas droit à des prestations de maladie parce qu’elle n’avait pas fourni de certificat médical valide attestant sa maladie et son incapacité de travailler.

[21] L’appelante a expliqué dans son avis d’appel comment elle avait obtenu les notes médicales. Elle travaillait dans un restaurant où elle effectuait du travail physique et travaillait debout de façon continue pendant plus de huit heures par jour. Elle a raconté qu’elle était enceinte de deux mois et qu’elle avait des antécédents de blessure au dos. Elle souffrait constamment de douleurs au dos et aux jambes. L’appelante s’est rendue chez son médecin de famille qui lui a dit d’éviter les radiographies et les produits chimiques pour soulager ses douleurs en raison de sa grossesse. Il lui a suggéré de consulter un médecin en médecine sportive pour recevoir un diagnostic et un traitement plus poussés qui n’étaient pas couverts par le RAMO. L’appelante n’avait pas les moyens de se payer ce traitement et n’a donc pas donné suite à ces recommandations. Le praticien de médecine chinoise qui a rédigé les notes pour sa demande d’AE était le seul médecin avec lequel elle pouvait se permettre un traitement à cette époque.

[22] L’appelante a également indiqué dans son avis d’appel qu’elle ne savait pas que le praticien de médecine chinoise n’était pas qualifié pour fournir des notes médicales. Il lui a suggéré d’éviter les travaux physiques lourds afin qu’ils n’affectent pas son corps et son bébé. L’appelante a expliqué que son anglais était très mauvais, de sorte qu’elle a dû recourir à une entreprise appelée X pour l’aider à présenter une demande de prestations de maladie de l’AE. Elle a expliqué que l’entreprise l’avait aidée à remplir et à soumettre les formulaires d’AE et qu’ils avaient vérifié ses documents, y compris le certificat médical du médecin. Ils ne lui ont pas fait part de problèmes concernant ses documents lorsqu’ils ont présenté la demande. L’appelante a expliqué qu’en raison de ses difficultés à communiquer en anglais, elle a également autorisé cette entreprise à l’aider dans toutes ses communications avec les bureaux gouvernementaux. Par conséquent, lorsqu’elle a reçu les lettres de Service Canada, elle les a remises à l’entreprise, qui lui a dit que le certificat médical du médecin pourrait poser un problème, mais qu’ils allaient lancer une contestation. C’est pourquoi elle a raté de nombreuses occasions de communiquer elle-même avec les bureaux gouvernementaux. L’appelante a expliqué qu’elle avait découvert que cette entreprise la trompait depuis longtemps lorsqu’elle a récemment reçu une lettre de l’Agence du revenu du Canada. Elle a alors appris que l’entreprise n’avait pas interjeté appel comme ils l’avaient dit.

[23] L’appelante a témoigné qu’elle est arrivée au Canada en février 2009. En 2013, elle travaillait debout de 8 à 10 heures par jour et souffrait de douleurs aux jambes et au bas du dos. Après être tombée enceinte, elle ne pouvait pas passer de radiographies ou prendre des analgésiques. Elle est donc allée voir le praticien de médecine chinoise pour apaiser ses douleurs. Elle a déclaré qu’un collègue lui avait recommandé ce médecin. L’appelante ne se souvenait pas de la date à laquelle elle a consulté pour la première fois le praticien de médecine chinoise, mais a indiqué que c’était peut-être à la mi-avril 2013. Toutefois, elle était certaine que c’était après sa grossesse. Elle a confirmé avoir accouché en novembre 2013.

[24] L’appelante a expliqué qu’elle avait un médecin de famille depuis 2010, mais qu’elle n’avait pas demandé son aide parce qu’elle pensait qu’il lui prescrirait peut-être des médicaments, ce qu’elle ne voulait pas, car elle était enceinte. De plus, il pratiquait la médecine occidentale et elle faisait davantage confiance au praticien de médecine chinoise. Elle a parlé au praticien de médecine chinoise de son milieu de travail et il lui a conseillé de prendre une pause du travail pour se reposer, car elle était enceinte. Il lui a fourni des notes médicales pour qu’elle puisse prendre une pause. Ce médecin lui a également donné des traitements de massothérapie et de physiothérapie pour atténuer ses douleurs et lui a recommandé d’élever les jambes. Elle a consulté le praticien de médecine chinoise environ trois à quatre fois et elle l’a payé pour le traitement. L’appelante n’a pas discuté avec son médecin de famille de la question de savoir si elle devrait s’absenter du travail.

[25] L’appelante a déclaré qu’elle avait entendu parler des prestations de maladie de l’AE par l’entremise d’un collègue de travail. Elle était seule à l’époque, car son mari était en Chine. Comme son anglais n’était pas bon, elle s’est adressée à une entreprise appelée X pour obtenir de l’aide. Elle a affirmé qu’elle avait trouvé l’entreprise grâce à une publicité en ligne. L’entreprise se trouvait un étage au-dessus du bureau du praticien de médecine chinoise dans un immeuble de bureaux situé au X. L’appelante a confirmé qu’il ne s’agissait pas de l’adresse figurant sur les notes médicales qu’elle avait fournies. L’appelante a nié que le praticien de médecine chinoise l’avait dirigée vers l’entreprise ou que l’entreprise l’avait dirigée vers le praticien de médecine chinoise. Elle a indiqué qu’elle avait d’abord consulté le médecin parce qu’elle ne se sentait pas bien.

[26] L’appelante a dit dans son témoignage qu’elle a remis les notes du praticien de médecine chinoise à l’entreprise. Elle a expliqué que même s’il était indiqué dans sa demande d’AE qu’elle n’avait pas obtenu d’aide pour remplir sa demande, l’entreprise l’avait en fait rempli pour elle. Elle ne savait pas ce qu’ils avaient indiqué dans sa demande parce qu’elle ne l’avait pas lu. En raison de ses difficultés en anglais, elle a simplement signé le formulaire. Elle a indiqué qu’elle faisait confiance à l’entreprise pour faire les choses légalement. L’entreprise lui a dit que si quelque chose se produisait, elle pourrait retourner les voir. Elle a communiqué de nouveau avec eux lorsqu’elle a reçu de la correspondance du gouvernement, et ils lui ont dit qu’ils allaient s’en occuper pour elle. L’appelante a déclaré qu’elle avait eu des communications par courriel avec l’entreprise et qu’elle les soumettrait au Tribunal après leur traduction. L’appelante a soumis des communications par courriel couvrant la période du 7 septembre 2018 au 27 mars 2019. Les courriels confirment que l’appelante a communiqué avec cette entreprise au sujet des documents gouvernementaux reçus et qu’elle s’est renseignée sur l’état d’un appelNote de bas de page 10.

[27] L’appelante a indiqué dans son témoignage que le praticien de médecine chinoise lui avait simplement dit qu’il était médecin. Elle n’a donc pas remis en question les notes. Elle lui faisait confiance. Sinon, elle aurait consulté un autre médecin pour obtenir un certificat médical attestant sa maladie. Elle ne comprend pas pourquoi les notes qu’elle a fournies posent problème. Elle croyait qu’elles étaient légales. Je lui ai posé des questions sur le titre « M.D. » figurant sur les notes. Elle ne connaissait pas la différence entre un M.D. et un praticien de médecine chinoise. Elle a expliqué qu’en Chine, les médecins pratiquent à la fois la médecine occidentale et la médecine chinoise.

[28] L’appelante a raconté qu’en tant que nouvelle arrivante, elle ne voulait rien faire d’illégal. Elle a dit que même lorsqu’elle a renvoyé son enfant en Chine, elle a demandé au gouvernement de mettre fin à sa prestation fiscale pour enfants et elle a remboursé l’argent qu’elle devait. De plus, lorsqu’elle est retournée au travail, elle a demandé à l’intimée de mettre fin à ses prestations d’AE. Elle a expliqué que lorsqu’elle a quitté le Canada en avril 2014 et qu’elle est revenue en juin 2014, contrairement à ce qu’elle avait indiqué dans son formulaire d’appel, elle n’a pas communiqué avec l’intimée pour mettre fin à ses prestations de maternité et parentales parce qu’elle croyait qu’elle n’avait pas à le faire. L’ami qui l’a aidée à remplir son formulaire d’appel a dû mal la comprendre à ce sujet.

[29] L’appelante a témoigné qu’elle n’avait pas assisté à l’entrevue avec l’intimée, comme l’avait demandé l’intimée dans sa lettre du 19 octobre 2017, parce qu’elle avait remis cette lettre à l’entreprise. Ils lui ont dit qu’ils soumettraient tous les documents nécessaires à l’intimée et qu’elle n’avait pas besoin de se présenter à l’entrevue. L’appelante a affirmé qu’elle n’avait pas non plus rappelé l’intimée après la conversation téléphonique du 31 mai 2018, car elle n’avait pas bien compris cette conversation et elle avait donné tous les renseignements à l’entreprise qui, selon elle, s’en occupait.

[30] L’appelante soutient qu’elle ne comprend pas quel est le problème avec les notes médicales qui ont été fournies. Le médecin qui les a écrites était un praticien de médecine chinoise qu’elle a vu dans une clinique. Il lui a donné des traitements de massothérapie et de physiothérapie et lui a dit de ne pas travailler. Elle croyait qu’il avait le pouvoir de fournir les notes.

[31] L’intimée est d’avis que des prestations de maladie de l’AE ne peuvent être versées à l’appelante à compter du 21 avril 2013 parce qu’elle n’a pas fourni de certificat médical valide attestant sa maladie et son incapacité de travailler. Les certificats médicaux fournis proviennent d’une personne qui n’est pas inscrite auprès de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario. La personne qui a signé les notes fait la promotion de la médecine chinoise traditionnelle et de l’acupuncture. L’intimée fait valoir qu’il n’est pas clair pourquoi cette personne aurait un carnet d’ordonnance, indiquerait qu’elle est médecin et donnerait des conseils médicaux alors qu’elle connaîtrait clairement les paramètres de sa profession. L’intimée soutient que peu importe si l’appelante savait ou ignorait qu’il n’était pas un médecin, elle a touché des prestations sans certificat médical valide. Comme l’appelante ne peut fournir de certificat médical valide, elle n’est pas admissible aux prestations de maladie qui lui ont été versées.

[32] Le Règlement sur l’AE prévoit que le certificat attestant l’incapacité de travailler en raison d’une maladie doit être fourni par un médecin ou un « autre professionnel de la santé »Note de bas de page 11. Par conséquent, ce ne sont pas uniquement les médecins qui ont le droit fournir ce certificat. La Loi et le Règlement ne renferment aucune définition d’« autre professionnel de la santé ». Je conclus donc que la définition d’« autre professionnel de la santé » pourrait inclure un praticien de médecine chinoise.

[33] Toutefois, l’homme qui a signé les notes médicales de l’appelante ne l’a pas fait à titre de praticien de médecine chinoise. Il a plutôt utilisé le titre « Dr » devant son nom et a signé les notes en utilisant le titre « M.D. », même s’il n’est pas inscrit comme médecin en Ontario. L’intimée a confirmé que l’adresse figurant sur les notes était une adresse résidentielle, et non celle d’un cabinet de médecin, ou même du bureau où il pratiquait la médecine chinoise.

[34] Même si l’homme qui a signé les notes médicales de l’appelante était un praticien de médecine chinoise autorisé, il n’a pas mentionné qu’il était ce type de praticien ni indiqué sa certification de praticien de médecine chinoise sur les notes médicales afin que les notes puissent être dûment authentifiées par l’intimée. Il a plutôt fait de fausses déclarations sur ses qualifications professionnelles en se présentant comme un médecin. C’est pour cette raison que les notes médicales ne sont pas valides. Des prestations ont été versées à l’appelante sur le fondement que ces notes médicales avaient été rédigées par un médecin, ce qui n’était pas le cas.

[35] Je conclus donc que les notes médicales fournies à l’appui de la demande de prestations de maladie de l’appelante ne sont pas valides. La personne qui a rédigé les notes médicales a fait de fausses déclarations sur ses qualifications. Aucun autre formulaire d’attestation médicale n’a été fourni pour attester la maladie de l’appelante du 21 avril au 17 août 2013.

[36] Comme les notes médicales fournies ne sont pas valides et qu’aucun autre formulaire d’attestation médicale n’a été fourni, l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était incapable de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure. Elle n’a donc pas droit aux prestations de maladie du 21 avril 2013 au 17 août 2013.

Deuxième question en litige : L’intimée a-t-elle le pouvoir d’imposer une pénalité?

[37] Non. Bien que l’appelante ait fourni des renseignements faux ou trompeurs sous la forme de deux notes médicales non valides, elle ne l’a pas fait sciemment. Comme elle n’a pas fourni sciemment les renseignements faux ou trompeurs, l’intimée n’a pas le pouvoir de donner un avertissement en guise de pénalité.

[38] La Commission peut imposer une pénalité à un prestataire si elle prend connaissance de faits qui démontrent que le prestataire a fait une fausse déclaration ou fourni des renseignements qu’il savait faux ou trompeursNote de bas de page 12. La Commission peut donner un avertissement au lieu de fixer le montant d’une sanction pécuniaireNote de bas de page 13.

[39] Il incombe initialement à la Commission de prouver qu’un prestataire a fait sciemment une déclaration ou une affirmation fausse ou trompeuse. Il y a ensuite renversement du fardeau de la preuve et il incombe désormais au prestataire de fournir une explication raisonnable pour prouver que la déclaration ou l’affirmation n’a pas été faite sciemmentNote de bas de page 14.

[40] L’appelante a fourni deux notes médicales à l’appui de sa demande de prestations, toutes deux signées par la même personne, avec les titres « Dr » devant son nom et « M.D. » après sa signature. Une recherche effectuée par l’intimée auprès de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario a révélé que la personne qui a signé ces certificats n’est pas un médecin dûment autorisé à exercer sa profession. Je conclus que l’intimée s’est acquittée du fardeau initial qui lui incombait de prouver que l’appelante a sciemment fait deux fausses déclarations en fournissant ces notes médicales. Les notes indiquent faussement qu’elles ont été remplies par un médecin.

[41] L’intimée soutient que l’appelante a agi sciemment en fournissant les notes médicales non valides. L’intimée souligne que le médecin de famille de l’appelante ne lui a pas recommandé de ne pas travailler. Son médecin de famille lui a plutôt conseillé de consulter un médecin en médecine sportive. L’intimée souligne également que l’appelante a indiqué dans son avis d’appel qu’elle était enceinte de deux mois lorsqu’elle est allée voir le médecin qui a signé les notes. Toutefois, la première note est datée du 25 février 2013 et la date prévue de son accouchement était le 19 novembre 2013. Ainsi, le 25 février 2013, elle venait tout juste de tomber enceinte, et ne le savait peut-être même pas encore.

[42] L’intimée soutient également que l’appelante affirme qu’elle a apporté les notes médicales à l’entreprise. Toutefois, il semblerait selon l’enquête plus générale de la Commission sur l’entreprise que cette dernière aurait dirigée l’appelante vers le praticien pour obtenir les notes médicales et non l’inverse. L’intimée soutient également que l’appelante a eu l’occasion de communiquer avec l’enquêteur pendant l’enquête lorsqu’elle a reçu les lettres de décision et de nouveau pendant l’examen administratif, mais qu’elle ne l’a pas fait.

[43] Bien qu’il y ait quelques incohérences entre le témoignage de l’appelante et les renseignements figurant dans son avis d’appel, et que les dates posent quelques problèmes, je conclus que le témoignage de l’appelante est globalement crédible. Elle a été directe et a répondu aux questions ouvertement et sans réserve.

[44] L’appelante a écrit dans son avis d’appel qu’elle s’était rendue pour la première fois chez le praticien de médecine chinoise alors qu’elle était enceinte de deux mois. Elle a témoigné qu’elle avait vu le praticien de médecine chinoise après sa grossesse, mais qu’elle n’était pas certaine de la date et qu’elle pensait que c’était peut-être en avril. Toutefois, j’estime qu’il est plus probable que l’appelante ait consulté le praticien en février, avant de savoir qu’elle était enceinte, étant donné qu’elle a accouché en novembre. À cet égard, elle est partie en congé pour cause de maladie le 19 février 2013 et la première note médicale était datée du 24 février 2013. Je n’accorde aucune importance aux différentes dates qu’elle a fournies concernant le moment où elle a consulté le praticien de médecine chinoise pour la première fois et à la question de savoir si elle était enceinte ou non à ce moment-là, compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis que ces événements sont survenus.

[45] L’intimée souligne que l’enquête donne globalement à penser que l’entreprise a dirigé l’appelante vers le praticien de médecine chinoise plutôt que l’inverse. L’appelante dit avoir d’abord consulté le praticien. J’accepte son témoignage à cet égard. Il concorde avec le fait que la première note médicale a été remplie le 19 février 2013 et que la demande de prestations de maladie de l’AE n’a été remplie par l’entreprise pour l’appelante qu’après cette date, le 21 avril 2013.

[46] Je conclus que l’appelante n’a pas sciemment fourni de renseignements faux ou trompeurs en présentant les deux notes médicales non valides. L’appelante a témoigné qu’elle ne savait pas que le praticien de médecine chinoise qui avait signé ses notes médicales n’était pas qualifié pour le faire. L’appelante s’est rendue à la clinique du praticien de médecine chinoise et il lui a donné des traitements de massothérapie et de physiothérapie. En raison de ses compétences limitées en anglais, elle s’est fiée à l’entreprise pour remplir sa demande d’AE. Elle a fourni à l’entreprise les notes du praticien et l’entreprise ne l’a pas informée d’un problème. L’appelante a signé la demande de prestation sans la lire en raison de ses problèmes linguistiques. Elle a fait confiance au médecin pour préparer les notes et à l’entreprise pour l’informer et déposer la demande pour elle. J’admets que l’appelante ne savait pas que les notes médicales qui lui avaient été fournies n’étaient pas valides. J’accepte également le témoignage de l’appelante selon lequel elle n’a pas répondu aux demandes de renseignements de l’intimée concernant les notes médicales, car elle croyait que l’entreprise s’occupait de ces questions pour elle. L’appelante a donné une explication raisonnable pour démontrer qu’elle n’a pas sciemment fourni de renseignements faux ou trompeurs.

[47] Une pénalité ne peut être imposée que si le prestataire a sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs. Comme j’ai conclu que l’appelante n’a pas sciemment fourni de renseignements faux ou trompeurs, l’avertissement donné en guise de pénalité doit être retiré.

Conclusion

[48] L’appel est accueilli en partie. L’appelante n’a pas droit à des prestations de maladie du 21 avril 2013 au 17 août 2013, car elle n’a pas prouvé sa maladie en fournissant un certificat médical valide pour cette période. L’avertissement donné par l’intimée est supprimé, car l’appelante n’a pas sciemment fourni de renseignements faux ou trompeurs.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 8 juillet 2019

Téléconférence

S. T., appelante

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.