Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] J’accueille l’appel. Je conclus que l’appelant (que j’appelle ci-après le prestataire) n’a pas quitté volontairement son emploi chez X (X) lorsqu’il a demandé à prendre des vacances peu après avoir commencé à travailler. Cela signifie qu’il n’est pas exclu du bénéfice des prestations supplémentaires d’assurance-emploi (AE) pour avoir quitté son emploi volontairement.

Aperçu

[2] Après que le prestataire eut reçu des prestations régulières d’AE, l’intimée (que j’appelle ci-après la Commission) lui a dit qu’il pouvait obtenir les semaines de prestations supplémentaires offertes aux prestataires dans certaines régions où le chômage est élevéNote de bas page 1. La Commission lui a également dit qu’il devait déclarer s’il avait quitté un emploi entre la fin de ses prestations régulières et le 3 juillet 2016, date à laquelle ses semaines supplémentaires commenceraient. Il n’a pas déclaré avoir travaillé chez X.

[3] La Commission a découvert par la suite que le prestataire avait travaillé pour cette entreprise du 6 au 29 juin 2016. La Commission s’est penchée sur la raison pour laquelle l’emploi avait pris fin et a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification. Sa décision signifiait qu’il était exclu du bénéfice de ses semaines supplémentaires de prestations et qu’il devait les rembourser.

[4] Le prestataire a interjeté appel à l’encontre de la conclusion de départ volontaire, en faisant valoir que son employeur l’avait congédié lorsqu’il avait demandé de prendre une semaine de congé pour des vacances prévues antérieurement. Il a soutenu que l’employeur n’était pas satisfait de son rendement au travail et s’était servi de sa demande de vacances comme excuse pour le congédier.

Questions préliminaires

[5] Après l’audience, le 5 juillet 2019, le prestataire a présenté une demande de clarification de son trop-payé. J’ai renvoyé cette question à la Commission. Le 11 juillet 2019, il a demandé d’interjeter appel à l’encontre de toutes les questions relatives à son trop-payé. Toutefois, la seule question dont je suis saisie est son appel de la décision de la Commission sur son départ volontaire d’X.

Questions en litige

[6] Je dois décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi ou si l’employeur l’a congédié. Si je conclus que l’employeur l’a congédié, je dois décider s’il a été congédié pour inconduite en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

Analyse

Départ volontaire

[7] La loi prévoit que vous ne pouvez pas recevoir de prestations si vous quittez volontairement votre emploi sans justificationNote de bas page 2. La Commission doit d’abord démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que vous avez quitté volontairement votre emploi. Vous quittez volontairement si vous aviez le choix de rester ou de partirNote de bas page 3.

[8] Si la Commission prouve que vous avez quitté volontairement, il vous appartient de prouver que vous aviez un motif valable de partir. Vous pouvez démontrer un motif valable si, compte tenu de toutes les circonstances, vous n’aviez pas d’autre solution raisonnable que de partir quand vous l’avez faitNote de bas page 4.

Inconduite

[9] Il peut ne pas être clair que vous ayez quitté volontairement votre emploi ou que votre employeur vous ait congédiéNote de bas page 5. Parfois, un employeur décide que les actes d’un prestataire justifient un congédiement et il consigne ce motif de cessation d’emploi sur le relevé d’emploi (RE). Toutefois, cette note sur votre RE ne prouve pas que vous avez été congédié pour inconduite au sens de la Loi sur l’AE.

[10] Pour prouver l’inconduite, la Commission doit d’abord déterminer les actes qui ont causé votre congédiement et démontrer que vous les avez commisNote de bas page 6. Elle doit ensuite démontrer que ces actes étaient délibérés et que vous avez manqué à votre devoir envers votre employeur. De plus, vous deviez ou auriez dû savoir que vos actes entraîneraient votre congédiementNote de bas page 7.

Le prestataire a-t-il quitté volontairement son emploi ?

[11] Non. Je conclus que le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. Vous quittez volontairement lorsque vous avez le choix de rester ou de partirNote de bas page 8. Je conclus qu’il n’a pas eu ce choix après que l’employeur l’a congédié et a refusé de le reprendre.

[12] L’employeur a émis un relevé d’emploi indiquant que le prestataire avait été « congédié » pendant sa période probatoire. L’employeur a déclaré qu’il avait congédié le prestataire après que celui-ci eut soulevé la question de ses vacances. L’employeur a interprété leur conversation comme signifiant que le prestataire avait décidé de prendre ses vacances de toute façon même s’il savait parfaitement que la politique de l’entreprise ne l’autorisait pas et qu’il serait congédié. La Commission a accepté le compte rendu de cette conversation fait par l’employeur, mais le prestataire conteste cette interprétation de ses intentions.

[13] J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire ait témoigné de façon fiable lorsqu’il a fait valoir qu’il n’aurait pas risqué son emploi pour se rendre à une réunion de famille. Je note que ses prestations régulières venaient de prendre fin. Il ne savait pas encore qu’il était admissible à des semaines supplémentaires de prestations, car la Commission lui a envoyé sa lettre d’avis sur cette question après sa dernière journée de travail chez X.

[14] J’estime qu’une barrière linguistique pourrait expliquer la conclusion de l’employeur selon laquelle le prestataire allait partir en vacances de toute manière, même si cela signifiait qu’il perdrait son emploi. Les difficultés linguistiques du prestataire en anglais parlé pourraient également expliquer sa croyance erronée, après son entrevue, qu’il serait en mesure de prendre congé malgré la politique de l’entreprise exigeant d’abord un an de service. J’ai noté à l’audience que ses habiletés de communication étaient limitées, même avec l’aide d’un interprète.

[15] Les politiques écrites de l’entreprise stipulent également qu’aucun employé ne peut prendre congé pendant l’été, soit la période de pointe de l’entreprise. Toutefois, vous devez être en mesure de lire l’anglais pour comprendre ces politiques. Comme je l’ai déjà mentionné, la connaissance de l’anglais par le prestataire est limitée.

[16] Bien que le prestataire ait été malavisé de soulever la question de sa semaine de vacances prévue antérieurement, il n’y a aucune preuve qu’il a démissionné de son emploi. J’accepte son témoignage sous serment selon lequel, lorsqu’il s’est rendu compte qu’il serait congédié s’il prenait une semaine de congé, il a immédiatement offert de renoncer à ses vacances. Il a témoigné qu’il n’était pas parti en vacances après avoir perdu son emploi.

[17] Compte tenu de ces facteurs, je conclus que le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. Son employeur l’a congédié. Par conséquent, je n’ai pas à décider s’il était justifié de quitter son emploi.

L’employeur a-t-il congédié le prestataire pour inconduite ?

[18] Non. Je conclus que l’acte invoqué par l’employeur comme motif du congédiement du prestataire ne satisfait pas au critère juridique de l’inconduite en vertu de la Loi sur l’AE.

[19] Le prestataire a témoigné que l’employeur lui avait demandé de fabriquer une porte le jour de son congédiement et n’avait pas été satisfait de ses efforts. Lorsque le prestataire a soulevé par la suite la question de ses vacances à venir, l’employeur s’est fâché et l’a congédié. Le prestataire a soutenu que sa demande de vacances n’était pas la véritable raison de son congédiement. Il croit que l’employeur l’a congédié parce qu’il ne pouvait pas fabriquer une porte correctement.

[20] J’estime que le témoignage du prestataire jette un doute considérable sur la raison de son congédiement. Pour qu’une inconduite soit démontrée en vertu de la Loi sur l’AE, la raison fournie par l’employeur doit être le véritable motif du congédiement et non une excuseNote de bas page 9.

[21] Même dans l’éventualité où j’accepterais que l’employeur ait congédié le prestataire en raison de sa demande de vacances, je conclus que cette action ne prouve pas qu’il y a eu inconduite. La présentation de cette demande n’était pas un acte délibéré, même si elle contrariait l’employeur durant la période de pointe de l’entreprise. Le fait de prendre un congé sans autorisation constituerait un manquement à la politique de la compagnie et au devoir du prestataire envers son employeur, mais j’accepte son témoignage selon lequel il a déclaré à l’employeur qu’il était prêt à ne pas prendre ces vacances. La compagnie avait des politiques écrites sur les vacances, mais j’estime qu’il est plus probable qu’improbable que les compétences du prestataire en anglais étaient trop limitées pour qu’il comprenne la menace de congédiement jusqu’à ce qu’il soit effectivement congédié.

[22] Je conclus également, selon la prépondérance des probabilités, que la barrière linguistique à laquelle fait face le prestataire explique les incohérences entre ce qu’il avait dit auparavant à la Commission et ce qu’il a déclaré par la suite à l’audience.

[23] La Commission a soutenu que les déclarations initiales spontanées du prestataire étaient plus crédibles que ses déclarations postérieures au refus de ses prestationsNote de bas page 10. Je serais généralement d’accord avec une telle observation, mais en l’espèce, j’accorde plus de poids aux déclarations ultérieures du prestataire. Lorsqu’il a fait ces déclarations, il bénéficiait de l’aide d’un interprète et il avait l’avantage d’avoir des interactions en personne avec moi au cours d’une audience par vidéoconférence. J’estime que ce témoignage est plus fiable que les déclarations qu’il a faites initialement au cours de conversations téléphoniques avec la Commission, sans l’aide d’un interprète.

[24] Compte tenu de ces facteurs, je conclus que, même si l’employeur a congédié le prestataire, il ne l’a pas congédié pour inconduite en vertu de la Loi sur l’AE. Une exclusion pour ce motif ne s’applique pas.

Conclusion

[25] Je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des semaines supplémentaires de prestations à cause de son congédiement d’X. Cela signifie que l’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

28 juin 2019

Vidéoconférence

H. L., appelant

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