Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – La division générale (DG) devait d’abord déterminer si le prestataire avait été harcelé au travail, mais elle ne la pas fait – Elle est plutôt passée directement à l’analyse des autres solutions alternatives raisonnables – Par conséquent, la DG a commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère juridique adéquat – En se fondant sur les définitions du harcèlement, la division d’appel a extrait les principes clés suivants : 1) les harceleurs peuvent agir seuls ou avec d’autres et n’occupent pas nécessairement des postes de supervision ou de gestion; 2) le harcèlement peut prendre différentes formes, y compris des gestes, une conduite, des commentaires, de l’intimidation et des menaces; 3) dans certains cas, un incident unique sera suffisant pour constituer du harcèlement; 4) l’accent est mis sur le prétendu harceleur et sur l'analyse visant à déterminer si cette personne savait ou aurait dû raisonnablement savoir que son comportement serait offensant ou humiliant, ou qu'il causerait de l’embarras ou bien un préjudice psychologique ou physique à l’autre personne.

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] N. D. est le prestataire en l’espèce. Il a travaillé comme X pendant environ un an de 2017 à 2018. Cependant, les choses ont changé pendant l’été 2018. Selon le prestataire, ses supérieures lui ont souvent dit qu’il devait être plus productif et que son travail comportait beaucoup d'erreurs. Lors de sa dernière journée de travail, une supérieure l’a traité de stupide et de paresseux. Le prestataire prétend que les autres membres du personnel présents pourraient avoir entendu ces propos.

[3] Le prestataire a quitté son emploi quelques jours plus tard et a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi (AE). Toutefois, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a rejeté sa demande. Elle a conclu que le prestataire était exclu du bénéfice des prestations d’AE parce qu’il avait volontairement quitté son emploi sans justificationNote de bas de page 1.

[4] Le prestataire a contesté la décision initiale de la Commission, mais sans succès jusqu’à présent, même devant la division générale du Tribunal. Le prestataire interjette maintenant appel de la décision de la division générale devant la division d’appel du TribunalNote de bas de page 2.

[5] J’ai conclu que la division générale n’a pas appliqué le critère juridique approprié. Pour réparer cette erreur, je rendrai la décision que la division générale aurait dû rendre : l’exclusion que la Commission a imposée au prestataire devrait être levée.

Questions en litige

[6] Dans le cadre de ma décision, j’ai posé et tranché les questions suivantes :

  1. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a tenu compte des allégations de harcèlement du prestataire?
  2. Devrais-je rendre la décision que la division générale aurait dû rendre?
  3. Devrais-je maintenir l’exclusion que la Commission a imposée au prestataire?

Analyse

[7] Avant de pouvoir intervenir en l’espèce, le prestataire doit me convaincre que la division générale a commis au moins l’une des trois erreurs possibles décrites dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS)Note de bas de page 3.

[8] En l’espèce, je me suis penché sur la question de savoir si la division générale a commis une erreur de droit ou a omis d’exercer sa compétence. Selon le libellé de la Loi sur le MEDS, tous ces types d’erreurs pourraient justifier mon intervention dans cette causeNote de bas de page 4.

[9] Si j’estime que la division générale a commis une erreur, la Loi sur le MEDS décrit alors les pouvoirs qui me sont conférés pour corriger cette erreurNote de bas de page 5.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a tenu compte des allégations de harcèlement du prestataire?

[10] Aux termes de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE), la partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle a quitté volontairement son emploi sans justification. Il ne fait aucun doute en l’espèce que le prestataire a quitté volontairement son emploi. L’attention de la division générale s’est plutôt portée sur la question de savoir s’il était fondé à quitter son emploi.

[11] Il peut être difficile de prouver ce fait. Le prestataire devait établir que, compte tenu de toutes les circonstances, son départ constituait la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 6. L’article 29(c) de la Loi sur l’AE prévoit un certain nombre de circonstances pertinentes que le Tribunal doit prendre en considération dans des cas comme celui-ci, mais il doit également tenir compte d’autres circonstances pertinentes.

[12] En l’espèce, le prestataire soutient qu’il était la cible de harcèlement au travail, ce qui lui a fourni une justification pour quitter son emploiNote de bas de page 7.

[13] Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale, dans les cas présumés de harcèlement, le Tribunal doit clairement établir si la personne était la cible de harcèlement ou nonNote de bas de page 8. Ce n’est qu’ensuite que le Tribunal peut envisager les autres solutions raisonnables qui s’offraient à cette personne. C’est tout à fait logique, étant donné qu’une conclusion de harcèlement influencera l’analyse des autres solutions raisonnables. Autrement dit, la question de savoir si une personne était effectivement harcelée au travail aura une incidence sur les autres solutions raisonnables s’offrant à cette personne.

[14] Toutefois, en l’espèce, la division générale semblait tirer peu de conclusions (voire aucune) sur les circonstances qui ont mené le prestataire à quitter son emploi. La division générale a plutôt souligné certains éléments de preuve du prestataire, fortement inspirés des observations écrites de la Commission, avant de tirer la conclusion suivante (paragraphe 14 de sa décision) :

[traduction]

J’ai attentivement examiné les observations qui m’ont été présentées. J’accepte et j’accorde plus de poids aux observations de la [Commission]. J’estime que le [prestataire] n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi. La raison est que le [prestataire] avait d’autres solutions raisonnables que celle de partir. Quelques-unes d’entre elles auraient été de rapporter l’incident à l’employeur, d’explorer l’option d’un transfert et de chercher un autre emploi avant de démissionner. Le [prestataire] n’a pas démontré qu’il avait pris des mesures pour résoudre le conflit avant de partir. Il a également confirmé qu’il n’avait pas quitté son emploi en raison de problèmes de santé.

[15] Je suis préoccupé par le contenu de ce paragraphe pour les raisons suivantes :

  1. le Tribunal accorde normalement du poids à la preuve plutôt qu’aux observations;
  2. la division générale n’a pas réellement expliqué pourquoi elle préférait les observations de la Commission à celles du prestataire ni pourquoi elle a rejeté la preuve du prestataire;
  3. contrairement aux directives de la Cour d’appel fédérale, la division générale a examiné les autres solutions raisonnables du prestataire sans d’abord établir s’il avait été harcelé ou non.

[16] Selon les arrêts de la Cour d’appel fédérale, la division générale était d’abord tenue d’établir si le prestataire était la cible de harcèlement au travail. Toutefois, elle ne l’a pas fait. Elle est plutôt passée directement à l’analyse des autres solutions raisonnables. Par conséquent, la division générale a commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère juridique approprié.

[17] La Commission soutient que cette erreur n’est pas pertinente, car la division générale a conclu à juste titre que le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi.

[18] Je ne peux retenir cet argument. Comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale, la division générale n’avait pas le droit de sauter la question du harcèlement et de passer immédiatement à l’analyse des autres solutions raisonnables. Si le prestataire était la cible de harcèlement, cela devrait influencer l’évaluation des autres solutions raisonnables qui s’offraient à lui, compte tenu de toutes les circonstances de son cas.

Question en litige no 2 : Devrais-je rendre la décision que la division générale aurait dû rendre?

[19] Oui, il convient en l’espèce de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[20] J’ai déterminé que j’avais la capacité et les renseignements nécessaires pour rendre une décision définitive en l’espèceNote de bas de page 9. De plus, j’ai examiné tous les éléments au dossier et j’ai écouté l’enregistrement de l’audience devant la division générale. Par conséquent, je vois peu d’avantages à renvoyer l’affaire devant la division générale.

Question en litige no 3 : Devrais-je maintenir l’exclusion que la Commission a imposée au prestataire?

[21] Non, l’exclusion que la Commission a imposée au prestataire devrait être levée.

[22] Le prestataire était l’un des deux X qui travaillaient pour l’employeur. À compter de l’été 2018, le prestataire affirme que le volume d’information qu’il devait traiter a augmenté, tandis que des problèmes techniques ont diminué sa productivitéNote de bas de page 10. Une supérieure a commencé à lui dire qu’il accusait un retard et qu’il devait redoubler d’efforts.

[23] Un jour, une deuxième supérieure a fait venir les deux X dans son bureau pour leur dire d’augmenter leur productivité, sans quoi ils feraient l’objet de mesures disciplinaires. En effet, l’employeur a par la suite licencié l’autre X. Le comptable de l’employeur parlait aussi régulièrement au prestataire de sa productivité.

[24] Le prestataire affirme qu’à un moment donné, ses supérieures l’ont accusé à tort d’avoir faire une erreur. À d’autres occasions, les supérieures du prestataire ont refusé de lui montrer des exemples des erreurs qu’elles l’accusaient de faire. Selon le prestataire, tout cela a contribué à créer un milieu de travail très stressant et toxique.

[25] Lors de sa dernière journée de travail, un vendredi, le prestataire affirme que ses supérieures lui ont posé une série de questions dégradantes, lui ont dit qu’il n’accomplissait que la moitié du travail qu’il était censé faire et l’ont traité de paresseux et de stupide. Lors de cette conversation, le prestataire et ses supérieures étaient seuls dans la pièce. Toutefois, le prestataire estimait que certains de ses collègues auraient pu entendre la conversationNote de bas de page 11.

[26] Ce jour-là, le prestataire a terminé son quart de travail habituel, mais affirme qu’il s’est senti malade et stressé toute la fin de semaine. Il n’est jamais retourné au travail après cet incident. Il a plutôt donné sa démission le mercredi suivant.

[27] Le prestataire a reconnu qu’il est particulièrement sensible au stress, lui qui a déjà eu besoin de suivre une thérapie psychologique à la suite d’un incident traumatique et à cause d’un problème de santé qui est aggravé par le stress.

[28] Le prestataire affirme qu’il n’a pas cherché un autre emploi avant de quitter son emploi parce qu’il ne s’attendait pas à ce que les choses se détériorent de cette façon. Il soutient également qu’il n’a jamais fait part de ses préoccupations à son employeur parce qu’il s’agissait d’une petite entreprise sans service de ressources humaines, sans système de rapports formels et, à sa connaissance, sans procédure relative aux plaintes. Finalement, il affirme que l’employeur est une petite entreprise familiale, que ses anciennes supérieures sont des sœurs et qu’elles sont toutes les deux unies au propriétaire par les liens du mariage.

[29] Les faits en l’espèce ne sont pas largement contestés. Selon l’employeur, le propriétaire a déclaré que le prestataire avait été informé au sujet de sa productivité, mais qu’il n’avait jamais été sanctionné pour cette raison. Le propriétaire a également affirmé que l’entreprise avait une politique en matière de respectNote de bas de page 12.

[30] Selon le prestataire, il a quitté son emploi principalement parce qu’il était la cible de harcèlement au travail, bien que certaines de ses allégations pourraient également correspondre à d’autres circonstances prévues à l’article 29(c) de la Loi sur l’AENote de bas de page 13.

[31] Le harcèlement n’est pas défini dans la Loi sur l’AE et n’a pas été interprété par les tribunaux. Je peux donc décider de la façon dont il devrait être interprété.

[32] Le prestataire est la seule partie qui a proposé une définition possible du harcèlement. Plus particulièrement, il se fonde sur la définition qui apparaît au chapitre 6.5.2 du Guide de la détermination de l’admissibilitéNote de bas de page 14, qui définit le harcèlement comme suit :

De façon générale, le harcèlement s’identifie à tout comportement déplacé à l’égard d’une autre personne dont l’importunité était connue de l’auteur ou n’aurait pas dû lui échapper. Le harcèlement peut prendre la forme de propos, d’actions ou de démonstrations répréhensibles qui humilient, rabaissent ou embarrassent une autre personne. Il peut provenir d’une personne ou d’un groupe de personnes dirigeantes ou employées créant une ambiance de travail hostile et malveillante qui devient vite insupportable.

Le harcèlement comprend aussi l’abus de pouvoir découlant de l’exercice préjudiciable de l’autorité dans le dessein de compromettre l’emploi d’une personne, de nuire à son rendement au travail, de mettre son moyen de subsistance en danger ou de s’ingérer de toute autre façon dans sa carrière. Des actes tels que l’intimidation, la menace, le chantage et la coercition constituent aussi une forme de harcèlement.

Qu’il soit de nature sexuelle ou autre, accompli à une ou à plusieurs reprises, le harcèlement est une activité répréhensible qui ne saurait en aucun cas être tolérée [notes de bas de page omises].

[33] De plus, la définition suivante de harcèlement devrait être ajoutée sous peu au Code canadien du travailNote de bas de page 15 :

harcèlement et violence Tout acte, comportement ou propos, notamment de nature sexuelle, qui pourrait vraisemblablement offenser ou humilier un employé ou lui causer toute autre blessure ou maladie, physique ou psychologique, y compris tout acte, comportement ou propos réglementaire.

[34] Bien que je ne sois pas tenu de respecter ces définitions, celles-ci présentent plusieurs caractéristiques communes que je juge convaincantes. En me fondant sur ces définitions, j’ai extrait les principes clés suivants :

  1. les auteurs du harcèlement peuvent agir seuls ou en groupe et n’occupent pas nécessairement un poste de supervision ou de gestion;
  2. le harcèlement peut prendre plusieurs formes, notamment un acte, un comportement, un propos, de l’intimidation et une menace;
  3. dans certains cas, un seul incident suffit pour être considéré comme du harcèlement;
  4. l’accent est mis sur le prétendu auteur du harcèlement et sur le fait de savoir si celui‑ci savait ou aurait raisonnablement dû savoir que son comportement pourrait offenser, embarrasser ou humilier une autre personne ou lui causer toute autre blessure psychologique ou physique.

[35] En appliquant ces principes, j’estime que le prestataire a été la cible de harcèlement au sens de l’article 29(c)(i) de la Loi sur l’AE. En effet, personne ne semble avoir sérieusement nié que cet incident s’était produit ou qu’il était inappropriéNote de bas de page 16. Le propriétaire de l’employeur a affirmé qu’il ne tolèrerait pas de tels propos et que ceux-ci étaient contraires à la politique de respect en milieu de travailNote de bas de page 17. Les supérieures du prestataire savaient ou auraient raisonnablement dû savoir que de tels propos embarrasseraient et humilieraient vraisemblablement le prestataire, surtout s’ils étaient tenus à portée de voix d’autres membres du personnel.

[36] De plus, ces propos ont été tenus dans un contexte où les supérieures du prestataire se plaignaient régulièrement de la qualité de son travail et le menaçaient de l’exposer à des mesures disciplinaires. Cependant, l’employeur a plus tard déclaré à la Commission que ses préoccupations concernaient uniquement la productivité du prestataire et n’étaient pas de nature disciplinaireNote de bas de page 18.

[37] Tout en gardant en tête que le prestataire était la cible de harcèlement au travail, je dois maintenant déterminer si son départ constituait sa seule solution raisonnable.

[38] La Commission soutient que, avant de quitter son emploi, le prestataire aurait dû essayer de résoudre ses problèmes avec son employeur et aurait dû faire des démarches pour trouver un autre emploi. En effet, les tribunaux ont reconnu que ce sont des solutions raisonnables dans de nombreux casNote de bas de page 19.

[39] De son côté, le prestataire soutient que les autres solutions raisonnables qui s’offraient à lui étaient plus limitées puisqu’il était victime de harcèlement. Une fois de plus, le prestataire s’appuie sur le Guide, qui prévoit ce qui suit (chapitre 6.5.2) :

Le prestataire est généralement fondé de prendre congé ou de quitter son emploi en pareilles circonstances de harcèlement, d’abus et de violence. Il s’agit là de la seule solution raisonnable dans son cas d’autant plus qu’il a tendance à cacher une telle situation à son entourage et va tolérer la situation qui se dégénère au fil de sa relation avec l’auteur de ce harcèlement, de cette violence jusqu’à ce qu’il n’y ait pas d’autres issues.

[…]

Le fait qu’une personne n’ait pas exercé de recours ou n’ait pas attendu le résultat de recours entrepris avant de quitter volontairement son emploi ne doit pas être retenu lorsque la situation révèle un harcèlement intolérable qui n’aurait pu être réglée immédiatement ou dans les quelques jours qui suivaient. Cependant, s’il existait dans l’entreprise qui employait le prestataire une politique crédible, cohérente et structurée à laquelle il aurait pu avoir recours pour régler la situation sans délai, on devra lui demander d’expliquer pourquoi il n’a pas utilisé une telle solution qui apparaissait à première vue raisonnable.

[40] Je suis plutôt d’accord avec l’observation du prestataire. Afin d’établir qu’elle était fondée à quitter son emploi, la partie prestataire n’a pas besoin de prouver qu’elle avait épuisé toutes les solutions possibles autres que celle de quitter son emploi. Dans le même ordre d’idées, la partie prestataire n’a pas besoin d’établir que ses conditions de travail étaient intolérables au point qu’elle n’avait d’autre choix que de quitter son emploi immédiatementNote de bas de page 20. La question est plutôt de déterminer si, compte tenu de toutes les circonstances, son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas.

[41] Qui plus est, la Cour d’appel fédérale a reconnu que le fait de résoudre des problèmes avec l’employeur et de faire des démarches pour trouver un autre emploi constitue d’autres solutions raisonnables dans certains cas.

[42] Compte tenu de toutes les circonstances en l’espèce, je suis convaincu que le prestataire n’avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. Le prestataire était la cible de harcèlement au travail. Il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce qu’il continue à subir de telles conditions tout en cherchant un autre emploi.

[43] Il n’est pas non plus raisonnable de s’attendre à ce qu’il ait fait part de ses préoccupations à son employeur. Le prestataire n’a jamais été informé de la politique de son employeur en matière de traitement de ce type de plainte. En effet, rien ne prouve que ce type de politique était en place.

[44] De plus, le prestataire était harcelé par ses supérieures immédiates. Bien que l’employeur ait affirmé que la supérieure du prestataire était en fait une tierce partie, celle-ci était l’épouse du propriétaire, et dans cette petite entreprise familiale, ils étaient tous deux liés aux auteurs du harcèlement du prestataire.

[45] Quant à la possibilité d’un transfert au sein de l’entreprise, le prestataire a expliqué qu’il n’aurait pas été capable de s’éloigner des gens qui l’avaient harcelé et qu’il n’y avait aucun poste de X dans les autres bureauxNote de bas de page 21.

[46] Par conséquent, j’ai jugé que le prestataire n’avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. Je lève donc l’exclusion que la Commission lui a imposée.

Conclusion

[47] En l’espèce, la division générale a commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère juridique approprié. Plus particulièrement, la division générale a évalué les autres solutions raisonnables qui s’offraient au prestataire sans d’abord déterminer s’il avait été la cible de harcèlement au travail.

[48] Par conséquent, j’ai décidé d’intervenir en l’espèce et de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. En résumé, le prestataire était fondé à quitter son emploi, et l’exclusion que la Commission lui a imposée devrait être levée.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 14 août 2019

Téléconférence

N. D., appelant
S. Prud’Homme, représentante de l’intimée (observations écrites seulement)

Dispositions législatives pertinentes

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

Moyens d’appel

58 (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

• • •

Décisions

59 (1) La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

• • •

Pouvoir du Tribunal

64 (1) Le Tribunal peut trancher toute question de droit ou de fait pour statuer sur une demande présentée sous le régime de la présente loi.

Loi sur l’assurance-emploi

Interprétation

29 Pour l’application des articles 30 à 33 :

[…]

c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci‑après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :

  1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
  2. […]
  3. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
  4. […]
  5. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi [...].

Exclusion : inconduite ou départ sans justification

30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas [...].

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