Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appelante, C. B., est la prestataire dans le présent appel. Son appel est accueilli. Il en résulte que la prestataire est admissible à des prestations parce qu’elle a prouvé qu’elle était fondée à choisir de quitter son emploi. Les présents motifs expliquent pourquoi.

Aperçu

[2] La prestataire travaillait comme enseignante. Elle est membre d’une Première Nation. Elle a subi des blessures lors d’une collision automobile en novembre 2017. Elle a commencé à souffrir de stress et d’anxiété après sa blessure. Ces problèmes se sont aggravés et elle a développé une dépression après le décès soudain de sa sœur en mars 2018.

[3] La prestataire a démissionné de son emploi pour entreprendre un processus de guérison axé sur les traditions de sa Première Nation. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (que j’appelle la Commission dans la présente décision) a déterminé qu’elle n’avait pas démontré qu’elle était fondée à choisir de quitter son emploi. La Commission a maintenu sa décision après réexamen. La prestataire a interjeté appel au Tribunal.

Questions préliminaires

[4] Le Tribunal peut tenir des audiences au moyen de questions et réponses écritesNote de bas de page 1. La prestataire a demandé au Tribunal de tenir son audience de cette façon. Nous avons inclus une série de questions auxquelles la prestataire devait répondre dans l’avis d’audience émis le 7 juin 2019. Nous avons envoyé l’avis d’audience à la prestataire par Xpresspost à l’adresse indiquée dans son avis d’appel. Les dossiers de Postes Canada indiquent que l’avis d’audience a été remis à la prestataire le 25 juin 2019.

[5] Nous avons demandé à la prestataire de répondre aux questions dans son avis d’audience au plus tard le 27 juin 2019. Étant donné qu’elle devait répondre au plus tard deux jours après que Postes Canada lui ait remis l’avis d’audience, nous avons tenté de communiquer avec la prestataire pour lui donner plus de temps pour répondre. Nous avons tenté de communiquer avec elle par téléphone les 3 et 4 juillet 2019, mais elle n’a pas répondu à ces appels.

[6] Si un prestataire ne se présente pas à l’audience, je peux rendre une décision en son absence si je suis convaincu qu’il a reçu l’avis d’audienceNote de bas de page 2. Les dossiers de Postes Canada que j’ai mentionnés ci-dessus indiquent que la prestataire a reçu l’avis d’audience le 25 juin 2019. Je conclus donc que la prestataire a reçu l’avis d’audience.

[7] Pour les motifs qui précèdent, j’ai rendu ma décision concernant l’appel de la prestataire en son absence, comme le permet le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[8] Je dois décider si la prestataire était fondée à quitter son emploi en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi. Je dois déterminer :

  1. si la prestataire a quitté volontairement son emploi;
  2. et, dans l’affirmative, si l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi compte tenu des circonstances entourant sa décision d’entreprendre son processus de guérison.

Analyse

[9] L’assurance-emploi verse des prestations aux personnes qui perdent involontairement leur emploi et qui sont sans travailNote de bas de page 3. La Commission exclut un prestataire du bénéfice des prestations s’il est incapable de démontrer qu’il était fondé à choisir de quitter son emploiNote de bas de page 4.

[10] La Commission doit prouver que la prestataire avait le choix de demeurer en poste, mais qu’elle a choisi de partir. Si je conclus que la Commission s’est acquittée de cette obligation, la prestataire doit alors prouver qu’elle était fondée à quitter son emploiNote de bas de page 5.

La prestataire a choisi de quitter son emploi

[11] La prestataire a déclaré dans son avis d’appel qu’elle avait démissionné. Elle n'a pas contesté qu’elle avait choisi de le faire. Je conclus donc que la prestataire a choisi de quitter volontairement son emploi conformément à la Loi sur l’assurance-emploi.

La prestataire était fondée à quitter son emploi

[12] La prestataire était fondée à quitter son emploiNote de bas de page 6. La Loi sur l’assurance-emploi énumère les circonstances que les décideurs doivent prendre en considération au moment de déterminer si un prestataire était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 7. La liste n’étant pas exhaustive, je dois donc soupeser chaque circonstance pour déterminer si la prestataire a établi qu’elle était fondée à quitter son emploiNote de bas de page 8. Le prestataire doit prouver que toutes les circonstances, énumérées ou non, démontrent qu’il est plus probable que le contraire qu’il n’avait pas d’autre solution de rechange raisonnable que de quitter son emploiNote de bas de page 9.

[13] La Commission affirme que la prestataire disposait de solutions de rechange raisonnables, par exemple explorer avec son employeur les options de congé qui s’offraient à elle et discuter de ses problèmes de stress, d’anxiété et de dépression avec un médecin. La prestataire affirme que ses actions démontrent qu’elle a épuisé toutes les solutions de rechange raisonnables avant de quitter son emploi.

[14] Les décideurs, moi et la Commission y compris, doivent évaluer le caractère raisonnable des solutions de rechange qui s’offraient à la prestataire selon une norme objective éclairée par l’appréciation subjective de la prestataire de ses circonstancesNote de bas de page 10.

[15] La prestataire a subi des blessures lors d’une collision automobile en novembre 2017. Ses blessures ont limité sa mobilité. Son médecin lui a recommandé d’accomplir des tâches légères au travail et d’éviter d’utiliser les escaliers. Son employeur a tenu compte de ses limitations au chapitre de la mobilité. Après la collision, la prestataire a commencé à trouver son aller simple de 90 minutes au travail stressant.

[16] La prestataire a également déclaré qu’elle est devenue plus anxieuse et a développé une dépression après le décès soudain de sa sœur en mars 2018. Elle a choisi de ne pas consulter un médecin pour faire traiter ces problèmes. Elle a plutôt choisi de les traiter en demandant à des aînés de l’aider à entreprendre un processus de guérison axé sur les traditions de sa Première Nation. Elle a dit à la Commission qu’un processus de guérison axé sur les traditions de sa Première Nation pourrait prendre jusqu’à un an.

[17] La prestataire a déclaré qu’elle avait demandé conseil à son syndicat sur la façon de prendre congé de son emploi afin d’entreprendre son processus de guérison. On lui a dit que démissionner était la meilleure chose à faire.

[18] L’employeur de la prestataire a dit à la Commission que la prestataire avait le droit de prendre un congé de maladie et de demander des prestations d’invalidité de longue durée. La prestataire a déclaré qu’elle ignorait que son employeur lui avait offert ces prestations lorsque la Commission a discuté de cette solution de rechange avec elle le 28 juin 2018.

[19] Cette preuve démontre que la prestataire a exploré les solutions de rechange qui, selon la Commission, s’offraient raisonnablement à elle.

[20] La prestataire doit satisfaire à la norme objective qui consiste à demander un traitement pour ses problèmes de stress, d’anxiété et de dépression. Lorsqu’un prestataire a le choix entre deux traitements pour traiter un problème de santé, la Commission ne peut affirmer qu’en choisissant l’un plutôt que l’autre le prestataire n’a pas épuisé toutes les solutions de rechange raisonnables.

[21] L’affirmation de la Commission selon laquelle la prestataire aurait pu opter pour la solution de rechange raisonnable de consulter un médecin pour discuter de ses problèmes de stress, d’anxiété et de dépression ne tient pas compte de la valeur thérapeutique d’un processus de guérison axé sur les traditions des Premières Nations.

[22] Éclairée par son appréciation subjective de sa situation, la prestataire a choisi un processus de guérison axé sur les traditions de sa Première Nation pour régler ses problèmes de stress, d’anxiété et de dépression. Entre les deux traitements qui s’offraient à elle, la prestataire a opté pour le processus de guérison. Ce choix m’apparaît raisonnable. Par conséquent, je conclus que la prestataire a épuisé les options raisonnables de traitement qui s’offraient à elle pour ses problèmes de santé. Le fait qu’elle n’ait pas choisi la voie que la Commission affirme qu’elle aurait pu emprunter pour traiter ses problèmes ne signifie pas qu’elle n’a pas épuisé toutes les solutions de rechange raisonnables.

[23] La prestataire doit également satisfaire à la norme objective qui consiste à envisager les options de congé et les prestations de remplacement du revenu offertes par son employeur.

[24] Éclairée par son appréciation subjective de sa situation, la prestataire croyait que son syndicat pouvait lui donner des conseils appropriés sur ses options de congé et sur les questions connexes. Son témoignage montre qu’elle a consulté son syndicat au sujet des options de congé offertes à son lieu de travail avant d’entreprendre son processus de guérison. Son syndicat lui a dit que démissionner était sa meilleure option.

[25] La preuve au dossier d’appel n’explique pas pourquoi la prestataire a choisi de parler à son syndicat au lieu de parler directement à son employeur des options de congé qui s’offraient à elle, le cas échéant. De plus, cette preuve n’explique pas pourquoi son syndicat croyait que de démissionner était sa meilleure option.

[26] Toutefois, le langage que la prestataire a utilisé selon les notes concernant sa conversation du 28 juin 2018 avec un agent de la Commission suggère qu’elle et son syndicat ont soupesé les options qui s’offraient à elle avant qu’elle choisisse de démissionner. Cela montre que la prestataire a discuté avec son syndicat des options de congé que son employeur pouvait lui offrir. Par conséquent, je conclus que la prestataire a épuisé la solution de rechange raisonnable consistant à examiner les options de congé et de prestations de remplacement du revenu qui s’offraient à elle.

[27] Compte tenu de la preuve, je conclus qu’il est plus probable que le contraire que la prestataire n’avait pas d’autres solutions de rechange raisonnables que de quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait.

Conclusion

[28] L’appel est accueilli.

 

Mode d’instruction :

Sur la foi du dossier

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