Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] C. L. est le prestataire en l’espèce. À la fin d’avril 2016, il a présenté une demande initiale de prestations régulières d’assurance-emploi (AE)Note de bas de page 1. Des rapports hebdomadaires ont été présentés et des prestations ont ensuite été versées au cours des semaines et des mois qui ont suivi.

[3] Toutefois, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a par la suite appris que le prestataire avait reçu des revenus d’emploi et des prestations d’AE en même temps pendant 12 semaines entre mai et août 2016. Par conséquent, la Commission a demandé au prestataire de rembourser les prestations qu’il avait touchées durant cette période. La Commission a aussi infligé une pénalité et remis un avis de violation au prestataire, mais elle a ensuite annulé l’avis de violation.

[4] D’un côté, le prestataire a nié avoir touché des prestations d’AE. Il affirme plutôt que son ex-épouse doit avoir demandé et touché ces prestations sans qu’il soit au courant ou sans son consentement. Ils se sont séparés en mai 2016, le mois après qu’elle l’a aidé à présenter sa demande de prestations initiale.

[5] D’un autre côté, la Commission soutient que le prestataire était responsable de la gestion de son dossier et de la protection du code d’accès confidentiel utilisé pour demander ses prestations. La Commission n’est toujours pas convaincue qu’une autre personne a touché les prestations d’AE du prestataire.

[6] Cependant, pour des raisons que le prestataire a expliquées, cela lui a pris beaucoup de temps pour rassembler les éléments de preuves dont il avait besoin contre son ex-épouse. Il dit que le personnel de la Commission lui a donné divers conseils et qu’il a fait de son mieux pour les suivre. Mais cela ne semblait jamais être assez.

[7] Finalement, le personnel de la Commission a dit au prestataire que sa seule option était de porter en appel devant la division générale du Tribunal la décision découlant de la révision de la Commission, mais son appel a été déposé avec plus d’un an de retard. La division générale a donc conclu qu’elle ne pouvait aucunement prolonger le délai prévu pour que le prestataire présente son appel. Cela signifie que la division générale n’a pas été en mesure d’évaluer le fond de sa cause.

[8] Le prestataire demande maintenant la permission d’interjeter appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Mais mon rôle est très limité; je peux seulement déterminer si la division générale a commis une des trois erreurs possibles lorsqu’elle a pris sa décision. En fin de compte, j’ai conclu que l’appel du prestataire n’avait aucune chance raisonnable de succès. En conséquence, je dois rejeter sa demande de permission d’en appeler.

[9] Au risque de retourner le prestataire dans un labyrinthe bureaucratique, je vais tout de même mentionner quelques options qui pourraient toujours s’offrir à lui dans ces circonstances difficiles.

Question en litige

[10] Le prestataire a-t-il soulevé une cause défendable grâce à laquelle il pourrait avoir gain de cause en appel?

Analyse

[11] Le Tribunal suit les dispositions et la procédure énoncées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Cet appel suit donc un processus en deux étapes, soit l’étape de la permission d’en appeler et l’étape de l’examen sur le fond. L’appel passe à l’étape de l’examen sur le fond, à moins qu’il n’ait aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2.

[12] Le critère juridique auquel le prestataire doit répondre à l’étape de la permission d’en appeler est peu exigeant : existe-t-il un motif défendable qui conférerait à l’appel une chance raisonnable de succès?Note de bas de page 3 Pour trancher cette question, je peux seulement évaluer si la division générale a commis une des trois erreurs énumérées dans la Loi sur le MEDSNote de bas de page 4.

Le prestataire a-t-il soulevé une cause défendable grâce à laquelle il pourrait avoir gain de cause en appel?

[13] Je comprends les arguments du prestataire, mais ils sont tous liés au fond de sa cause. Toutefois, la division générale n’a jamais évalué le fond de la cause parce que le prestataire a présenté son appel avec plus d’un an de retard. La division générale n’a aucun pouvoir discrétionnaire dans des cas comme celui-ci : la Loi sur le MEDS l’empêche d’analyser en profondeur les arguments du prestataireNote de bas de page 5.

[14] Malgré cette conclusion, je suis allé au-delà du cadre de la demande que le prestataire a présentée à la division d’appel et j’ai évalué s’il était possible que la division générale ait mal interprété ou omis d’évaluer adéquatement un élément de preuve pertinentNote de bas de page 6 . Si c’était le cas, j’accorderais la permission d’en appeler, peu importe les problèmes techniques présents dans les documents écrits du prestataire.

[15] En bref, la division générale a conclu que le prestataire avait reçu la décision découlant de la révision de la Commission le 21 juin 2017 ou vers cette date. Elle a aussi conclu que le prestataire avait déposé son appel devant la division générale le 29 avril 2019. Le prestataire ne conteste pas ces dates. Effectivement, la preuve les démontre bien. Comme plus d’un an sépare ces dates, la division générale n’avait d’autre choix que de conclure que l’appel ne pouvait aller de l’avant.

[16] Je suis convaincu que, lorsqu’elle a tiré cette conclusion, la division générale n’a ni mal interprété ni omis d’évaluer adéquatement un élément de preuve.

[17] Par conséquent, l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès et sa demande de permission d’en appeler doit être rejetée.

Quelles sont les autres options qui s’offrent au prestataire?

[18] Bien que je n’aie d’autre choix que de refuser la permission d’en appeler en l’espèce, j’ai l’impression regrettable que les allégations de fraude du prestataire à propos de son ex-épouse n’ont jamais été pleinement examinées.

[19] Néanmoins, des décisions précédentes ont reconnu que le prestataire ne devrait pas avoir à rembourser des prestations qui ont été frauduleusement touchées par son ex-épouse. Pour prouver sa thèse, le prestataire doit démontrer qu’il n’a jamais reçu les prestations et qu’elles ont été obtenues sans qu’il le sacheNote de bas de page 7.

[20] À ce sujet, je fais remarquer que l’ex-épouse du prestataire l’a aidé à présenter sa demande initiale de prestations d’AENote de bas de page 8. Il n’est donc pas surprenant qu’elle ait pu avoir accès à toute l’information dont elle aurait eu besoin pour aussi présenter d’autres demandes.

[21] De plus, le prestataire déclare ce qui suit :

  1. des détails concernant ses renseignements bancaires ont été modifiés dans son compte d’AE à l’époque de sa séparation;
  2. le nouveau compte de banque appartenait seulement à son ex-épouseNote de bas de page 9;
  3. contrairement à ce que le personnel de la Commission a dit au prestataire, sa banque lui a confirmé que des prestations d’AE à son nom auraient pu avoir été déposées dans un compte qui porte le nom d’une autre personneNote de bas de page 10.

[22] Finalement, en ce qui concerne la recommandation faite au prestataire de signaler à la police les activités frauduleuses de son ex-épouse, le prestataire a affirmé qu’il avait essayé de le faire, mais que la police avait refusé de se mêler de ce qu’elle percevait comme étant un problème conjugalNote de bas de page 11.

[23] Toutefois, le prestataire a présenté tous ces renseignements longtemps après que la Commission a rendu sa décision découlant de la révision. Par conséquent, le personnel de la Commission a dit au prestataire que son seul recours était de porter cette décision en appel devant la division générale du TribunalNote de bas de page 12. Malheureusement, l’appel du prestataire avait déjà plus d’un an de retard.

[24] Malgré tout, l’article 111 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) permet à la Commission de rouvrir un dossier si des faits nouveaux lui sont présentésNote de bas de page 13. C’est ce qui est parfois nommé une demande relative aux faits nouveaux. Cependant, dans ce contexte, les tribunaux ont donné une interprétation très stricte à l’expression « faits nouveaux ».

[25] J’admets que la Commission peut déjà avoir rendu au moins une décision au titre de l’article 111 de la Loi sur l’AE. Bien que cet article ne soit pas mentionné précisément, cette décision se trouve dans une lettre datée du 15 avril 2019Note de bas de page 14.

[26] Certes, je trouve qu’il est un peu étrange que le seul recours mentionné dans la lettre de la Commission du 15 avril 2019 était un appel au Tribunal. Je ne suis pas directement saisi de cette question, mais je crois comprendre que le prestataire pourrait aussi demander à la Commission de réviser la décision relative à l’article 111 qui se trouve dans sa lettre du 15 avril 2019Note de bas de page 15.

[27] Alors, si le prestataire est insatisfait de la décision découlant de la révision de la Commission, il aurait alors droit à un nouvel appel devant la division générale du Tribunal, même si cela se limitait au sujet traité dans la décision découlant de la révisionNote de bas de page 16.

[28] En plus de demander à la Commission de réviser sa décision du 15 avril 2019, le prestataire pourrait aussi présenter une nouvelle demande relative aux faits nouveaux. Il est possible de présenter un nombre illimité de ces demandes. De même, il n’existe pas de date limite précise avant laquelle ces demandes doivent être présentées.

[29] Un fait important, toutefois, est que chaque demande doit s’appuyer sur des éléments de preuves nouveaux. Parmi les autres options, par exemple, le prestataire pourrait fournir des éléments de preuves nouveaux qui montrent d’autres contextes dans lesquels il a tenté de donner suite à des allégations de fraude à propos de son ex-épouse, expliquer les résultats obtenus et joindre autant de documents à l’appui que possible.

[30] Le prestataire devrait envisager d’écrire à la Commission aussitôt que possible s’il veut demander la révision de la décision du 15 avril 2019 ou s’il veut présenter une demande relative aux faits nouveaux.

Conclusion

[31] Pour les motifs donnés ci-dessus, l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. La demande de permission d’en appeler est donc rejetée.

 

Représentant :

C. L., non représenté

Dispositions législatives pertinentes

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

  1. Modalités de présentation
  2. 52 (1) L’appel d’une décision est interjeté devant la division générale selon les modalités prévues par règlement et dans le délai suivant :
    1. a) dans le cas d’une décision rendue au titre de la Loi sur l’assurance-emploi, dans les trente jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision;
    2. b) dans les autres cas, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision.
  3. Délai supplémentaire
  4. (2) La division générale peut proroger d’au plus un an le délai pour interjeter appel.
  5. • • •
  6. Moyens d’appel
  7. 58 (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :
    1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
    2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
    3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.
  8. Critère
  9. (2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.
  10. Décision
  11. (3) Elle accorde ou refuse cette permission.

Loi sur l’assurance-emploi

  1. Annulation ou modification de la décision
  2. 111 La Commission peut annuler ou modifier toute décision rendue à l’égard d’une demande particulière de prestations si des faits nouveaux lui sont présentés ou si elle est convaincue que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait.
  3. Révision — Commission
  4. 112 (1) Quiconque fait l’objet d’une décision de la Commission, de même que tout employeur d’un prestataire faisant l’objet d’une telle décision, peut, dans les trente jours suivant la date où il en reçoit communication, ou dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder, et selon les modalités prévues par règlement, demander à la Commission de réviser sa décision.
  5. Nouvel examen
  6. (2) La Commission est tenue d’examiner de nouveau sa décision si une telle demande lui est présentée.
  7. Règlement
  8. (3) Le gouverneur en conseil peut, par règlement, préciser les cas où la Commission peut accorder un délai plus long pour présenter la demande visée au paragraphe (1).
  9. • • •
  10. Appel au Tribunal de la sécurité sociale
  11. 113 Quiconque se croit lésé par une décision de la Commission rendue en application de l’article 112, notamment une décision relative au délai supplémentaire, peut interjeter appel de la décision devant le Tribunal de la sécurité sociale constitué par l’article 44 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.
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