Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. La prestataire n’a pas choisi de recevoir des prestations parentales standards.

Aperçu

[2] Dans sa demande de prestations parentales, la prestataire devait choisir un nombre de semaines de prestations. Les prestations standards sont versées sur une période allant jusqu’à 35 semaines à un taux de 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable. Les prestations prolongées sont quant à elles versées sur une période pouvant aller jusqu’à 61 semaines au taux de 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable. Quand la partie prestataire a arrêté son choix et que la Commission de l’assurance-emploi du Canada commence à verser les prestations parentales, un parent ne peut décider de passer d’une option à l’autre.

[3] En l’espèce, on aperçoit sur la demande de la prestataire que celle-ci avait sélectionné les prestations standards afin de recevoir des prestations pendant 35 semaines. Toutefois, avant même de commencer à toucher les prestations, la prestataire a décidé d’opter pour les prestations prolongées lors d’une conversation avec un agent de la Commission. Malgré ce fait, la Commission a décidé de verser des prestations parentales standards à la prestataire. La prestataire a demandé à la Commission de lui verser des prestations prolongées plutôt que des prestations standards, mais la Commission a maintenu que des prestations standards lui avaient été versées à sa demande et que lorsqu’une prestation est versée, la Commission ne peut modifier l’option du nombre de semaines de prestations. La prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant la division générale du Tribunal.

Questions en litige

[4] La prestataire peut-elle modifier son choix de toucher des prestations standards et opter plutôt pour des prestations parentales prolongées?

Analyse

[5] Des prestations parentales sont payables à une partie prestataire qui veut prendre soin de son nouveau-néNote de bas de page 1. La partie prestataire choisit le nombre maximal de semaines, soit 35 ou 61, pendant lesquelles les prestations peuvent lui être verséesNote de bas de page 2. Le choix de la partie prestataire quant au nombre maximal de semaines de prestations parentales pouvant lui être versées est irrévocable dès lors que des prestations sont verséesNote de bas de page 3.

[6] En l’espèce, la demande soumise en ligne par la prestataire le 7 février 2019 montre qu’elle avait opté pour les prestations standards versées sur 35 semainesNote de bas de page 4. La Commission a effectué le premier versement de prestations parentales standards le 18 mars 2019. La Commission affirme qu’après que les versements de prestations parentales ont commencé, la prestataire ne pouvait plus modifier son choix du nombre de semaines de prestations.

La prestataire a-t-elle choisi de recevoir des prestations parentales standards?

[7] Je conclus que la prestataire a initialement opté pour des prestations parentales standards, mais qu’elle a modifié son choix de façon valide, et ce, avant que la Commission ne commence à lui verser des prestations. Pour en arriver à cette conclusion, j’ai considéré que les éléments de preuve suivants étaient pertinents.

[8] D’abord, la prestataire a témoigné que le 7 mars 2019, elle s’était rendue à un bureau régional de la Commission pour présenter son permis de travail et qu’elle avait posé des questions à l’agent de la Commission au sujet du nombre de semaines de prestations parentales auxquelles elle aurait droit. L’agent lui a alors dit qu’elle avait choisi de toucher des prestations standards sur une durée de 35 semaines, mais qu’en raison de la date de naissance de son enfant, elle n’aurait droit qu’à deux semaines de prestations standards. Toutefois, l’agent l’a informée que si elle optait plutôt pour les prestations prolongées, elle toucherait des prestations pendant davantage de semaines, bien qu’à un taux de prestations inférieur. La prestataire m’a expliqué avoir déclaré à l’agent qu’elle était en congé jusqu’en octobre 2019 et lui avoir exprimé vouloir plutôt toucher des prestations prolongées afin de passer plus de temps avec son enfant à la maison. À l’issue de cette conversation, la prestataire affirme qu’elle pensait que l’agent allait modifier la durée de prestations conformément à son souhait de toucher des prestations parentales prolongées.

[9] J’accepte le témoignage de la prestataire indiquant qu’elle a modifié son choix puisque les notes au dossier indiquent que le 7 mars 2019, un agent de la Commission a mentionné à la prestataire qu’elle ne recevrait que deux semaines de prestations standards alors qu’elle aurait droit à six mois de prestations prolongéesNote de bas de page 5. J’ai tenu compte de l’argument de la Commission, selon lequel une note au dossier n’indique pas que la prestataire a modifié son choix. Toutefois, la prestataire a témoigné qu’avant sa conversation avec l’agent, elle ne savait pas à combien de semaines de prestations elle aurait droit. Par conséquent, je conclus qu’il est tout à fait logique que la prestataire ait modifié son choix de toucher des prestations standards pour plutôt toucher des prestations prolongées après que l’agent l’eut informée qu’en optant pour des prestations standards, elle n’aurait droit qu’à deux semaines de prestations.

[10] De plus, des notes additionnelles au dossier indiquent que les 8, 11 et 14 mars 2019, la Commission a laissé quelques messages à la prestataire pour lui expliquer ses options. À mon avis, ceci indique que la Commission considérait que la prestataire n’avait pas fait son choix et que celle-ci devait toujours explorer ses options et faire un choix selon ses préférences. De plus, les notes au dossier indiquent que puisque la prestataire n’avait pas répondu aux messages laissés par la Commission, celle-ci a traité la demande comme si l’option des prestations standards avait été choisie et a versé des prestations le 18 mars 2019. Pour ces raisons, je conclus que les tentatives de la Commission de communiquer avec la prestataire constituent un élément de preuve indiquant que le 7 mars 2019, la prestataire a communiqué au personnel de la Commission son choix de toucher des prestations prolongées lors de sa visite au bureau régional de la Commission et qu’une autre personne travaillant pour la Commission tentait de faire un suivi pour confirmer qu’elle souhaitait modifier son choix.

[11] Finalement, la prestataire a communiqué avec la Commission aussitôt après avoir constaté que ses prestations avaient pris fin après deux versements. À mon avis, il semble évident qu’elle s’attendait à recevoir des prestations prolongées puisqu’elle pensait avoir modifié son choix auprès de l’agent de la Commission, le 7 mars 2019.

[12] Je conclus que la majorité des éléments de preuves montrent que la prestataire a modifié son choix de toucher des prestations standards pour plutôt recevoir des prestations prolongées, et ce, avant que la Commission ne lui verse ses prestations. Il est évident, en examinant le témoignage de la prestataire et ses déclarations à la Commission, que la prestataire a constamment soutenu avoir modifié son choix le 7 mars 2019. La Commission soutient que le 18 mars 2019, le versement des prestations avait commencé. De plus, la prestataire m’a affirmé qu’elle avait l’intention de retourner au travail en octobre 2019. J’estime donc qu’il est raisonnable qu’elle ait souhaité modifier son choix le 7 mars 2019, lorsqu’elle a appris de la Commission qu’elle n’aurait droit qu’à deux semaines de prestations standards. Enfin, la prestataire a communiqué avec la Commission aussitôt après avoir pris conscience de l’arrêt des prestations. Cela montre qu’elle s’attendait à recevoir des prestations parentales prolongées, comme elle en avait discuté avec la Commission le 7 mars 2019.

[13] La Commission soutient avoir versé des prestations parentales standards à la prestataire conformément au choix de cette dernière, et que ce choix devient irrévocable lorsqu’elle commence à verser des prestations à la prestataire. Je juge que l’argument de la Commission ne tient pas, parce qu’elle n’a pas tenu compte du fait qu’à la date du versement des prestations, le 18 mars 2019, la prestataire avait déjà modifié son choix et opté pour des prestations prolongées.  

[14] Pour tous ces motifs, je conclus que la prestataire a démontré que, le 7 mars 2019, avant que des prestations ne lui soient versées, elle avait modifié son choix en exprimant à la Commission vouloir toucher des prestations parentales prolongées. La Commission a effectué le versement de la prestation après que la prestataire eut décidé d’opter pour les prestations parentales prolongées. De plus, la Commission a établi le montant des prestations hebdomadaires selon l’option des prestations parentales standards et la prestataire n’a reçu que deux semaines de prestations. Toutefois, le choix revient à la prestataire et le 7 mars 2019, elle a opté pour les prestations parentales prolongées. C’est ce qu’elle devrait toucher.

Conclusion

[15] J’accueille l’appel.

[16] Les dispositions au titre desquelles les parents se voient offrir deux choix en ce qui a trait au maximum de semaines de prestations parentales qu’ils toucheront sont entrées en vigueur en décembre 2017. Depuis, quelques affaires ont été instruites par le Tribunal, dans le cadre desquelles il devait déterminer si un choix clair avait été fait et si la partie prestataire pouvait modifier son choix. Comme on peut le lire dans une décision rendue par la division d’appel du Tribunal, [traduction] « la Loi sur l’AE énonce que les personnes qui demandent des prestations parentales doivent faire un choix. Cependant, la Loi sur l’AE ne précise pas la façon dont ce choix doit être fait ni ne dit à la Commission ce qu’elle doit faire si le choix est ambiguNote de bas de page 6 ». Dans cette perspective, je recommande que, dans le cas où une partie prestataire modifie son choix après avoir présenté sa demande, la Commission s’assure que la partie prestataire comprenne les conséquences de son choix en lui faisant signer un document qui confirme ce choix. Cela mettrait fin aux confusions découlant des appels téléphoniques entre les prestataires et la Commission ainsi qu’aux malentendus relatifs aux modifications apportées après la présentation de la demande de prestations parentales et après le versement des prestations.

[17]  Soyons francs, accueillir un nouveau-né exige beaucoup d’ajustements, même pour des parents expérimentés. La raison d’être des prestations parentales est de permettre aux parents de passer du temps avec leur bébé. Ainsi, je recommande à la Commission de continuer à trouver des façons d’améliorer ses procédures afin que les parents puissent profiter des moments précieux avec leurs enfants pendant leur congé parental.

Date de l’audience :

Le 29 octobre 2019

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

N. G., appelante

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