Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel de la Commission.

Aperçu

[2] L’intimée, J. M. (la prestataire), employée dans l’enseignement, a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi pour la période non scolaire du 2 juillet 2018 au 31 août 2018. L’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission), a déterminé que la prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations pendant cette période parce qu’elle ne satisfaisait à aucune des exceptions prévues à l’article 33 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE).

[3] La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision en soutenant qu’elle avait satisfait à la première exception de l’article 33 du Règlement sur l’AE. La Commission a maintenu sa décision en notant que le contrat de travail de la prestataire n’avait pas été résilié le 29 juin 2018 parce qu’elle avait accepté, avant son expiration, un autre contrat à compter de septembre. La prestataire n’était pas d’accord et a interjeté appel à la division générale du Tribunal.

[4] La division générale a conclu que le contrat d’emploi de la prestataire n’avait pas pris fin le 29 juin 2018. Toutefois, elle a conclu que l’emploi de la prestataire pendant sa période de référence était principalement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance et qu’elle satisfaisait donc à l’exception de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[5] La Commission a obtenu la permission d’interjeter appel à la division d’appel. La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit parce que la Cour d’appel fédérale a confirmé que les enseignants suppléants qui concluent des contrats temporaires pour l’enseignement régulier pendant l’année scolaire ne répondent plus à la définition de « base occasionnelle » ou « de suppléance » au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE, même s’ils conservent leur statut d’employé occasionnel ou suppléant auprès de la commission scolaire.

[6] Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur de droit en interprétant l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[7] Le Tribunal accueille l’appel de la Commission.

Question en litige

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en interprétant l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE?

Analyse

Le mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que lorsque la division d’appel entend des appels en vertu de l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, le mandat de la division d’appel lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loiNote de bas de page 1.

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal d’appel administratif pour les décisions rendues par la division générale. Elle n’exerce pas un pouvoir de surveillance semblable à celui exercé par une cour supérieureNote de bas de page 2.

[10] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Question en litige : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en interprétant l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE?

[11] La seule question à trancher est celle de savoir si la division générale a commis une erreur de droit en interprétant l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[12] Les faits ne sont pas contestés. La prestataire était employée comme enseignante suppléante au début de l’année scolaire 2017-2018. De septembre 2017 au 26 mars 2018, elle a travaillé comme enseignante suppléante occasionnelle dans le cadre d’affectations à court terme d’une durée et d’un nombre de jours variables dans différentes écoles. La prestataire a confirmé que, du 27 mars 2018 au 29 juin 2018, elle travaillait tous les jours scolaires en remplacement d’un enseignant en particulier, sur une base régulière, continue et prédéterminée, dans la même école.

[13] La division générale a conclu que la prestataire était principalement enseignante suppléante pendant la période de référence. Par conséquent, la division générale a conclu que l’emploi de la prestataire dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance à la fin de l’année scolaire 2017-2018, conformément à l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[14] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit parce que la Cour d’appel fédérale a confirmé que les enseignants suppléants qui concluent des contrats temporaires pour l’enseignement régulier pendant l’année scolaire ne répondent plus à la définition de « base occasionnelle » ou « de suppléance » au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE, même s’ils conservent leur statut d’employé occasionnel ou suppléant auprès de la commission scolaire.

[15] Avec égards, la décision de la division générale doit être infirmée. Le Tribunal rendra la décision qui aurait dû être rendue en vertu de l’article 59(1) de la Loi sur le MEDS.

[16] Au titre de l’article 33(2) du Règlement sur l’AE, un enseignant qui occupe un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour les semaines de chômage comprises dans toute période de congé. L’expression « toute période de congé » comprend les vacances d’été.

[17] L’article 33(2) du Règlement sur l’AE contient trois exceptions à cette règle générale. Il s’agit de trois exceptions distinctes et non d’une exception assortie de trois conditions. Par conséquent, ces paragraphes ne s’appliquent pas de façon cumulative, mais plutôt séparément et indépendamment les uns des autres.

[18] L’une de ces exceptions se trouve à l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE et s’applique aux enseignants qui sont employés sur une base occasionnelle ou de suppléance.

[19] « [L]’enseignement occasionnel est un enseignement à intervalles irréguliers, dispensé de façon occasionnelle ou sur demande.” À ces fins, il « y a suppléance lorsqu’une personne est sur appel ou qu’elle peut remplir les fonctions d’un autre enseignant temporairement, durant par exemple, les congés sans solde, les vacances ou les congés de maladieNote de bas de page 3 ».

[20] La division générale a suivi l’interprétation d’une décision antérieure de la division d’appel, selon laquelle l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE énonce qu’il y a exception à l’inadmissibilité lorsque l’emploi d’un prestataire dans l’enseignement pendant la période de référence est principalement ou entièrement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléanceNote de bas de page 4.

[21] Bien que je convienne que l’article 33(2)(b) prévoit une exception à l’inadmissibilité lorsque l’emploi d’un prestataire dans l’enseignement pendant la période de référence est entièrement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance, je ne suis pas d’accord pour dire que l’exception s’applique également lorsque l’emploi dans l’enseignement est principalement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléanceNote de bas de page 5.

[22] L’article 33(2) du Règlement sur l’AE établit clairement la règle générale selon laquelle un prestataire qui exerçait un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence n’est pas admissible au bénéfice des prestations.

[23] Par conséquent, pour appliquer l’exception de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE, l’enseignant exerçant son emploi sur une base occasionnelle ou de suppléance doit satisfaire à l’exception pour toute partie de la période de référence, sinon l’enseignant tombe sous le coup de la règle générale et devient inadmissible. Autrement dit, lorsque l’emploi d’un enseignant n’est plus exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance pour une partie de la période de référence, l’exception ne s’applique plus.

[24] Avec égards, je ne peux pas suivre l’interprétation selon laquelle l’exception à l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE s’applique lorsque l’emploi dans l’enseignement est principalement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance. Pour ce faire, je devrais faire fi de la règle générale établie par l’article 33(2) du Règlement sur l’AE selon laquelle un prestataire qui est employé dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence est exclu du bénéfice des prestations.

[25] Cette interprétation de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE a été confirmée à de nombreuses reprises par la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 6.

[26] Dans l’arrêt BlanchetNote de bas de page 7, la Cour d’appel fédérale a énoncé que le bénéfice de l’exception ne provient pas du statut de l’enseignant auprès de la commission scolaire, mais de l’emploi qu’il a occupé pendant la période de référence. La Cour s’est exprimée ainsi :

« En d’autres termes, un enseignant peut, par exemple, avoir un statut de suppléant, mais durant sa période de référence être appelé, et s’engager par contrat, à exercer un emploi non pas sur une base occasionnelle ou de suppléance, mais sur une base régulière ou à intervalle régulier à temps partiel. Même s’il garde son statut de suppléant selon l’entente collective qui régit la commission scolaire et le syndicat des enseignants, il n’exerce pas sur une base de suppléance l’emploi à temps partiel qu’il a contracté. Il ne remplit pas alors les conditions de l’exception de l’alinéa 33(2)b). »

[27] Mme Blanchet avait signé un contrat d’enseignement à temps partiel pour 8,7 % d’une affectation régulière d’enseignement à temps plein. En même temps, du 23 août 2002 au 27 juin 2003, elle avait un autre contrat d’enseignement à temps partiel, également pour 8,7 % d’une affectation régulière d’enseignement à temps plein. Selon son témoignage, son revenu variait de 15 000 $ à 17 000 $ par année, dont 4 500 $ provenaient de ces deux contrats. Le reste provenait de son travail de suppléante.

[28] Bien que les éléments de preuve montraient clairement que l’emploi de Mme Blanchet dans l’enseignement pendant la période de référence était principalement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance, la Cour d’appel fédérale a néanmoins conclu qu’elle ne satisfaisait pas aux conditions de l’exception prévue à l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[29] La Cour d’appel fédérale a clairement établi que les enseignants qui concluent des contrats temporaires pour l’enseignement régulier au cours de l’année scolaire ne répondent plus à la définition d’emploi exercé sur une base « occasionnelle » ou « de suppléance » au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[30] En appliquant ces principes à la présente affaire, le Tribunal ne peut que conclure que l’emploi de la prestataire à titre d’enseignante n’était pas exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE. Elle avait le statut d’enseignante suppléante, mais, pendant la période de référence, elle a été appelée et s’est engagée par contrat à exercer un emploi non pas sur une base occasionnelle ou de suppléance, mais sur une base régulière.

[31] Par conséquent, la division générale a erré en l’espèce en ce qui concerne l’interprétation et la portée de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[32] Pour les motifs susmentionnés, il est fait droit à l’appel de la Commission.

Conclusion

[33] Le Tribunal accueille l’appel de la Commission.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparution :

Le 16 août 2019

Téléconférence

Joe Monaco, représentant de l’appelant
Angèle Fricker, représentante de l’intimée
A. J., mise en cause

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