Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, R. B. (prestataire), a travaillé pendant plusieurs années dans un centre sportif et récréatif. En décembre 2018, son employeur l’a congédié en raison de son inconduiteNote de bas de page 1. Le prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi, mais la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), a rejeté sa demande de prestations en invoquant son inconduite. La Commission n’a pas changé d’avis après révisionNote de bas de page 2. Le prestataire a interjeté appel de la décision en révision à la division générale, qui a rejeté l’appel. Le prestataire soutient qu’il était un bon employé et que son employeur l’a congédié de façon injustifiée.

[3] Le prestataire cherche maintenant à obtenir la permission d’en appeler de la décision de la division générale au motif qu’elle n’aurait pas observé un principe de justice naturelle, et qu’elle aurait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Je dois décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

[4] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès et je rejette donc la demande de permission d’en appeler.

Questions en litige

[5] Les questions que je dois trancher sont les suivantes :

Question en litige no 1 : Est-il possible de soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle?

Question en litige no 2 : Est-il possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée en concluant que l’employeur avait prévenu le prestataire qu’il devait renouveler sa certification sans quoi il risquait d’être congédié?

Question en litige no 3 : Le Tribunal de la sécurité sociale devrait-il examiner la plainte présentée par le prestataire devant un tribunal des droits de la personne?

Analyse

[6] Avant que le prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue que ses motifs d’appel relèvent d’au moins un des trois moyens d’appel énoncés à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). L’appel doit également avoir une chance raisonnable de succès.

[7] Seuls trois moyens d’appel sont permis par l’article 58(1) de la LMEDS. Ces moyens sont les suivants :

(a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

(b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

(c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Une chance raisonnable de succès équivaut à une cause défendable en droitNote de bas de page 3. Ce critère est relativement peu exigeant, car le prestataire n’a pas à prouver le bien-fondé de ses prétentions; il doit simplement démontrer qu’il existe une cause défendable en droit. Pour de l’audience de l’appel, le critère juridique est beaucoup plus rigoureux.

Question en litige no 1 : Est-il possible de soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle?

[9] Le principe de justice naturelle dont il est question à l’article 58(1) se rapporte aux règles de procédure fondamentales qui s’appliquent dans un contexte judiciaire ou quasi judiciaire. L’existence de ce principe permet de veiller à ce que toutes les parties soient dûment avisées de toute instance, qu’elles aient pleinement la possibilité de présenter leur cause, et que la procédure soit équitable et impartiale ou ne suscite pas de crainte raisonnable de partialité. Ce principe est lié aux questions d’équité procédurale plutôt qu’à l’issue d’une décision et des conséquences qu’elle pourrait avoir sur une partie.

[10] La division générale a tenu une audience en personne. Le prestataire ne laisse pas entendre qu’il n’a pas eu droit à une audience équitable. Il n’allègue pas, par exemple, que le membre de la division générale ne lui a pas donné un préavis suffisant, qu’il ne lui a pas donné la possibilité de présenter sa cause, ou qu’il était partial ou semblait faire preuve de partialité à son égard. Pour cette raison, je ne suis pas convaincue qu’il est possible de soutenir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle.

Question en litige no 2 : Est-il possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée en concluant que l’employeur avait prévenu le prestataire qu’il devait renouveler sa certification sans quoi il risquait d’être congédié?

[11] Le prestataire fait valoir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle a tirée de façon abusive ou arbitraire en concluant que son employeur l’avait prévenu qu’il risquait d’être congédié pour inconduite s’il ne renouvelait pas sa certification. Il soutient notamment que la division générale a mal interprété la lettre d’avertissement de l’employeur datée du 19 novembre 2018Note de bas de page 4.

[12] Pour commettre une inconduite, une personne doit avoir agi de manière délibérée ou avoir fait preuve d’une insouciance qui frôle le caractère délibéré. De plus, elle devait savoir qu’elle risquait de perdre son emploi en raison de sa conduite ou de son inaction, ou que toute personne raisonnable comprendrait qu’il est possible de perdre son emploi en agissant de la sorte. Il importe peu que la personne ait été un bon employé et qu’elle ait même remporté des prix pour son travail. Une personne qui perd son emploi en raison d’une inconduite n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[13] En l’espèce, le prestataire soutient qu’il ne pouvait pas savoir qu’il risquait de perdre son emploi. Il prétend notamment que la lettre de son employeur ne l’a pas prévenu qu’il risquait d’être congédié s’il n’obtenait pas le renouvellement de sa certification. Il soutient que la division générale s’est trompée en interprétant la lettre de son employeur comme étant un avertissement qu’il perdrait son emploi s’il ne renouvelait pas sa certification.

[14] En outre, le prestataire affirme qu’il ne pouvait pas savoir qu’il risquait de perdre son emploi s’il n’obtenait pas le renouvellement de sa certification puisque d’autres employés continuaient de travailler même sans détenir la certification appropriéeNote de bas de page 5.

[15] Le prestataire s’attendait à ce que l’employeur traite tous les employés sur un pied d’égalité. Il considère que le traitement inégal est une persécution politique et une violation de ses droits de la personne. Il déclare qu’il présenté une plainte relative aux droits de la personne contre son employeur à cet égard.

[16] La division générale a écrit :

[traduction]

L’employeur a remis une lettre d’avertissement au prestataire le 19 novembre. La lettre explique que le renouvellement de la certification d’ingénieur électricien est une exigence du TSBC. Elle mentionne également que l’employeur a parlé à plusieurs reprises avec le prestataire de cette obligation avant d’en arriver à fixer un délai. La lettre précise que le prestataire sera congédié si sa certification n’est pas renouvelée au plus tard le 2 décembre. Le prestataire prétend qu’il n’a pas accepté les conditions énoncées dans la lettre d’avertissement. Il convient toutefois que l’employeur lui a remis la lettre d’avertissement.

(Mis en évidence par la soussignée)

[17] Bien que d’autres employés aient pu continuer de travailler même sans détenir une certification ou un titre de compétence approprié, dans le cas du prestataire, une lettre d’avertissement a été remise par l’employeur. La ligne Objet de cette lettre était [traduction] « Avertissement écrit – Suspension ». Il est clair que l’employeur avait l’intention de donner un avertissement au prestataire.

[18] Si la lettre de l’employeur a vraiment averti le prestataire qu’il risquait d’être congédié s’il n’obtenait pas le renouvellement de sa certification, le prestataire ne peut pas utiliser le fait que d’autres personnes travaillaient sans certification appropriée pour dire qu’il ignorait que son employeur pouvait le congédier.  

[19] L’employeur a écrit :

[traduction]

[…] Vous nous avez informés que vous aviez l’intention de fournir votre certification renouvelée à la direction d’ici la date limite du 2 décembre 2018 et que comprenez que le fait de ne pas vous conformer à cette exigence entraînera votre licenciement […]Note de bas de page 6.

[20] Le prestataire affirme qu’il n’a pas pensé qu’il s’agissait d’un avertissement et il prétend que la division générale a eu tort de l’interpréter ainsi.

[21] Je ne vois pas comment la phrase « le fait de ne pas vous conformer à cette exigence entraînera votre licenciement […] » pourrait être autre chose qu’un avertissement que le prestataire risquait d’être congédié s’il ne renouvelait pas sa certification et n’informait pas son employeur qu’il l’avait fait. L’employeur a également précisé dans sa lettre que le prestataire devait obtenir le renouvellement de sa certification d’ingénieur électricien de classe 4 pour respecter la réglementation provinciale. Il s’agissait apparemment d’une condition de son emploi.

[22] De plus, l’employeur a écrit dans la même lettre que la mesure disciplinaire entraînerait une suspension sans solde de trois jours (mais qu’il considérerait que le prestataire avait déjà purgé cette suspension). L’employeur a ensuite déclaré que la lettre serait conservée au dossier du prestataire pendant 24 mois. Si d’autres incidents disciplinaires devaient se produire [traduction], ils « entraîneraient des mesures disciplinaires progressives pouvant aller jusqu’au congédiement [du prestataire] ».

[23] Le prestataire n’a offert aucune autre interprétation de la lettre d’avertissement. Je ne vois aucune autre façon d’interpréter raisonnablement cette lettre.

[24] Je ne suis pas convaincue qu’il est possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire, lorsqu’elle a considéré que la lettre de l’employeur du 19 novembre 2018 était un avertissement que le prestataire s’exposait à un congédiement s’il ne renouvelait pas son certification.  

Question en litige no 3 : Le Tribunal de la sécurité sociale devrait-il examiner la plainte présentée par le prestataire devant un tribunal des droits de la personne?

[25] Le prestataire soutient que son employeur l’a persécuté en raison de ses convictions politiques et qu’il a présenté une plainte devant un tribunal des droits de la personne. Le prestataire fait valoir que le Tribunal de la sécurité sociale doit examiner la plainte qu’il a déposée devant le tribunal des droits de la personne. Toutefois, le Tribunal de la sécurité sociale n’a pas la compétence d’examiner et de trancher des plaintes de cette nature. Il ne s’agit pas d’un moyen d’appel reconnu à l’article 58(1) de la LMEDS.

[26] Je remarque que le prestataire a déposé de grandes parties du dossier d’audience devant la division générale avec sa demande à la division d’appel. Si le prestataire me demande de réévaluer et de réapprécier la preuve, et de rendre une décision plus favorable, l’article 58(1) de la LMEDS ne permet la réévaluation de la preuve ni la tenue d’une nouvelle audience sur l’affaire.

Conclusion

[27] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

R. B., non représenté

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