Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande d’annulation ou de modification de la décision rendue par la division d’appel le 16 mai 2019 est rejetée.

Aperçu

[2] L’appelante, M. L. (prestataire), a quitté le Canada pour se faire opérer en raison d’un problème de santé. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que la prestataire était inadmissible aux prestations d’assurance-emploi lorsqu’elle se trouvait à l’étranger parce qu’elle n’avait pas prouvé que son traitement médical n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada. La Commission a maintenu cette décision après que la prestataire a demandé une révision.

[3] La prestataire a interjeté appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais son appel a été rejeté. Elle a interjeté appel de la décision de la division générale à la division d’appel. Le 16 mai 2019, la division d’appel a conclu que la division générale avait erré, mais a confirmé que la prestataire n’était pas admissible aux prestations.

[4] Le 12 août 2019, la prestataire a déposé une demande d’annulation ou de modification de la décision de la division d’appel conformément à l’article 66 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[5] La demande est rejetée. La prestataire n’a présenté aucun fait nouveau ni établi que la division d’appel a rendu sa décision sans connaître un fait essentiel ou que la décision était fondée sur une erreur relative à un fait essentiel.

Questions en litige

[6] Les renseignements que la prestataire a fournis à l’appui de sa demande d’annulation ou de modification de la décision constituent-ils des faits nouveaux?

[7] La division d’appel a-t-elle rendu sa décision sans connaître un fait essentiel ou a-t-elle fondé sa décision sur une erreur relative à un tel fait?

Analyse

[8] L’article 66 de la Loi sur le MEDS qui est actuellement en vigueur énonce les conditions nécessaires pour que la division d’appel puisse annuler ou modifier sa décision :

Modification de la décision

66 (1) Le Tribunal peut annuler ou modifier toute décision qu’il a rendue relativement à une demande particulière :

  1. a) dans le cas d’une décision visant la Loi sur l’assurance-emploi, si des faits nouveaux lui sont présentés ou s’il est convaincu que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait;

Question en litige no 1 : Les renseignements que la prestataire a fournis à l’appui de sa demande d’annulation ou de modification de la décision constituent-ils des faits nouveaux?

[9] Les conditions sous lesquelles la division d’appel peut accueillir une demande d’annulation ou de modification d’une décision sont essentiellement les mêmes que celles que prévoyait l’article 120 de la Loi sur l’assurance-emploi, qui a été abrogé (en vigueur avant le 1er avril 2013). Cette disposition législative était ainsi rédigée :

Modification de la décision

120 La Commission, un conseil arbitral ou le juge-arbitre peut annuler ou modifier toute décision relative à une demande particulière de prestations si on lui présente des faits nouveaux ou si, selon sa conviction, la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait.

[10] La Cour d’appel fédérale a élaboré un critère pour les faits nouveaux relativement à l’article 86 (d’une version qui remonte à encore plus loin de ce qui s’appelait à l’époque la Loi sur l’assurance-chômage) dans l’arrêt Canada c ChanNote de bas de page 1. Par la suite, elle a confirmé dans l’arrêt Canada c HinesNote de bas de page 2 que ce critère juridique s’appliquait aussi à l’article 120 (qui avait remplacé l’article 86). L’arrêt Hines reprend ainsi les termes de l’arrêt Chan :

[…] Les « faits nouveaux », aux fins du réexamen de la décision du juge-arbitre recherché conformément à l’article 86 de la Loi, sont des faits qui se sont produits après que la décision a été rendue ou qui ont eu lieu avant la décision mais n’auraient pu être découverts par une prestataire diligente et, dans les deux cas, les faits allégués doivent avoir décidé de la question soumise au juge-arbitre. [mis en évidence par le soussigné]

[11] On peut maintenant appliquer la même définition des « faits nouveaux », initialement élaborée pour l’article 86 de la Loi sur l’assurance-chômage et appliquée à l’article 120 de la Loi sur l’assurance-emploi,pour interpréter l’article 66(1)(a) de la Loi sur le MEDS.

[12] La prestataire a présenté un certain nombre de documents pertinents pour confirmer ses visites médicales, ses tests diagnostiques ainsi que son diagnostic. Il s’agit des documents suivants :

  1. une lettre datée du 14 juin 2019 qui confirme que la prestataire a été vue dans le cadre d’un programme de fertilité en 2017, soit le 24 avril, le 12 juin et le 18 juillet (document 1)Note de bas de page 3;
  2. une copie de l’historique des visites de la patiente en date du 14 juin 2019, qui montre que la prestataire a été vue pour un problème gynécologique le 16 décembre 2014, le 30 septembre 2015, le 23 janvier 2017 et le 13 février 2017 (document 2)Note de bas de page 4;
  3. un rapport radiologique pour une hystérosonographie daté du 2 juin 2017 (document 3)Note de bas de page 5;
  4. un rapport radiologique pour une échographie pelvienne daté du 30 janvier 2017 (document 4)Note de bas de page 6;
  5. une lettre datée du 3 avril 2018 dans laquelle la Dre R., M.D., confirme que la prestataire était invalide du 29 janvier 2018, jour de la chirurgie, au 1er mai 2018 (document 5)Note de bas de page 7.

[13] Toutefois, dans sa demande d’annulation ou de modification d’une décision, la prestataire énumère seulement trois documents. L’un d’eux est le document 4 (cité plus haut). Les deux autres documents sont décrits comme [traduction] « gynécologue », en date du 13 février 2017, et [traduction] « programme de fertilité », en date du 18 juillet 2017.

[14] La prestataire a joint le document 2, qui confirme qu’elle a été vue à plusieurs reprises pour un problème gynécologique, y compris le 13 février 2017. Le document n’est pas daté du 13 février 2017, mais je vais supposer qu’il s’agit du deuxième document auquel la prestataire fait référence dans la liste de documents qu’elle a dressée. Elle a aussi fourni le document 1, qui confirme les visites qu’elle a effectuées dans le cadre du programme de fertilité, mais il est daté du 14 juin 2019, et non du 18 juillet 2017. La lettre confirme que la visite la plus récente est celle du 18 juillet 2017. Je vais donc supposer qu’il s’agit du premier document dans la liste de documents dressée par la prestataire.

[15] Aucun de ces documents ne se rapporte à de nouveaux « faits nouveaux ». La prestataire a présenté le document 5 à la division générale dans le cadre de son premier appel. Les quatre autres documents portent tous sur des faits dont la prestataire était au courant avant que la division d’appel ne rende sa décision. La prestataire aurait aussi pu obtenir les mêmes documents, qui prouvent ces faits, avant l’audience si elle avait agi avec diligence.

Question en litige no 2 : La division d’appel a-t-elle rendu sa décision sans connaître un fait essentiel ou a-t-elle fondé sa décision sur une erreur relative à un tel fait?

[16] La décision de la division d’appel était fondée sur la conclusion que la prestataire n’a pas établi que le traitement qu’elle a reçu à l’étranger n’était pas immédiatement ou promptement disponible au Canada. J’avais jugé que la division générale avait erré, car elle avait exigé que la prestataire démontre que le traitement de son problème de santé était à la fois [sic] immédiatement et promptement disponible. Toutefois, lorsque j’ai substitué ma décision à celle de la division générale, j’ai confirmé que la prestataire n’avait pas pu établir que le traitement qu’elle a reçu n’était pas immédiatement disponible ou qu’il n’était pas promptement disponible.

[17] Dans ma décision, j’ai accepté la preuve de la prestataire qui montrait qu’elle avait déjà été sur une liste d’attente pendant environ un an avant qu’on communique avec elle au sujet de la même opération chirurgicale qu’elle a finalement subie à l’étranger. La prestataire a refusé de subir l’opération une première fois parce qu’elle voulait d’abord faire traiter ses problèmes de fertilité, mais aussi parce qu’elle n’était pas très symptomatique à ce moment-là.

[18] Cependant, la prestataire n’avait présenté aucun avis médical ni d’autres éléments de preuve à l’appui de son historique. De plus, il n’y avait aucun élément de preuve montrant le temps d’attente pour la même opération chirurgicale ou la mesure dans laquelle il aurait été difficile d’y avoir accès après que la prestataire a retiré son nom de la liste d’attente. Je n’ai pas admis que la preuve présentée par la prestataire quant à son historique était suffisante pour établir que l’opération n’était pas immédiatement ou promptement disponible à la fin de 2017, au moment où ses symptômes s’étaient aggravés.

[19] Aucun des documents que la prestataire a soumis dans le cadre de la présente demande d’annulation ou de modification d’une décision ne permet d’établir qu’une myomectomie n’était pas promptement disponible dans la région où elle réside au Canada ni que l’opération n’était pas immédiatement disponible.

[20] La prestataire fait maintenant valoir que l’apparition ou l’aggravation de ses symptômes ne veut pas dire qu’elle nécessitait un traitement de façon urgenteNote de bas de page 8. Je suppose qu’elle prétend que cela signifie que le temps d’attente qu’elle a connu en 2016 devrait aussi s’appliquer à la fin de l’année 2017, lorsqu’elle a décidé d’aller à l’étranger pour subir l’opération. Toutefois, dans son témoignage, la prestataire a dit à la division générale que son état de santé avait changé juste avant qu’elle quitte le Canada pour se faire opérer, c’est-à-dire qu’elle a fait une crise aiguë qui a provoqué une vive douleur et une paralysie temporaire. Elle a dit qu’en faisant des recherches, elle a compris que l’apparition de ces symptômes ou l’augmentation de leur fréquence signifiait qu’elle ne pouvait plus repousser l’opérationNote de bas de page 9.

[21] Ce qu’elle suggère actuellement, soit que ses symptômes étaient normaux étant donné son problème de santé, n’est qu’une tentative de présenter la preuve sous un éclairage différent et de plaider de nouveau sa cause après qu’une décision a déjà été prononcée. Ce n’est pas là le but du processus d’annulation ou de modification d’une décision au titre de l’article 66 de la Loi sur le MEDS.

[22] La prestataire n’a soulevé aucun fait essentiel qui m’était inconnu. De plus, elle n’a pas établi que j’ai commis une erreur relative à un fait essentiel en fondant ma décision sur un tel fait.

Conclusion

[23] La demande d’annulation ou de modification de la décision rendue par la division d’appel le 16 mai 2019 est rejetée.

 

Mode d’instruction :

Observations :

Sur la foi du dossier

M. L., prestataire

S. Prud’homme, représentante de l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada

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