Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appelant a refusé un emploi convenable sans motif valable pendant sa période de prestations. L’appel est rejeté et l’appelant est exclu du bénéfice des prestations, tel que déterminé par la Commission.

Aperçu

[2] L’appelant, M. S., a déposé une demande de prestations d’assurance-emploi. Une période de prestations a été établie à partir du 2 décembre 2018.

[3] Pendant les premiers mois de sa période de prestations, l’appelant a été convoqué au travail à quelques reprises pour travailler en tant que signaleur pour le compte de son employeur X, mais il ne s’est pas présenté.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a procédé à un examen de la demande de prestations et a déterminé que l’appelant avait refusé sans motif valable un emploi convenable offert par X à deux reprises, soit les 12 et 23 janvier 2019. Par conséquent, l’appelant a été exclu du bénéfice des prestations pendant sept semaines pour chacun de ces refus.

[5] L’appelant conteste maintenant la décision de la Commission devant le Tribunal. Il soutient qu’il avait un motif valable pour refuser l’emploi, puisque son employeur ne lui fournissait pas de casque de sécurité.

Question en litige

[6] L’appelant doit-il être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour avoir refusé sans motif valable un emploi convenable à deux reprises pendant sa période de prestations? 

Analyse

L’appelant doit-il être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour avoir refusé sans motif valable un emploi convenable à deux reprises pendant sa période de prestations? 

[7] Oui, je considère qu’une exclusion est applicable dans ce dossier, et ce, pour les raisons suivantes.

[8] Lorsqu’il est au chômage, un prestataire d’assurance-emploi a l’obligation d’accepter tout emploi convenable qui lui est offert, à moins d’avoir un motif valable pour refuser cet emploi. Note de bas de page 1

[9] Si un prestataire refuse un emploi convenable sans motif valable, il sera exclu du bénéfice des prestations pour une durée de sept à douze semaines. Note de bas de page 2

[10] La durée exacte de l’exclusion est à la discrétion de la Commission. Je ne peux pas modifier la durée de l’exclusion, sauf si la Commission a utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon non judiciaire.Note de bas de page 3 

[11] Afin d’être en mesure de trancher dans ce dossier, je dois me poser quatre sous-questions 

  1. Est-ce que l’appelant a refusé un emploi pendant sa période de prestations?
  2. Si oui, est-ce que cet emploi était convenable?
  3. Si oui, est ce que l’appelant avait un motif valable de refuser cet emploi?
  4. Sinon, quelle devrait être la durée de l’exclusion imposée à l’appelant?

Est-ce que l’appelant a refusé un emploi pendant sa période de prestations?

[12] Suite à une pause pendant la période des fêtes, l’employeur X soutient qu’il avait à nouveau besoin d’employés dès la deuxième semaine de janvier. L’employeur déclare que l’appelant a été convoqué au travail à au moins à deux reprises, soit les 12 et 23 janvier 2019, mais que celui-ci a refusé de se présenter. L’appelant reconnait avoir refusé de se présenter au travail après avoir été contacté par l’employeur lors de ces deux journées. 

[13] Je conclus que l’appelant a effectivement refusé de travailler à deux reprises au cours de sa période de prestations.  

Est-ce que cet emploi était un emploi convenable?

[14] Un emploi convenable est un emploi offrant au prestataire des conditions de travail et un salaire n’étant pas inférieurs aux conditions dont il bénéficiait dans son occupation ordinaire. De plus, un emploi est considéré convenable seulement si le prestataire à la capacité d’effectuer le travail, que l’horaire n’est pas incompatible avec ses obligations et croyances et que la nature du travail n’est pas contraire à ses convictions morales ou croyances religieuses.Note de bas de page 4

[15] Je considère que l’emploi proposé à l’appelant était un emploi convenable pour les raisons suivantes.

[16] Lors de son embauche initiale chez X, l’appelant était affecté à un poste à temps plein. D’ailleurs, entre le 12 novembre 2018 et le 1er décembre 2018, la preuve démontre qu’il a travaillé 144 heures au totalNote de bas de page 5.

[17] À partir du 1er décembre, l’appelant soutient avoir été réaffecté. Il est passé d’un poste à temps plein avoisinant les 50 heures de travail par semaine, à un poste sur appel lui offrant du travail seulement deux jours par semaine. L’appelant a alors demandé à l’employeur de lui préparer un relevé d’emploi, afin d’avoir accès aux prestations pour combler son manque de revenus.

[18] Il semble toutefois que les activités chez l’employeur ont reprises peu de temps après. Dans un échange par texto avec l’appelant, l’employeur mentionne que le travail a repris dès le 7 janvier et qu’elle doit embaucher de nouveaux signaleurs pour combler toutes les heures dont elle disposeNote de bas de page 6. Lors de ses multiples conversations avec l’appelant au cours de l’hiver, l’employeur répète d’ailleurs à plusieurs reprises qu’elle a amplement de travail pour lui et qu’elle doit recruter de nouveaux employés pour combler son manque de personnel. De plus, l’employeur a réitéré ces déclarations lors de ses conversations avec la Commission, en soutenant que l’appelant aurait pu reprendre le travail à temps plein dès la deuxième semaine de janvier 2019 s’il l’avait voulu.Note de bas de page 7

[19] En fait, les échanges de textos entre l’appelant et l’employeur démontrent que c’est plutôt l’appelant qui a demandé à travailler seulement un ou deux jours par semaine après avoir déposé sa demande de prestations.Note de bas de page 8 Le 16 décembre 2018, il a notamment écrit: « …avec le chômage, je vais vouloir faire 1 jrs ou 2 jusqu’à quand sa recommence… sé sur que "manque de travail" serait préférable. » (sic)

[20] À mon avis, la preuve démontre que l’appelant aurait pu travailler à temps plein (ou presque) dans le même emploi qu’il occupait jusqu’au mois de décembre, et ce, dès le retour de la pause des fêtes. Au cours du mois de janvier, l’appelant s’est fait convoquer au travail de manière sporadique (notamment les 12 et 23 janvier) parce qu’il limitait lui-même sa disponibilité à travailler, et non parce que l’employeur n’avait pas d’heures à lui offrir. En somme, tout indique que les conditions de travail et le salaire qui lui étaient proposés par l’employeur au moment des refus de travail n’étaient pas inférieurs à ce qu’il avait avant de déposer sa demande de prestations.Note de bas de page 9

[21] De plus, malgré les informations contradictoires à cet effet, je considère que l’appelant avait la capacité d’effectuer le travail qui était demandé par son employeur.Note de bas de page 10

[22] En effet, suite à la décision rendue par la Commission, l’appelant a déposé des certificats médicaux faisant mention d’un arrêt de travail. L’appelant a reconnu lors de l’audience avoir utilisé ces certificats afin d’avoir accès aux prestations malgré la décision négative de l’intimée. Le premier certificat, rempli le 5 février 2019, fait état d’un arrêt de travail du 7 décembre 2018 au 15 avril 2019. Le deuxième certificat, rempli le 2 avril 2019, fait état d’un arrêt de travail du 7 décembre 2018 au 25 mars 2019. Toutefois, ces certificats médicaux m’apparaissent comme des certificats de complaisance, et je leur accorde un très faible poids pour les raisons suivantes : 

  1. Au moment de remplir sa demande, le 14 décembre 2018, l’appelant a demandé des prestations régulières et non de maladie.
  2. Le relevé d’emploi soumis par l’employeur ne mentionne pas d’arrêt de travail pour raison de maladie. Selon le document, le relevé a été produit à la demande de l’appelant, car celui-ci voulait se mettre volontairement sur le chômage.
  3. L’employeur n’a jamais été mis au courant que l’appelant avait un quelconque problème médical l’empêchant de travailler pour une période prolongée. De plus, les multiples échanges par messages textes entre l’appelant et l’employeur autour des dates en litige ne comportent aucune mention à cet effet.
  4. Dans ses conversations avec la Commission, l’appelant n’a jamais mentionné que l’emploi en question ne lui convenait pas pour des raisons médicales. D’ailleurs, lors d’une conversation tenue le 25 janvier 2019, alors qu’il était censé être en arrêt de travail, l’appelant a clairement mentionné à la Commission qu’il était disponible pour travailler en tout temps et à temps plein. Il n’a jamais dit qu’il était malade.
  5. Les certificats ont été émis de façon rétroactive, et les dates sur les certificats médicaux semblent avoir été ajustées afin de permettre à l’appelant d’avoir d’abord accès aux prestations de maladie, puis aux prestations régulières par la suite. En effet, le deuxième certificat met fin à l’arrêt de travail le 25 mars 2019, soit presque exactement 15 semaines après le début de l’arrêt de travail. Curieusement, la durée de 15 semaines correspond maximum de semaines de prestations de maladie que les prestataires peuvent recevoir.

[23] Et, en terminant, il n’y a rien dans la preuve ou dans les soumissions de l’appelant qui me permet de croire que l’horaire proposé ou la nature du travail entrait en conflit avec l’horaire, les croyances ou les convictions de l’appelant.Note de bas de page 11

[24] Pour ces raisons, je considère que l’emploi qui était proposé à l’appelant par X était un emploi convenable.

Est-ce que l’appelant avait un motif valable de refuser cet emploi?

[25] On considère qu’un prestataire avait un motif valable pour refuser un emploi s’il a agi prudemment, comme on s’attend qu’il faudrait normalement agir dans des circonstances semblables. Note de bas de page 12

[26] Afin de justifier ses refus de travail, l’appelant a invoqué essentiellement deux motifs.

[27] Premièrement, il a mentionné qu’il n’avait pas de casque de protection pour travailler sur le chantier, alors qu’il s’agit d’une pièce d’équipement obligatoire.

[28] À mes yeux, refuser de travailler pour cette raison ne constitue pas un motif valable. L’employeur a déclaré que sa politique interne obligeait les employés doivent fournir leur propre casque de sécurité, et que l’appelant avait pu travailler au cours du mois de novembre seulement parce qu’on lui avait prêté un casque de façon exceptionnelle.

[29] Je considère qu’il est raisonnable pour un employeur de demander à ses employés de fournir leur propre équipement de sécurité, surtout lorsqu’il s’agit d’un item de nature personnelle comme un casque. De plus, il semble que des casques de sécurité sont disponibles à des prix modiques dans les magasins à grande surfaceNote de bas de page 13. Je considère qu’une personne raisonnable et désireuse de trouver du travail aurait pris les mesures nécessaires pour obtenir un casque et se rendre au travail.

[30] Deuxièmement, l’appelant a soumis des certificats médicaux faisant état d’un arrêt de travail au cours de l’hiver 2018/2019. Toutefois, pour les raisons que j’ai énoncées en détail précédemment, j’accorde un très faible poids à ces deux certificats. À mes yeux, la preuve démontre que l’appelant était capable de travailler pendant la période en litige et qu’il a refusé de travailler pour une autre raison que son incapacité prétendue.

[31] Je conclus que l’appelant n’avait pas de motif valable pour refuser de travailler les 12 et 23 janvier 2019.

Quelle devrait être la durée de l’exclusion imposée à l’appelant?

[32] Conformément à la Loi, la durée de l’exclusion dans le cas d’un refus de travail doit se situer entre 7 et 12 semaines. La durée exacte de l’exclusion est une décision discrétionnaire de la Commission. 

[33] Dans le présent dossier, la Commission a imposé la sanction minimale prévue par la Loi à l’appelant, soit sept semaines d’exclusion pour chacun des deux refus de travail.

[34] Les soumissions de la Commission en ce qui concerne la durée de l’exclusion sont pour le moins laconiques. Toutefois, la durée de l’exclusion semble être en accord avec la politique de l’intimée, qui prévoit l’imposition de la sanction minimale de sept semaines d’exclusion si la durée de l’emploi offert est de sept semaines ou moins, et ce, pour chaque refus de travail sans motif valableNote de bas de page 14.

[35] L’employeur soutient que l’appelant aurait pu travailler à temps plein à partir de la deuxième semaine de janvier s’il l’avait voulu, mais que celui-ci limitait sa disponibilité à un ou deux jours par semaine. Ainsi, il est probable que l’appelant aurait pu continuer de travailler après avoir été convoqué au travail les 12 et 23 janvier, puisque l’employeur semblait avoir amplement de travail pour lui. Toutefois, la preuve ne permet pas de déterminer la durée des emplois proposés avec certitude.

[36] Ainsi, j’estime que la Commission a utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en imposant à l’appelant la sanction minimale prévue par la Loi pour chacun des deux refus de travail. Je ne modifierai donc pas la durée de l’exclusion imposée par la Commission.

Conclusion

[37] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 1er août 2019

En personne

M. S., appelant

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