Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] L’intimé, G. O. (le prestataire), a fait une demande de prestations d’assurance emploi et a touché celles ci à compter de janvier 2018.

[3] L’appelante, la Commission de l’assurance emploi du Canada, a appris que le prestataire n’avait pas déclaré le fait qu’il avait travaillé et avait gagné un revenu pendant qu’il touchait des prestations d’assurance emploi. L’appelante a réparti ce revenu et a imposé au prestataire une pénalité pour avoir sciemment fait 12 fausses déclarations dans ses déclarations bimensuelles.

[4] Le prestataire a demandé une révision de la pénalité, que la Commission a ramené de 5 000 $ à 2 000 $. Le prestataire a interjeté appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale et a demandé que les [traduction] « pénalités et taxes » soient annulées, en raison de sa situation financière.

[5] La division générale a conclu que le prestataire a fait 12 déclarations fausses ou trompeuses lorsqu’il a omis de déclarer son revenu dans ses déclarations bimensuelles. Toutefois, elle a également conclu qu’en appliquant le critère subjectif au mot « sciemment », le prestataire n’avait pas sciemment fait les fausses déclarations.

[6] L’appelante a interjeté appel à la division d’appel et a soutenu que la division générale avait rendu une décision entachée d’erreurs de droit et fondé sa décision sur des conclusions de fait gravement erronées. La permission d’en appeler a été accordée en raison de la possibilité d’erreurs de droit.

[7] La division générale a commis une erreur de droit en faisant une mauvaise application de la jurisprudence contraignante.

Questions en litige

[8] La division générale a-t-elle rendu une décision entachée d’une erreur de droit en faisant une mauvaise application de la jurisprudence contraignante?

[9] Si la division générale a commis une erreur, la division d’appel devrait-elle renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen ou la division d’appel peut-elle rendre la décision que la division générale aurait dû rendre?

Analyse

[10] Les seuls moyens d’appel à la division d’appel sont les suivants : la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit; elle n’a pas observé un principe de justice naturelle; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.Note de bas de page 1 Comme il est possible que la division générale ait rendu une décision entachée d’une erreur de droit, la division d’appel a accordé à la Commission la permission d’en appeler.

[11] La division d’appel n’est pas tenue de faire preuve de déférence envers la division générale en ce qui concerne les questions de justice naturelle, de compétence ou de droit.Note de bas de page 2 De plus, la division d’appel peut tirer une conclusion relative à une erreur de droit, qu’elle ressorte ou non à la lecture du dossier.Note de bas de page 3

[12] Lorsqu’une conclusion de fait erronée est alléguée, la décision doit être fondée sur cette conclusion de fait erronée, et la conclusion doit avoir été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à la connaissance de la division générale, plutôt que d’être simplement erronée.Note de bas de page 4

[13] Lorsqu’une erreur mixte de fait et de droit commise par la division générale révèle une erreur de droit isolable, la division d’appel peut intervenir au titre de l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas de page 5

[14] L’appel dont était saisie la division générale portait sur la question de savoir si le prestataire avait sciemment fait de fausses déclarations. L’appelante soutient qu’il existe des erreurs de droit ou des erreurs de fait distinctes. Étant donné que le critère juridique applicable aux fausses déclarations faites sciemment est défini par la jurisprudence, la question mixte en l’espèce révèle des questions juridiques distinctes à l’égard desquelles la division d’appel peut intervenir.

Question en litige n° 1 : La division générale a-t-elle rendu une décision entachée d’une erreur de droit en faisant une mauvaise application de la [sic] contraignante?

[15] La division générale a commis une erreur de droit en faisant une mauvaise application de la jurisprudence contraignante.

[16] La Cour d’appel fédérale a statué, en ce qui concerne le critère juridique, que « [s]’agissant de l’interprétation à donner au mot “sciemment”, cette Cour a précisé qu’il fallait utiliser un critère subjectif pour déterminer si la connaissance requise existe. […] le critère de la connaissance subjective permet de tenir compte d’éléments objectifs. »Note de bas de page 6

[17] Ce critère à deux volets est bien établi dans la jurisprudence : tout d’abord, la Commission doit démontrer que le prestataire a sciemment fait une déclaration fausse ou trompeuse; ensuite, le prestataire doit démontrer que la déclaration n’a pas été faite sciemment et fournir une explication raisonnable quant aux renseignements inexacts fournis.

[18] C’est par rapport au deuxième volet du critère que l’appelante soutient que la division générale a commis une erreur. L’appelante soutient que la division générale a tenu compte des circonstances atténuantes tirées du témoignage du prestataire, mais qu’elle n’a pas tenu compte de l’ensemble de la preuve. L’intimé [sic] souligne que le niveau de scolarité du prestataire (grades universitaires en sciences et en génie) constitue un exemple d’élément de preuve que la division générale n’a pas prise en considération.

[19] Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Bellil, il revenait au prestataire « d’expliquer l’existence de ses réponses inexactes; il devait démontrer qu’il ne savait pas que ses réponses étaient inexactes. »9 [sic]. L’explication fournie par M. Bellil pour justifier ses réponses erronées est son manque d’attention portée aux questions. La Cour d’appel fédérale a conclu que la division générale n’avait pas tenu compte de l’ensemble de la preuve, notamment le niveau de scolarité de M. Bellil.

[20] En l’espèce, la division générale n’a pas non plus tenu compte du niveau de scolarité du prestataire. La division générale a fait référence aux décisions de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Bellil, mais n’a pas tenu compte de tous les éléments de preuve objectifs pertinents. L’explication du prestataire pour justifier ses réponses erronées était son manque d’attention portée aux questionsNote de bas de page 7 du fait qu’il était dépassé par sa situation. En l’espèce, la division générale n’a pas tenu compte du niveau de scolarité du prestataire, comme dans l’arrêt Bellil.

[21] La division générale a commis une erreur de droit faisant une mauvaise application de la jurisprudence contraignante.

Question en litige n° 2 : Si la division générale a commis une erreur, la division d’appel devrait-elle renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen ou la division d’appel peut-elle rendre la décision que la division générale aurait dû rendre?

[22] J’ai conclu que la division générale avait rendu une décision entachée d’erreur de droit.

[23] L’appelante fait valoir que les éléments de preuve dont disposait la division générale est à la disposition de la division d’appel et que, par conséquent, il serait plus opportun que la division d’appel rende la décision que la division générale aurait dû rendre plutôt que de renvoyer l’affaire à la division générale.

[24] Le prestataire a fait valoir que la division générale a tenu compte de l’ensemble de la preuve, notamment son témoignage, et que sa décision devrait être maintenue.

[25] Je conclus que le dossier d’appel est complet et je suis en mesure de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Lorsque la division générale commet une erreur susceptible de contrôle et que le dossier d’appel est complet, la division d’appel a compétence pour rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[26] Il ne fait aucun doute que le prestataire a fait 12 fausses déclarations dans ses déclarations bimensuelles. L’explication du prestataire pour justifier ses réponses erronées était son manque d’attention portée aux questions; il s’en est tenu aux réponses choisies d’avance par son navigateur Web sans lire les questions ou l’attestation et a opté pour la façon la plus simple qui soit de remplir les déclarations tout en présumant qu’il avait droit aux prestations parentales parce que son épouse et lui avaient récemment eu un enfant. Le prestataire est une personne très instruite qui est capable de comprendre le sens de la question [traduction] « Avez-vous travaillé? » à laquelle il a répondu 12 fois « Non ». En appliquant l’arrêt Bellil en l’espèce, le manque d’attention lorsqu’on répond aux questions ne suffit pas à éviter une sanction administrative dans de telles circonstances.

[27] Dans ses observations orales et écrites, l’appelante a souligné que la pénalité imposée au prestataire serait encore réduite de 1 000 $ en raison des circonstances atténuantes supplémentaires présentées à l’audience de la division générale. La pénalité, qui était de 5 000 $ au départ, a été ramenée à 2 000 $; si l’on en retranche encore 1 000 $, elle serait de 1 000 $.

[28] Pour ces motifs, il est fait droit à l’appel et la décision visant l’intimé concernant la pénalité et l’avis de violation est confirmée sous réserve d’une modification de la pénalité de 2 000 $, qui est ramenée à 1 000 $.

Conclusion

[29] Il est fait droit à l’appel et la pénalité est ramenée de 2 000 $ à 1 000 $.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 26 septembre 2010

Téléconférence

Louise Laviolette, représentante de l’appelante
G. O., intimé non représenté

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