Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – Le prestataire a aussi présenté l’argument subsidiaire voulant que la Commission ait omis de l’informer de demander de cesser de recevoir ses prestations pendant un certain temps – Les conseils que la Commission a fournis, ou omis de fournir, au prestataire n’étaient pas pertinents à la question qui devait être tranchée par la DG – La compétence de la DG était limitée à l’examen des questions décrites dans la décision issue de la révision – La DG n’était pas autorisée à superviser de façon générale la qualité du service fourni par les agentes et les agents de la Commission ni de s’assurer que la Commission avait informé le prestataire de la façon de maximiser ses prestations.

Contenu de la décision



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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est refusée.

Aperçu

[2] Le demandeur, H. M. (prestataire) a demandé et obtenu des prestations pendant une période durant laquelle il enseignait aussi à temps partiel dans une université. L’intimé, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a plus tard mené une enquête et conclu que le prestataire n’avait pas déclaré tous ses gains. La Commission a réparti de nouveau ses gains sur une période qui comprenait les semaines durant lesquelles le prestataire avait travaillé et celles durant lesquelles il n’avait pas travaillé. À l’étape du réexamen, la Commission a retiré sa pénalité et annulé l’avis de violation, mais elle a conservé la partie du trop-payé liée à l’erreur que le prestataire a commise en déclarant sa rémunération nette plutôt que sa rémunération brute.

[3] Le prestataire a interjeté appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale en déclarant qu’il croyait que les gains découverts par la Commission comprenaient ses gains d’une bourse de recherche. Il a aussi soutenu qu’aucun de ses gains n’aurait dû être réparti au cours des semaines durant lesquelles il n’avait pas enseigné. Cela comprenait les semaines du 30 août 2015, du 20 décembre 2015, du 27 décembre 2015 et du 3 janvier 2016. La division générale a rejeté son appel et le prestataire demande maintenant la permission d’en appeler à la division d’appel.

[4] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur en manquant à un principe de justice naturelle, en fondant sa décision sur une conclusion de fait erronée, ou en rendant une décision entachée d’une erreur de droit.

Questions préliminaires

[5] À la division générale, l’appel a été instruit en même temps que l’appel connexe dont le numéro de dossier est GE-19-1554 étant donné que les faits des deux appels étaient semblables et qu’ils concernaient des questions communes relatives aux gains et à la répartition de ceux-ci. Toutefois, la division générale a rendu une décision distincte pour chaque appel compte tenu des différences factuelles concernant les sommes reçues et les périodes en question.

[6] J’ai également examiné les appels des deux décisions de la division générale ensemble et j’ai rendu des décisions distinctes. La présente décision est liée à l’appel de GE-19-1553, interjeté devant la division d’appel, et dont le numéro de dossier est AD-19-476.

Questions en litige

[7] Peut-on soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle en omettant de tenir compte que la Commission n’a pas fourni toute l’information qu’elle aurait dû fournir au prestataire?

[8] Peut-on soutenir que la division générale a rejeté l’appel complètement, en se fondant sur une conclusion de fait erronée qui a été tirée sans égard pour la preuve démontrant que le prestataire n’avait pas reçu toute l’information qu’il aurait dû recevoir de la Commission?

[9] Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en s’appuyant sur la jurisprudence distincte en raison des faits ou en omettant de suivre la jurisprudence fournie par le prestataire?

Analyse

[10] Pour intervenir à l’égard d’une décision de la division générale, la division d’appel doit conclure que cette dernière a commis l’une des erreurs correspondant aux « moyens d’appel » prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[11] Les seuls moyens d’appel sont décrits ci-après :

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Pour accueillir la demande de permission d’en appeler et permettre à l’appel de poursuivre, je dois déterminer qu’au moins l’un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Une chance raisonnable de succès a été assimilée à une cause défendableNote de bas de page 1.

Question en litige no 1 : Peut-on soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle en omettant de tenir compte du fait que la Commission n’a pas fourni au prestataire toute l’information qu’elle aurait dû lui fournir?

[13] Le prestataire a expliqué qu’il croyait que la division générale n’avait pas respecté un principe de justice naturelle parce que l’agent ou l’agente de la Commission ne l’avait pas adéquatement informé de la façon dont il pourrait gérer sa demande afin de maximiser son admissibilité aux prestations. Il soutient que la décision de la Commission était injuste et que la division générale a commis une erreur de justice naturelle en ne tenant pas compte du fait qu’il n’avait pas été adéquatement informé par la Commission.

[14] Le concept de justice naturelle comprend les protections procédurales telles que le droit à un décideur impartial et le droit d’une partie d’être entendue et de connaître les arguments avancés contre elle. Le prestataire n’a pas remis en question la pertinence de l’avis d’audience de la division générale, l’échange ou la divulgation de documents avant la tenue de l’audience, la manière dont l’audience devant la division générale a été tenue, sa compréhension du processus, ou toute autre action ou procédure qui aurait nui à son droit d’être entendu ou de réfuter la preuve contre lui. Il n’a pas non plus laissé entendre que la membre de la division générale avait été partiale ou qu’elle avait préjugé de l’issue de l’affaire.

[15] Par conséquent, il n’existe pas de cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur aux termes de l’article 58(1)(a) de la Loi sur le MEDS en n’observant pas un principe de justice naturelle.

Question en litige no 2 : Peut-on soutenir que la division générale a rejeté l’appel complètement en se fondant sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte de la preuve démontrant que la Commission n’avait pas fourni au prestataire toute l’information qu’elle aurait dû lui fournir?

[16] Il y avait deux questions en litige devant la division générale. La première question en litige consistait à déterminer si la Commission avait correctement déterminé les montants reçus comme étant des gains. Le prestataire avait laissé entendre qu’une partie de sa bourse avait été comprise par erreur comme un gain, mais il était d’accord à l’audience de la division générale que la bourse avait été payée pendant une période durant laquelle il n’y avait pas de trop-payé. La division générale a déterminé que la bourse n’avait pas été comprise dans les gains déterminés par la Commission et que les sommes versées par l’employeur du 30 août 2015 au 23 avril 2016 étaient des gains. Le prestataire n’a pas prétendu devant la division d’appel que la division générale avait commis une erreur factuelle par rapport aux paiements liés à sa bourse.

[17] La deuxième question en litige consiste à déterminer si les montants ont été répartis conformément à la Loi sur l’assurance-emploi et au Règlement sur l’assurance-emploi. À la division générale, le prestataire a affirmé qu’il devrait être considéré en chômage durant les semaines où il était lié par contrat, mais il n’enseignait pas. Toutefois, le prestataire a aussi présenté un argument subsidiaire à l’effet que la Commission ne lui avait pas informé qu’il devrait demander de cesser de recevoir des prestations pendant un certain temps. Il croit qu’il aurait pu demander de cesser de recevoir des prestations pendant les périodes durant lesquelles il était lié par contrat sans travailler et que, en adoptant une telle stratégie, il aurait peut-être pu réactiver sa demande pour obtenir ses prestations au complet sans déduction de gains. Il affirme que la division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte de sa preuve démontrant qu’on ne l’avait pas bien informé et que la division générale n’avait pas envisagé de fournir une réparation pour sa situation.

[18] Peu importe si une telle stratégie avait été réaliste ou si elle avait donné le résultat visé dans les circonstances particulières du prestataire, les conseils que l’agente ou l’agent de la Commission a omis, ou non, de fournir au prestataire n’étaient pas pertinents à la question en litige devant la division générale. La compétence de la division générale était limitée à l’examen des questions décrites dans la décision issue de la révision. La division générale n’était pas autorisée à superviser de façon générale la qualité du service offert par les agentes et les agents de la Commission, ni de veiller à ce que le prestataire soit informé par la Commission de la façon de maximiser ses prestations.

[19] Le prestataire n’a soulevé aucune conclusion de fait erronée ni décrit comment une telle conclusion aurait pu avoir été tirée de façon abusive ou arbitraire ni comment elle aurait pu avoir ignoré ou mal interprété des éléments de preuve pertinents. Conformément à la directive de la Cour fédérale dans Karadeolian c Canada (Procureur général)Note de bas de page 2, j’ai aussi examiné le dossier afin d’y déceler tout autre élément de preuve qui aurait pu être ignoré ou négligé. Toutefois, je n’ai rien trouvé qui permettrait d’affirmer qu’il s’agit d’une cause défendable.

[20] Par conséquent, j’estime qu’il n’existe aucune cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur au titre de l’article 58(1)(c) en rejetant l’appel complètement, en se fondant sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des documents portés à sa connaissance.

Question en litige no 3 : Peut-on soutenir que division générale a commis une erreur de droit en s’appuyant sur la jurisprudence distincte en raison des faits ou en omettant tenant compte de la jurisprudence fournie par le prestataire?

[21] La division générale s’est appuyée sur la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) c FrenetteNote de bas de page 3, de même que dans l’affaire Bruneau c Commission, Sous-procureur général du CanadaNote de bas de page 4. Ces causes appuient le principe selon lequel les gains d’un employé lié par un contrat de service qui comprend des périodes durant laquelle l’employé n’a pas fourni de services devraient être répartis au cours de la période pour laquelle la rémunération était payable et non seulement au cours de la période durant laquelle l’employé a exercé ses fonctions. L’application de Frenette et Bruneau aux faits au dossier du prestataire exigerait que les gains du prestataire soient répartis de la semaine du 30 août 2015 au19 décembre 2015 inclusivement, et du 20 décembre 2015 au 23 avril 2016 inclusivement.

[22] Le prestataire a soutenu devant la division générale qu’il y avait lieu d’établir en quoi l’affaire Frenette était différente. Il a noté que la période d’enseignement dans Frenette n’était pas continue et périodique avec de longs retards entre chaque séance d’enseignement, alors que ses propres semestres académiques n’étaient pas périodiques et ils ne comprenaient pas de longs retards.

[23] La division générale n’a pas accepté que cette distinction était pertinente. Elle a affirmé que la décision dans Frenette était fondée sur le fait que l’appelant dans cette affaire avait reçu un salaire en paiements égaux au cours d’une période durant laquelle il enseignait pour certaines périodes seulement. Cela était aussi vrai dans les circonstances du prestataire, peu importe si ses périodes d’enseignement étaient plus continues que dans le cas de Frenette.

[24] Le prestataire n’a pas laissé entendre que l’analyse faite par la division générale de Frenette était erronée et aucune erreur ne ressort à la lecture du dossier ni autrement.

[25] Le prestataire a aussi fait valoir que la division générale avait ignoré la jurisprudence qu’il avait présentée, qui comprenait la décision 20249 du juge-arbitre du Canada sur les prestations (décision CUB), une décision du juge-arbitre dans le cadre d’un système d’appel précédent, et la décision CUB 14461.

[26] La décision CUB a fait l’objet d’un appel devant la Cour d’appel fédérale et elle a été examinée dans l’affaire Canada (Procureur général) c John Morgan, A-1200-87Note de bas de page 5. La division générale a examiné Morgan en détail, mais elle a établi en quoi elle était différente en se fondant sur le fait que dans Morgan, l’appelant n’avait pas reçu de salaire avant la date à laquelle il avait commencé à travailler. Inversement, le prestataire a reçu des paiements périodiques au cours de la période complète du contrat, y compris des périodes durant lesquelles il n’avait pas travaillé. La division générale a jugé qu’il s’agissait d’une différence importante.

[27] Les décisions CUB n’ont pas une force exécutoire sur le Tribunal de la sécurité sociale, et la division générale n’aurait pas commis une erreur de droit si elle n’avait pas appliqué une décision CUB. Peu importe, la division générale a fait référence à la décision CUB 20249 citée par le prestataire, et elle a établi en quoi elle était différente essentiellement de la même manière qu’elle avait établi que Morgan était différente. Contrairement au prestataire dans cet appel, l’appelant dans la décision CUB 20249 n’avait fourni aucun service (durant la période initiale du contrat) et n’avait reçu aucun salaire pour cette période.

[28] À part avoir affirmé que la situation factuelle dans Morgan et la décision CUB 20249 correspondait mieux aux faits de son propre dossier, le prestataire n’a pas expliqué pourquoi il croit que la division générale a commis une erreur en ne suivant pas Morgan et en concluant qu’elle devait suivre Frenette et Bruneau. De plus, le prestataire n’a pas contesté l’analyse de la division générale selon laquelle elle considérait une circonstance particulière comme était une circonstance clé : le prestataire a reçu un salaire en paiements égaux au cours d’une période pendant laquelle le prestataire avait travaillé à certains moments seulement. Cela était également vrai des circonstances de l’appelant dans Frenette, et la division générale a considéré cela comme important à l’applicabilité de Frenette. La division générale a établi en quoi l’affaire Morgan était différente parce que, comme la Cour l’a affirmé dans Morgan, aucune preuve ne démontrait que l’appelant (dans Morgan) [traduction] « avait obtenu un salaire pour une période avant la date à laquelle il a réellement commencé à travailler ».

[29] Je n’accepte pas qu’il y ait une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit au titre de l’article 58(1)(b) de la Loi sur le MEDS en suivant Frenette (et Bruneau) et en établissant en quoi l’affaire Morgan était différente. Le prestataire n’a pas expliqué comment cela pourrait constituer une erreur de droit. Pour qu’une cause soit défendable, il n’est pas nécessaire que je sois convaincu selon la prépondérance des probabilités, mais il faut tout de même quelque chose de plus que la simple affirmation du prestataire que la division générale aurait dû faire une chose plutôt qu’une autre.

[30] Il n’existe aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[31] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

H. M., non représenté

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