Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. La Commission et l’employeur n’ont pas prouvé que l’appelante (prestataire) a quitté son emploi.

Aperçu

[2] La prestataire a présenté une demande initiale de prestations de maladie de l’assurance-emploi, car au moment de la cessation d’emploi, elle était blessée et suivait un plan de retour au travail avec des tâches légères. Puisque la prestataire était capable de travailler, elle a changé sa demande pour des prestations régulières. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a exclu la prestataire du bénéfice des prestations régulières parce qu’elle a conclu qu’elle a quitté son emploi sans justification. La Commission a décidé que la prestataire n’avait pas démontré qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision en faisant valoir qu’elle n’avait pas quitté son emploi. Elle a fait valoir qu’elle avait fait l’objet d’un congédiement déguisé lorsque l’employeur lui a donné un ultimatum pour qu’elle prenne un congé sans solde ou qu’elle démissionne. La Commission n’était cependant pas d’accord et a maintenu sa décision initiale. La prestataire a porté cette décision en appel auprès du Tribunal de la sécurité sociale du Canada.

Questions préliminaires

[3] L’ancien employeur de la prestataire a demandé à être ajouté comme partie à cet appel. J’ai rejeté la demande le 4 juin 2019 parce que l’employeur n’a pas démontré qu’il avait un intérêt direct dans cet appel. Les motifs ont été fournis dans une lettre adressée à l’employeur. À ce jour, le Tribunal n’a reçu aucune observation des parties concernant cette décision.

Question en litige

La prestataire devrait-elle être exclue du bénéfice de prestations parce qu’elle aurait quitté volontairement son emploi sans justification?

  1. La prestataire a-t-elle quitté son emploi? Dans l’affirmative, une solution raisonnable s’offrait-elle à elle plutôt que de quitter son emploi?

Analyse

Question en litige no 1 : La prestataire devrait-elle être exclue du bénéfice de prestataire parce qu’elle aurait quitté volontairement son emploi sans justification?

[4] Lorsqu’une partie prestataire quitte son emploi ou prend un congé, elle n’est pas automatiquement admissible à des prestations. La personne doit démontrer qu’elle avait été « fondée à » quitter son emploi afin de recevoir des prestationsNote de bas de page 1.

[5] Pour justifier son départ ou sa prise de congé, une partie prestataire doit démontrer que, compte tenu des circonstances, elle n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploiNote de bas de page 2.

[6] Puisque la prestataire conteste le fait qu’elle ait quitté son emploi, je dois d’abord décider si elle a effectivement démissionné avant de décider si elle avait été fondée à le faire.

  1. La prestataire a-t-elle quitté son emploi? Dans l’affirmative, une solution raisonnable s’offrait-elle à elle plutôt que de quitter son emploi?

[7] Non. La preuve ne démontre pas que la prestataire a quitté volontairement son emploi le 23 octobre 2018. Bien que ce soit le dernier jour de travail de la prestataire, elle n’a ni souhaité ni déclenché la cessation d’emploi.

[8] Il incombe initialement à la Commission et à l’employeur de démontrer que la prestataire a quitté volontairement son emploi.

[9] Ce qui suit n’est pas contesté. La prestataire a subi une blessure au bras droit et était incapable d’exercer ses fonctions habituelles. Du 27 août au 9 octobre 2018, la prestataire a exercé son emploi régulier avec quelques mesures d’adaptation en raison de ses restrictions médicales. Le 9 octobre 2018, son médecin a indiqué qu’elle avait besoin d’un mois supplémentaire de tâches légères. Son employeur lui a fourni des mesures d’adaptation en lui confiant des tâches légères dans un autre secteur. Le 15 octobre 2018, le médecin de la prestataire a fourni à l’employeur ses restrictions médicales et a établi un plan de retour au travail. La prestataire a continué à effectuer des tâches légères conformément au plan jusqu’à ce qu’elle soit convoquée à une réunion avec la direction le 23 octobre 2018. Lors de cette réunion, l’employeur a proposé d’accorder à la prestataire un congé sans solde jusqu’au 17 décembre 2018.

[10] L’employeur a indiqué sur le relevé d’emploi (RE) que la prestataire avait démissionné pour des raisons de santé. Une indemnité de congé annuel et une indemnité de préavis lui ont été versées (GD3-18). L’employeur a déclaré qu’il a simplement fait preuve de clémence en lui versant l’indemnité de départ. L’employeur a également déclaré à la Commission que la prestataire avait déclaré qu’elle ne pouvait pas continuer à travailler et qu’il lui avait donc offert de prendre congé. La prestataire a refusé de prendre congé jusqu’au 17 décembre 2018 et a préféré démissionner (GD3-24).

[11] La Commission a établi que la prestataire avait quitté son emploi le 23 octobre 2018. Elle a estimé que prendre un congé était une solution raisonnable plutôt que de quitter son emploi. Elle a donc exclu la prestataire du bénéfice de prestations régulières d’assurance-emploi à partir du 28 octobre 2018.

[12] Pour plusieurs motifs, j’estime que la Commission et l’employeur ne se sont pas acquittés de la charge de démontrer que la prestataire a quitté son emploi.

[13] Premièrement, la prestataire n’a pas déclenché la cessation d’emploi; c’est l’employeur qui l’a fait. La prestataire suivait un plan de retour au travail et effectuait des tâches légères lorsque l’employeur l’a convoquée à une réunion lors de son dernier jour de travail. Il ressort clairement de la lettre de congédiement que c’est l’employeur qui a décidé que la prestataire devait prendre congé à compter du 23 octobre 2018. L’employeur a déclaré : [traduction] « À ce stade, nous pensons que c’est la meilleure solution pour votre santé... » (GD3-21). Il a offert à la prestataire un congé sans solde avec comme date de retour le 17 décembre 2018. La prestataire ne voulait cependant pas prendre un congé sans solde de manière soudaine. Au lieu de poursuivre le plan de retour au travail qui était en place, l’employeur a déclenché la cessation d’emploi en n’offrant à la prestataire qu’un seul autre choix : une indemnité de départ tenant lieu de préavis. 

[14] Deuxièmement, je suis d’accord avec l’argument de la prestataire selon lequel l’offre de l’employeur de lui verser une indemnité de départ tenant lieu de préavis est contraire à sa position selon laquelle la prestataire a démissionné. L’employeur n’avait aucune obligation légale de verser une indemnité de départ à la prestataire si elle avait démissionné. Pourtant, l’employeur a versé à la prestataire une indemnité de départ tenant lieu de préavis parce qu’il a [traduction] « décidé de faire preuve de clémence » (GD3-24). L’explication de l’employeur ne réfute toutefois pas l’hypothèse selon laquelle un tel paiement est généralement effectué par un employeur qui met fin à un contrat sans préavis. En outre, même si la prestataire a accepté l’offre d’indemnité de départ de l’employeur, cela n’est pas non plus une preuve à l’appui du fait qu’elle aurait démissionné.   

[15] Troisièmement, il n’y a aucune preuve indiquant que la prestataire ait voulu quitter son emploi, qu’elle ait déclenché sa cessation d’emploi ou qu’elle ait quitté son emploi de toute autre manière le 23 octobre 2018. La prestataire a constamment et catégoriquement affirmé qu’elle n’avait pas quitté son emploi. Elle a été convoquée à une réunion et s’est vue proposer deux options : prendre un congé sans solde jusqu’au 17 décembre 2018 ou quitter son emploi. La prestataire a refusé de prendre un congé sans solde de manière soudaine (pendant lequel elle aurait également dû payer sa part de prestations) parce qu’elle n’en avait pas les moyens. La prestataire n’avait aucun désir ou raison de s’absenter du travail parce qu’elle aurait pu continuer à effectuer les tâches légères qui lui avaient été assignées dans le cadre de son plan de retour au travail. 

[16] De plus, contrairement à l’argument de l’employeur selon lequel la prestataire a déclaré qu’elle ne pouvait pas continuer à travailler, il n’y a aucune preuve à l’appui du fait que la prestataire n’était pas capable de travailler. La preuve médicale démontre qu’elle était apte à effectuer des tâches légères et qu’elle participait à un plan de retour au travail (GD6-10). La prestataire était donc apte à effectuer des tâches légères lors de son dernier jour de travail et aurait continué à travailler si l’employeur ne l’avait pas convoquée à une réunion.

[17] Enfin, je note que la Commission n’a communiqué avec l’employeur qu’une seule fois lors du stade initial de l’enquête. Après révision, la Commission n’a pas demandé à l’employeur pourquoi il avait convoqué la prestataire à une réunion le 23 octobre 2018. L’employeur n’a pas fourni d’explication pour ne pas avoir continué à tenir compte des restrictions médicales de la prestataire. Il n’y a aucune preuve à l’appui du fait que la prestataire n’a pas pu ou n’a pas voulu poursuivre son plan de retour au travail. Je ne peux donc pas arriver à la même conclusion que la Commission selon laquelle la prestataire a quitté son emploi.

[18] Je conclus que, compte tenu de toutes les circonstances, la Commission n’a pas satisfait à la charge initiale de démontrer que la prestataire avait quitté volontairement son emploi. La prestataire ne devrait donc pas être exclue du bénéfice de prestations régulières à compter du 28 octobre 2018.

Conclusion

[19] L’appel est accueilli.

 

Mode d’instruction :

Questions et réponses

Observations :

S. S., appelante

Christopher Drinovz, représentant de l’appelante

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