Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal rejette l’appel.

Aperçu

[2] La mise en cause, W. L. (prestataire), a travaillé comme aide-éducatrice pour l’appelante, X (employeur), pendant plusieurs mois. Son emploi a pris fin au mois d’août 2018. La prestataire a déclaré avoir été congédiée de son emploi après avoir pris quelques jours de congé pour s’occuper de sa fille qui se remettait d’une opération. L’employeur, de son côté, a déclaré que la prestataire a démissionné de son emploi, puisque son mari a contacté l’employeur afin de l’aviser que sa conjointe ne retournerait plus au travail. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), a déterminé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification. La prestataire a demandé la révision de cette décision mais la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale du Tribunal.

[3] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas quitté volontairement son emploi puisqu’elle n’avait pas le choix de rester ou de quitter. Elle a donc annulé l’exclusion imposée à la prestataire par la Commission.

[4] L’employeur, qui a assisté à l’audience, a obtenu la permission d’en appeler de la décision de la division générale. Il fait valoir que la division générale n’a pas tenu compte des éléments portés à sa connaissance. Il fait également valoir que la division générale n’a pas respecté un principe de justice naturelle en lui refusant l’opportunité de présenter de la preuve au soutien de sa position.

[5] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que la prestataire n’avait pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’assurance-emploi. Il doit également décider si la division générale a fait défaut d’observer un principe de justice naturelle

[6] Le Tribunal rejette l’appel de l’employeur.

Questions en litige

[7] Est-ce que la division générale a fait défaut d’observer un principe de justice naturelle en refusant à l’employeur l’opportunité de présenter de la preuve au soutien de sa position?

[8] Est-ce que la division générale a erré en droit en concluant que la prestataire n’avait pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’AE?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[9] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).Note de bas de page 1

[10] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[11] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Remarques préliminaires

[12] Tel que souligné par le Tribunal lors de l’audience, afin de décider du présent appel de l’employeur, il ne sera tenu compte que de la preuve présentée devant la division générale puisque les compétences de la division d’appel sont limitées par l’article 58 (1) de la Loi sur le MEDS.

Question en litige no 1: Est-ce que la division générale a fait défaut d’observer un principe de justice naturelle en refusant à l’employeur l’opportunité de présenter de la preuve au soutien de sa position?

[13] L’employeur fait valoir qu’il a été surpris par la preuve de la prestataire à l’effet qu’elle devait s’occuper de sa fille puisque ses parents n’étaient pas à son domicile. Il soutient que la prestataire n’avait jamais allégué ce fait auparavant. Il n’a donc pu présenter des éléments de preuve lors de l’audience visant à contredire la version de la prestataire. L’employeur fait valoir qu’il s’agit d’un fait important puisque la division générale en a tenu compte dans sa décision.

[14] Compte tenu de cet argument de l’employeur, le Tribunal a procédé à écouter l’enregistrement de l’audience devant la division générale. Il ressort qu’en aucun temps l’employeur a soulevé devant la division générale avoir été pris par surprise par cette preuve de la prestataire. Il n’a également pas questionné la prestataire sur cette preuve et n’a pas demandé l’ajournement de l’audience afin de lui permettre de contredire la preuve de la prestataire.

[15] Le Tribunal doit-il accueillir le présent motif d’appel lorsqu’une partie fait preuve de passivité devant la division générale? Le Tribunal ne le croit pas.

[16] L’employeur a eu l’opportunité lors de l’audience de faire part de sa surprise à la division générale, de questionner la prestataire ou de demander un ajournement afin de répondre à cette preuve, ce qu’il n’a pas fait.

[17] Le Tribunal estime que, même s’il est convenable que la division générale explique et informe les parties de la question à trancher et des procédures devant elle, son devoir n’implique pas que le membre de la division générale agisse comme représentant de l’une ou l’autre des parties.

[18] Ce moyen d’appel est donc rejeté.

Question en litige no 2 : Est-ce que la division générale a erré en droit en concluant que la prestataire n’avait pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’AE?

[19] L’employeur fait valoir que la division générale a rendu sa décision en ignorant les éléments portés à sa connaissance, pour conclure à tort qu’il n’y avait pas eu départ volontaire de la part de la prestataire. Il soutient que la division générale a erré en concluant de la preuve que le mari de la prestataire n’avait pas le mandat de démissionner au nom de la prestataire.

[20] Malgré les déclarations de la prestataire et de son mari, la division générale a jugé de la preuve que ce dernier avait effectivement contacté l’employeur autour du 20 août pour démissionner au nom de sa conjointe. La division générale est arrivée à cette conclusion pour trois raisons : l’appréciation du travail de la prestataire par l’employeur, la confirmation par une tierce partie de la démission présentée par le mari et les propos tenus par le mari à l’effet que l’employeur poussait les employés à partir en refusant de comprendre la situation de la prestataire.

[21] La division générale s’est alors demandé si les actions et paroles du mari devaient être interprétées comme un départ volontaire de la part de la prestataire.

[22] Tel que souligné par la division générale, la prestataire a communiqué avec l’employeur au cours de sa deuxième journée d’absence (le 21 août) afin d’avoir son horaire de travail pour le 22 août. Ce geste indique clairement qu’elle avait l’intention de retourner au travail après ses deux journées d’absence. Un tel comportement implique manifestement qu’elle n’était pas d’accord avec les actions et paroles de son mari. Il n’y a d’ailleurs aucune preuve au dossier que la prestataire a personnellement démissionné de son emploi.

[23] À la lumière des faits au dossier, la division générale a conclu que la prestataire n’avait pas le choix de rester ou de quitter. En effet, lorsque celle-ci a contacté l’employeur le 21 août afin d’avoir son horaire de travail, l’employeur a refusé de la remettre à l’horaire, sous prétexte que son mari avait déjà démissionné à sa place la veille. La prestataire était donc face à une fin d’emploi qui lui était imposée, et qui n’était donc pas volontaire.

[24] Tel que mentionné lors de l’audience de l’appel, la division d’appel n’est pas habilitée à juger de nouveau une affaire ni à substituer son pouvoir discrétionnaire à celui de la division générale. Les compétences de la division d’appel sont limitées par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. À moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

[25] Le Tribunal en vient à la conclusion que la décision de la division générale repose sur les éléments de preuve portés à sa connaissance, et il s’agit d’une décision qui est conforme aux dispositions législatives et à la jurisprudence relative au départ volontaire.

[26] Ce moyen d’appel est rejeté.

Conclusion

[27] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

15 août 2019

Vidéoconférence

Me Nathalie Raymond, représentante de l’appelante
X, représentante de l’appelante
Mme W. L., mise en cause
X, représentant de la mise en cause

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