Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] L’appelante, A. N. (prestataire), a depuis longtemps des problèmes dentaires et médicaux liés à ses implants dentaires et à des infections connexes au visage. La prestataire a vécu des complications et une réapparition des symptômes en juillet 2018, durant une période où elle touchait des prestations d’assurance-emploi. La prestataire avait initialement été traitée dans son pays d’origine (pays A) pour le même problème. Elle y est donc retournée pour suivre un traitement.

[3] L’intimée, à savoir la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a déterminé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations du 5 juillet 2018 au 17 août 2018, pendant la période où elle était à l’étranger, car elle n’a pas prouvé que son traitement médical n’était pas promptement ou immédiatement disponible dans la région où elle réside au Canada. La Commission a aussi conclu que la prestataire n’était pas capable de travailler et disponible à cette fin entre le 13 mai 2018 et le 18 août 2018, car elle a demandé des prestations de maladie, mais n’avait pas fourni un certificat médical adéquat. Elle a maintenu ces décisions après révision.

[4] La prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais celle-ci a rejeté son appel. Elle en appelle maintenant à la division d’appel.

[5] L’appel est accueilli. La division générale n’a pas tenu compte d’éléments de preuve pertinents concernant sa conclusion selon laquelle le traitement médical de la prestataire était promptement ou immédiatement disponible dans la région où elle réside au Canada. La division générale a aussi omis de tirer une conclusion de fait nécessaire concernant la question de savoir si la prestataire était disponible pour travailler entre le 13 mai 2018 et le 4 juillet 2018.

[6] J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. La prestataire n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations du 13 mai 2018 au 4 juillet 2018, car j’estime qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin durant cette période. Elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations du 5 juillet 2018 au 18 août 2018, car elle était à l’étranger pour suivre un traitement médical qui n’était pas disponible immédiatement dans la région où elle réside au Canada.

Questions en litige

[7] La conclusion de la division générale selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas promptement ou immédiatement disponible a-t-elle été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?

[8] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de tirer une conclusion de fait nécessaire concernant la question de savoir si la prestataire était disponible pour travailler entre mai 2018 et la date à laquelle elle est partie au pays A?

Analyse

[9] La division d’appel ne peut intervenir dans une décision de la division générale que si elle peut conclure que la division générale a commis l’un ou l’autre des types d’erreurs nommés « moyens d’appel » à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[10] Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

La conclusion de la division générale selon laquelle le traitement médical de la prestataire n’était pas promptement ou immédiatement disponible a-t-elle été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?

[11] L’article 37(b) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) énonce qu’une partie prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations pour toute période pendant laquelle elle est à l’étranger. Toutefois, l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE) prévoit une exception pour une partie prestataire qui se trouve à l’étranger pour subir un traitement médical qui n’est pas immédiatement ou promptement disponible dans la région où elle réside au Canada.

[12] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas démontré que son traitement médical n’était pas immédiatement et promptement disponible, en se référant à [traduction] « la preuve au dossier, y compris l’élément de preuve présenté par l’appelante selon lequel elle aurait pu suivre son traitement au QuébecNote de bas de page 1 ».

[13] Dans sa demande de permission, la prestataire a soutenu que la division générale avait mal interprété et ignoré des points importants.

[14] La division générale disposait d’éléments de preuve concernant les antécédents médicaux de la prestataire. La prestataire a affirmé qu’elle s’était rendue au pays A en novembre 2017 pour subir un traitement curatif et qu’elle était revenue au Canada. Elle a décrit son dernier traitement, subi en 2018, comme étant une suite de ce traitement précédentNote de bas de page 2. Elle a soutenu que, depuis de nombreuses années, elle suivait un traitement pour soigner ce problème de santé, y compris plusieurs chirurgies, au pays ANote de bas de page 3 et que ses implants dentaires avaient été posés dans le cadre de ce traitement. Elle a affirmé que son médecin au pays A avait prévu qu’elle devrait s’y rendre à nouveau pour faire un suivi au cours des deux années suivantes ou si des problèmes survenaient.

[15] Le traitement que la prestataire a subi en juillet 2018 au pays A été décrit dans une lettre provenant de son chirurgien comme comprenant une chirurgie visant le curetage et le retrait de tissu inflammatoire autour de ses implants dentaires. Le chirurgien a confirmé que sa présence était nécessaire dans le cadre de son traitement complexe à long termeNote de bas de page 4.

[16] La prestataire a également présenté un élément de preuve concernant le fait qu’elle devait subir ce traitement de façon urgente. Elle a déclaré à la Commission qu’elle avait été malade et ressenti de la douleur à partir du début de mai 2018Note de bas de page 5, mais elle a affirmé que [traduction] « quelques jours » avant son départ du Canada, une infection s’est propagée dans son visage en entier. Elle avait de l’enflure au visage, aux yeux et à la gorge ainsi que de la difficulté à parler et à dormirNote de bas de page 6. La prestataire a affirmé qu’elle avait appelé son [premier] médecin au pays A et qu’il lui avait dit qu’elle devait s’y rendre immédiatementNote de bas de page 7. Dans sa déclaration écrite, elle a affirmé que son médecin l’avait avisée que cela pouvait entraîner des conséquences sérieuses si elle ne remédiait pas à la situationNote de bas de page 8. La prestataire est partie pour le pays A le jour suivantNote de bas de page 9.

[17] La preuve que la prestataire a présentée comprenait un aperçu des expériences qu’elle avait vécues en essayant de se faire traiter au Canada. Dans une déclaration écrite, la prestataire a affirmé qu’elle ne se sentait pas bien depuis avril ou mai 2017 et qu’elle avait consulté des urgentologues à Hull (Gatineau) et MontréalNote de bas de page 10. Elle a affirmé qu’elle avait consulté un médecin en novembre [2017] qui avait fait des radiographiesNote de bas de page 11 et qu’elle avait consulté un autre médecin à Montréal, mais qu’il lui avait dit qu’il [traduction] « ne pouvait même pas l’ouvrirNote de bas de page 12 ». On lui a dit que cela prendrait des mois avant qu’une chirurgie puisse avoir lieu, et qu’elle devrait fournir ses [traduction] « antécédents médicaux » qui se trouvaient toujours [au pays A]Note de bas de page 13. L’anglais n’est pas la langue maternelle de la prestataire et son vocabulaire en anglais est plutôt limité. Je lui ai donc demandé d’expliquer à la division d’appel ce qu’elle voulait dire lorsqu’elle a affirmé que le médecin ne pouvait pas « l’ouvrir ». Elle a précisé que le médecin n’avait pas les instruments nécessaires pour retirer son implant dentaire.

[18] La prestataire a aussi expliqué que ses problèmes de santé ne concernaient pas seulement ses dents, mais également des problèmes liés aux os du visage, y compris la région autour des yeux et des sinus. Elle a affirmé qu’au Canada, elle devrait se rendre à différents endroits pour obtenir le traitement visant divers aspects de ses soins dentaires et médicaux. Tant dans sa déclaration écrite que dans son témoignage, la prestataire a soutenu qu’elle obtiendrait des soins plus rapidement au pays A, car ils étaient [traduction] « centralisés ». Elle voulait dire par là qu’il s’agissait d’un traitement intégré qui comprenait des traitements tant dentaires que médicaux, notamment une chirurgie aux os du visageNote de bas de page 14. Le dentiste montréalais de la prestataire avait recommandé qu’elle soit traitée par le spécialiste qui l’avait soignée à l’origineNote de bas de page 15, ce qu’il a confirmé ultérieurement par écritNote de bas de page 16.

[19] Devant la division générale, la prestataire a raconté une tentative qu’elle avait faite d’obtenir un traitement à une autre occasion, de nombreuses années auparavant. Elle avait consulté un médecin en raison de complications causées par son implant dentaire, mais elle avait été très troublée parce que le médecin avait retiré une partie de son implant dentaire qui était [traduction] « instable », même si cela avait une incidence sur sa capacité à parler. Elle a affirmé que le médecin lui avait expliqué qu’il avait agi de la sorte parce qu’elle n’avait pas les moyens de recevoir d’autres soinsNote de bas de page 17 (vraisemblablement, des soins qui consistaient en une solution plus complète à ses problèmes).

[20] De toute évidence, la division générale était au courant que la justification de la prestataire reposait en partie sur la description du traitement dans son pays d’origine comme étant moins dispendieux, centralisé et comprenant l’utilisation d’instruments spécialisésNote de bas de page 18. La division générale a rejeté ces considérations sur le fondement de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE, qui ne tient pas compte du besoin de recourir à un traitement économique ou rapideNote de bas de page 19.

[21] Toutefois, la situation décrite par la prestataire comprenait bien plus qu’une question d’économie ou de rapidité. La prestataire a décrit la nature spécialisée et continue de son traitement, la difficulté à organiser un traitement multidisciplinaire au Canada et le délai que cela causerait, le délai nécessaire pour obtenir ses dossiers médicaux du pays A, et ses expériences précédentes lorsqu’elle avait cherché à être traitée au Canada où les instruments requis et les techniques de traitement étaient inconnus du médecin traitant. Fait plus important encore, elle a expliqué que son état s’était détérioré à un point tel qu’elle nécessitait un traitement de façon urgente. Elle avait consulté des médecins au Canada, mais avait découvert que le traitement prendrait des mois à organiser et nécessiterait le transfert de ses dossiers médicaux du pays A. Inversement, son spécialiste au pays A pouvait la voir immédiatement.

[22] Ces circonstances étaient pertinentes dans le cadre de la question que la division générale devait trancher, à savoir si un autre traitement était promptement ou immédiatement disponible dans la région où résidait la prestataire. La division générale a décidé de s’appuyer sur ce qu’elle a décrit comme la [traduction] « propre preuve » de la prestataire selon laquelle elle aurait pu recevoir son traitement en entier au Québec. Durant son audience devant la division d’appel, la prestataire a affirmé que la division générale avait dû mal la comprendre; elle avait dit qu’elle pouvait recevoir un traitement au Canada pour soulager la douleur.

[23] Je n’ai pas trouvé à quel moment la prestataire a dit à la division générale qu’elle aurait pu recevoir au Québec le genre de traitement qu’elle a reçu au pays A. La prestataire a affirmé qu’elle avait consulté un médecin en 2017 qui avait été incapable de pratiquer une intervention sur ses implants dentaires et qui avait déclaré que cela prendrait des mois à coordonner son traitement. Cependant, cela a eu lieu avant son traitement de novembre 2017 au pays A et non au moment de l’apparition des symptômes aigus en juillet 2018. La preuve que la prestataire a présentée démontrait qu’elle ne pouvait pas recevoir un traitement adéquat au Canada de façon urgente.

[24] En tous les cas, la preuve relative à la disponibilité du traitement sur le fondement des consultations effectuées à Montréal au milieu de l’année 2017 répond seulement à la question qui concerne la disponibilité du traitement au Canada. Elle ne fournit aucun renseignement sur la question de savoir si le traitement médical était disponible promptement ou immédiatement. La division générale ne s’est pas penchée sur la question de savoir si le traitement était disponible immédiatement pour remédier à l’état de la prestataire en juillet 2018.

[25] La division générale n’aborde pas non plus la question de la disponibilité du traitement dans la région où résidait la prestataire. Selon la déclaration de celle-ci, elle se trouvait dans une clinique à Gatineau lorsqu’elle a [traduction] « découvert » par hasard qu’elle avait toujours un médecin de famille à MontréalNote de bas de page 20. Cependant, elle vivait à Ottawa depuis 2017Note de bas de page 21 au moment où elle a cherché à se faire soigner en mai 2018 et par la suite. Il faudrait supposer que la région où elle résidait serait la région d’Ottawa.

[26] Je suis d’avis que la division générale a ignoré des éléments de preuve importants concernant la question de savoir si le traitement de la prestataire était immédiatement disponible.

[27] La Commission était d’accord sur le point exposé dans la décision d’appel selon lequel il était défendable que la division générale n’avait pas tenu compte de certains éléments de preuve concernant la disponibilité prompte ou immédiate du traitement. D’après cette observation, il n’est pas clair que la Commission concède ou non le point selon lequel la division générale a erré en ne tenant pas compte d’un élément de preuve pertinent.

[28] J’admets que la conclusion de la division générale selon laquelle le traitement de la prestataire était promptement ou immédiatement disponible au Canada a été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance aux termes de l’article 58(1)(c) de la Loi sur le MEDS.

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de tirer une conclusion de fait nécessaire concernant la question de savoir si la prestataire était disponible pour travailler entre mai 2018 et la date à laquelle elle est partie au pays A?

[29] Originalement, la prestataire a demandé des prestations régulières, non pas des prestations de maladie. Sa demande a été convertie en demande de prestations de maladie le 29 juin 2018 ou vers cette date, après que la Commission a déterminé que la question de la disponibilité posait problèmeNote de bas de page 22. La Commission a seulement informé la prestataire en octobre qu’elle était inadmissible au bénéfice des prestations. La lettre de décision précisait qu’elle était inadmissible au bénéfice des prestations à partir du 13 mai 2018 jusqu’au 18 août 2018 pour deux raisons. La lettre mentionnait que la Commission avait [traduction] « découvert que la prestataire n’était pas capable de travailler », ce qui signifiait qu’elle ne satisfaisait pas aux exigences énoncées à l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE. La lettre soulignait aussi que le certificat médical de la prestataire n’était pas acceptable, ce qui donnait à croire qu’elle ne satisfaisait pas aux exigences énoncées à l’article 18(1)(b) de la Loi sur l’AE.

[30] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas prouvé qu’elle était incapable de travailler pour des raisons de maladie, car elle n’a pas accepté que sa preuve médicale ne précisait pas la durée de sa maladie ou qu’elle était incapable de travailler. Cette conclusion soutient l’inadmissibilité au bénéfice des prestations pour la prestataire au titre de l’article 18(1)(b) de la Loi sur l’AE durant la période où elle était au Canada [sic], mais elle affaiblit la décision de la Commission selon laquelle la prestataire devrait être inadmissible au bénéfice des prestations en raison de son incapacité dans la période précédant son départ au pays A pour être soignée.

[31] Toutefois, la division générale a rejeté l’appel de la prestataire en entier. Cela signifie que la division générale a maintenu la conclusion de la Commission selon laquelle la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations pour la période allant de mai 2018 jusqu’à son départ au pays A en juillet 2018. Après avoir conclu que la prestataire était capable de travailler durant cette période, la décision de la division générale devrait contenir une conclusion selon laquelle la prestataire n’était pas disponible pour travailler au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE.

[32] La division générale a analysé la disponibilité de la prestataire, mais seulement durant la période où elle se trouvait au pays A. Elle a conclu qu’elle avait exprimé le désir de réintégrer le marché du travail dès que possible et qu’elle avait fait des démarches pour trouver un emploi convenable. Toutefois, elle a conclu qu’elle avait fixé des conditions personnelles qui limitaient ses chances de réintégrer le marché du travail durant la période où elle se trouvait au pays A. De toute évidence, ces conditions personnelles ne s’appliquaient pas durant la période où elle se trouvait au Canada. Il est tout aussi évident que la division générale n’a pas déterminé la disponibilité de la prestataire durant la période où elle était toujours au Canada.

[33] Compte tenu de la conclusion de la division générale selon laquelle la prestataire n’était pas incapable de travailler, il était nécessaire que la division générale tire également une conclusion concernant la disponibilité avant de confirmer son inadmissibilité à partir de mai 2018 jusqu’à son départ à l’étranger. Elle n’a pas tiré une telle conclusion.

[34] J’estime que la division générale a commis une erreur de droit au titre de l’article 58(1)(b) de la Loi sur le MEDS en omettant de tirer une conclusion de fait nécessaire.

Réparation

[35] En vertu de l’article 59 de la Loi sur le MEDS, je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale avec ou sans directives, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

[36] J’estime que le dossier d’appel est complet et que je peux donc rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[37] La Commission a maintenant concédé que la prestataire avait prouvé qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin durant la période allant du 13 mai 2018 au 4 juillet 2018, qui a précédé son départ à l’étranger pour subir un traitement médical. La Commission accepte qu’elle était confuse lorsqu’elle a demandé des prestations de maladie et qu’elle a toujours soutenu, y compris dans son témoignage devant la division générale, qu’elle était capable de travailler et cherchait un emploi convenable durant la période où elle était au Canada.

[38] Je suis d’accord avec cette observation et j’estime que la prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations du 13 mai 2018 au 4 juillet 2018, car elle était capable de travailler et disponible à cette fin. Je me fonde sur le témoignage de la prestataire, dans lequel elle a fourni des détails relatifs à sa recherche d’emploi et elle a déclaré qu’elle avait effectué une recherche d’emploi très active après la fin de son contrat en mai 2018Note de bas de page 23. Je me fonde aussi sur sa déclaration écrite, selon laquelle elle continuait à chercher un emploi, à faire des examens et à participer à des entrevuesNote de bas de page 24, et sur sa déclaration à la Commission selon laquelle elle aurait travaillé malgré la douleurNote de bas de page 25.

[39] En ce qui concerne la période où la prestataire était à l’étranger, la Commission a observé que, même si la prestataire se trouvait à l’étranger pour obtenir un traitement médical qui n’était pas promptement et immédiatement disponible dans la région où elle résidait, la prestataire ne répondait pas aux exigences énoncées à l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE. La Commission fait valoir que l’article 55(1)(a) s’applique sous réserve de l’article 18(1) de la Loi sur l’AE et que la prestataire doit donc tout de même prouver qu’elle serait sans cela disponible pour travailler au titre de l’article 18(1)(b) même si elle était malade. Selon la Commission, elle n’était pas « sans cela disponible », car elle se trouvait à l’étranger.

[40] À mon avis, ce point de vue est une interprétation erronée de l’expression « sans cela disponible » au sens de l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE. Cet article prévoit une exception à l’inadmissibilité habituelle établie à l’article 37 de la Loi sur l’AE pour une personne qui se trouve à l’étranger, mais qui subit un traitement médical qui n’est pas promptement et immédiatement disponible dans la région où elle réside. Il serait abusif que la Loi sur l’AE prévoie une exception précise à l’inadmissibilité établie à l’article 37 pour les personnes qui se trouvent à l’étranger, mais d’interpréter ensuite l’exigence selon laquelle la partie prestataire soit « sans cela disponible » prévue à l’article 18(1)(b) de façon à ce qu’il signifie que la partie prestataire soit toujours inadmissible, peu importe l’article 55(1)(a), parce qu’elle est à l’étranger. De ce point de vue, il n’y aurait aucune circonstance qui permettrait à l’exception prévue à l’article 55(1)(a) d’être applicable et ce dernier serait inutile. L’expression « sans cela disponible » énoncée à l’article 18(1)(b) signifie clairement [traduction] « si ce n’était pas de la maladie ». Selon moi, la maladie doit comprendre le traitement de la maladie, que ce traitement ait lieu au Canada ou à l’étranger.

[41] J’admets que la situation de la prestataire était urgente. Les premiers symptômes de la prestataire se sont manifestés plutôt rapidement et semblaient débilitants. La prestataire était inquiète et elle a accepté l’avis de son spécialiste au pays A selon lequel il y aurait des conséquences sérieuses si elle retardait son traitement. Le problème de santé pour lequel la prestataire devait être soignée était la conséquence d’un traitement continu commencé au pays A, qui durait déjà depuis des années, ou la conséquence d’un recul dans ce traitement. Le médecin de la prestataire au pays A pouvait la recevoir immédiatement et, de plus, il était tout spécialement qualifié pour remédier à ses problèmes de la façon la plus efficace, car il avait une expérience personnelle avec la prestataire et son traitement.

[42] J’accepte aussi le fait que des délais seraient sans doute causés par le besoin d’obtenir des dossiers qui se trouvaient au pays A, des notes de renvois à d’autres médecins, des rendez-vous et un traitement dans la région d’Ottawa. J’admets que le type de traitement qu’elle a subi ou la nature de ses implants étaient vraisemblablement moins courants au Canada qu’au pays A, et que cela peut avoir augmenté la difficulté à obtenir un traitement efficace immédiatement.

[43] Comme j’ai estimé que la prestataire devait recevoir un traitement médical de façon urgente en juillet 2018, je suis d’avis que son traitement peut seulement être considéré comme étant « immédiatement disponible » dans les circonstances particulières de cette affaire, s’il était disponible de manière urgente. Selon le chirurgien de la prestataire au pays A, elle a été traitée pour une péri-implantite, c’est-à-dire une infection touchant les tissus mous et durs (os) autour d’un implant. La prestataire a affirmé qu’elle prenait des analgésiques et suivait les instructions des médecins pour éliminer l’infection, mais que son état s’était soudainement aggravéNote de bas de page 26. Je suis convaincu, à la lecture du rapport médical préparé par le médecin de la prestataire au pays A et d’après les conseils qu’il a fourni à la prestataire, que le retrait de l’infiltrat inflammatoire et le curetage étaient nécessaires sur le plan médical afin de s’attaquer à la base de ses problèmes. Il est possible que la prestataire ait pu obtenir des analgésiques et des antibiotiques, ou même faire retirer ses implants de façon urgente. Cependant, je suis convaincu que l’intervention qu’elle a subie au pays A pour aborder ses complications tout en conservant les implants qui soutenaient son pontNote de bas de page 27 n’était pas immédiatement disponible dans la région où elle résidait au Canada.

[44] Par conséquent, j’estime que le traitement que la prestataire a reçu au pays A n’était pas immédiatement disponible au Canada et que l’article 55(1)(a) du Règlement sur l’AE est applicable pour l’exempter de l’inadmissibilité prévue à l’article 37 de la Loi sur l’AE parce qu’elle se trouvait à l’étranger.

[45] La prestataire se trouvait au pays A du 5 juillet 2018 au 18 août 2018. La lettre provenant de son spécialiste au pays A confirme que sa présence était nécessaire pour un traitement complexe à long terme et qu’elle était sous supervision médicale durant tout son séjour. Il n’y a aucune preuve du contraire. Par conséquent, j’estime que la prestataire était incapable de travailler du 5 juillet 2018 au 18 août 2018 en raison de son traitement, qui était la conséquence de sa maladie ou blessure particulière. Elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations au titre de l’article 18(1)(b) de la Loi sur l’AE.

Conclusion

[46] L’appel est accueilli. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. La prestataire n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations du 13 mai 2018 au 4 juillet 2018, car j’ai conclu qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin pendant cette période. Elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations entre le 5 juillet 2018 et le 18 août 2018, après son retour au Canada, car j’accepte le fait qu’elle était incapable de travailler pour des raisons de maladie ou de blessure et parce qu’elle subissait un traitement à l’étranger qui n’était pas promptement et immédiatement disponible dans la région où la prestataire résidait.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparution :

Le 13 août 2019

Téléconférence

A. N., appelante

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