Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal rejette l’appel.

Aperçu

[2] L’appelante, M. R. (prestataire), a subi un arrêt de travail le 10 août 2018, pour des raisons de maladie. Elle pouvait effectuer un retour progressif au travail à partir du 30 juillet 2018, mais a décidé de quitter son emploi. Le 11 octobre 2018, la prestataire a demandé la conversion de ses prestations d’assurance-emploi de maladie à des prestations régulières. Néanmoins, elle n’a déposé le renouvellement de sa demande de prestations que le 22 novembre 2018. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a tenu compte de sa demande de conversion et a établi sa demande de prestations à partir du 21 octobre 2018.

[3] La prestataire a par la suite demandé une antidate au 30 juillet 2018. Elle a soutenu être disponible à travailler à partir de cette date, mais qu’elle n’était pas en mesure de retourner à son emploi habituel. La Commission a refusé d’accorder une antidate au 30 juillet 2018, en soutenant que la prestataire n’avait pas agi comme l’aurait fait une personne raisonnable puisqu’elle n’avait pas tenté de valider son admissibilité aux prestations avec la Commission.

[4] La division générale a conclu que la demande ne pouvait être antidatée au 30 juillet 2018, puisqu’elle n’avait pas démontré avoir un motif valable justifiant le retard à déposer sa demande de prestations.

[5] La permission d’en appeler a été accordée au prestataire. Elle soutient que la division générale a erré en droit dans son interprétation de l’article 10(5) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) et dans son interprétation de la jurisprudence applicable en matières d’antidate.

[6] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré dans son interprétation de l’article 10(5) de la Loi sur l’AE.

[7] Le Tribunal rejette l’appel de la prestataire.

Question en litige

[8] Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 10(5) de la Loi sur l’AE?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[9] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas de page 1

[10] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[11] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Question en litige: Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 10(5) de la Loi sur l’AE?

[12] Ce moyen d’appel est sans fondement.

[13] L’article 10(5) de la Loi sur l’AE prévoit que lorsque le prestataire présente une demande de prestations après le délai prévu par règlement pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si celui-ci démontre qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

[14] Pour établir l’existence d’un motif valable aux termes de l’article 10(5) de la Loi sur l’AE, un prestataire doit réussir à démontrer qu’il a fait ce que toute personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait fait pour se renseigner sur ses droits et obligations en vertu de la Loi sur L’AE.

[15] Tel que souligné par la division générale, un prestataire est tenu de vérifier « assez rapidement » s’il a droit à des prestations d’assurance‑emploi et de s’assurer des droits et obligations que lui impose la Loi sur l’AE. Il doit également prendre des mesures raisonnables auprès de la Commission pour vérifier ses croyances personnelles ou les renseignements obtenus par l'intermédiaire de tiers. Cette obligation implique un devoir de prudence sévère et strict.Note de bas de page 2

[16] Qui plus est, la Cour d’appel fédérale a réaffirmé qu’un motif valable doit s’appliquer à la période entière du retard.Note de bas de page 3

[17] La prestataire reproche à la division générale de ne pas avoir pris en considération l’effet combinés des raisons avancées pour expliquer son retard. Elle soutient que la division générale a évacué les motifs avancés par la prestataire parce que celle-ci ignorait la Loi sur l’AE.

[18] La prestataire soutient en appel avoir fait les efforts nécessaires afin de se renseigner sur la question de son départ volontaire et sur celle de son arrêt de rémunération en consultant le site internet de la Commission. Elle fait valoir qu’elle n’avait aucune obligation de s’informer par téléphone ou en allant directement dans un centre de service. Elle a également déposé un certificat médical qui démontre qu’elle n’était pas dans son état habituel, que la situation était anormale pour elle, qu’elle était encore clairement affectée par la maladie. Sa rationalité, sa logique et son ambition étaient altérés. La prestataire soutient qu’elle a fait ce que toute personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait fait pour se renseigner sur ses droits et obligations en vertu de la Loi sur L’AE.

[19] La prestataire a expliqué à la division générale que selon ses connaissances et la compréhension générale de la population, elle n’avait pas droit aux prestations en raison du fait qu’elle avait volontairement quitté son emploi. De plus, elle se croyait toujours liée à son employeur en raison des commissions de ventes qu’il devait lui verser et parce qu’il n’avait pas émis son relevé d’emploi. Elle a vérifié ses croyances sur le site internet de la Commission et s’est trouvée rassurée. La prestataire a également expliqué qu’elle se relevait péniblement des difficultés vécues suite au décès de sa mère et de son arrêt de travail.

[20] Ainsi, ce n’est que lorsque l’agente de la Commission a communiqué avec elle dans le but de de la questionner sur sa disponibilité, qu’elle a su qu’elle pourrait recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle a alors avoir fait les démarches en ce sens. Elle a rencontré son médecin pour obtenir un certificat médical pour justifier son départ volontaire. Elle s’est présentée dans un centre de service pour demander la conversion de ses prestations et en a fait un suivi trois semaines plus tard. Elle a agi rapidement après avoir été informée par la Commission.

[21] La preuve devant la division générale démontre que la prestataire a décidé au mois de juillet 2018 de ne pas retourner pour son employeur afin de préserver sa santé. Le Tribunal est d’avis que puisque la prestataire avait déjà reçu 15 semaines de prestations de maladie, elle aurait dû s’informer auprès de la Commission afin de vérifier ses croyances personnelles et la possibilité de convertir ses prestations de maladie à des prestations régulières suite à son départ volontaire. Cela est d’autant plus vrai qu’elle a quitté son emploi pour des raisons, à tout le moins, défendables.

[22] Il n’était également pas raisonnable pour la prestataire de se fier à des informations générales se trouvant sur le site de la Commission compte tenu de sa situation particulière.Note de bas de page 4 Elle se devait de clarifier avec la Commission la question de son départ volontaire et la question de son arrêt de rémunération compte tenu du paiement à venir de ses commissions de ventes. Le fait que l’employeur ne lui avait pas remis son relevé d’emploi ne constitue pas, dans les circonstances, un motif valable. D’autant plus qu’il s’agissait d’un renouvellement de prestations.

[23] Le Tribunal est d’avis que la division générale n’a pas erré en concluant que la prestataire aurait dû prendre des mesures concrètes auprès de la Commission pour s’assurer de la teneur de ses droits et obligations en vertu de la Loi sur l’AE.

[24] La prestataire plaide vigoureusement que son état de santé physique et psychologique constitue la clé de voûte de l’édifice des motifs expliquant son retard. Cependant, la preuve démontre que la prestataire était apte à effectuer une recherche d’emploi active depuis le mois de juillet 2018, malgré son état de santé et la détresse d’avoir perdu sa mère au printemps 2018.

[25] Lors d’une conversation téléphonique avec la Commission en date du 11 octobre 2018, la prestataire a confirmé qu’elle pensait retourner sur le marché du travail dans un avenir rapproché et qu’elle ne désirait pas pour le moment de prestations régulières.Note de bas de page 5

[26] Malgré la sympathie qu’éprouve le Tribunal pour la prestataire, celle-ci n’a pas réussi à démontrer devant la division générale qu’elle a fait ce que toute personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait fait pour se renseigner sur ses droits et obligations en vertu de la Loi sur l’AE. La prestataire n’a pas démontré que pour la période entière du 30 juillet 2018 au 20 octobre 2018, elle avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande de prestations.

[27] Le Tribunal en vient donc à la conclusion que la division générale a tenu compte de l’ensemble des arguments de la prestataire et que sa décision repose sur les éléments de preuve portés à sa connaissance, et qu’il s’agit d’une décision conforme aux dispositions législatives et à la jurisprudence.

[28] Pour les motifs précédemment énoncés, il y a lieu de rejeter l’appel.

Conclusion

[29] Le Tribunal rejette l'appel.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 5 novembre 2019

Vidéoconférence

Héloïse Varin, représentante de l’appelante.

Josée Lachance, représentante de l’intimée

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