Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel. Je conclus que l’appelante (que j’appelle ci-après la prestataire) a quitté volontairement son emploi. Je conclus également qu’elle n’était pas fondée à quitter son emploi puisqu’elle disposait de solutions de rechange raisonnables. Cela signifie qu’elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi (AE).

Aperçu

[2] La prestataire a quitté son emploi de commis aux comptes créditeurs et a présenté une demande de prestations régulières d’AE. La Commission a examiné les motifs de son départ et a décidé qu’elle avait quitté volontairement son emploi sans justification. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[3] La prestataire n’est pas d’accord. Elle soutient que l’employeur l’a congédiée lorsqu’il a affiché un avis de poste vacant dont la description de travail était la sienne. Elle affirme que l’employeur voulait la congédier parce qu’elle s’était plainte de devoir attendre six mois pour adhérer au régime d’avantages sociaux, alors que d’autres n’avaient qu’à attendre trois mois. Elle s’était également plainte de sa charge de travail accrue sous la direction du nouveau propriétaire de l’entreprise.

Questions préliminaires

[4] Après l’audience, le 16 juillet 2019, la prestataire a soumis une observation supplémentaire. J’ai accepté cette observation comme étant pertinente à son appel et je l’ai incluse dans mon examen de sa situation.

Question en litige

[5] Je dois décider si la prestataire a quitté son emploi volontairement ou si son employeur l’a congédiée. Si je conclus qu’elle a quitté volontairement son emploi, je dois alors décider si elle était fondée à le faire.

Analyse

[6] Lorsque vous quittez un emploi, vous n’avez pas automatiquement droit à des prestations d’AE. La loi dit que vous êtes exclue du bénéfice des prestations si vous quittez volontairement votre emploi sans justificationNote de bas de page 1. Le fait d’avoir une bonne raison de partir n’est pas suffisant pour prouver l’existence d’une justificationNote de bas de page 2.

[7] La Commission doit d’abord prouver que vous avez quitté volontairement votre emploi. Il vous appartient ensuite de démontrer que vous étiez fondée à partir. Vous pouvez démontrer une justification si, compte tenu de toutes les circonstances, vous n’aviez d’autre solution raisonnable que de partir quand vous l’avez faitNote de bas de page 3.

La prestataire a-t-elle quitté volontairement son emploi ou son employeur l’a-t-il congédiée?

[8] Je conclus que la prestataire a quitté volontairement son emploi parce qu’elle aurait pu rester employéeNote de bas de page 4. Le critère juridique pour déterminer si vous quittez volontairement votre emploi est de savoir si vous aviez ce choix ou non.

[9] La prestataire soutient que la compagnie a démontré qu’elle la congédiait en affichant un avis d’offre de son emploi le soir du 7 mars 2019, après sa conversation avec sa gestionnaire cet après-midi-là. Elle croit que l’offre d’emploi était la réponse de l’employeur à ses plaintes selon lesquelles elle devait attendre six mois pour bénéficier du régime d’avantages sociaux. Elle ne croit pas que l’employeur embauchait quelqu’un pour l’aider. Elle dit qu’elle n’avait d’autre choix que de partir parce que la gestionnaire avait l’intention de la remplacer.

[10] Il n’y a aucune preuve que l’employeur l’a congédiée ou avait l’intention de la congédier. L’affichage du poste n’était pas un avis de congédiement. Il n’y a aucune preuve de mesures disciplinaires antérieures comme des lettres d’avertissement au sujet d’un mauvais rendement. La prestataire a témoigné que la gestionnaire était [traduction] « arrogante » lors de leur dernière rencontre, mais qu’elle n’avait pas menacé de la congédier. La gestionnaire lui a dit qu’elle ferait part de ses préoccupations au président et qu’elle lui transmettrait la réponse de celui-ci.

[11] Je conclus que c’est la prestataire qui a mis fin à son emploi le 8 mars 2019 en envoyant un courriel au président et au vice-président (VP) de la compagnie annonçant sa démission. Elle a agi ainsi même après qu’un chef de bureau lui eut assuré le matin même que l’affichage de l’avis de poste vacant n’avait pas pour but de la remplacer.

[12] La prestataire n’a pas attendu la réponse de sa supérieure immédiate à leurs discussions de l’après-midi précédent. Elle s’était attendue à une réponse immédiate, mais elle a ensuite vu l’offre d’emploi. Selon ses dires, elle pensait que le président et le vice-président lui demanderaient de rester après qu’elle leur eut envoyé sa démission par courriel, mais sa stratégie a échoué. Ils ne lui ont pas répondu.

[13] Je conclus que la prestataire a quitté volontairement son emploi. Son employeur ne l’a pas congédiée le 8 mars 2019. Elle a écarté toute possibilité que la compagnie la congédie plus tard en démissionnant d’abord.

L’appelante était-elle fondée à quitter volontairement son emploi?

[14] Non. Je conclus qu’elle n’avait pas de justification parce qu’elle disposait d’autres solutions raisonnables plutôt que de quitter son emploi quand elle l’a fait. La loi dit que vous pouvez démontrer l’existence d’une justification si vous n’aviez aucune autre solution raisonnable que de démissionner, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 5. C’est à vous de le prouverNote de bas de page 6.

Pourquoi la prestataire a-t-elle quitté son emploi?

[15] Bien que la prestataire ait nié avoir quitté volontairement son emploi, j’ai tenu compte de ses observations sur les raisons pour lesquelles elle a démissionné le 8 mars 2019, afin d’évaluer toutes ses circonstances à ce moment-là.

[16] J’estime que le fait d’avoir à attendre pour bénéficier du régime d’avantages sociaux de l’entreprise était la principale raison de sa décision de démissionner après avoir vu l’offre d’emploi affichée. Elle m’a dit qu’en dépit de sa charge de travail accrue, elle ne serait pas partie si elle avait pu adhérer immédiatement au régime. Elle estime que l’employeur l’a traitée injustement. Bien qu’elle n’en ait aucune preuve, elle croit être la seule employée qui devait attendre six mois. Les nouveaux employés obtenaient une protection après trois mois.

[17] La prestataire a fait état d’un antagonisme avec sa supérieure immédiate, qui avait été [traduction] « arrogante » lors de leur dernière rencontreNote de bas de page 7. Elle s’est plainte d’avoir une charge de travail plus lourde que tout autre employé. Elle devait donc travailler pendant sa pause-repas et faire des heures supplémentairesNote de bas de page 8. Elle estimait également que sa gestionnaire l’obligeait à partirNote de bas de page 9. La loi permet que de telles circonstances puissent justifier l’abandon d’un emploi, mais vous devez quand même démontrer que vous avez d’abord essayé toutes les solutions raisonnables autres que le départ.

La prestataire avait-elle d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi?

[18] Oui. Elle soutient qu’elle n’avait d’autre choix que de démissionner une fois qu’elle a vu l’offre d’emploi affichée, mais je conclus qu’elle avait plusieurs solutions de rechange raisonnables plutôt que de démissionner lorsqu’elle l’a fait.

[19] Je suis d’accord avec les observations de la Commission selon lesquelles la prestataire aurait pu attendre que sa gestionnaire lui communique la réponse aux préoccupations qu’elle avait soulevées le 7 mars 2019. Le prestataire s’attendait à recevoir une réponse le même jour. Elle a démissionné lorsque, n’ayant eu aucune réponse, elle a vu l’offre d’emploi.

[20] La prestataire a démissionné même si le chef de bureau lui avait déjà dit ce matin-là que l’avis de poste vacant ne constituait pas une mesure pour la remplacer, mais bien une offre d’emploi pour une personne supplémentaire. La prestataire n’a pas cru cela. À son avis, le service des comptes n’avait pas besoin d’aide supplémentaire. Elle a découvert par la suite que l’employeur n’avait pas embauché de personne supplémentaire après son départ. Elle soutient que cela prouve que la gestionnaire avait bel et bien affiché son poste comme étant vacant le 7 mars 2019 parce que l’entreprise prévoyait la remplacer.

[21] Je conclus que ce que la compagnie a pu faire ensuite pour répondre à ses propres besoins opérationnels à ce moment-là n’est pas pertinent en l’espèce. Je ne peux tenir compte que des circonstances qui existaient quand la prestataire a décidé de quitter son emploi.

[22] Je conclus qu’elle a pris un risque lorsqu’elle a démissionné parce qu’elle était d’avis que l’offre d’emploi équivalait à un avis de congédiement. Les prestataires ont la responsabilité de ne pas risquer de se trouver en chômageNote de bas de page 10. C’est pourquoi protéger votre emploi en le conservant est une solution de rechange raisonnable au départNote de bas de page 11.

[23] Les employés doivent faire part de leurs préoccupations à leur employeur avant de partir pour voir si elles peuvent être résoluesNote de bas de page 12. Lorsqu’on soulève des préoccupations, il faut prévoir un délai raisonnable pour l’obtention d’une réponse. J’accepte que la prestataire a discuté de ses préoccupations avec sa gestionnaire. Toutefois, elle n’a pas attendu de recevoir une réponse à leur rencontre du 7 mars 2019.

[24] Je conclus que la prestataire aurait pu attendre pour vérifier le bien-fondé de sa conviction que l’employeur la remplaçait, plutôt que de démissionner moins de 24 heures après cette dernière rencontre. Le matin du 8 mars 2019, le chef de bureau avait tenté de la rassurer sur le fait que l’employeur ne la remplaçait pas, mais la prestataire a démissionné de toute façon. Quoi qu’elle ait pu craindre, l’employeur ne l’a pas congédiée.

[25] La prestataire aurait également pu attendre de trouver un autre emploi, en tant que solution de rechange raisonnable à sa démission au moment où elle a remis celle-ci. Elle savait qu’elle était insatisfaite de son emploi. Elle considérait sa charge de travail comme trop lourde après que la compagnie eut changé de mains et elle était mécontente du régime d’avantages sociaux. Elle n’a signalé aucun nouveau problème qui l’ait obligée à partir, si ce n’est son choc de voir l’offre d’emploi. Elle a dit avoir cherché un autre emploi, mais elle savait qu’elle n’en avait pas lorsqu’elle a démissionné.

[26] La prestataire a déclaré qu’elle se sentait désespérée à l’idée de rester dans son emploi et qu’elle craignait de devenir déprimée. Elle croyait que l’emploi était mauvais pour elle, mais elle n’a pas consulté un médecin pour obtenir des conseils sur la question de savoir si elle devrait partir ou non. L’obtention de conseils médicaux aurait été une autre solution raisonnable plutôt que de démissionner.

[27] Elle aurait également pu demander un congé pour composer avec son état de choc et de stress et avoir le temps de réfléchir à sa situation. À la date de son départ, elle n’était qu’à six semaines de la fin de sa période probatoire et de son admissibilité au régime d’avantages sociaux.

[28] Comme la prestataire disposait de ces solutions raisonnables au lieu de quitter son emploi, elle n’était pas fondée à démissionner lorsqu’elle l’a fait. En conséquence, elle ne peut pas toucher de prestations.

Conclusion

[29] Je conclus que la prestataire est exclue du bénéfice des prestations. Cela signifie que l’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

11 juillet 2019

En personne

Q. G., appelante

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.